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Critique de Apoapo


Le roman choral est difficile. Difficile, lorsque trois personnages seulement, fussent-ils aussi extraordinaires et marginaux et démesurés dans leur renfermement souffrant que ceux-ci, s'alternent dans une mise en scène, de structure triptyque, typique du théâtre moderne (par opposition au théâtre classique) où la parole/conscience et non l'action fait avancer le récit. Difficile aussi, lorsque le poids de la souffrance est tellement palpable, à chaque phrase, que le recours salvateur aux artefacts des sens, la vue des couleurs pour l'enfant sauvage qui deviendra peintre, l'odorat pour le clown faisant son deuil par des symphonies de parfums, ne suffit pas à soustraire le lecteur d'une influence émotionnelle au premier degré par moments presque dévastatrice. Il s'agit d'un recours salvateur tout de même, car la peinture aura pour l'enfant sauvage exactement le même effet révélateur qu'une psychanalyse ; le regard porté par celui-là sur Mlle B., aussi blessant de réalisme soit-il, lui rendra pour la première fois une ombre d'humanité à elle ; les soins au parfum de chocolat chaud que Giacomo déverse sur l'enfant exorciseront sa propre angoisse du Sort en lui révélant qu'il s'agit de l'interruption - réversible - d'une transmission par la filiation, qui ne lui était pas échue par voie biologique...
Trois déchirements dans les relations de filiation, remarquera-t-on ; que l'analyse avisée de la jeune psychologue sait faire remonter loin, à plusieurs générations.
Néanmoins cette première esquisse d'évidence est loin d'épuiser tout le potentiel d'interprétation renfermé par cet énorme opus, dont l'originalité déroute autant que la densité des images et des sentiments ; et mon propre bouleversement m'empêche de me soustraire à un questionnement sans réponses qui est quantitativement bien plus important que les quelques ébauches ci repérées.

Cit. finale :
Les gens ne savaient pas ce que c'était que cette ombre, ils en avaient peur, pensez donc, disait-il, si on avait représenté un vrai monstre, vert ou diabolique, les gens achèteraient, ils ont l'habitude et puis ça purifie des vieux démons, mais cette ombre grise on ne savait pas ce qu'il y avait à l'intérieur, on pouvait y mettre le pire, peut-être même qu'il n'y avait rien, c'était le dessin d'une absence plus monstrueuse qu'un monstre, et ça, c'était impensable. (p. 251).
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