Oeil-de-chat

La haine aurait été plus facile. Avec la haine, j’aurais su comment me comporter. Elle est transparente, froide comme le métal, directe, inébranlable, contrairement à l’amour.

Le terme classique a fini par signifier pour moi : brisé, effacé. La plupart des choses grecques et romaines ont des parties de corps manquantes, et l'absence générale de bras, de jambes, de nez commence à m'énerver, sans parler de pénis arrachés. Et puis il y a tout ce gris, ce blanc [...].

Le temps n'est pas une ligne, mais une dimension ; comme les dimensions de l'espace. Si l'on peut modifier l'espace, on peut aussi modifier le temps.

Je n’ai pas encore appris que la chevalerie chez les hommes n’est que de l’idiotie chez les femmes : les hommes peuvent se tirer d’un sauvetage beaucoup plus aisément une fois qu’ils y sont pris.

Les jeunes femmes ont besoin de faire preuve d'injustice, cela fait partie de leurs rares moyens de défense.

Le temps n’est pas une ligne, mais une dimension ; comme les dimensions de l’espace. Si l’on peut modifier l’espace, on peut aussi modifier le temps. Et si l’on en savait suffisamment, on pourrait aller plus vite que la lumière, remonter dans le temps, et exister à deux endroits à la fois.
C’est mon frère Stephen qui m’a appris cela, à l’époque où il enfilait son chandail rouge foncé pour étudier et se tenait sur la tête afin que le sang irrigue mieux son cerveau et le nourrisse. Je ne comprenais pas ce qu’il voulait dire, alors, mais peut-être ne me l’expliquait-il pas très bien. Il prenait déjà ses distances par rapport à l’imprécision des mots.
C’est à ce moment-là que je me suis mise à imaginer le temps comme une forme, comme une chose que l’on pouvait voir, une série de transparents liquides superposés. On ne regarde pas en arrière le long du temps, mais plutôt au travers, comme dans de l’eau. Parfois, ceci remonte à la surface, parfois cela, et d’autres fois, rien. Mais rien ne disparaît.

Combien de temps avons-nous vécu ainsi, comme des nomades aux confins de la guerre ?
Aujourd'hui, nous avons voyagé longtemps et nous montons la tente assez tard. Nous sommes près de la route, au bord d'un lac anonyme aux berges irrégulières. (...) Le soleil s'attarde dans un long coucher frisquet, écarlate, saumon, puis d'un rouge vif et irréel de mercurochrome. La lumière rose demeure à la surface, tremblote, s'atténue, puis disparaît.

Les garçons sont fiers de leur habillement neutre, de leurs chaussettes tombantes, de leur peau salie et tachée d’encre : pour eux, la saleté a autant de valeur que les blessures ou presque. Ils travaillent dur à être des gars.

L'amour rend aveugle; mais lorsqu'il s'en va, il nous permet d'y voir plus clair que jamais. Comme une vague qui se retire et révèle ce qui a été jeté, a sombré: des bouteilles cassées, de vieux gants, des canettes rouillées de boissons gazeuses, des squelettes de poissons rongés, de voeux os.

Peut-être n’aurait on jamais dû faire connaître aux hommes leur propre humanité. Cela n’a servi qu’à les rendre plus astucieux, sournois, fuyants et difficiles à comprendre.