Avec
Une nuit chez Tennessee, Autheman produit un polar, noir de noir, dense et poisseux, comme les tonneaux de mélasses que San Severina produit à partir de canne à sucre.
San Severina, l'île vers laquelle Vic Valence se dirige à la recherche de Ponce, un ami de longue date. Il va aussi retrouver Tennessee, une ancienne égérie d'une marque de jus de fruits, célèbre pour sa paire de sein, qu'elle monnaie encore dans son boui-boui à San Severina.
Entre Vic, Tennessee et Ponce, il y a un passé, glorieux et moins glorieux. Il y a de l'amour, du sexe. Des liens indéfectibles, mais qui résistent parfois difficilement à 12 diamants. Ponce les a volés aux indiens miskitos, au Nicaragua. Ce pays est enfoncé dans une guerre civile, financée par la CIA du côté des Contras. Et d'ailleurs, ces diamants devaient servir à acheter des armes aux Contras.
Qui est le commanditeur de Vic Valence, marin au long cours, détaché des contingences matérielles, mais qui feraient bien des heureux s'il récupérait les diamants...
On devine (et je n'ai pas tout dit) un récit très bien construit, documenté, ancré dans des dizaines d'années de polars noirs, de
Faulkner à Izzo, en passant par Irish ou Thompson, Hammett ou Goodis. Autheman connaît ses classiques et il les utilise à bon escient.
Côté dessin, je suis moins fan. Cela cadre bien avec le propos. On est dans du "sale", du brut, du gras. Mais il m'a manqué un trait un peu plus fini, plus fluide. Cela donne l'impression d'être dessiné à l'arrache, extirpé de la boue originelle, de la fange dans laquelle se vautrent les héros (ou anti-héros) de ce polar qui vaut le détour.
Je découvre qu'Autheman a produit 2 tomes de suite des aventures de Vic Valence. le premier tome se termine effectivement sur une sorte de hangover, mais fort conforme à l'esprit looser des polars de ce type. J'irai quand même explorer ces suites...