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EAN : 9782742793624
153 pages
Actes Sud (15/08/2010)
  Existe en édition audio
3.71/5   2064 notes
Résumé :
En débarquant à Constantinople le 13 mai 1506, Michel-Ange sait qu'il brave la puissance et la colère de Jules II, pape guerrier et mauvais payeur, dont il a laissé en chantier l'édification du tombeau, à Rome. Mais comment ne pas répondre à l'invitation du sultan Bajazet qui lui propose- après avoir refusé les plans de Léonard de Vinci, - de concevoir un pont sur la Corne d'Or ?
Ainsi commence ce roman, tout en frôlements historiques, qui s'empare d'un fait ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (374) Voir plus Ajouter une critique
3,71

sur 2064 notes
Il y a un certain temps que je voulais découvrir Matthias Enard, mais « Zone » son précédent livre me semblait être une sorte d'ovni littéraire
( plus de 500 pages je crois, en une seule phrase) du coup j'avais remis l'expérience à plus tard.
Et bien je dois avouer que «Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants », me fait regretter ma frilosité. de par l'histoire tout d'abord, aussi étonnante que méconnue, un Michel-Ange aveuglé par son travail, tellement loin des manigances faite sur sa personne et des enjeux que sa décision amenait. Et puis bien sur par l'écriture agréable, fluide d'Enard, bien au-dessus d'un grand nombre de ces confrères, précise, poétique, imagée. Alors même si la brièveté du roman est son seul défaut, le voyage sur les pas du célèbre italien sur les rives du Bosphore vaut largement le détour. C'est sur, je reviendrai vers vous Monsieur Enard.

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Je ne vous parlerai pas de batailles, de rois et d'éléphants...Mathias Enard en est infiniment plus capable que moi !

A travers ce que je qualifierai de long poème, à la manière d'une histoire chantée au Moyen-Age, il nous narre les quelques semaines passées à Istanbul par Michel-Ange, censé construire un pont sur la Corne d'Or. En effet, blessé par le pape Jules II, qui ne le paie pas, il s'en va à la rencontre du sultan Bajazet qui lui a proposé de dessiner ce fameux pont.
Et là-bas, la douceur de vivre le rattrape, lui, l'ascète, le travailleur infatigable, le bourru.
Une amitié se crée avec le beau et ambigu poète Mesihi de Pristina, qui lui fait découvrir tous les trésors de la ville...et les bouges. Mais Michel-Ange s'en défend, malgré lui. Malgré lui aussi, il est attiré par une jeune musicienne et danseuse andalouse, mais jamais il ne la touchera, ou à peine une caresse sur le bras.
Cette Andalouse mystérieuse nous livre, à mon sens, les plus beaux passages : « Je sais que les hommes sont des enfants qui chassent leur désespoir par la colère, leur peur dans l'amour ; au vide, ils répondent en construisant des châteaux et des temples. Ils s'accrochent à des récits, ils les poussent devant eux comme des étendards ; chacun fait sienne une histoire pour se rattacher à la foule qui la partage. On les conquiert en leur parlant de batailles, de rois, d'éléphants et d'êtres merveilleux ; en leur racontant le bonheur qu'il y aura au-delà de la mort, la lumière vive qui a présidé à leur naissance, les anges qui leur tournent autour, les démons qui les menacent, et l'amour, l'amour, cette promesse d'oubli et de satiété. Parle-leur de tout cela, et ils t'aimeront ; ils feront de toi l'égal d'un dieu. Mais toi tu sauras, puisque tu es ici tout contre moi, toi le Franc malodorant que le hasard a amené sous mes mains, tu sauras que tout cela n'est qu'un voile parfumé cachant l'éternelle douleur de la nuit. »

Qu'il y ait eu un complot, qu'il se soit commis un meurtre, que le pont soit construit ou pas, on s'en moque...Ce qui reste après la lecture de ce livre, c'est une indéfinissable atmosphère, ouatée, musquée. Difficile de quitter un ouvrage qui nous parle de batailles, de rois et d'éléphants...
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Michel Ange à Constantinople et ses amours platoniques avec une belle andalouse, comment résister à un pareil programme? Rien que le titre éveille l'envie de partir à sa suite.

Mathias Enard a imaginé la présence de Michel Ange en Turquie, contrarié qu'il est dans ses relations romaines avec le pape Jules II, pour construire un pont sur le Bosphore. de là, une féerie poétique se développe où les femmes tiennent une place de choix, particulièrement celle qui va séduire le grand maître.

Tout autour, ce sont les parfums de l'Orient, sa douceur et sa violence, tout un ensemble totalement différent de ce que l'on peut vivre à Rome. On a du mal sans doute à imaginer Michel Ange dans cet Orient insaisissable, mais le charme prend et la magie poétique de l'auteur exalte ce voyage improbable.

Pas d'action trépidante, mais une multitudes de nuances dans cette lecture imprégnée de réalisme et de mystère. Poésie, architecture, arômes orientaux, amour sont la palette de ce petit livre écrit simplement et avec talent. Une très belle découverte.
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L'identité d'un écrivain se trouve dans ses allées et venues, sa pensée est une pensée de la traversée.
Mathias Enard aime les traversées !
Celle de l'est et de l'ouest.
Celle de l'islam et de la chrétienté.
Celle de l'artiste et de l'homme.

Il part de la découverte d'un fait méconnu dans la vie de Michelangelo pour construire un récit délicieusement épique où il emmène le sculpteur florentin en Turquie au sein de l'Empire ottoman où de vrais personnages vont se côtoyer.
Dans ce court roman choral a trois voix, ce sont trois parties d'un triangle qui donneront le rythme et les couleurs à la narration : la Turquie, l'Andalousie et l'Italie.

On découvre la personnalité complexe de Michelangelo, dont l'orgueil et la vanité n'avaient d'égal que son talent : démesuré.
A cette période le sculpteur florentin souffre profondément de ne pas être reconnu à sa juste valeur.
Des années de peine, de travail acharné ne lui ont toujours pas apporté la reconnaissance qu'il désire. Humiliations, manigances et intrigues de cour sont monnaie courante dans la vie d'un artiste.

Immensément talentueux, mais obscur à lui-même, son physique ingrat le poussait à chercher dans la beauté la manière d'exprimer ce qui lui faisait péniblement défaut.
La beauté des lignes d'un paysage, les traits d'une femme ou d'un homme, il les reproduisait dans ses dessins et sculptures cet idéal tant recherché.

Son séjour/aventure dans l'Empire ottoman allait marquer et influencer durablement sa peinture.
Les couleurs des étoffes, la moiteur des saisons, l'odeur des épices, l'ivresse de la danse et de la musique, seraient des constantes dans certains détails de ses oeuvres.

On ne quitte qu'à regret ce récit presque trop court, au rythme languide.

Michelangelo est-il vraiment allé en Turquie ?
On n'en saura jamais !
L'important que ce Mathias Enard l'y a amené !


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Si la vie est une succession de parenthèses, celle qui mena Michel-Ange à Constantinople en 1506, le transforma à tout jamais.
Le puissant pape guerrier Jules II lui doit de l'argent lorsque le sultan Bajazet lui propose de concevoir un pont sur la Corne d'Or, après avoir rejeté les dessins de Léonard de Vinci. C'est flatteur mais renforce la pression sur les épaules de Michel-Ange
Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants ressemble à un conte tout à la fois sombre et lumineux, empreint de mystère, La lecture de ce court roman est un véritable délice. Les phrases sont brèves, ciselées, simples et poétiques. Ce portrait intime d'un artiste en proie aux doutes, aux pressions politiques et à la tyrannie de l'amour et du désir, est fascinant. de multiples rencontres jalonnent son séjour, fortes, belles et inquiétantes…
Tourner les pages de ce livre, c'est comme sentir un extrait de parfum qui vous embarque dans un voyage étonnant, celui De La Renaissance et de la création d'une oeuvre.
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Je sais que les hommes sont des enfants qui chassent leur désespoir par la colère, leur peur dans l'amour; au vide, ils répondent en construisant des châteaux et de temples. Ils s'accrochent à des récits, ils les poussent devant eux comme des étendards; chacun fait sienne une histoire pour se rattacher à la foule qui la partage. On les conquiert en leur parlant de batailles, de rois, d'éléphants et d'êtres merveilleux; en leur racontant le bonheur qu'il y aura au-delà de la mort, la lumière vive qui a présidé à leur naissance, les anges qui leur tournent autour, les démons qui les menacent, et l'amour, l'amour, cette promesse d'oubli et de satiété.
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Tu sens que la fin approche, que c'est la dernière nuit. Tu auras eu la possibilité de tendre la main vers moi, je me serai offerte en vain. C'est ainsi. Ce n'est pas moi que tu désires. Je ne suis que le reflet de ton ami poète, celui qui se sacrifie pour ton bonheur. Je n'existe pas. Tu le découvres peut-être maintenant ; tu en souffriras plus tard, sans doute ; tu oublieras ; tu auras beau couvrir les murs de nos visages, nos traits s'effaceront peu à peu. Les ponts sont de belles choses, pourvu qu'ils durent ; tout est périssable. Tu es capable de tendre une passerelle de pierre, mais tu ne sais pas te laisser aller aux bras qui t'attendent.
Le temps résoudra tout cela, qui sait. Le destin, la patience, la volonté. Il ne restera rien de ton passage ici. Des traces, des indices, un bâtiment. Comme mon pays disparu, là-bas, de l'autre côté de la mer. Il ne vit plus que dans les histoires et ceux qui les portent. Il leur faudra parler longtemps de batailles perdues, de rois oubliés, d'animaux disparus. De ce qui fut, de ce qui aurait pu être, pour que cela soit de nouveau. Cette frontière que tu traces en te retournant, comme une ligne avec un bâton dans le sable, on l'effacera un jour ; un jour toi-même te laissera aller au présent, même si c'est dans la mort.
Un jour tu reviendras.
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Triste présage, ce matin le singe est mort. Ou peut-être cette nuit; à son réveil, Michel-Ange l'a trouvé étendu par terre, les pattes repliées, la tête reposant sur le menton, comme arrêté dans sa course.
Michelangelo a pris la minuscule main dans la sienne, l'a soulevée, elle est retombée.
Il a ramassé l'animal, il semblait avoir perdu tout son poids, ne plus rien peser, comme si seule l'énergie de la vie lui donnait sa masse.
C'était une chose infime que la mort rendait encore plus fragile.
Michel-Ange a senti son coeur se serrer. Il a allongé la petite dépouille dans la cage qu'il a décrochée et posée sur le sol.
Il a préféré ne plus le voir, et a appelé un serviteur pour qu'on l'en débarrasse immédiatement, en espérant que cela efface aussi l'étrange tristesse qui l'étreignait. Il a pleuré ce décès comme celui d'un enfant qu'on aurait à peine eu le temps de connaître
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Cela commence par des proportions. L'architecture est l'art de l'équilibre ; tout comme le corps est régi par des lois précises, longueur des bras, des jambes, position des muscles, un édifice obéit à des règles qui en garantissent l'harmonie. L'ordonnancement est la clé d'une façade, la beauté d'un temple provient de l'ordre, de l'articulation des éléments entre eux. Un pont, ce sera la cadence des arches, leur courbe, l'élégance des piles, des ailes, du tablier. Des niches, des gorges, des ornements pour les transitions, certes, mais déjà, dans le rapport entre voûtes et piliers, tout sera dit.
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Michel-Ange rêve d’un banquet d’autrefois, où l’on discuterait d’Eros sans que jamais le vin n’empâte la langue, sans que l’élocution ne s’en ressente, où la beauté ne serait que contemplation de la beauté, loin de ces moments de laideur préfigurant la mort, quand les corps se laissent aller à leurs fluides, à leurs humeurs, à leurs désirs. Il rêve d’un banquet idéal, où les commensaux ne tangueraient pas dans la fatigue et l’alcool, où toute vulgarité serait bannie au profit de l’art.
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Vidéo de Mathias Enard
Grand entretien de clôture avec Mathias Enard - Modération par Zoé Sfez - dimanche 2 octobre 2022, 17h30-18h30 - Château du Val Fleury, Gif-sur-Yvette (Paris-Saclay) Festival Vo-Vf, traduire le monde (les traducteurs à l'honneur)
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