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EAN : 9782912667281
130 pages
Finitude (10/10/2005)
4/5   4 notes
Résumé :
"La France, c’est connu, aime la littérature. Quel que soit son régime, elle est folle de ses écrivains. A une condition, une seule, minime, certes, mais indispensable: qu’ils soient morts. Pour les vivants, qu’ils crèvent. La postérité fera le tri."

Jean-Pierre Enard est un bon écrivain, d'ailleurs il est mort.
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Ce week-end, j'ai eu l'occasion de découvrir ce petit recueil de textes sur la littérature, les prix, les écrivains, les éditeurs, les lecteurs... C'est drôle, caustique à souhait, facile à lire, léger mais posé sur de solides observations. Je n'en ai pour le moment grignoté que quelques passages bien croustillants, et j'adore déjà!
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Cet ouvrage reprend une série de textes de Jean-Pierre Enard, l'auteur des Contes à faire rougir les petits chaperons. le premier texte (dont est tiré la citation qui introduit le résumé) est selon moi le meilleur, avec la quatrième de couverture : « Jean-Pierre Enard est un bon écrivain. D'ailleurs, il est mort. » Je suis un peu moins convaincue par les autres articles qui m'ont souvent parus être de la provocation pure.
Lien : http://therewillbebooks.word..
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Citations et extraits (29) Voir plus Ajouter une citation
Qui veut le succès ne dois pas brouiller sa piste. Il faut rentrer dans le rang. Observer les règles. Choisir son genre: saga familiale, souvenirs d'enfance, récit historique, confession cul. Ce dernier, recommandé pour les auteurs femmes et pour les goujats qui laissent deviner les noms et les pratiques de leurs partenaires.
Deux manières d'écrire sont acceptées. La distinguée, vocabulaire puisé dans le Robert en neuf volumes, imparfait du subjonctif et citations incluses dans le texte sans guillemets. La torrentielle, argot piqué chez Simonin, énumérations pittoresques, points de suspension et invocation de Saint Céline. L'essentiel, dans un cas comme dans l'autre, c'est d'éviter le réel. La crudité, la nudité, l'absence d'alibis font fuir.
Cela ne se limite pas à l'écriture de l'érotisme.

L'éthique d'un écrivain, c'est son style. La structure du récit, la syntaxe, le vocabulaire, la ponctuation.
Ne pas céder au tape-à-l’œil, à la mode, à la facilité, à la convention. Ne pas écrire dans le moule. Renoncer au brillant toc. Être, quel qu'en soit le prix à payer, fidèle à l'idée qu'on se fait de la littérature et de soi-même.
Tout le reste en découle: imagine-t-on Beckett un dimanche après-midi à la télévision?

Éviter les compromissions: c'est l’œuvre même qui doit être irréductible. Le reste n'a aucune importance. Ainsi Cocteau.

(Idées blanches, p.69-70)
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Le langage, c'est comme le bois ou la pierre : un matériau. Écrire, c'est le travailler. On admet qu'un sculpteur apprenne sa technique. Et qu'un acteur fasse de la gymnastique ou place sa voix avant de monter sur scène. C'est pareil pour l'écrivain. Il doit s'exercer. Et, avant tout, pour désacraliser l'écriture.
D'où l'utilité des travaux alimentaires. Ils ont l'avantage de permettre de gagner, plus ou moins bien, sa vie et de donner l'occasion de travailler à brut le matériau. Écrire les mémoires d'un chanteur, rédiger un récit véridique de deux cents feuillets sur des amours de stars, composer les légendes d'un conte pour enfants, traduire un ouvrage économique sur la crise du pétrole, découper un scénario de bandes dessinées, c'est utiliser l'écriture. La plier pour la rendre souple et se soumettre à des lois pour s'adresser à des publics différents. Connaître, attraper, rejeter des mots, des tournures, des liaisons, des trucs de métier, en somme, qui entreront, ou non, dans le façonnement de son style personnel. Bref, apprendre à écrire.

(Nous ne dormons jamais, p.44-45)
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Belles moralités.
Dashiell Hammet, interrogé par une commission maccarthyste. On lui demande de livrer des noms. Il n'en connaît aucun. Il pourrait le dire. Il préfère se taire et se laisser mettre en prison. Par respect de soi mais aussi pour défendre son idée de la démocratie.
Georges Perros, après quelques années de galères parisiennes, TNP et Gallimard, s'installe à Douarnenez. Pour se mettre au vert de l'océan, peut-être. Surtout pour rester fidèle à soi-même. Face à la mer, dans la solitude et la pauvreté, on ne se berce plus de vains mots. Une vie sans illusions et une écriture nue.
Moralité de ces moralités: une morale n'a de sens que traduite en actes. L'écrivain est le plus mal placé pour se contenter de paroles.

(Idées blanches, p.62)
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Les romans sont comme les enfants. Personne ne sait au juste d'où ils viennent. Les scientifiques prétendent que c'est la petite graine linguistique de papa qui s'est glissée dans le ventre de maman écriture. Ils parlent de matrice et ils sont sûrs qu'ils ont tout dit. Les psychanalystes pensent qu'ils poussent dans les choux du passé et qu'en fouillant le champ de sa mémoire, on en déterre ici ou là. C'est faire du neuf avec du vieux. Les idéalistes croiraient plutôt aux cigognes de la pure imagination. Discours antique, qui fait sourire.
Au fond, je préfère ne pas savoir. Si je pouvais connaître les mécanismes, les réactions chimiques, les influx nerveux et physiologiques, les enchaînements linguistiques, j'arrêterais. Si je savais comment j'écris mes livres, je n'en écrirais plus.

Roman n°1, septembre 1982
Extrait de La cigogne et le roman

(Idées blanches, p.71-72)
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L'éditeur ne fait que répéter une conception issue des écoles, lycées ou facultés. Une vision mystique de l'écriture, où l'écrivain naît avec une plume au bout du bras et, d'une façon tout à fait désintéressée, se met à pratiquer l'art noble de conter des histoires avec des mots. Les profs et les éditeurs se bouchent les oreilles quand ils entendent Brecht, Balzac ou Beaumarchais clamer qu'ils écrivent aussi pour gagner de l'argent. [...]
Dans cette image pieuse, il vaut mieux que l'écrivain souffre, évidemment. [...] Le prof, le critique, l'éditeur, au chaud devant leur demi de bière, glosent à l'infini sur la misère de la littérature et la littérature de la misère. Quelques écrivains se trémoussent, à l'infini eux aussi, pour recueillir leurs applaudissements. [...]
Sacrée, l'écriture ne peut venir que par illuminations successives. Voyez comme c'est commode quand on écrit "Guerre et Paix" ou "Panique".

(Nous ne dormons jamais, p.42-43)
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