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Stéfanie Delestré (Préfacier, etc.)Hervé Delouche (Préfacier, etc.)
EAN : 9782070789702
112 pages
Joëlle Losfeld (24/03/2005)
4.11/5   19 notes
Résumé :

"On votait pour la paix, on payait pour la guerre. Partout les innocents, enfournés par wagons, roulaient dans les nuits calmes. Et ceux qui pleuraient le faisaient en silence."Inhumain. C'est l'adjectif qui revient le plus souvent à l'esprit lorsqu'on lit ce texte. La marche au canon, c'est la lente dégradation de l'honneur, la guerre que l'on fait à coups de canons (celui qui tue et celui que l'on boit pour oublier les atrocités... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
"On m'avait mis dans la guerre. On y avait mis le monde. Pourquoi ? Pourquoi ça ? on m'avait mis de force dans cette guerre que je ne voulais pas."Le seconde classe Augustin Marcadet mobilisé est démoralisé...
flanqué dans cette guerre en compagnie de ses compagnons d'infortunes. Transbahuté, ballotté ,dans des wagons à bestiaux, voué à tourner en rond, attendre des plombes les ordres de gradés planqués qui les considèrent comme de la chair à canon.
De quoi prendre la poudre...d'escampette !
Jean Meckert alias Jean Amila connu pour ses polars antimilitaristes comme le Boucher des Hurlus et La Lune d'Omaha avait déjà tiré à boulets rouges en 1941 dans la marche au canon.
En une centaine de pages, Jean Meckert raconte le vécu de la débacle de 40, le quotidien, l'attente, la peur, l'écoeurement et l'angoisse. Les ordres bidons le dépassent, la connerie humaine aussi.
On pense souvent à Céline et à son Bardamu.
Les inédits et introuvables de Jean Meckert réedités aux éditions Joëlle Losfeld offrent d'autres pépites, j'espère aussi bien écrites, qui viennent s'ajouter de facto à ma pile à lire qui ressemble maintenant, la poisse, à la tour de pise.
La marche au canon, ça boom !
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3 septembre 1939 : Augustin Marcadet et sa bande sont mobilisés. Ils sont acheminés vers les frontières de l'Est par wagons à bestiaux. le voyage est long, interminable. Mais rien ne se passe comme prévu : l'état-major balance, hésite, tergiverse, ne semble pas maitriser la situation. Les trouffions subissent les atermoiements de leurs supérieurs et c'est la débâcle, le doute, la désillusion : c'est la drôle de guerre.

10 mai 1940 : L'armée allemande lance son offensive et fait plier la France en 6 semaines : c'est la blitzkrieg, l'humiliation.

24 juin 1940 : Pétain reconnait la défaite en signant l'armistice. Les français se jettent sur les routes à mesure que l'ennemi avance vers la capitale : c'est l'exode.

Au travers du personnage de Marcadet, Jean Meckert livre un regard cru sur ce marasme. Ses mots sont vrais, sans fioritures.

Largement inspiré du vécu de l'auteur, ce récit de 1940 n'a pas pris une ride ! Une version non romancée de l'excellent « Suite française » d'Irène Némirovsky qui peut se lire d'une traite !
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Avant de devenir l'auteur de romans noirs Jean Amila, Jean Meckert a écrit plusieurs romans sous son vrai nom, dont plusieurs ont connu un grand succès chez Gallimard pendant la seconde guerre mondiale.
Celui-ci, pourtant, a été refusé entre 1940 et 1955.
En le lisant, on comprend aisément pourquoi, tant il donne une image désastreuse de la pauvre armée française durant la débâcle de 1940 : médiocrité, découragement, alcoolisme, défaitisme, désertion des officiers, pillage et même brutalités sur des civils français.
S'il était impossible de publier un tel réquisitoire sous la France de Vichy, le traumatisme devait encore être trop frais dans les 10 ans qui ont suivi la guerre pour donner à voir ce genre d'image déplorable qui devrait donner à réfléchir à l'auteur de l'essai "comme des lions", que j'ai lu au début de l'année, et qui, derrière le projet louable de réhabiliter la combattivité de certaines troupes françaises en 1940, a tendance à passer un peu trop sous silence cette débâcle qui fut réelle.
Si Meckert choisit le "roman" pour son récit, dont le narrateur ne porte pas son nom, on ne peut se méprendre sur son aspect autobiographique, tant les situations décrites sentent le vécu. D'ailleurs, Meckert était incorporé dans le génie comme le narrateur de l'histoire, a effectivement été affecté sur des voies de chemin de fer, et a lui aussi fui en Suisse pour échapper à la captivité.
Un court roman édifiant, dans lequel l'auteur manifeste un style à la fois très sûr et bien à lui, et où il expose déjà les convictions antimilitaristes qu'il exprimera toute sa vie.
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Jean Meckert est sans doute plus connu sous son pseudonyme Jean Avila, notamment par les lecteurs de la Série Noire, qui publia à partir de 1950 nombre de ses oeuvres. Les Editions Joelle Losfeld ont la générosité de nous offrir une séance de rattrapage en rééditant ses premiers romans, dont certains étaient jusqu'à présent introuvables, à l'instar de "La marche au canon", écrit, suppose-t-on, au début des années 40.
L'intrigue en est réduite à presque rien : un jeune soldat part faire la guerre (la seconde). Il n'a même pas le temps de connaître un semblant d'affrontement avec l'ennemi que c'est la débandade, un exode désordonné où chacun s'efforce de sauver sa peau.

Cela commence de manière presque guillerette, l'ironie au départ point à peine lors de l'évocation rigolarde de l'enrôlement, dont la dimension anecdotique culmine avec l'essayage de l'uniforme. Mais une forme d'angoisse s'insinue assez vite bien que de manière subreptice, notamment sous la forme du "mugissement sinistre des sirènes" s'infiltrant dans les conversations au bistrot.

Toute idée de grandeur est absente de la restitution d'une morne routine vampirisée par les gestes pathétiques de la survie au quotidien. Aux atmosphères épaisses et gueulardes des bistrots malpropres où les hommes boivent jusqu'à plus soif dans les odeurs de bière et de tabac, succèdent la promiscuité crasseuse des corps puants, les transports en wagons dans lesquels les troupes s'entassent comme des bestiaux, la brutalité des bombardements qui en l'espace de quelques minutes, laissent derrière eux leur lot de cadavres et d'estropiés…

Nulle grandiloquence non plus dans l'évocation de la soudaine vulnérabilité de ces hommes dépassés par un conflit dont le sens et le but leur échappent, ramenés à l'état d'enfants apeurés, auxquels on fait perdre l'habitude de penser. de chaque page du texte sourd l'ampleur de l'absurdité et de la violence de la guerre, du décalage entre rhétorique patriotique et réalité du terrain, de la fracture entre élites décisionnaires et peuple qui subit.

En revanche, comme la voix de Jean Meckert est prégnante et singulière ! Il met sa gouaille et sa poésie au service d'un sens aigu de l'observation, utilisant des détails ou des images qui parfois surprennent mais se révèlent toujours justes, et surtout très évocateurs. Avec un parler populaire qui donne à son discours une apparente -mais fausse- naïveté, il exprime à la fois son immense tristesse et sa rancoeur face à l'injustice faite à sa jeunesse et à celle de ses camarades. le rythme heurté, sans temps mort, qui anime son texte, le rend à la fois très vivant et quasi hypnotique, tandis que le caractère parfois désuet que peut prendre sa parole pour le lecteur d'aujourd'hui accentue son pouvoir immersif.

"La marche au canon" est d'ailleurs inspiré de la propre expérience de l'auteur qui, lors de sa mobilisation transcrivit, sur le vif, ses impressions.

"On était de pauvres gars. On avait nos volontés vivantes perdues sous le poids des forces vieilles".
Lien : https://bookin-ingannmic.blo..
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Une vue détonante de la défaite de 1940. Mais cela sent tellement le vécu. Cela fait du bien de lire de tels livres.
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Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
Préface

(...)
Cela , c'est la version officielle, forcément optimiste. Mais dès les premières pages de ce roman, Meckert évoque de manière bouleversante le drame de tous les départs au combat, celui de toutes ces jeunesses brisées par des conflits et des enjeux qui les dépassent. " Par wagons, par centaines de milliers de wagons à bestiaux,le monde partait ainsi en guerre. Et les nouveaux soldats partout dormaient, chantaient, vomissaient, ou pleuraient dans la guerre qui pointait. Partout tragique, puni contre sa destinée , sans vouloir et savoir, on partait innocent. On fabriquait la foudre, on avait tout en nous, on votait pour la paix, on payait pour la guerre. Partout les innocents, enfournés par wagons, roulaient dans les nuits calmes.Et ceux qui pleuraient le faisaient en silence"

Stenéfanie Delestré
Hervé Delouche
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- En somme, disait un gars, ceux qui veulent se faire tuer pour l'honneur, levez le doigt !
- L'honneur de l'armée, disait un autre, je m'assois dessus !
Ces gars là étaient censés.
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Un jour, le canon a grondé. Un premier coup a secoué l'horizon. De tressautement local en pâleurs concentriques, on nous a dit, c'est la guerre !
Immédiatement et sans délai, je suis parti à la guerre. Il me fallait des allures de petit courage. Elle avait des lettres, la bonne guerre, des lettres hautes dans le journal. On avait fait sa publicité. C'était quelqu'un, la guerre aux lettres hautes. On était badaud, bon badaud moral. On allait voir la guerre.
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Dans tout ce qu'on avait prétendu me faire faire, je n'avais rien compris ! Rien partout ! Je savais seulement que j'étais devenu quelque chose d'insignifiant, de négligeable, qu'on pouvait tuer comme un moucheron ou une fourmi !
Mais je revendiquais aussi ma part de pauvre héros, dans ce conflit où je n'avais rien vu, rien compris, et où je m'étais seulement mis là où l'on m'avait dit.
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On n'était pas des héros, on le savait. L'écoeurement était complet, sans qu'on dise. On flottait, on avait peur. On sentait que l'ultime assaut était proche et pouvait nous étendre en charognes au moment où la guerre était si près de sa fin. Ah non! Vivre d'abord ! L'honneur de l'armée n'était pas entre nos mains ! Et si tous les sous-officiers s'étaient cavalés, ces bien-pensants, ces bien-payés, ce n'était pas à nous de faire leur métier !
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