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Critique de mimipinson


« J'avais déjà commencé mon autobiographie à Cuba, et je l'avait intitulée Avant la nuit, car je devais l'écrire avant la tombée de la nuit, puisque je vivais fugitif dans un bois. Maintenant, la nuit avançais de nouveau, de façon, de façon plus imminente. C'était la nuit de la mort. Maintenant il fallait vraiment que je finisse mon autobiographie avant la nuit. »


Mon voyage à Cuba ne m'emportera ni vers les plages, ni vers l'exotisme insouciant qui peut occuper le touriste en mal de soleil et de chaleur .Bien au contraire, il me catapultera au coeur de la dictature exercée par un homme depuis des années sur une population à bout de souffle.
Reinaldo Arenas, fait partie de ces écrivains cubains qui ont écrit la révolte, le rejet de ce régime, et qui en ont payé le prix fort.
J'ai choisi, un peu par hasard, cet ouvrage qui n'est pas un roman, mais une autobiographie, grâce à la rediffusion cet été du film que Julian Schnabel a réalisé à partir de ce livre.
Cette autobiographie a quelque chose d'original, dans le sens où elle n'a rien de linéaire, de chronologique. Elle commence par la fin de la vie de l'écrivain qui se sait malade et préfère la mort à la déchéance, et se termine par une lettre d'adieu qui n'est rien d'autre qu'un testament politique et une dernier réquisitoire contre celui contre lequel il se sera battu à sa manière toute sa vie.
« J'exhorte le peuple cubain de l'exil comme de l'ile à continuer à lutter pour la liberté. Môn message n'est pas un message de défaite, mais de lutte et d'espérance. Cuba sera libre. Moi je le suis déjà. »
Le reste, n'est rien d'autre que la Vie, avec un V majuscule ; une vie vécu à 100 à l'heure, une vie croquée par les deux bouts, une vie éprise de liberté et de beauté absolue, une vie qui finalement sera sa perte.
Cette biographie, est donc plutôt thématique que linéaire : 70 chapitres, pour la plupart courts, voire très courts. Seuls deux seront plus copieux :L'érotisme, et, La prison. Et cela n'est pas un hasard
70 chapitres, 70 tableaux….Une autobiographie atypique, que Reinaldo écrit par petites touches, comme on peint au petit pinceau. C'est court, c'est clair, c'est précis.
La thématique, plutôt que la chronologie, reflète la personnalité bouillonnante de cet écrivain. Il sera marqué très tôt par sa relation avec sa mère, et sa relation aux femmes : il ne connaît pas son père, et sera élevé par sa famille maternelle.

Ce qui frappe d'emblée, c'est que très tôt, il sera pris d'obsessions érotiques, et une attirance marquée et assumée pour les garçons, puis les hommes. Rajoutons à cela, une persécution systématiques des homosexuels, et nous comprendrons l'importance qu'il donnera à l'érotisme dans son oeuvre, en ne cachant rien dune sexualité débridée, décomplexée. Il l'écrira dans des termes explicites, souvent très crus, qui pourraient à premier abord passer pour de la vulgarité, mais qui venant d'un homme me gène moins que d'une femme, et qui exprime surtout la révolte contre l'oppression, le désir de liberté absolue. Cet homme a passé un certain temps en prison, ou dans des camps de travail, et cela explique aussi l'importance qu'il a donnée à ce thème dans son texte.

Reinaldo dresse tout au long de ces pages, qui se lisent avec beaucoup de facilité, un tableau très éloigné du cadre idyllique que certains viennent chercher à Cuba. Et c'est cela qui m'a fasciné, la dénonciation d'un régime exsangue, mais toujours debout, qui persécute, traque, affame, assoiffe. Un régime qui a fait de ses intellectuels, des criminels, qui a fait des homosexuels des animaux que l'on enferme dans les pires conditions. Il rend hommage à de nombreux écrivains cubains, notamment Guillermo Rosares (cf. Mon ange).

« Cette fois, pour tous les intellectuels cubains la nuit noire était venue. Impossible désormais d'envisager de quitter le pays, car dès 1970 Fidel avait proclamé que tous ceux qui le souhaitaient étaient déjà partis ; il faisait ainsi de l'ile une prison où tout le monde, d'après lui, était heureux de vivre. »
Mais, l'exil n'est pas mieux ressenti. Si l'auteur a pu, s'échapper, ce n'est pas pour autant, que la vie en a été meilleure pour lui. Miami, la ville la plus proche de Cuba, ne lui convenait pas. New-York sera pour lui synonyme de maladie et de mort.

« Certes, dix ans après, je m'aperçois que pour un expatrié il n'y a aucun endroit où l'on puisse vivre ; il n'existe aucun endroit, car celui où nous avons rêvé, où nous avons découvert un paysage , lu notre premier livre, eu notre première aventure amoureuse, demeure l'endroit rêvé ; en exil, on n'est plus qu'un fantôme, l'ombre de quelqu'un qui ne peut jamais atteindre sa propre réalité ; je n'existe pas depuis que je suis en exil ; depuis lors, j'ai commencé à fuir de moi- même. » propos écrits en 1990…..20 ans après ,où en est Cuba ?????

Cela restera une lecture marquante, grave, qui donne envie de secouer beaucoup de choses. Elle peut rebuter certains, voir les choquer. En ce qui me concerne, j'ai beaucoup apprécié ce livre. J'attendais de l'avoir lu pour visionner le film ; et lirai très certainement d'autres ouvrages de cet auteur.



Lien : http://leblogdemimipinson.bl..
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