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Thomas Gomez (Éditeur scientifique)Dorita Nouhaud (Autre)Georges Pillement (Autre)
EAN : 9782080704559
350 pages
Flammarion (07/01/1993)
4.04/5   69 notes
Résumé :
Malgré le refus de Miguel Angel Asturias d'être considéré comme un auteur engagé, Monsieur le Président est tout entier habité par cette volonté de dénoncer l'inhumanité, la bestialité et l'injustice d'un régime dictatorial. Une barbarie qui trouve sa genèse dans l'assassinat d'un homme de main du pouvoir par un simple d'esprit, souffre-douleur de celui-ci. Ce crime déclenche bientôt une... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (11) Voir plus Ajouter une critique
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Dès les premières pages, je n'ai pas accroché à Monsieur le Président. Avoir été sage, j'aurais refermé le livre au lieu de tenter à tout prix de passer au travers, je l'aurais mis de côté pour pouvoir mieux le ressortir dans cinq, dix ans. Malheureusement, j'ai persisté et ma mauvaise première impression m'a accompagné tout au long de ma lecture. Et les critiques élogieuses que je lis (que j'ai lues trop tard, hélas) me le font regretter, me signifient que je suis passé à côté de quelque chose de formidable. Un rendez-vous littéraire manqué !

J'ai d'autres raisons de m'en désoler. Cela faisait un certain temps que je me promettais la lecture d'une oeuvre de Miguel Angel Asturias, grand auteur guatémaltèque, récipiendaire du prix Nobel de Littérature, une légende du 20e siècle. Vraiment pas n'importe qui ! Et son Monsieur le Président fait même partie des 1001 livres qu'il faut avoir lu, une belle porte d'entrée à son oeuvre. Je voulais l'aimer avant même le commencer…

Ce roman polyphonique critique la dictature. le Guatemala a dû subir le joug de quelques de ces tyrannies, comme d'autres pays d'Amérique du Sud. Et d'ailleurs dans le monde. Ainsi, Monsieur le Président a une portée universelle. On y voit les dérives de tels systèmes et comment les gens ont peur, tentent de survivre mais même les innocents finissent par en souffrir. C'était glauque et démoralisant. Je sais, je sais, c'est le propos de l'auteur ! En même temps, les aventures décrites avaient cet air d'irréel et d'étrangeté.

Si cette oeuvre était instructive, je n'éprouvais pas vraiment de plaisir à le lire, je lui trouvais un je-ne-sais-quoi de claustrophobique. C'est probablement le style qui m'a rebuté. Un roman qui n'en est pas vraiment un, constitué d'une multitude de chapitres courts qui mettent de l'avant des personnages nombreux (c'est une des rares fois où je n'arrivais pas à retenir les noms), bigarrés et pas partuclièrement sympathiques. Et je ne parle pas de l'intrigue que j'ai eu de la difficulté à cerner. Une véritable histoire labyrinthique !
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C'est une période historique vécue par Asturias durant son enfance et son adolescence, la dictature d'Estrada Cabrera, qui est le support de cette fiction. Elaborée selon trois mouvements, dont les titres insistent sur la temporalité indéfinie de la dictature, cette oeuvre reconstruit à merveille le climat de dégradation morale d'une société broyée par la terreur.
Le récit s'organise autour de l'assassinat d'un colonel proche du dictateur, prétexte pour entamer la persécution de deux opposants au régime, un général et un avocat. A cette trame s'ajoute l'histoire d'amour entre le favori du dictateur et la fille du général opposant. A partir de ces deux axes narratifs, le roman incarne tout à la fois l'univers misérable des laissés-pour-compte, la cruauté du régime totalitaire, la délation comme sport national et le contrôle policier de la population. L'ombre du dictateur parcours tout le roman au travers des agissements de ceux qui servent son pouvoir.
Si Asturias donne une dimension esthétique au langage populaire guatémaltèque, enchâssé dans un cadre culturel bien précis, la réalité qu'il construit dans cette oeuvre devient universelle, s'attachant à montrer les ressorts internes des êtres humains dans un environnement autoritaire. D'un point de vue littéraire, on sent les influences de l'onirisme surréaliste et de l'oralité qu'Asturias a expérimenté lors des 10 années qu'il a passées à Paris. Ce roman brillant se pose comme l'archétype littéraire du dictateur latino-américain en renouvelant la structure du récit, le langage et la temporalité.
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El Señor Presidente
Traduction : Georges Pillement & Dourita Nouhaud
On ne sort pas indemme de ce roman où la cruauté et une fatalité implacable s'acharnent sur l'intégralité des personnages et dans des proportions qui rappellent tout ce que vous avez jamais pu lire sur les tortures pratiquées par les régimes totalitaires.
Guatémaltèque, Asturias nous dépeint évidemment une dictature latino-américaine vendue aux USA et, par conséquent, conservatrice dans l'âme. Mais ce que n'avait pas prévu cet écrivain qui reçut le Prix Lénine de la Paix en 1966, c'est que la puissance de son évocation est telle qu'elle en arrive à bannir les frontières et que, en dépit du contexte géographique, son "Monsieur le Président" finit par symboliser la Dictature à l'échelle universelle.
Quiconque a lu le "1984" d'Orwell ne pourra s'empêcher d'effectuer le parallèle entre le roman futuriste et essentiellement dirigé contre la dictature stalinienne du Britannique et celui, presque intemporel et dirigé contre une tyrannie pro-capitaliste, d'Asturias. Mais là où Orwell expliquait l'emprise de Big Brother sur son peuple par sa présence permanente, via la télévision et les dispositifs de surveillance, dans le foyer de chacun, Asturias imagine un Président qui voit tout, entend tout, devine tout et finit toujours par tout savoir tout simplement parce qu'il est le Mal incarné.
A propos de son oeuvre, l'écrivain guatémaltèque fut le premier à évoquer le "réalisme magique" qu'il tenait à développer autant dans son style (d'un lyrisme déconcertant) que dans son univers guatémaltèque. Il le reliait non pas aux Surréalistes français - qui l'influencèrent pourtant beaucoup mais à qui il reprochait d'être trop intellectuels - mais aux origines pré-colombiennes de sa culture. de fait, "Monsieur le Président" peut se lire comme un hymne de mort, à la gloire de ces dieux qui, après avoir créé les quatre premiers hommes, furent pris de peur à l'idée que leurs créatures pourraients les supplanter. Ils les privèrent alors de certains sens et les rendirent mortels.
Il semble que la religion maya, surtout après l'arrivée des Toltèques, ait eu quelques rapports avec celle des Aztèques. Or ces derniers avaient un faible accentué pour les sacrifices humains particulièrement sanglants. En ce sens, le roman d'Asturias offre une véritable manne à cette espèce de Moloch maya que représente le Président.
L'intrigue ? ... Disons que le confident du Président, Miguel Visage-d'Ange, tombe amoureux de la fille d'un général qui doit partir en exil sur l'ordre du dictateur. A partir de là, le malheureux, qui était pourtant non seulement beau mais aussi "méchant comme Satan", se met à jouer un double-jeu qui le mènera à une fin abominable.
Le tout baigne dans une atmosphère de cauchemar, non pas un cauchemar à la Kafka, froid, net, précis et pourtant absurde mais un cauchemar réaliste, aux couleurs flamboyantes des Tropiques, où les misérables se font piétiner dans la boue et le sang et où le soleil s'éteint à jamais pour ceux qu'a condamnés la vindicte cruelle du Président.
Si vous avez l'estomac bien accroché, ce livre - qui est un grand, un très grand livre - est pour vous. Sinon, abstenez-vous. Avec sa description des mendiants de la Porte du Seigneur, la première page, au reste, vous renseignera déjà sur vos capacités à aller de l'avant. ;o)
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Dans un état d'Amérique latine, l'ombre tutélaire du Présidente, règle le cours des âmes et le sort des destinés individuelles: permanent est le choix cornélien entre la compromission ou la mort.

Bien que cela ne soit pas précisé, il semblerait que la figure du Présidente soit fortement empruntée à celle du dictateur guatémaltèque Manuel Jose Estrada Cabrera, qui sévit durant l'enfance et la jeunesse de l'auteur. L'imprécision voulue quand aux lieux de cette histoire et à la personne de l'autocrate, permet à cette chronique atroce de prendre un tour plus universel, que l'histoire mouvementée de nombreux pays d'Amérique latine est fâcheusement là pour confirmer.

Cette oeuvre polyphonique illustre éloquemment les mouvements obscurs de la nature humaine qui fermentent sous un régime dictatorial. La peur exacerbe les instinct les plus bas, la foire aux places d'honneurs et au lucre révèle les personnalités dans leur abjection et leur cruauté. Mais c'est par sa remarquable richesse d'invention d'image et du langage que ce roman est mémorable : finesse prodigieuse dans l'analyse des sens, proche de l'hyperesthésie; éruption maîtrisée de l'irrationnel et du mystique indigène dans le cours du récit.
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"Monsieur le président" est un roman sur les violences et les perversions causées par une dictature dans un pays imaginaire d'Amérique centrale. Il a été publié en 1946, écrit par le prix Nobel guatémaltèque 1967, Miguel Asturias

Roman difficile, tragique, cruel, et violent, il ne manque pourtant pas d' l'humour noir (comme lorsque la chute d'un jeune "tambour" dans l'escalier fait sursauter tous les militaires qui commencent à tirer dans tous les sens - quand le jeune tambour sera découvert comme la cause du désastre, il sera exécuté, cela va sans dire)

Romans à éviter si on a le coeur sensible, après beaucoup de rebondissements, le héros, au départ "favori" du président, aura une fin tragique à laquelle il fallait s'attendre. Tout le roman est parcouru par un cruel jeu de chat et de la souris.

A travers ce roman difficile, l'auteur nous donne une leçon magistrale sur les horreurs d'une telle dictature, les mensonges, la perversion, les arrestations arbitraires, la vie tragique et remplie de peur de chaque citoyen. A qui faire confiance, à qui parler, l'allié d'aujourd'hui sera assassiné ou emprisonné le lendemain - et les prisons sont pleines...


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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
À cette heure de la nuit, les quartiers pauvres donnaient une impression de solitude infinie, de misère crasseuse avec un reste de laisser-aller oriental, de fatalisme religieux qui en faisaient une émanation de la volonté divine. Les caniveaux emportaient la lune è fleur de terre, et l'eau potable, dans les tuyaux, comptaient les heures sans fin d'un peuple qui se croyait condamné à l'esclavage et au vice.
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Sur les marches du Porche, on voyait [les mendiants], tournés vers le mur, compter leurs sous, mordre leurs pièces de nickel pour s'assurer qu'elles n'étaient pas fausses, parler seuls, avaler en cachette des croûtons de pain sec, passer en revue leurs provisions de bouche et de guerre car, dans la rue, ils marchaient sur pied de guerre, armés de pierres et de scapulaires. Jamais on ne les avais vu s'entraider. Avares de leurs restes comme tous les mendiants, ils préféraient les donner aux chiens, plutôt qu'à leurs compagnons d'infortune.
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- L'amour, ma petite, c'est comme les sorbets au sirop. Si on y goûte juste au moment où on vient de les faire, le jus abonde que c'en est un plaisir, il sort de tous les côtés et il faut se dépêcher de l'avaler, sinon il coule ; mais après! après, il ne reste plus qu'un bout de glace sans goût ni couleur.
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-(...) le crime est précieux, parce qu'il garantit au gouvernement l'adhésion du citoyen. La patrie?... Sauvez-vous, Général ! Je sais ce que je vous dis, il n'y a pas de patrie qui tienne... Les lois ? Quelle farce ! Sauvez-vous, Général, parce que la mort vous attend.
- Mais puisque je suis innocent !
- Ne vous demandez pas, Général, si vous êtes coupable ou innocent ; demandez-vous si vous pouvez ou non compter sur la faveur du maître, car un innocent mal vu du gouvernement est en pire posture qu'un coupable ! (p.87)
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La policía sacó a botar el cuerpo del Mosco en una carreta de basuras que se alejó con dirección al cementerio. Empezaban a cantar los gallos. Los mendigos en libertad volvían a las calles. La sordomuda lloraba de miedo porque sentía un hijo en las entrañas...
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Video de Miguel Angel Asturias (2) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Miguel Angel Asturias
Jacqueline Duhême Une vie (extraits) conversation avec Jacqueline Duhême à la Maison des artistes de Nogent-sur-Marne le 8 février 2020 et où il est notamment question d'une mère libraire à Neuilly, de Jacques Prévert et de Henri Matisse, de Paul Eluard et de Grain d'aile, de Maurice Girodias et d'Henri Miller, de Maurice Druon et de Miguel-Angel Asturias, de dessins, de reportages dessinés et de crobards, d'Hélène Lazareff et du journal Elle, de Jacqueline Laurent et de Jacqueline Kennedy, de Marie Cardinale et de Lucien Bodard, de Charles de Gaulle et du voyage du pape en Terre Sainte, de "Tistou les pouces verts" et de "Ma vie en crobards", de Pierre Marchand et des éditions Gallimard, d'amour et de rencontres -
"Ce que j'avais à faire, je l'ai fait de mon mieux. le reste est peu de chose." (Henri Matisse ). "Je ne sais en quel temps c'était, je confonds toujours l'enfance et l'Eden – comme je mêle la mort à la vie – un pont de douceur les relie." (Miguel Angel Asturias)
+ Lire la suite
>Littérature (Belles-lettres)>Littérature espagnole et portugaise>Romans, contes, nouvelles (822)
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