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Claude Grimal (Éditeur scientifique)Patrick Ferragut (Traducteur)
EAN : 9782868699503
267 pages
Actes Sud (28/01/1993)
3.99/5   670 notes
Résumé :
In the Country of Last Things est le titre original du Voyage d'Anna Blume. De ce " pays des choses dernières " où elle tente de survivre au froid, aux prédations et au désespoir, Anna Blume - venue chercher son frère disparu, William - écrit une longue lettre dont on ne sait si elle trouvera jamais son destinataire : ses errances dans une ville aux rues éventrées, sa lutte pour subsister parmi les " chasseurs d'objets " et les " ramasseurs d'ordures ", la mort omni... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (54) Voir plus Ajouter une critique
3,99

sur 670 notes
Une lecture atypique et troublante que ce voyage d'Anna Blume...
« Laissez toute espérance, vous qui entrez », voilà qui pourrait résumer la plus grande partie de ce récit sombre et crépusculaire aux allures de guide de survie en territoire hostile.
Fantasmagorie ? Allégorie ? Je me suis interrogé tout au long de ma lecture et à l'arrivée ma foi...
J'hésite à tenter de classer cette histoire, peut-être dans la rubrique étrange, ma frustration est réelle, j'avoue que je n'ai pas compris où l'auteur m'emmenait, et pourtant j'ai rarement été aussi concentré et attentif à une lecture.
Une lettre d'une exceptionnelle longueur, très peu de dialogues, le tout sous la forme d'une lente descente aux enfers en compagnie d'Anna Blume qui va faire l'expérience quasi exhaustive de tout ce que peut subir un être humain en termes de privations et de dangers, de peurs et d'inconforts.
Dans un univers où le chacun pour soi est une simple question de survie, où la moindre victoire sur l'adversité n'est qu'un simple sursis, Anna, alternant entre la plus farouche détermination et le lâcher prise qui la libérerait de son fardeau qu'est devenue sa vie, va nous emmener au plus profond du désespoir, aux limites de la folie.
La première partie est dure car sans justification, c'est pesant et parfois glauque car sans espoir, on s'éloigne de l'humain, où cela nous mène-t-il ?
Anna s'accroche, et le lecteur aussi, et elle a raison car sa première et seule action altruiste va lui permettre de réintégrer le monde des vivants, un sursis qui nous amène à la deuxième partie du récit pour d'autres épreuves, pour d'autres espoirs...
C'est ma deuxième lecture de Paul Auster et je continue à aimer le style, le moins que l'on puisse dire c'est qu'avec cette histoire on est sorti des sentiers battus, c'est même une sortie de route en fait :)
En passant je pense que le titre original " le pays des choses dernières " est plus approprié...
En conclusion je ne sais pas si j'ai aimé mais l'auteur m'aura intéressé jusqu'au bout, une expérience que je ne suis pas mécontent d'avoir vécue.
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Ouf! Quel voyage! Je viens de finir ce livre et cette effroyable plongée en enfer continue à me secouer de sentiments contradictoires : admiration devant l'art de Maître Auster, totale empathie pour les personnages plus vrais que nature, et surtout angoisse devant le miroir que ce livre pourrait être. Si la dystopie est un sous-genre de l'anticipation, un tel roman peut comme quelques grands monuments de la SF, s'avérer prophétique. Alors, il faudra se souvenir qu'en 1987, un certain Paul Auster a imaginé un monde à la fois fort lointain et à la fois très proche du nôtre ou du moins de ce qu'il peut devenir. Toutes les dystopies à la mode, écrites vite fait, et vendues au kilo, peuvent aller se rhabiller. Gageons que quand ce genre sera passé de mode, on continuera à lire le voyage d'Anna Blume, et à frémir d'un effroi d'humain et d'un plaisir de lecteur.
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Je renonce, j'abandonne, je déclare forfait à la moitié du livre : vous aurez compris, j'ai DETESTE cette histoire nauséeuse, comateuse, désespérante. Et pourtant...Paul Auster est un de mes auteurs préférés ! Celui qui d'habitude me réjouit le coeur, fait travailler mon imagination et fait pétiller mon intellect...

Ici, rien, rien, rien. le désert.
Ou plutôt, une ville.
Une ville où tout se délite, où les rues disparaissent, où les immeubles s'effondrent, où les hommes ont faim, ont soif, sont laids, sont sales, sont malades, ne songent plus qu'à survivre. Et encore ! Il y a en a qui s'assemblent pour mieux mourir. Les souvenirs eux-mêmes s'en vont définitivement.
Anna Blume s'y est rendue, pourtant, dans cette ville, mais sans savoir où elle mettait les pieds. Elle recherchait tout simplement son frère disparu là. Après une traversée de dix jours en mer (mais quelle mer ?), elle a accosté dans cet enfer tout droit sorti du cerveau du plus tordu des psychopathes. Elle cherche son frère, et bien évidemment ne le trouve pas. Elle doit donc survivre, en se faisant « charognarde », en ramassant les détritus les plus divers pour les vendre. Puis elle fait la connaissance d'une vieille dame qui la prend sous son aile, mais cette dame est condamnée. Elle poursuit alors son errance et arrive dans une bibliothèque.
Et c'est là que j'ai décidé que je ne l'accompagnerais plus.

TERMINE. Je ne saurai jamais si Anna Blume s'en sort, et je m'en contrefiche. Son univers délabré, qu'elle se le garde. Je n'y ai vu aucune once de positivité. Je n'ai même pas voulu réfléchir à ce que Paul Auster voulait nous communiquer comme message.
Je ne retiens que cette phrase à laquelle je refuse d'adhérer : « Nous sommes tous devenus des monstres. »
Vite ! de l'air !
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Je ne sais pas si c'est la même chose pour vous, mais il y a des livres qui laissent un souvenir marquant, non seulement en raison de leur contenu mais aussi pour les circonstances dans lesquelles ils ont été lus.C'est le cas pour ce roman, en ce qui me concerne.

Je me souviens clairement que je l'ai savouré dans le cocon neigeux d'un chalet alsacien, en vacances .L'atmosphère brumeuse, fantomatique du livre s'accordait bien avec le paysage de montagne voilé par les flocons,au sein duquel on se sentait un peu isolé du reste du monde.

J'ai été déroutée au départ par cette plongée glaçante dans une ville du futur, où les rêves sont éteints, où les êtres humains, las et désabusés, sont emprisonnés dans un système cruel.

le personnage principal, Anna, est touchant dans son désarroi, ses errances, et l'on finit par entrer tout à fait dans ce sombre univers de science-fiction, dont seuls quelques êtres vont tenter de sortir.

Une lecture étrange et angoissante , qui laisse son empreinte en nous.
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On a l'habitude de se sentir vaguement mal à l'aise dans les univers créés par Paul Auster, tant il excelle à brouiller les repères et placer ses personnages - et ses lecteurs - dans des situations d'inconfort. Ici, le curseur est poussé à l'extrême et l'inconfort est maximal.

On ne saura pas vraiment quelle catastrophe a fait s'écrouler le monde dans lequel Anna débarque à la recherche de son frère. On n'aura aucune indication de lieu, de circonstances, si ce n'est que c'est "la ville", que les Désordres l'ont ravagée, que tout ce qui existe encore va disparaître dans l'instant, et que les habitants y sont réduits à des stratégies de survie, qui par le vol, qui par le suicide, qui par les seules activités qui aient encore cours : ramasseur d'ordures ou chasseur d'objet.

Peu importe au final car le point de focale ici ce sont les réactions de ces quelques personnages sur le parcours d'Anna qui vont comme elle cultiver, ou à défaut ne pas perdre, ce qui leur reste d'humanité.
Peu importe aussi car ce qui interpelle dans ce récit angoissant c'est ce que représente cette ville pour chaque lecteur : une parabole de la violence du monde moderne, celle du modèle occidental, ou celle encore de la vie de chacun, faite d'effondrements et de dévastations sans espoir?

Attention à cette lecture riche mais dangereuse, dont on risque, à l'instar de cette ville dont on semble ne pouvoir partir, de ne pas arriver à sortir en refermant le livre.
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Citations et extraits (33) Voir plus Ajouter une citation
De jour comme de nuit , il fallait des bougies quand on se rendait dans les rayons. Les livres étaient situés au coeur du bâtiment, et il n’y avait donc de fenêtres dans aucun des murs. Comme l’électricité était coupée depuis longtemps, nous n’avions d’autre solution que de transporter notre éclairage. A une époque, disait-on, il y avait eu plus d’un million de volumes dans la Bibliothèque nationale. Ce nombre avait été fortement réduit avant mon arrivée, mais il en restait encore des centaines de mille, et c’était une avalanche imprimée ahurissante. Il y avait des livres posés droit sur leur étagère tandis que d’autres jonchaient chaotiquement le plancher et que d’autres étaient encore amoncelés en tas désordonnés. Il y avait bien un règlement de la bibliothèque – et il était rigoureusement appliqué – qui interdisait de sortir les livres hors du bâtiment, mais un grand nombre d’entre eux avaient néanmoins été dérobés et vendus au marché noir. De toute façon, on pouvait se poser la question si la bibliothèque en était encore une. Le système de classement avait été complètement chamboulé , et, avec tant de volumes déplacés, il était virtuellement impossible de trouver un ouvrage qu’on aurait précisément recherché. Si on considère qu’il y avait sept étages de rayonnages, dire qu’un livre n’était pas à sa place revenait à déclarer qu’il avait cessé d’exister. Même s’il était physiquement présents dans ces locaux, le fait était que personne ne le retrouverait jamais. J’ai fait la chasse à un certain nombre de vieux registres municipaux que voulait Sam, mais la plupart de mes incursions dans ces locaux n’avaient d’autre but que de ramasser des livres au hasard. Je n’aimais pas beaucoup me trouver là, car je ne savais jamais sur qui je pouvais tomber et je devais respirer cette humidité froide avec son odeur de pourriture moisie. J’entassais autant d’ouvrages que je pouvais sous mes deux bras et je remontais dans notre chambre. Les livres nous ont servi à nous chauffer pendant cet hiver. En l’absence de tout autre combustible, nous les brûlions dans le poêle en font pour faire de la chaleur. Je sais que cela a l’air épouvantable, mais nous n’avions vraiment pas le choix. C’était soit cela, soit mourir de froid. L’ironie de la chose ne m’échappe pas – passer tous ces mois à travailler à un livre en même temps que nous brûlions des centaines d’autres ouvrages pour nous tenir chaud. Ce qu’il y a de curieux, c’est que je n’en ai jamais éprouvé de regret. Pour être franche, je crois que j’avais en fait du plaisir à jeter ces livres dans les flammes. Peut-être cela libérait-il quelque colère secrète en moi ; ou peut-être était-ce simplement une façon de reconnaître que ce qui leur arrivait n’avait pas d’importance. Le monde auquel ils avaient appartenu était révolu, et au moins ils étaient à présent utilisés à quelque chose.
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Les gouvernements vont et viennent très vite, ici, et il est souvent difficile d'être au fait des modifications. C'était la première fois que j'entendais parler de ce changement de pouvoir, et quand j'ai demandé à quelqu'un quel était le but du Mur marin, il m'a répondu qu'il devait prévenir le risque de guerre. La menace d'une invasion étrangère se faisait plus forte, a-t-il dit, et notre devoir de citoyen était de protéger notre patrie. Grâce aux efforts du grand Untel - quel qu'ait pu être le nom du nouveau chef - les matériaux des bâtiments effondrés étaient à présent récupérés pour servir à la défense, et le projet fournirait du travail à des milliers de gens. Qu'est-ce qu'ils donnent comme paie ? ai-je demandé. Pas d'argent, a-t-il dit, mais un toit et un repas chaud par jour. Cela m'intéressait-il de m'enrôler ? Non merci, ai-je répondu, j'ai d'autres choses à faire. Eh bien, a-t-il dit, j'aurais bien le temps de changer d'avis. Le gouvernement estimait qu'il faudrait au moins cinquante ans pour finir le mur. Grand bien leur fasse, ai-je dit, mais, en attendant, comment est-ce qu'on sort de là ? Oh non, a-t-il dit en secouant la tête, c'est impossible. Les bateaux n'ont plus le droit d'entrer, désormais - et si rien n'entre, rien ne sort.

Et avec un avion ? ai-je dit. C'est quoi, un avion ? m'a-t-il demandé en souriant d'un air intrigué, comme si je venais de faire une plaisanterie qu'il ne comprenait pas. Un avion, ai-je dit. Une machine qui vole dans les airs et transporte les gens d'un endroit à un autre. C'est ridicule, a-t-il rétorqué, me jetant un regard soupçonneux. Une telle chose n'existe pas. C'est impossible. Ne vous en souvenez-vous donc pas ? ai-je demandé. Je ne sais pas de quoi vous parlez, a-t-il répondu. Il pourrait vous en cuire de répandre des bobards comme ça. Le gouvernement n'aime pas qu'on invente des histoires. Ça sape le moral.



Tu vois à quoi on se heurte ici. Ce n'est pas seulement que les choses disparaissent - mais lorsqu'elles sont parties, le souvenir qu'on en avait s'évanouit aussi. Des zones obscures se forment dans ton cerveau, et à moins que tu ne fasses un effort constant pour te rappeler les choses qui ont disparu, elles se perdent pour toi à jamais. Je ne suis pas plus à l'abri que quiconque de cette maladie, et il n'est pas douteux que de nombreux vides de ce genre se trouvent en moi. Une chose s'évanouit, et si on attend trop longtemps avant d'y repenser , aucun effort, si grand soit-il, ne réussira à l'arracher de l'oubli. Après tout, le souvenir n'est pas un acte volontaire. C'est quelque chose qui a lieu malgré soi, et, lorsqu'il y a trop de choses qui changent en permanence, il est inévitable que le cerveau flanche, il est inévitable que certaines choses passent au travers...
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Comment parler à quelqu'un d'avions, par exemple, s'il ne sait pas ce qu'est un avion ? C'est un processus lent, mais inéluctable, d'effacement. Les mots ont tendance à durer un peu plus que les choses, mais ils finissent aussi par s'évanouir en même temps que les images qu'ils évoquaient jadis. Des catégories entières d'objets disparaissent - les pots de fleurs, par exemple, ou les filtres de cigarette, ou les élastiques - et pendant quelque temps on peut reconnaître ces mots même si on ne peut se rappeler ce qu'ils signifient. Mais ensuite, petit à petit, les mots deviennent uniquement des sons, une distribution aléatoire de palatales et de fricatives, une tempête de phonèmes qui tourbillonnent, jusqu'à ce qu'enfin le tout s'effondre en charabia.
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Nous sommes si nombreux à être redevenus comme des enfants. Ce n’est pas que nous le voulions, comprends-tu, ni qu’aucun de nous en soit réellement conscient. Mais lorsque l’espérance s’est enfuie, lorsqu’on découvre qu’on a même cessé d’espérer que l’espérance soit possible, on a tendance à remplir les espaces vides par des rêves, des petites pensées enfantines et des histoires qui aident à tenir.
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Contrairement à ce qu'on pourrait supposer, les faits ne sont pas réversibles. Ce n'est pas parce que tu as pu entrer que tu seras capable de sortir. Les entrées ne deviennent pas des sorties, et il n'y a rien pour garantir que la porte que tu as franchie il y a un moment sera encore là quand tu retourneras pour la chercher à nouveau. C'est ainsi que ça marche dans la ville. Chaque fois que tu crois connaître la réponse à une question, tu découvres que la question n'a pas de sens.
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Notre mot sur, écrit par Paul Auster, traduit par Anne-Laure Tissut et publié aux éditions Actes Sud : https://www.librairie-ledivan.com/livre/9782330188757
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