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Une saga moscovite tome 2 sur 3
EAN : 9782070402755
608 pages
Gallimard (24/06/1997)
4.31/5   83 notes
Résumé :
A travers les destinées des Gradov, grands médecins, grands militaires, et celles des petites gens qui les entourent, c'est toute la Russie qui respire...
comme elle peut.., en l'une des périodes les plus dramatiques qu'elle ait connues : 1924-1953, dates du " règne " de Staline. Les Gradov sont des personnages bien romanesques, pris dans une vie quotidienne faite d'ambition, de dévouement, de contradictions, de passions, de rires. (...) Les véritables sagas ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
Un gros roman de Vassili Axionov, fils de Evguenia Guinzbourg, elle-même auteur du "Vertige" et du "Ciel de la Kolyma" , récits fameux de son arrestation et de sa déportation au goulag avec son mari (en 1937). Ses parents étaient pourtant des communistes convaincus, persuadés au début de leur calvaire que le parti ne pouvait se tromper, que s'ils avaient été condamnés, ils devaient avoir commis quelque péché capital contre l'édification du socialisme. Leur fils vécu avec eux à Magadan, en extrême orient, puis ils furent libérés en 1953, avec la "libéralisation" khroutchévienne.
Encore un de ces romans russes sur le Stalinisme à lire absolument si vous avez toujours besoin de croire que sans Staline et sa "déviation" totalitaire, le régime communiste eût pu déboucher sur une société juste.
Ce que montre précisément cet autre grand roman russe sur cette période, c'est que le système porte en lui, de manière inhérente, en raison même de la nature humaine, la fatalité de ce qu'il va devenir, comme l'attestent d'autres tentatives de construction de sociétés fondées sur cette idéologie (le Cambodge pour ne citer que cette expérience.) Ce que montre (ou plutôt illustre brillamment le livre dans la fiction), c'est que ce type de régime ne diffère que dans les objectifs annoncés de l'autre totalitarisme du vingtième siècle, qu'il ne peut que donner le pouvoir (que ce soit dans les camps ou dans les hautes spères du régime), aux individus les plus corrompus, aux instincts les plus vils.
Par exemple, Beria, le second du petit père des peuples, devient sous la plume d'Axionov, un personnage à part entière du roman, qui fait enlever des jeunes filles dans Moscou pour qu'on les livre à ses désirs de vieillard libidineux. Ceci n'est nullement une liberté que prendrait le romancier avec L Histoire , car il semble bien en effet que la réouverture récente des archives de l'URSS confirme ce que d'autres auteurs et ce que la rue de Moscou avaient déjà largement rendu public.
D'autres romans russes ont peint cette époque à leur manière, en s'essayant à marcher sur les traces du Guerre et Paix de Tolstoi. Outre les livres de Soljenitsyne bien sûr, l'autre grande saga à lire, plus centrée elle sur la bataile de Stalingrad, est "vie et destin" de Vassili Grossman, qui lui aussi établit dans la fiction le parallèle que devait faire au niveau philosophique Hannedt Arendt entre Nazisme et Communisme.
L'originalité de ce roman là tient à ce qu'il parvienne à nous faire vivre ces événements et ces destins tragiques, d'une manière ..... comment dire ...presque "légère", ceci sans édulcorer la réalité vécue par les personnages et les soviétiques à cette période. Même au bagne, une vie s'organise, des couples se retrouvent et s'aiment. Pendant la "Grande guerre patriotique" (entendez la deuxième guerre mondiale) les soviétiques retrouvent une dignité et un courage dont ils se croyaient dépourvus, eux qui, en temps de paix, se sont laissés traîner dans les camps comme un troupeau d'esclaves, et qui se soumettront à nouveau, pour la plupart, la paix revenue. le style, proche du réalisme fantastique de Boulgakov participe ..comment dire encore .. de cette "légèreté dans l'horreur " Comme dans le "Maître et Marguerite" ou le Roman Théâtral" de Boulgakov, les personnages historiques sont des protagonistes à part entière de la narration. On a déjà vu comment le terrible Beria participait à l'histoire. Mais Staline aussi devient un héros presque crédible de la fiction. Comme son acolyte Beria, il est rendu à la fois "humain" et accessible, mais aussi Ubu plus monstrueux encore, par le semblant d'empathie qu'Axionov joue parfois à nous faire ressentir à l'égard des bourreaux, en les caricaturant parfois sous la forme de bouffons pathétiques, vulnérables, faibles devant la maladie, la vieillesse ou l'impuissance, sujets au doute métaphysique parfois.... Mais que l'on ne s'y trompe pas. Comme celle de Kundera, cette "légèreté" axionovienne est elle aussi .... insoutenable. Dostoïevski, auquel il est fait abondamment référence, n'est jamais très loin....
A Moscou, après la guerre, les déportations continuent,. Les procès de médecins (juifs la plupart !!) accusés de vouloir empoisonner les membres du bureau politique causent la perte d'un des héros, grand médecin, qui refuse de participer à la curée contre ses collègues. Mais dans le Moscou (dans la capitale, pas dans la russie profonde !!) de l'après-guerre, une certaine prospérité permet aux moscovites de mener une existence à peu près normale, pour peu que l'on échappe aux tentacules de la pieuvre protéiforme. Une jeunesse dorée fait la nouba, du sport, sort dans les boites à la mode, écoute du jazz, fricote avec les rejetons des "organes du parti".

La patte de l'auteur de cette fresque qui porte bien son nom de saga est faite d'un curieux mélange de farce burlesque, de tragédie grecque (ou dostoïevskienne comme on voudra...) et aussi, par moment, pour le "liant" romanesque, peut-être, d'une sorte de frivolité nomenklaturienne "à visage humain", de quadrille en crinolines et au pas de l'oie apprécié dans les sphères du pouvoir. Mais plus intéressant encore que cela, l'horreur dominante est constamment tempérée par l'amour qui lie les membres de la famille Gradov, par l'humour dont font preuve les membres de cette cellule inoxydable de l'intelligentsia patriotique éclairée qui résiste à sa manière au tyran et à ses sbires ordinaires. Comme les héros "positifs" de Guerre et Paix , cette bourgeoisie progressiste et fondamentalement humaniste, puise la force de résister au mal et à la table rase culturelle imposée par les bolchéviques à la fois dans ses racines profondément slaves et dans un souci constant de rester ouverte au monde extérieur.
Ceux qui ont étudié la langue de Pouchkine ont forcément entendu dire par leurs professeurs que les meilleurs écrivains russes sont ceux qui ont su réaliser une synthèse entre les courants slavophile et occidentaliste qui traversent et enrichissent l'oeuvre des plus grands, celle de Tolstoy, de Dostoïevski, de Pasternak, etc.... Je crois qu'Axionov s'inscrit dans cette lignée, lui le "traître cosmopolite" comme étaient nommés les accusés des procès de Moscou et de Prague, lui qui a émigré aux USA, mais qui continue de puiser son inspiration dans sa culture.....

Ce gros pavé de 1600 pages se lit presque comme un roman feuilleton (en raison peut-être des "crinolines" évoquées plus haut.) L'histoire tourne autour d'une famille de grands médecins, de militaires héros de la guerre dont l'un est rappelé du goulag pour sauver la mère patrie de l'envahisseur hitlérien, de poètes, de cadres sincères du parti, qui auront tous à souffrir dans leur chair du régime, mais qui sont en même temps, du fait de leur compétence dont a besoin le parti, préservé du pire. La maison familiale, datcha héritée de l'ancien régime et curieusement jamais confisquée, sorte de croisement entre les propriétés pour personnages de Tchékhov et de maison coloniale à la "Autant en emporte le vent", est l'ultime refuge de la cellule familiale disloquée par L Histoire mais qui s'y retrouve par moments pour y trouver la force qui permettra aux membres de cette "dynastie" de traverser les épreuves avec dignité.
Un livre optimiste finalement, contrairement à beaucoup de romans historiques russes traitant de cette époque sombre.
Les références littéraires et historiques sont nombreuses, mais, cerise sur le gâteau, la traduction de Lily Denis, dans l'édition Folio de poche, fourmille de notes documentées permettant au lecteur non spécialiste de posséder toutes les informations utiles pour la compréhension du contexte dans lequel s'inscrit l'histoire.


Lien : http://jcfvc.over-blog.com
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Vassili Axionov poursuit le récit de la fresque familiale des Gradov. J'ai mis plus de temps à terminer cette suite qui semble fade et moins intense que la première partie.
Un personnage accapare, à lui seul, cette Saga Moscovite II et cela m'a un peu déçu car les autres membres de la famille passent au second plan.
Reste que c'est un bon moment de lecture et j'ai eu le souffle coupé aux pages 408 et 409, j'ai eu un doute quand Nina se questionne page 416 et je n'ai eu aucune compassion à la page 426.
Toutefois, j'aurai aimé que cette partie soit aussi émouvante que la précédente.
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Vassili Axionov, disparu en juillet 2009 à Moscou, est l'un des romanciers russes contemporains les plus traduits dans le monde. Très populaire en Russie, il est surtout connu en France pour sa Saga moscovite, sorte de Guerre et Paix du XXe siècle, tragique et burlesque, qui fut un immense succès de librairie à sa sortie en 1995. Né en 1932, Axionov a connu les retournements de l'histoire russe de son temps. En 37, année de la Grande Terreur stalinienne, ses parents sont déportés au goulag et il ne retrouve sa mère Evguénia Guinzbourg, futur auteur du Vertige et du Ciel de la Kolyma, que dix ans plus tard en Sibérie. Icône des années 60, comme le chanteur Boulat Okoudjava son ami, il peint dans ses premiers textes la jeunesse des années du Dégel et fait des débuts littéraires fracassants en parlant de jazz, de jeans et de sexualité, en dehors de tout conformisme. Mais le contexte politique se durcit. Vingt ans plus tard, c'est l'exil forcé aux États-Unis et la perte de sa nationalité soviétique. le retour en Russie ne sera possible qu'après la chute de l'URSS. Une merveilleuse saga en deux tomes, qui retracent la vie des Gradov, médecins, militaires et celles de petites gens qui les entourent. Une période dramatique durant le règne de Staline de 1924 à 1953. Un régal Nena
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Suite et fin des aventures de la famille Gradov…

Cette saga, en deux livres, retrace la vie de cette famille de l'intelligentsia russe pendant les années durant lesquels Staline fut au pouvoir.

Ce deuxième « tome » se concentre sur les dernières années du règne stalinien, en gros de la fin de la seconde guerre mondiale à sa mort.

Cette fois-ci c'est la troisième génération des Gradov qui se retrouve au centre de l'action.

La jeunesse moscovite s'encanaille et rêve non plus de révolution mais de biens matériels, d'appartements individuels, de sports, d'alcool et de sexe.

Pour autant, il serait idiot pour eux d'occulter la réalité politique du pays. La déportation et les goulags sont toujours d'actualité, le népotisme aussi.

Mais surtout, se joue une guerre en coulisse.

Le camarade Staline voit sa santé décliner. Une lutte d'influence se joue à chaque instant pour savoir qui pourra se saisir du pouvoir à l'occasion de la mort du tyran.

Le coup de coeur ressenti avec le premier livre s'est confirmé avec cette deuxième partie.

La plume de Vassili Axionov réussie toujours à faire mouche, à émouvoir sans verser dans le pathos, à retranscrire les failles, les faiblesses et les moments de courage de ses personnages.

Sur cette période stalinienne, « une saga moscovite » est définitivement à ranger au rayon des incontournables au même titre que Vie et Destin de Grossman.
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1925-1953, la famille Gradov sous trois générations pendant l’ère stalinienne. Dans la capitale, sur les champs de bataille ou au goulag, ils sont médecins, poète, peintre ou général, ils adhèrent au régime en place, l’utilisent ou le subissent. Un roman fleuve (plus de 1600 pages) historique et romanesque, non exempt de longueurs ou de passages difficiles pour qui n𠆞st pas bien au courant des pensées et faits historiques, mais qui emporte le lecteur tel un ”Guerre et Paix” du 20e siècle.
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Fallait-il rouler ses cheveux au fer pour obtenir quelque chose dans le genre dernier cri de la "couronne de la paix" ? Tout remonter pour dégager son col de cygne ? Ou les partager sur les côtés ? Ou les serrer en arrière ? Maman s'était drôlement bien débrouillée, elle s'était fait couper à la garçonne, liquidé tous les doutes, et de plus, elle avait rajeuni de dix ans.
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Ils ne me font pas peur, se disait de plus en plus souvent Boris. Est-ce à moi d’avoir peur ? Bon à la fin des fins, admettons qu’ils m’arrêtent. Je m’évaderai vite fait, ça ne me coûtera rien. Bon, ils m’abattront en cours d’évasion ou m’exécuteront après jugement, j’ai tant de fois risqué ma vie en quatre ans de service que je ne vais tout de même pas avoir peur d’un machin aussi élémentaire qu’une balle. La torture, c’est autre chose, je ne suis pas certain de ne pas la craindre. Nous avons subi une préparation psychologique dans ce sens, mais je ne suis pas certain de ne pas la craindre. On nous a également initiés aux méthodes « d’interrogatoire actif ». Dieu merci, je n’ai jamais eu lieu d’y recourir moi-même, mais rappelle-toi : tu as vu Smougliany, Grozdiov et Zoubkov interroger le « capitaine Balenciaga », un prisonnier à qui ils voulaient faire avouer son vrai nom. Non, je ne suis pas certain d’être psychologiquement prêt à supporter la torture.
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Dans le fond, qu'est-ce-que je sais de sa vie actuelle ? Peut-être qu'elle hurle de nostalgie, celle de son fils, celle de ses fabuleuses apparitions rue Gorki... Peut-être qu'elle échangerait le Connecticut entier contre ma mansarde, mon peintre et ses fleurs pas si innocentes que ça.
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incipit :
Le Félix-Dzerjinski entrait dans la baie de Nagaïevo, fier oiseau des mers, véritable "Annonciateur de la tempête révolutionnaire", on peut bien le dire. Un tel profil, ma foi, la mer d'Okhotsk n'en avait aucun souvenir, avec ses bateaux négriers, rafiots au nez camus, dans le genre de cette Djourma si délabrée.
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Il venait d'avoir quarante-six ans. Ses yeux n'avaient pas terni, mais avaient légèrement changé de couleurs dans le sens du bleu glacial de la Kolyma.
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