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René de Ceccatty (Traducteur)Ryôji Nakamura (Traducteur)
EAN : 9782869302457
169 pages
Payot et Rivages (01/05/1989)
3.87/5   333 notes
Résumé :
"Oreiller d'herbes" est singulier par son écriture, impressionniste, poétique, et par son projet même. Un peintre se retire dans une auberge de montagne pour peindre et réfléchir sur son art, sur l'acte de création. L'atmosphère subtile et poétique d'"Oreiller d'herbes" est admirablement rendue par les traducteurs.
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Critiques, Analyses et Avis (44) Voir plus Ajouter une critique
3,87

sur 333 notes
Je me souviens d'avoir débuté, il y a longtemps, mon commentaire de Sur la Route par : « Ceci n'est pas un livre, c'est un état d'esprit. » Eh bien je crois que je pourrais débuter celui-ci par une formule exactement similaire, tant l'impression laissée sur moi est du même type (mais non pas comparable).

Ici, l'auteur Natsume Sôseki écrit le roman d'une quête. Mais est-ce un roman ? Est-ce une quête ? Je ne sais… Car c'est si différent des écrits à l'occidentale, c'est si chargé de codes, qui me sont, pour bon nombre, inconnus, que je n'arrive guère à me prononcer. Bref, c'est spécial.

Au départ, j'ai vraiment adoré l'entrée en matière du roman, pleine de réflexion et de philosophie, le tout délicatement recouvert d'une fine couche de lyrisme. Et puis, est venue la narration, au sens le plus classique du terme, avec des personnages, des événements, si bien que l'impression première — très positive — est un peu retombée comme un soufflet, car, avons-le, l'auteur n'est pas franchement un as de l'intrigue.

Oui, c'est cela qui m'a un peu déroutée, cette espèce de mélange entre une introspection de haut vol teintée de poésie comme sut en faire Fernando Pessoa avec son Livre de l'Intranquillité et cette soupe narrative, plus prétexte qu'autre chose. Et puis, par moments, ça revenait, les phases méditatives, apaisantes et lyriques à la fois, mais sans le charme des débuts.

L'auteur, donc, nous fait prendre part à la quête personnelle du narrateur, un peintre japonais de Tokyo (Edo) qui souhaite se rendre dans la montagne la plus reculée pour toucher aux racines vraies de l'art, de la poésie tout particulièrement bien qu'il fût peintre, je le rappelle. C'est en cela que ce livre n'est peut-être pas si éloigné du roman de Jack Kerouac sus-mentionné, l'idée d'une quête d'un objet immatériel. Il appartient peut-être également à la catégorie de ceux qu'a signés Hermann Hesse, son Siddhartha, son Loup de Steppes, par exemple, mais avec des tonalités bien à lui, très extrême-orientales, plus proches à certains égards de celles d'auteurs nippons du XXème tels que Kawabata ou Mishima.

Vous voyez, c'est assez étrange comme objet littéraire. Pas désagréable, de mon point de vue, mais pas non plus à m'y sentir totalement à l'aise : un rythme lent, réflexif, méditatif et contemplatif, mais pas que, des épisodes narratifs où l'on suit des personnages, mais pas que, et puis surtout, une gageure insurmontable, à savoir, essayer désespérément de pister, de s'approcher de manière asymptotique de ce que pourrait être un être poétique, le tout sur fond de séparation entre un homme et une femme couplé à un arrière-plan de guerre sino-russe.

Vous admettrez que ce n'est pas évident à définir un machin pareil, ça résiste à toute forme de catégorisation et je me demande encore, plusieurs semaines après en avoir terminé la lecture ce que je dois en penser. Peut-être est-ce cela finalement, l'accession à la poésie vraie, ne plus penser, lâcher prise, dériver sur l'onde, laisser glisser les lignes et les impressions sous nos yeux de lectrices et de lecteurs inconséquents… Quoi qu'il en soit, de cet avis comme de beaucoup d'autres choses, cela ne signifie pas grand-chose, et si le coeur vous en dit, allongez-vous sous les nuages, la nuque posée sur un oreiller d'herbes et laissez-vous porter…
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Séduit la semaine dernière par le roman satirique de Natsume Sôseki, « Je suis un chat », l'envie était grande d'explorer sur-le-champ l'univers de cet auteur japonais disparu voici près d'un siècle.
Est-ce le besoin de goûter à un quelconque repos ? Mon choix s'est porté sur un titre on ne peut plus évocateur et qui fleure bon la campagne : « Oreiller d'herbes ».

Le repos de l'esprit, c'est précisément ce qu'espère trouver le narrateur sur ce chemin montagneux où le conduisent ses pas.
Ce peintre trentenaire est en recherche d'impassibilité, d'inspiration. Ce voyage en altitude loin de Tokyo, lui permettra peut-être de fuir quelques temps le monde d'ici-bas, de s'affranchir des passions terrestres, de s'élever au-dessus de la mêlée, de trouver la sérénité propice à la création.

Poète à ses heures il aime composer des haïkus, ces poèmes qui en seulement dix-sept syllabes traduisent si justement l'évanescence des choses.
Une chanson à peine audible et une silhouette féminine, brièvement entraperçue au clair de lune, inspirent son âme poétique lors de sa première nuit dans une auberge située près d'une source thermale.
Mais transcrire le lendemain sur la toile sa sensation de plénitude n'est pas chose aisée et l'artiste, perdu dans ses pensées vagabondes sur l'art, reste improductif devant son chevalet.

Avec une sensibilité toute japonaise, Sôseki décrit le processus fait d'introspection, de tâtonnements, de doutes, par lequel l'artiste arrive après un long cheminement à matérialiser son état d'esprit, ses sensations.
Les réflexions sur l'art, par petites touches au fil des chapitres, ne sont jamais rébarbatives. Fin connaisseur de l'Occident, sa préférence pour la culture orientale est cependant manifeste et argumentée avec pertinence et mesure.

Loin des sentiers battus, ce roman poétique dégage une grande bouffée d'oxygène. Sa lecture permet de s'élever pendant quelques heures au-dessus des standards occidentaux, « d'errer dans l'univers impassible ».
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Un peintre vient passer quelques jours dans la montagne, dans une station thermale désertée depuis que la guerre russo-japonaise a débuté en 1904. Il y apprécie le calme pour se consacrer à son art et réfléchir à la condition de l'artiste, ne plus exister que comme peintre. Il recherche l'impassibilité mais bientôt il est troublé par une jeune femme étrange, Nami, qui semble perturbée après son divorce.

Un très beau texte, très poétique, nourri de réflexion sur la littérature et la peinture, illustré de haïkus, petits poèmes japonais de dix-sept syllabes. Il ne s'y passe pas grand chose mais tout est dans la subtilité des relations entre les personnages qui glissent comme des ombres, des paysages sublimes, et la guerre en arrière plan qui menace les jeunes appelés comme la folie qui guette les amours contrariées. Car l'artiste, recherchant la beauté, saisissant l'instantanéité de la perception, se nourrit aussi de cette désespérance...

L'auteur, Natsumé Soseki, a disparu il y a un siècle mais son roman est d'une grande modernité. Ses réflexions sur la destinée de l'homme contemporain, le rôle de l'artiste et l'art abstrait, les dangers de la civilisation moderne sont très actuelles.

" J'ai par hasard obtenu une journée de sérénité
J'ai compris cent ans d'agitation
Où pourrai-je garder cette nostalgie lointaine ?
Sinon dans le ciel vaste où règnent les nuages blancs ?"
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Depuis le temps que je dois lire ce livre, c'est fait. J'y ai retrouvé toute la sensibilité de Sôseki. A la recherche d'un endroit propice pour peindre ou composer un poème, le narrateur nous entraîne dans ses rêveries, ses contemplations et ses errances. Parfois, au grès de ses rencontres avec des personnages improbables , le récit frôle le surnaturel, mais nous permet de suivre le cheminement de ses pensées. Une figure maintes fois décrite attirera notre intention. C'est celle du tableau de « L'Ophélie » du peintre anglais, Millais. le corps évanescent de cette jeune femme flottant au fil de l'eau sert de comparaison pour notre peintre qui peine à trouver un sujet de peinture. Bien souvent, c'est l'industrialisation du Japon qui se fait à grands pas, qu'essaie de fuir le protagoniste en se réfugiant dans la nature et dans l'art. La finesse des descriptions, toute orientale et non dénuée d'humour, que ce soit de la nature, des vêtements, des constructions, des situations... ne décevra pas la sensibilité du lecteur(trice).
J'allais oublier ! Un grand merci aux éditions Picquier pour la reproduction des tableaux originaux qui émaillent le récit et nous permettent de suivre le narrateur dans ses errances et ses rencontres.
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« Un peintre se retire dans les montagnes, pour peindre, pour se reposer, mais surtout pour faire le point sur son art. Qu'est-ce que la sensibilité artistique ? Qu'est-ce que la création ? Qu'est-ce qu'une sensation ? Comment distinguer l'art japonais de l'art occidental ? le peintre observe la nature mais aussi les êtres humains. Dans l'auberge où il loge, il est le témoin silencieux d'un curieux manège. Une femme exceptionnellement belle paraît chargée d'un passé mystérieux qu'il essaie de mettre au jour. Les légendes du lieu, les commérages s'entremêlent et, à travers l'observation de cet être qui est à la fois le modèle idéal du peintre et le personnage du roman en train de s'écrire, l'auteur tente de définir son art, dans l'attente de la crise qui lui donnera son sens » (extrait présentation éditeur).

-

Difficile exercice dans lequel je me lance car il est ardu d'expliquer le cheminement par lequel nous fait passer ce roman. J'ai tout d'abord cru que je ne parviendrais pas au terme de l'ouvrage tant la lecture des premières pages est laborieuse.

Pourtant, en apparence, la « prise de contact » est agréable. le récit se développe à la première personne et nous permet d'accéder au monologue intérieur du narrateur. Lorsqu'on fait la connaissance de cet homme – un peintre – il est train de gravir les sentiers rocailleux d'une montagne. A mesure qu'il progresse dans son ascension, ses pensées cheminent sur la démarche qu'il est en train d'entreprendre. On comprend que son intention est de se soustraire de l'agitation de la Cité (de la société) pour être au plus près de la nature et y mener une réflexion sur le sens de la vie, des valeurs. Il souhaite trouver un lieu propice pour vivre en adéquation avec l'art de vivre qu'il s'est fixé. Sôseki Natsumé ne raconte pas l'histoire d'un homme en quête d'inspiration mais propose une réflexion plus large sur la création artistique et l'importance de l'Art dans nos sociétés (orientales et occidentales).

Dès la première page, le narrateur est entièrement consacré à sa quête spirituelle et chaque élément (un caillou, une fleur, le relief d'une montagne…) est prétexte à la réflexion et à l'introspection. Cependant, pour le lecteur, ce n'est pas simple de lui emboiter le pas aussi promptement.

Oreiller d'herbes est une oeuvre poétique. La contemplation est un élément central du récit, le rythme narratif est au service des cheminements intérieurs du personnage principal. La présence de quelques personnages secondaires permet de le relier à des considérations plus matérielles ; leurs agissements et leurs propos interpellent le narrateur, le surprennent, l'incitent à approfondir sa démarche et à l'ancrer dans la réalité.
Lien : http://chezmo.wordpress.com/..
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Citations et extraits (182) Voir plus Ajouter une citation
Ainsi, puisque le monde dans lequel nous vivons est difficile à vivre et que nous ne pouvons pas pour autant le quitter, la question est de savoir dans quelle mesure nous pouvons le rendre habitable, ne fût-ce que la brève durée de notre vie éphémère. C'est alors que naît la vocation du poète, la mission du peintre. Quel que soit son art, l'artiste apaise le monde, il est précieux en ce qu'il enrichit le cœur de l'homme.

Chapitre 1.
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La civilisation, de nos jours, vous donne un terrain de telle ou telle superficie en vous disant d'y dormir ou de rester éveillé, à votre guise. Puis elle installe un grillage autour du terrain qu'elle vous a alloué et vous interdit de le franchir sous peine de représailles. C'est le propre de l'homme de vouloir se déplacer en toute liberté dans l'espace dont il dispose, mais il veut bénéficier de la même liberté au-delà des grilles. Les misérables peuples civilisés vivent du matin au soir en hurlant et en se brisant les dents à leurs grillages. La civilisation donne la liberté à l'individu, puis, au nom de la paix sociale, fait de lui un tigre pris au piège. Cette paix n'est pas une paix authentique. C'est la paix du tigre au jardin d'acclimatation fixant les visiteurs d'un œil rancunier tandis qu'il s'étire pour leur plus grand plaisir. Si un seul barreau de la cage se brisait, ce serait le chaos.

Chapitre 13.
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« Est-ce que je vous lave la tête ?
— Non, je n'y tiens pas.
— Bien, je vais m'occuper de vos pellicules alors. »
Le patron a trempé ses dix doigts dans l'eau douteuse de la cuvette, et le voilà qui les pose avec aplomb sur mon crâne et sans me demander mon avis se met à frotter avec une force étonnante dans un aller et retour infernal. Ses ongles passent et repassent à l'allure d'un râteau géant sillonnant une contrée stérile à la vitesse d'un ouragan, en séparant un par un les cheveux noirs à la racine. J'ignore combien de centaines de cheveux poussent sur ma tête, mais chacun d'eux ayant été déraciné, le terrain nu et graisseux labouré, avec les forces qui lui restent, le patron me masse le crâne avec une telle violence que le choc me traverse des pieds à la tête et que mes os et ma cervelle en sont ébranlés.
« Qu'est-ce que vous en dites ? Ça fait du bien, non ?
— Vous avez un doigté exceptionnel !
— Vous croyez ? Tout le monde se sent bien après ça, vous savez.
— Je préfère vous dire que j'ai l'impression que ma tête va se décoller !
— Vous êtes à ce point fatigué ? Ça doit être à cause de la température. »

Chapitre 5.
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Le monde est rempli d'individus chicaneurs, malveillants, mesquins, d'un sans-gène révoltant. Il y en a dont on peut se demander ce qu'ils viennent faire là. Et ce sont justement ceux-là qui se croient tout permis. Ils s'adjugent le plus vaste espace là où souffle le vent de la société et ils en sont tout fiers. Ils s'imaginent que la vie consiste à faire suivre leurs semblables par un détective pendant cinq ans ou dix ans, pour qu'il compte le nombre de leurs pets. Puis, mis en votre présence, ils vous apprennent que vous avez lâché tant de pets, et un autre tant, autant de choses que personne ne demande à savoir. Si encore ils vous le disaient en face, vous en prendriez bonne note, mais les voilà qui insinuent dans votre dos combien de pets vous avez lâchés. Si on se fâche, ils continuent de plus belle. Si on leur demande d'arrêter, ils s'obstinent et s'obstinent encore. Et ils prétendent que c'est là leur ligne de conduite.

Chapitre 11.
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C'est le poème, c'est le tableau qui libère le monde des vicissitudes et rend l'univers digne d'être aimé. C'est la musique, c'est la sculpture. On pourrait aller jusqu'à dire qu'il n'est pas nécessaire de récréer le monde. Il suffit de regarder autour de soi pour que vive le poème, pour que jaillisse le chant. Les notes n'ont pas besoin de partition pour que la mélodie retentisse dans le cœur. Les couleurs n'ont pas besoin de support pour que la magnificence de la peinture se reflète aux yeux de l'esprit. Il me suffit de purifier, en me l'appropriant avec sérénité, le monde d'ici-bas, décadent et fangeux, par l'intermédiaire du cœur. C'est ainsi que le poète sans voix qui ne compose pas une seule rime, le peintre sans couleurs ni tissu de soie, doué de la faculté de voir ce bas monde, capable de se délivrer des passions pour pénétrer dans une sphère de pureté et bâtir un univers sans pareil… plus qu'un fils de riche, plus qu'un fils de puissant, plus qu'un enfant chéri dans le monde ordinaire, est un être heureux.

Chapitre 1.
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Vidéo de Natsume Soseki
RÉFÉRENCE BIBLIOGRAPHIQUE : Natsume Sôseki, Je suis un chat, traduit du japonais et présenté par Jean Cholley, Paris, Gallimard, 1978, p. 369, « Unesco ».
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