C'est ce regard-là que je revois partout, plutôt que vos yeux de cette nuit dont mon souvenir retrouve surtout la forme et non le regard.
La tour Magne tournait sur sa colline laurée
Et dansait lentement, lentement s’obombrait
Tandis que des amants descendaient de la colline
La tour dansait lentement comme une sarrasine.
Le vent souffle pourtant il ne fait pas du tout froid
Je te verrai dans deux jours et suis heureux
comme un roi
...
Je pense à tes cheveux qui sont mon or et ma gloire
Ils sont toute ma lumière dans la nuit noire
Et tes yeux sont les fenêtres
d’où je veux regarder
La vie et ses bonheurs la mort qui vient aider
Ma chérie, mon amour si grand pour toi trouve moyen de grandir encore dans l'absence et il grandira sans cesse quand nous serons l'un près de l'autre. Il est comme un grand oiseau qui planerait plus haut que les aéroplanes, il monte sans cesse, oiseau angélique, dans les sublimes régions de l'éther - pas celui de Nice qui sonnait toutes ses cloches à toute volée à tous tes sens - Et c'est plus haut que l'éther même qu'un jour, purs esprits nous nagerons éternellement unis dans l'éternelle volupté de la vie la plus forte, la plus douce, la plus tendre, après nous être aimés par tous nos sens, si aiguisés pourtant, ô ma chérie infiniment sensible et infiniment voluptueuse.
Après j’ai eu en me promenant avec vous le sentiment le plus triste de ma vie celui de vous aimer et de ne pas encore être ami d’amitié avec vous. Et je me suis un moment demandé et je me le redemande encore si ce n’est pas cela qu’il faudrait ambitionner par-dessus tout.
Je donne à mon espoir mes yeux, ces pierreries
Je donne à mon espoir mes mains, palmes de victoire
Je donne à mon espoir mes pieds, chars de triomphe
Je donne à mon espoir mes narines qu'embaument les fleurs de la mi-mai
Je donne à mon espoir mon coeur en ex-voto
Je donne à mon espoir tout l'avenir qui tremble comme une petite lueur au loin dans la forêt
(Lettre 155 - Extrait - p.368)
Mon Lou, la voix des obus est un véritable miaulement, ils miaulent comme des chats amoureux. C’est fantastique.
Les neuf portes de ton corps sont les entrées merveilleuses du plus beau, du plus noble palais du monde. Que je l’aime ma chérie. J’oubliais tes deux yeux chauds et salés comme la mer et plus profonde que ses gouffres. Neuf portes, ô mes neuf muses, quand vous entrouvrirai-je encore ? Ma chérie, ma chérie, tu ne peux pas imaginer à quel point je te voudrais
Je t'embrasse, je baise tes petits seins roses et insolents qui semblent des brebis broutant des lys et des violettes .
Au demeurant, je vais en écrire un pour vous tout exprès et nul doute qu'inspiré par une passion aussi violente et puisque c'est de vous qu'il s'agit, d'une essence aussi délicate, je n'écrive là mon livre le plus rempli de cette humanité qui est à mon gré la seule chose digne de toucher les hommes et d'être recherchée par un écrivain.
J'aurais voulu déjà écrire un poème pour vous. Il m'eût été trop personnel et n'eût dépeint que les sentiments que vous avez éveillés en moi et aussi votre grâce. Mais, en somme je ne connais rien de vous sinon que je vous trouve infiniment jolie et digne d'être aimée sans espérance de retour.
Je voudrais tout savoir de vous et je ne sais rien, sinon que vous avez été mariée et ne l'êtes plus.
26 - [L'imaginaire/Gallimard, p. 14]
La nuit
S'achève
Et Gui
Poursuit
Son rêve
Où tout
Est Lou
On est en guerre
Mais Gui
N'y pense guère.
La nuit
S'étoile et la paille se dore :
Il songe à Celle qu'il adore
(Nuit du 27 avril 1915)