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EAN : 9782259008945
617 pages
Editions de Minuit (01/02/1982)
4.44/5   8 notes
Résumé :
Oranienburg-Sachsenhausen, où furent détenus 8 000 Français, est l'un des camps de concentration les moins connus de France. Il fut pourtant le quartier général de l'inspection centrale SS et le coeur même du système contrationnaire nazi : on y expérimentait les méthodes d'extermination massive appliquées ensuite dans les autres camps ; les détenus y servaient de cobayes pour des " études " pseudo-médicales. Mais Sachso, qui vit passer 200 000 prisonniers de vingt n... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Oranienburg-Sachsenhausen plus communément connu sous le nom de Sachso est le deuxième camp de concentration créé par les nazis en 1936 juste après Dachau et avant Buchenwald. A sa tête, un certain Eicke sorti tout droit d'un asile psychiatrique. Ça ne s'invente pas et ça en dit long sur les tortionnaires et leurs méthodes. Ce camps est avant tout un réservoir de main d'oeuvre destiné aux usines Allemandes telles que Krupp, Siemens, Heinkel, Speer et tant d'autres. le but n'est pas d'exterminer tout de suite mais de tuer à la tâche les prisonniers pour en tirer le maximum de profit. Même si une station d'extermination : la station Z, trône dans le camps. Celle ci est destinée à éliminer ceux qui ne pourront pas servir de main d'oeuvre car trop faibles à l'arrivée. Pas que les plus forts y soient bien traités, loin de là, ils mourront plus lentement mais tout aussi sûrement.
Un document repris dans le livre est à ce sujet assez éloquent : il s'agit de la grille des tarifs mis en place par les nazis pour la « location des prisonniers » aux usines. le calcul de la rentabilité d'un détenu est basé sur une durée de vie moyenne de 9 mois. Très pragmatique le document prévoit dans le calcul de la rentabilité sur ces 9 mois « l'utilisation rationnelle du cadavre » à savoir les dents en or, les vêtements, les objets de valeur, sans oublier de déduire le coût moyen de l'incinération. Au total un détenu rapportera donc en moyenne 1 631 marks… On fait difficilement plus glauque et plus inhumain. Pourtant je vous assure que dans ces témoignages j'ai lu bien pire.

Entre sa création en 1936 et sa libération le 22 avril 1945, 204 537 prisonniers vont être retenus à Sachso, 100 167 détenus seront exterminés et 9000 mourront pendant les marches de la mort. Sans compter ceux qui mourront des suites des mauvais traitements après cette date et tous ceux qui sont morts sans laisser de trace, les archives ayant été partiellement brûlées par les Allemands pendant la débâcle.

Entre ces deux dates des hommes ont vécu l'enfer dans l'enceinte de Sachso. Ce sont principalement des triangles rouge : opposants politiques. Beaucoup de français furent envoyés dans ce camps il y eut les gueules noires du Nord qui avaient fait grève pour protester contre leurs conditions de travail et le gouvernement de Vichy. En 1941, 300 d'entre eux arrivèrent à Sachso. Il y eut également les fameux Nuit et Brouillard qui étaient des résistants et des saboteurs voués à une mort certaine mais dont personne ne devait connaître le sort. C'est également à Sachso que les SS punis pour un motif quelconque étaient envoyés, de même pour les antifascistes Allemands. Au nombre des détenus il y avait aussi de nombreux triangles vert, à savoir des prisonniers de droit commun.

ce livre recueille 300 témoignages de français qui ont survécu et qui se sont sentis le devoir de raconter. Il se sont alors fait violence pour affronter leurs cauchemars et raviver leurs douloureux souvenirs. Très bien construit le livre s'articule autour de ces témoignages et nous parle de l'internement dans ce camp, du voyage en convois jusqu'aux marches de la mort en passant par la quarantaine à l'arrivée dans le camp, les différents kommandos existants, le revier, les tentatives d'évasion, le fonctionnement administratif absurde mais terriblement efficace, la résistance au sein du camps (son organisation et ses actions) et enfin la libération.

En presque 600 pages beaucoup de choses ont été écrites, instructives mais surtout douloureuses et révoltantes. Pourtant le récit n'est pas larmoyant il est animé de la détermination de tous ces rescapés. Ce que j'en retiendrai surtout c'est la force de caractère de ces hommes à qui on a voulu nier toute humanité. Affamés, maltraités, ils ne se sont pas contentés de survivre comme les SS s'y attendaient. Ils n'ont cessé de faire preuve de courage et de lutter d'une manière qui les rend presque sur-humains. L'importance de la solidarité entre les détenus, même de nationalité différente, est frappante. Alors que les SS tentent de diviser les prisonniers et de les dresser les uns contre les autres dans un chacun pour soi fatal (auquel certain d'ailleurs céderont, c'est inévitable) la plupart ne tombent pas dans le piège et mettent en place une solidarité à la fois salvatrice et dangereuse car cela les amène à prendre des risques. L'exemple le plus marquant est « la soupe des français ». Les français ayant le droit de recevoir des colis (ce qui n'est pas le cas des russes ou des juifs par exemple) ils vont mettre leurs contenus en commun (enfin ce qu'il en reste après le pillage des geôliers). Avec la complicité des cuistots français ils vont permettre à l'ensemble des détenus de profiter d'un supplément de soupe.
Si nourrir les corps est primordial ils n'en oublient pas la lutte qui les a amené au camp et pendant 22 mois un bulletin quotidien relayant les dernières informations circulera dans le camp grâce à la résistance. S'ils avaient été pris c'était la mort à coup sur. Ils profitent également d'être employés dans les usines pour s'adonner au sabotage avec une ruse et une intelligence incroyables. Ils seront d'ailleurs aidés par de nombreux allemands au triangle rouge. C'est ainsi que l'un des avions de la Luftwaffe le E177 fut un véritable désastre tellement il avait été saboté à toutes les étapes de la chaîne.

Dans les ateliers les prisonniers s'adonnent aussi à la perruque : il s'agit de fabriquer un objet qui n'a rien à voir avec le travail de l'usine et de le mettre en évidence (une pipe, un coupe papier, un jouet d'enfant...). Souvent les SS en redemandent et les ouvriers se retrouvent à faire « la perruque » au lieu de leur travail. le bénéfice est double : ne pas travailler c'est saboter et faire la perruque est moins pénible que le travail habituel.

Résister c'est aussi ce médecin qui refuse d'être le médecin personnel des SS renonçant ainsi à de la nourriture plus abondante et un peu moins de risques de se faire abattre. Invoquant le serment d'Hippocrate il refusera en disant qu'il soignera tous le monde sans distinction. Par ce choix il améliorera grandement la qualité de vie des pensionnaires du revier et sauvera de nombreuses vies.

Un livre très riche de connaissances sur cette période de l'Histoire, difficile à lire humainement parlant mais nécessaire. L'Amicale des anciens déportés et famille de disparus d'Oranienburg-Sachsenhausen et ses kommandos le dit très bien : « Nous voudrions que la petite flamme de l'esprit de Sachso ne s'éteigne pas, qu'elle témoigne contre l'oubli et pour le souvenir de nos camarades disparus, qu'elle indique le chemin de la vigilance et de l'union nécessaire pour empêcher le retour d'un passé abhorré. Nous voudrions qu'elle brille avec toutes les autres qui, en France et dans le monde, symbolisent la volonté de dignité, de justice, de progrès des hommes, le désir de liberté, d'indépendance et de paix des peuples. Par ce livre, nous vous la confions. »
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Excellent ouvrage collectif sur la Déportation écrite par les déportés survivants eux-mêmes après un long travail scientifique.
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
Et puis sur la place, j'aperçois soudain une toute petite chose inhabituelle que je vais pouvoir grossir volontairement de manière démesurée, pour n'être plus imprégnée que d'elle, pour chasser l'absurde, pour ne plus voir ni entendre pendant quelques minutes les coups pleuvoir, la veulerie et la haine s'assouvir, la dégradation de l'espèce humaine s'accomplir...
Là, devant moi, sur le sol poussiéreux bouleversé par les bottes des geôliers, un magnifique scarabée doré, gros comme un pouce, avance avec peine sur la terre sèche et sablonneuse qu'il entraîne sous lui en faisant scintiller ses élytres cuivrés. Quel spectacle féerique! Quelle perfection! Est-il vraiment de notre monde? Sommes-nous encore du sien?
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Il ne faudra jamais oublier cette fraternité et ne jamais cataloguer les autres peuples, en particulier le peuple allemand, comme tout bon ou tout mauvais.
(Au sujet de l'entraide qui se met en place entre les prisonniers quelle que soit leur nationalité).
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