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EAN : 9782246734192
281 pages
Grasset (19/08/2009)
  Existe en édition audio
3.45/5   2046 notes
Résumé :
" C'est l'histoire d'une Emma Bovary des seventies, qui a reproduit lors de son divorce le silence de la génération précédente sur les malheurs des deux guerres. C'est l'histoire d'un homme devenu un jouisseur pour se venger d'être quitté, d'un père cynique parce que son coeur était brisé. C'est l'histoire d'un grand frère qui a tout fait pour ne pas ressembler à ses parents, et d'un cadet qui a tout fait pour ne pas ressembler à son grand frère. C'est l'histoire d'... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (200) Voir plus Ajouter une critique
3,45

sur 2046 notes
Mon deuxième Beigbeder et pas des moindres puisqu'il s'agit de quelques bribes de sa vie qu'il nous relate dans ce roman français.

Embarqué en garde à vue pour un peu de farine blanche sur le capot d'une voiture, dans la cellule où il étouffe, où il s'ennuie, il ne lui reste qu'une échappatoire: écrire sa vie. Lui qui est amnésique, ce n'est pas une mince affaire. Seul avec lui-même, les souvenirs reviennent comme autant d'images salvatrices de sa condition de prisonnier privé de sa liberté.

Frédéric Beigbeder nous compte sa vie, son enfance, ses parents, ses grands-parents, sa fille avec beaucoup d'humilité et de sensibilité. Ça sonne juste les pensées de Beigbeder, ça sonne l'enfant de trop, l'enfant de divorcé, la France a contre courant. Ça coule de source surtout avec le poète enfermé plus loin qui déglingue sa prose contre l'absurdité du système. Carcéral, familial, existentiel.

De petits chapitres pour de grands passages, des citations à la pelle, le tout dans l'acuité et la douceur d'un Beigbeder inspiré, avec juste l'envie pour une fois de ne plus oublier d'où il vient et où il a grandi.

Alors oui, j'assume, j'aime l'écrivain. Je ne connais pas l'homme mais du Beigbeder, c'est de la bonne. À mon goût du moins.
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S'il vous plait, un Beigbeder light!
Pas de souci chef, j'ai ça en magasin.
Le point de départ d‘ «Un roman français» part de la désagréable aventure que le célèbre noceur, écrivain, animateur, réalisateur a connu en 2010. A savoir une garde à vue pour avoir sniffer un petit rail de coke sur le capot d'une voiture alors que passait la maréchaussée. Répréhensible bien évidemment.
Et de prendre la machine à remonter le temps pour justement le faire passer dans sa cellule pendant sa garde à vue. Et surprise, on découvre un F.B. tendre, sensible, torturé (ça on s'en doutait un peu) qui nous offre un roman beaucoup plus sage que sa production habituelle. Il réussit à nous émouvoir menant son récit jusqu'au bout avec le même brio. L'humour est là aussi mais souvent plus pour botter en touche que pour faire le malin.
OK, je ne suis peut-être pas objectif car je suis un fan de cet hurluberlu mais ce roman français montre que le génial présentateur du cercle (tient c'est mon speudo) est un talentueux auteur. Et je ne reviendrai pas sur ma position ! Prix Renaudot de surcroit.
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Certains bouquins sont comme des contrats de téléphonie mobile ou des billets d'avion low cost : il vaut mieux lire ce qui est écrit en petits caractères, au risque de s'exposer à de fâcheux malentendus. La qualité du service réside dans l'astérisque. C'est le cas de la dernière publication signée Beigbeder. On a dans les mains un livre à la couverture jaune pisseux, lointain reliquat d'une maison d'édition autrefois respectable, et l'on court au quiproquo si l'on ignore le sous-titre : roman. Indication certes anodine mais qui place d'emblée ces pages dans le domaine de la fiction et exige du lecteur une attitude particulière. Il ne s'agit pas de considérer les faits narrés comme parfaitement authentiques, mais d'accepter d'y croire, de suspendre notre incrédulité. Dans le cas présent, cela évite bien des mauvaises surprises. Les personnages sont fictifs donc le Frédéric Beigbeder dont il est ici question est à distinguer de celui, bien réel, dont l'avocat a menacé les journalistes de poursuites, s'ils avaient le toupet de parler de l'arrestation de son client pour usage de stupéfiant. Dans ce roman, un écrivain qui se décrit comme célèbre, à succès, bref puant, est embarqué pour avoir tapé un rail de coke sur le capot d'une voiture. Rien à voir, effectivement. Une nuit au cachot va donner à cet homme-nez l'occasion de revenir sur sa naissance, sur l'histoire de sa famille et sur ses drames adolescents. C'est bien connu, l'enfermement est une condition – nécessaire mais pas suffisante – à l'écriture. le narrateur le rappelle au détour d'un interrogatoire, en se plaçant pêle-mêle aux côtés de Villon, Marot, Cervantès, Casanova, Voltaire, Sade, Verlaine, Wilde, Dostoïevski, Genet, Céline… N'en jetez plus ! On a bien compris dans quelle division il jouait, le Fredo. Toute grande oeuvre naît d'une tragédie personnelle : ici, le pauvre reclus forme le projet de son livre car il ne peut pas dormir – comme Proust, faut-il comprendre. En effet, sa cellule de garde-à-vue ne sent pas très bon et puis, il y a du bruit. Il va donc concevoir un roman qui nous racontera l'histoire de sa vie. Ce livre appartient donc au genre bigrement original de l'autofiction. On doit ainsi suspendre notre incrédulité : les souvenirs de Frédéric ne sont pas la biographie de Beigbeder (flagrance philosophique au détour d'une page : « toute vie a autant de versions que de narrateurs : chacun possède sa vérité »), il ne faut pas tout prendre au premier degré, pas même la prétention de littérature qu'affiche ce torchon.

Sous couvert de la fiction, le narrateur peut faire la satire d'une certaine bêtise, celle d'un auteur de bonne famille, dont l'écriture doit bâtir sa célébrité (« la pointe de mon Bic s'enfonçait dans la peinture blanche comme les mains des acteurs dans le ciment d'Hollywood Boulevard ») et sa tour d'argent (« le bonheur d'être coupé du monde, voilà ma première addiction »). L'autodérision est sensible, notamment quand le narrateur menace la police : « si vous ne me libérez pas tout de suite, j'écris un livre ! ». Néanmoins, elle n'excuse pas la catastrophe d'ensemble (il a vraiment écrit ce livre). le personnage débite âneries crasses sur évidences molles ; il joue à l'excès le rôle d'un furoncle de vanité, bouffi d'orgueil et suintant de frustration. Son nombril, gonflé de vacuité, est le centre d'un monde gras et fat, situé entre les beaux quartiers parisiens, les stations balnéaires du Sud-ouest et les clubs de polo (d'où les captivantes révélations sur la bite de quelques grands patrons). Stressé, pressé par la police, ce bouton d'acné égoïste explose. Et voilà : son pus éclabousse presque trois cents pages.

Passé le premier dégoût, j'avoue que cette parodie de la stupidité beigbedérienne a pu me faire sourire. La dimension héroï-comique du livre est parfois irrésistible : un nanti, arrêté pour une histoire banale, passe une nuit ordinaire en cellule en ressassant sa vie médiocre et la transforme en existence digne de figurer auprès des événements historiques du siècle dernier. « Ce livre serait alors une enquête sur le terne, le creux, un voyage spéléologique au fond de la normalité bourgeoise, un reportage sur la banalité français ». Pourquoi le conditionnel ? Ah, oui, le titre l'annonce en fanfare : Frédéric a, au moins, des dimensions hexagonales. L'ouverture d'Un roman français (non, non, pas Une Suite française, voyons !) donne le ton quand elle mentionne la mort d'un aïeul durant la première guerre. « Ce descendant de croisés a été condamné à imiter Jésus-Christ : donner sa vie pour les autres. Je descends d'un preux chevalier qui a été crucifié sur des barbelés de Champagne ». On l'aura compris, ce roman se fonde sur deux principes, usés jusqu'à la corde par les publicitaires : comparaison et assimilation. Je rapproche deux éléments (une voiture et la masculinité par exemple) et je les identifie métonymiquement (la voiture est une part de la masculinité). Je me compare donc je suis. Ici, Frédéric se mesure à beaucoup de choses, à tout le monde, i.e. ses parents (aussi frivoles, plus riches), ses grands-parents (moins pleutres, plus élégants), son frères (moins moche, plus riche), les innombrables auteurs cités (ses égaux). La phrase est ainsi encombrée de formules comparatives qui n'apportent rien, sinon quelques mauvaises blagues et l'affliction du lecteur. Passons sur les références aux auteurs. Il s'agit surtout de se cacher derrière des icônes pour éviter de parler de soi (Weyergans l'a fait avec habileté dans Trois jours chez ma mère, dont Grasset nous ressert ici l'épigone dégénérée). Ces citations peuvent agacer ou faire involontairement sourire (franchement, la fille « aux yeux bleus comme une héroïne d'Henry James », fallait le faire), quand elles ne trahissent pas la sottise du narrateur (les quelques lignes sur Foucault, parmi les seules références un peu développées, laissent présager de ce qu'il a compris des autres écrivains honteusement embrigadés). Elles forment le pendant culturel aux vérités fulgurantes – sur la vie, la mort, la littérature – qui émaillent les chapitres. En vrac : « On peut oublier son passé. Cela ne signifie pas que l'on va s'en remettre » ; « il est difficile de se remettre d'une enfance malheureuse, mais il peut être impossible de se remettre d'une enfance protégée » ; « ce truc qu'on appelle la liberté, c'était surtout une lutte pour une vie plus douillette que celle des générations précédentes » ; « définition possible de l'amour : un électrochoc qui ressuscite le souvenir » ; « tout écrivain est un “Ghostbuster” : un chasseur de fantômes » (je vous épargne les références à Proust) et enfin : « l'esclavage du féminisme – avant les femmes élevaient les enfants, maintenant elles élèvent les enfants et doivent EN PLUS travailler ».

Flippant, non ?

Non. Il ne faut pas prendre au sérieux ces blagues de potache. On vous avait prévenu, il s'agit d'un roman. Cela excuse tout, même les comparaisons les plus imbéciles, surtout quand Frédéric est fâché tout rouge. Enfermé, il se révolte : « La Loi n'a pas toujours raison, particulièrement en France » et donne l'exemple du gouvernement Pierre Laval. La garde à vue se prolonge et l'idiot prend ses aises : « les conditions de détention des étudiants contestataire à Téhéran : les mêmes qu'à Paris 8e ». Ah, ces pandores veulent la guerre ? Hé bien, ils l'auront ! Finies les réticences rhétoriques ! « J'écris le mot “divorce” mais jamais il ne fut prononcé par mes parents avant des années. C'était comme les “événements” d'Algérie… ». Faut-il le répéter ? Frédéric est aux dimensions de la France ! Cet homme ne se compare plus à l'Histoire. Ses petits drames sont l'Histoire : « En 1942, les enfants ne savaient rien sur les juifs cachés par leurs parents au deuxième étage de la Villa Navarre ; trente ans plus tard, les enfants ne savaient rien sur le divorce de leurs propres parents ».

On le voit, le ridicule n'évite pas l'indécence. Et on salue à cet égard la conscience professionnelle de Grasset qui a suivi le même chemin. En décidant de censurer le chapitre consacré au magistrat Jean-Claude Marin, on a donné la touche de grotesque éditorial qui manquait au tableau. le narrateur vilipende celui qui a décidé de prolonger sa détention et prend des airs de Dante, Voltaire ou Zola (rayez la mention inutile). Ces lignes sont d'un niveau rarement atteint : « J'accuse l'accusation. […] Les mots : Jean, Claude et Marin, pour les générations à venir, ne seront pas un prénom et un nom oubliés. […] Pour toujours, Jean, Claude et Marin symboliseront la Cruauté d'une Justice Disproportionnés envers les Artistes Malades. […] Te voilà immortalisé pour les siècles et les siècles… ». L'ironie du passage est aussi fine qu'un calembour de Jean Roucas. Qui peut prendre Frédéric au sérieux quand il déclare : « Cette page est de loin la plus dangereuse que j'ai jamais écrite de ma vie » ? Et bien, l'éditeur qui, en bon lecteur de roman, suspend son incrédulité et censure le passage par crainte de représailles judiciaires. Et Grasset de nier que c'est simplement pour faire du buzz et qu'il n'est pas marchand de tapis…

Avec Un roman français, Beigbeder nous prouve qu'un auteur doit savoir faire feu de tout bois, de toute brindille, même d'une souche de fin de race. Son écriture est plate, ses réflexions stupides et l'histoire n'est même pas assez intéressante pour pouvoir figurer dans un forum Internet. Et pourtant, il la publie, il la vend et sa renommée va permettre d'éclipser des oeuvres plus méritoires.
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Eh oui, encore un livre que j'ai sauvé du pilon (yes...une victoire de plus accomplie) car celui-ci a été trop consulté donc très légèrement abîme (ce qui, entre nous, se remarque à peine), et cette fois, un ouvrage que j'ai beaucoup aimé. Lorsque Frédéric Beigbeder dit à un moment donné que c'est le premier livre qu'il aurait du écrire, moi je rajouterais que c'est le premier livre que j'aurais du lire de lui...car en effet, il y a tout dans cet ouvrage. Non pas une histoire, celle de l'auteur lui-même, avec ses bons et mauvais côtés mais également celle de sa fille Chloé (ici, le narrateur auteur regard"e droit devant, à savoir vers l'avenir) mais aussi un peu de celle de ses parents et de ses grands-parents (regard tourné dans l'autre sens cette fois, vers le passé). L'auteur nous parle énormément de son frère Charles avec lequel il a eu une grande complicité durant son enfance mais dont il, s'es(t toujours senti inférieur. Pour cause, alors que Frédéric se retrouve en cabane pour avoir consommé des stupéfiants sur la voie publique, son aîné, lui, s'apprête à se voir remettre la légion d'honneur par le Président de la République française. C'est ainsi que débute ce "roman français" mais c'est aussi de la sorte que l'auteur se rend compte que lorsque l'on est confronté à des situations des plus délicates et non pas des plus confortables non plus, là où on se retrouve plongé dans un trou noir, des souvenirs, que l'on croyait enfouis à jamais tout comme ce corps gisant dans la crasse, se mettent brusquent à rejaillir...

Un roman qui se lit très rapidement (si seulement j'avais eu un peu plus de temps pour moi ces derniers temps, je crois que je l'aurais dévoré en quelques heures seulement), avec des chapitres courts et une écriture fluide et légère ! A découvrir sans faute !
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Huitième roman de Beigbeder, « le roman français » est « l'histoire d'un mec » qui se fait arrêter pour consommation de produits stupéfiants sur la voie publique une nuit à Paris, en 2008. L'ennui est très productif pour les écrivains et sa garde à vue le conduit à se souvenir de son enfance oubliée. La garde à vue n'est qu'une anecdote, mais pour la première fois Beigbeder se remet en question, revient sur son passé et celui de sa famille, et signe une autobiographie teintée d'autodérision dans le mode de la confession.

C'est l'histoire d'un enfant gâté, dans tous les sens du mot, qui passe aux aveux, semble-t-il avec sincérité, mais avec une évidente propension à la provocation. Certaines scènes sont touchantes, voir émouvantes – avec sa fille – mais le tout, trop nombriliste dans ce milieu bobo, révèle peu de moments réellement passionnants. Beigbeder traque ses souvenirs dans sa tête et partage ses angoisses ; « J'ai inventé celui qu'on prend pour moi depuis vingt ans » écrit-il tel un défi.
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Citations et extraits (238) Voir plus Ajouter une citation
(...)la "vie de famille".Pourquoi cette expression m'apparaît-elle comme une menace, voire un oxymoron ? On se figure tout de suite un pauvre homme épuisé, qui tente d'installer un siège-bébé dans une automobile ovale. Bien sûr, il n'a pas fait l'amour depuis des mois. Une vie de famille est une suite de repas dépressifs où chacun répète les mêmes anecdotes humiliantes et automatismes hypocrites, où l'on prend pour un lien ce qui n'est que loterie de la naissance et rites de la vie en communauté. Une famille, c'est un groupe de gens qui n'arrivent pas à communiquer, mais s'interrompent très bruyamment, s'exaspèrent mutuellement, comparent les diplômes de leurs enfants comme la décoration de leurs maisons, et se déchirent l'héritage de parents dont le cadavre est encore tiède. Je ne comprends pas les gens qui considèrent la famille comme un refuge alors qu'elle ravive les plus profondes paniques.Pour moi, la vie commençait quand on quittait sa famille.
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C’est toi que j’ai cherchée tout ce temps,
dans ces sous-sols vrombissants et sur ces pistes où je ne dansais pas,
dans une forêt de personnes, sous les ponts de lumière et les draps de peau, au bout des pieds maquillés qui débordaient de lit en feu,
au fond de ces regards sans promesses,
dans les arrière-cours d’immeubles bancals, par-delà les danseuses esseulées et les barmen ivres,
entre les poubelles vertes et les cabriolets d’argent,
je te cherchais parmi les étoiles brisées et les parfums violets, dans les mains gelées et les baisers liquoreux, en bas des escaliers branlants,
en haut des ascenseurs lumineux,
dans les bonheurs blêmes et les chances saisies et les mains serrées trop fort,
et à force j’ai dû cesser de te chercher
sous la voûte noire,
sur les bateaux blancs,
dans les échancrures veloutées et les hôtels éteints,
dans les mains mauves et les ciel d’ivoire, parmi les aurores marécageuses,

mon enfance évanouie.
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"J'ai moins aimé ce qui concerne les nuits passées en garde à vue pour consommation de cocaïne sur la voie publique. C'est curieux, j'aurais dû sympathiser, ayant moi-même passé une nuit en prison pour une infraction à peu près aussi conne (avoir fumé une cigarette dans un avion) - et, je confirme, les conditions de détention, ce n'est pas tout à fait ça. Mais l'auteur et son ami le poète sont un peu revendicatifs, grandes gueules."

"Dans cet épisode délinquant, quelque chose ne va pas. L'enfant ne se reconnaît pas dans l'adulte qu'il est devenu. Et, là aussi c'est probablement la vérité: l'enfant n'est pas le père de l'homme. Il y a l'enfant, il y a l'homme et entre les deux, il n'existe aucun rapport. C'est une conclusion inconfortable, embarrassante: on aimerait qu'au centre de la personnalité il y ait une certaine unité; c'est une idée dont on peine à se détacher; on aimerait pouvoir faire le lien."

********************************

"Mon enfance n'est ni un paradis perdu, ni un traumatisme ancestral. Je l'imagnie plutôt comme une lente période d'obéissance. On a tendance à idéaliser ses débuts mais un enfant est d'abord un paquet que l'on nourit, transporte et couche. En échange du logement et de la nourriture, le paquet se conforme à peu près au réglement intérieur."

"Je ne parlerai pas de moi, pour ne pas me condamner à parler de vous" Mauriac s'adressant à sa famille.

"La famille est une succession de corvée, une meute de personnes qui vous ont connu bien trop tôt, avant que vous ne soyez terminé - et les anciens sont toujours les mieux placés pour savoir que vous ne l'êtes toujours pas.(...) Une vie de famille est une succession de repas dépressifs où chacun répète les mêmes anecdotes humiliantes et automatismes hypocrites, où l'on prend pour un lien ce qui n'est que loterie de la naissance et rites de la vie en commnauté. Une famille, c'est un groupe de gens qui n'arrive pas à communiquer mais s'interrompent très bruyamment, s'exaspèrent mutuellement, comparent les diplômes de leurs enfants comme la décoration de leur maison, et se déchirent l'héritage des parents dont le corps est encore tiède. Je ne comprends pas les gens qui considèrent la famille comme un refuge alors qu'elle ravive les plus profondes paniques. Pour moi, la vie commençait quand on quittait sa famille. Alors seulement, l'on se décidait à naître. Je voyais la vie divisée en deux partie: la première était un esclavage, et l'on employait la seconde à essayer d'oublier la première. S'intéresser à son enfance était un truc de gâteux ou de lâche."

"Avez-vous remarqué que tous les contes de fées se terminent le jour du mariage? Moi aussi je me suis marié à deux reprises, et j'ai éprouvé la même crainte, à chaque fois, pile au moment de dire "oui", cette intuition désagréable que le meilleur était derrière nous."

"On se drogue parce que la vie est assomante, que les gens sont fatigants, qu'il n'y a plus tellement d'idées majeures à défendre, qu'on manque d'entrain." Françoise Sagan

"On peut oublier son passé. Cela ne signifie pas que l'on va s'en remettre."

"Il est possible que j'aie cru être amnésique alors que j'étais juste un parresseux sans imagination. Nabokov et Borges disent, à peu de chose près la même chose: l'imagination est une forme de la mémoire."

"Si j'ai perdu la mémoire à l'âge adulte, c'est peut-être que déjà, très jeune, je n'avais plus confiance en la réalité."

"Depuis je n'ai cessé d'utiliser la lecture comme un moyen de faire disparaître le temps, et l'écriture comme un moyen de la retenir."

"En fuyant ma famille, je ne me rendais pas compte que j'abdiquais face à une aliénation bien pire: la soumission à l'individualisme amnésique. Privé de nos liens familiaux, nous sommes des numéros interchangeables comme les "amis" de Facebook, les demandeurs d'emploi de l'ANPE ou les prisonniers du Dépôt."

"Quand je prias pour les Ethiopiens à la messe de l'école Bossuet, c'était surtout pour ne pas leur ressembler."

"C'est pour cela que j'aime l'autobiographie: il me semble qu'il y a là, enfoie en nous, une aventure qui ne demande qu'à être découverte, et que si l'on arrive à l'extraire de soi, c'est l'histoire le plus étonnante jamais racontée. "Un jour mon père à rencontré ma mère, et puis je suis né, et j'ai vécu ma vie." Waow, c'est un truc de maboul quand on y pense. Le reste du monde n'en a probablement rien à foutre, mais n'est notre conte de fées à nous. Certes, ma vie n'est pas plus intéressante que la vôtre, mais elle ne l'est pas moins. c'est juste une vie, et c'est la seule dont je dispose. Si ce livre a une chance sur un milliard de rendre éternels ma mère, mon père et mon frère, alors il méritait d'être écrit. c'est comme si je planter dans ce bloc de papier une pancarte indiquant: ICI PLUS PERSONNE NE ME QUITTE. Aucun habitant de ce livre ne mourra jamais."


Préface du livre dans l'édition Le Livre de poche, 2010, (ISBN 978-2-253-13441-1
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Je voudrais que tu me consoles. Tu viens chez moi ? N'oublies pas d'amener tes deux bras, j'ai l'intention de dormir au milieu. Au fait, je t'aime
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On peut oublier son passé. Cela ne signifie pas que l'on va s'en remettre.
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