Le roman de F. Azevedo est une saga familiale racontée par un des membres de la famille, Antonio, fils aîné de José Custódio et Maria Romana. Au début du XXe siècle, ce jeune couple de Portugais décident d'émigrer au Brésil en compagnie de Palma, la soeur de José. le lecteur accompagne le destin des membres de cette famille sur quatre générations, entre 1908 et 2008. Aucun fait extraordinaire ne caractérise ces vies normales aux prises aux problèmes habituels de toute famille. Il est en effet question des relations familiales complexes - entre parents et enfants et surtout, entre frères et soeurs -, de rencontres et de séparations, de rancoeurs, de jalousies et de non-dits, de réconciliations, de choix de vie, etc. Les existences des personnages de
la recette magique de tante Palma sont tour à tour marquées par des moments d'allégresse et de tristesse (deuils, absence d'êtres chers, saudade). Certains thèmes tels que la mort accidentelle, la vieillesse, la mémoire, l'adoption, la stérilité, l'homosexualité, le divorce, l'adultère, les retrouvailles, etc. reviennent à plusieurs reprises. Mais c'est l'amour, sous toutes ses formes, qui apparaît en filigrane tout au long du récit.
De la famine dont souffre le Portugal au début du XXe siècle aux innovations technologiques de notre temps (téléphones portables, skype, écographies…), le roman traverse tout un siècle et évoque les changements liés aux comportements humains, à la liberté individuelle, aux relations, à la communication, etc.
Le fil conducteur de la saga est le riz que la tante Palma est allée ramasser sur le parvis de l'église de Via-na de Castelo où son frère et sa belle-soeur se sont mariés et qu'elle a ensuite offert au jeune couple. Symbole de fertilité et d'amour, ces douze kilos de riz ont la vertu magique de ne pas s'abimer. Il accompagnera donc la famille pendant cent ans ; source de miracles, il est aussi l'objet de convoitise, de jalousie, de discorde - il est également la cause d'un accident domestique qui a conduit les deux enfants d'Antonio à l'hôpital. Il semblerait que tous les conflits, les drames et les joies de la famille tournent autour de cet étrange et énigmatique cadeau de mariage.
Tout en préparant le repas de la fête de famille célébrant les cent ans du mariage de ses parents et du « riz de Palma » - le lecteur obtient ces informations au fur et à mesure - Antonio, le narrateur alors âgé de 88 ans, se remémore certaines scènes, dialogues et autres moments importants de sa vie, en remontant jusqu'au mariage de ses parents et terminant par la naissance imminente de son arrière-petite-fille.
Le roman est composé de cinquante-huit parties de longueur inégale (entre deux et quatorze pages) et dont le titre, une expression ou un simple mot, se trouve dans le chapitre correspondant.
Les cent ans d'histoire familiale sont racontés au présent et de manière linéaire et fragmentée, rappelant la narration cinématographique. Les dialogues que le narrateur imagine (par exemple, entre ses parents avant sa naissance) et ceux qu'il se remémore sont très vivants. Les différents parlers des personnages - le portugais du Portugal, le brésilien et ses variantes rurales – sont retranscrits. L'auteur recourt par ailleurs très souvent aux suffixes diminutifs, très usités au Brésil.
La prose de F. Azevedo est à la fois dynamique et poétique ; les nombreuses ellipses, les phrases courtes, très souvent nominales, les points d'interrogation et d'exclamation, donnent au récit rythme et intensité. Certaines phrases ou mots résonnent, en ricochet, tout au long du livre, comme par exemple : « La famille est un plat difficile à préparer » ou encore « éléphant et mante religieuse ».
Le chapitre où il est question du départ tour à tour d'Antonio et de ses frères à Rio de Janeiro est relaté à la manière d'un conte. On trouve aussi une recette de cuisine écrite de façon très originale par tante Pal-ma, des lettres, les paroles d'un fado ainsi que des SMS.
De par son propos et son style, La recette magique de Palma, est un roman intense et captivant. le lecteur est happé par le récit dénué de personnages ou de faits extraordinaires mais centré sur la quête de la justesse des sentiments et des émotions dans le contexte familial. Alors qu'il se trouve dans sa cuisine à réfléchir et à analyser les souvenirs qu'il évoque, le narrateur octogénaire s'adresse de temps à autre au lecteur.
Les contours et les caractères de tous les personnages sont dessinés avec beaucoup de précision et de justesse, le plus romanesque étant sans doute celui de la tante Palma.
Lyrique et extrêmement délicat, le roman n'est pas dénué d'humour ; plusieurs anecdotes, les traits de caractère de certains personnages ou encore quelques situations sont tout à fait drôles.
Certains épisodes (disputes, retrouvailles, scènes érotique) sont suggérés, créant ainsi un effet intéressant.