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Michelle Charrier (Traducteur)
EAN : 9782207260395
304 pages
Denoël (15/10/2009)
3.91/5   32 notes
Résumé :
Paru quelques mois avant sa mort en Grande-Bretagne, La Vie et rien d'autre témoigne de l'incroyable parcours de l'homme et de l'écrivain J.G. Ballard.
Introduits dans les coulisses de sa vie et de son oeuvre, nous suivons l'enfance mouvementée à Shanghai et la douloureuse expérience de l'internement dans un camp de prisonniers japonais en Chine — clefs de son roman le plus connu, Empire du soleil. Mêlant sens aigu de l'analyse et traits d'humour très ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Paru quelques mois avant sa mort en Grande-Bretagne, La Vie et rien d'autre se lit comme un roman. JG Ballard y livre des clefs résonnant étrangement avec son oeuvre foisonnante dans laquelle l'horrible côtoie souvent l'indicible.
En vrac : Rêves humains conduisant au désastre programmé à coup de béton, de voitures, d'armes sophistiquées, de thérapies machiavéliques ; dérèglements climatiques, errances sociales, réalités transfigurées et artificielles, mensonges et tromperies.
Pour l'enfant élevé dans le cocon de la Concession Internationale de Shanghai, durant la guerre sino-japonaise, où « (…) un grand feu d'artifice célébrait l'ouverture d'une nouvelle boite de nuit, pendant que les voitures blindées de la police municipale s'enfonçaient dans la foule hurlante des émeutiers. » ; « Il ne se passait pas un trajet dans Shanghai (…) sans (qu'il ne soit) témoin de quelque chose d'étrange, de mystérieux, pourtant normal, à (ses) yeux. »
Le spectacle de la guerre est érigé en loisir dominical « (…) le dimanche après-midi quand nous allions visiter en compagnie de nos parents et de leurs amis les champs de bataille du sud et de l'ouest de Shanghai, tout juste rendus au calme (…) »
Le jeune James est attiré par les armes, l'autorité des soldats japonais et les symboles de la guerre « mais jamais on ne (lui) permit de garder ne serait-ce qu'une simple baïonnette »
Il joue dans une veille carcasse de chasseur chinois abandonné « (…) seul dans l'appareil mystérieux, quoique frappé à mort – rêve de vol préservé. »
A partir de 1941 (il a 11 ans) L'expérience du camp de Lunghua va forger la personnalité de James en l'extrayant de l'autorité parentale. La transgression permanente de cette autorité et de la morale qui en découle devient la règle « Mon père resta muet lorsque je lui montrai le combustible, mais il se doutait forcément que je l'avais volé dans l'entrepôt des cuisines. »
La fréquentation quotidienne de l'humiliation d'adultes, de scènes de tortures, enfin de la mort, fait partie de cette expérience.
C'est un James profondément bouleversé qui retrouve l'Angleterre et ses grands-parents chez lesquels il va vivre désormais « Jamais encore la vie ne m'avait conduit à explorer un abysse aussi profond, des kilomètres sous l'altitude zéro de la santé mentale. J'espère y avoir survécu, mais je n'en ai toujours pas la certitude absolue. »
Les années de collège et d'université qui suivent servent à mesurer l'écart séparant James de cette Grande-Bretagne sortie vainqueur de la guerre dont il se demande « (…) en quoi (sa) situation aurait pu être pire si elle avait perdu la guerre. » et il comprend « très vite que cette Angleterre en laquelle (son) éducation l'avait amené à croire (…) n'était qu'une illusion. »
A Cambridge il suit ses cours, mais se réfugie dès qu'il le peut au Cinéma des Arts, Carné, Arletty, Cécile Aubry, Max Ophüls, Clouzot, Cocteau, Maria Casarès, Wolfgang Staudte deviennent ses compagnons d'étude. Plus tard, il découvrira Freud et les surréalistes à une époque où « ils faisaient figure de plaisanterie éculée jusque dans les journaux les plus respectables. »
En choisissant la psychologie, il est « orienté » vers la médecine. « Près de soixante ans plus tard, je reste persuadé que mes deux ans d'anatomie comptèrent parmi les plus importants de ma vie et participèrent largement à la formation de mon imaginaire (…) un fonds imposant de métaphores anatomiques qui allaient s'insinuer dans toute mon oeuvre… » (Cf Crash est tenté de répondre le lecteur.)


La dissection de cadavres le ramène inlassablement à l'horreur de la guerre dont il a été le témoin « je faisais l'autopsie de tous les Chinois abandonnés au bord de la route, sur le chemin de mon école, je menais une sorte d'enquête émotionnelle, voire morale… »
JG Ballard met sa plume d'écrivain reconnu et expérimenté, au service de ses mémoires en décrivant sans Pathos, à la manière d'un entomologiste, les différents épisodes de sa vie en précisant en quoi ils ont contribué à faire de lui l'homme (le père de famille) et le romancier pessimiste mais souvent visionnaire qu'il est devenu.
Un livre de références dont la lecture s'impose non seulement comme clé de l'oeuvre de Ballard, mais comme témoignage cru et sans fard d'une période de l'histoire qui influence toujours notre histoire actuelle.

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Auteur d'une vingtaine de romans dont plusieurs adaptés au cinéma et de presque autant de recueils de nouvelles, James Graham Ballard est un écrivain de science-fiction et d'anticipation sociale anglais né en 1930 à Shanghai et mort en 2009 des suites d'un cancer de la prostate à Londres. La Vie et rien d'autre (2009) est un livre de mémoires.
Le livre est découpé en deux parties dont on peut s'étonner qu'elles occupent une importance presque égale puisque la première retrace l'enfance et l'adolescence de l'auteur à Shangai, une quinzaine d'années, la seconde le reste de sa vie. Mais il faut aussi admettre que sa jeunesse ne fut pas banale. En 1930 nous sommes dans la Chine de Tchang Kaï-chek et son père est PDG de la filiale chinoise d'une grande entreprise de textile de Manchester. Les Ballard vivent confortablement dans la Concession internationale avec les autres étrangers puis vient la guerre sino-japonaise et l'invasion nippone, la famille est internée jusqu'à la fin de la Seconde Guerre mondiale dans un camp pour civils où les Occidentaux s'organisent au mieux. Toute cette première partie ne manque pas de sel, Ballard la racontant avec son regard d'enfant ingénu, même les cadavres de Chinois dans les rues ne l'effraient pas et le gamin, à le lire, vit une période riche en aventures et découvertes de mille sortes.
La seconde partie de cette autobiographie court de 1946 à 2007. Il part en 1946 pour l'Angleterre et commence des études de médecine (étonnantes pages sur les cours de dissection mais il avait déjà une certaine expérience des cadavres vus en Chine) envisageant de se consacrer à la psychanalyse qui le passionne et le passionnera toute sa vie. Des études rapidement abandonnées et suivies d'études de littérature anglaise puis de petits jobs avant qu'il ne s'engage dans l'Armée de l'air et soit envoyé au Canada. La proximité des Etats-Unis lui fait alors découvrir les revues de S.F. et il écrit sa première nouvelle de science-fiction qui sera publiée en 1956.
Il y aura aussi son premier mariage avec Mary, décédée trop tôt, le laissant avec trois jeunes enfants qu'il élèvera seul. Ce qui nous donne de belles pages sur l'amour familial, compensant avec ses enfants ce que ses parents très « british » ne lui avaient pas donné. Bien plus tard il rencontrera Claire… Quand le bouquin s'achève après un court retour à Shangai pour la BBC et boucler la boucle, Ballard soigne son cancer avec un succès temporaire, sachant très bien qu'il est condamné à court terme. L'homme est calme et stoïque, acceptant avec sérénité son destin. Respect.
Le livre nous offre encore de belles pages sur l'écriture, les motivations ayant poussé Ballard à écrire, la genèse de quelques uns de ses romans (Crash !, La Foire aux atrocités, Empire du Soleil), le rôle et la place de la S.F. dans la littérature ; on y croise ses amis écrivains, Kingsley Amis, Michael Moorcock, Iain Sinclair, Will Self. Mais il est aussi question d'Art et de peinture, de l'explosion culturelle des années 60 et de mille autres choses passionnantes sur la vie en général, d'ailleurs j'ai annoté ou souligné de nombreux passages du livre méritant d'y revenir plus tard.
Vous n'êtes pas amateur de S.F., Ballard ne fait pas partie de vos écrivains favoris, qu'importe, ce livre dépasse largement ces critères. Fort bien écrit, il se lit avec grand plaisir, mêlant aventures, émotions, humour discret, sincérité, critique sociale de l'Angleterre et tant d'autres choses… Un très bon livre.
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Loin des provocations de "Crash !", cette autobiographie de J.G. Ballard se rapproche de "L'empire du soleil" pour la partie qui concerne son enfance. On ne connaissait guère que par "Le lotus bleu" le Shanghai de l'entre-deux guerres et l'invasion du Japon. Ballard décrit la chute d'un monde avec le regard lucide d'un enfant qui s'adapte à toutes les situations, y compris à celle d'un camp d'internement où les japonais rassemblent les occidentaux. Imre Kertész, enfant, avait su aussi survivre dans les camps nazis ("Être sans destin"). J.G. Ballard, dont un médecin lui a annoncé une maladie fatale, se hâte de faire le récit de sa vie, sans concession. Au regard critique qu'il pose sur des parents lointains et futiles, il oppose la révélation inattendue de l'amour conjugal et de la paternité, dans des pages très touchantes. le talent d'un grand écrivain s'exprime dans ce récit très simple et d'une extrême lucidité, qui apprend beaucoup sur le contenu de son oeuvre et sa conception de la science fiction, dont il est un des maîtres. La vie, célébrée dans le titre, mal traduit en français, en ce qu'il renvoie au très beau fil de Bertrand Tavernier, est de l'ordre du miracle ("Miracles of life" titre originel), tant la folie du monde tend constamment à la détruire.
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J.G. Ballard, célèbre écrivain de science-fiction, auteur de Crash !, Millenium People ou encore le Monde englouti, est né en 1930 à Shanghai où il vécut son enfance et son adolescence. Il rejoignit ensuite l'Angleterre et après deux ans d'étude de la médecine, se consacra à l'écriture malgré l'opposition de ses parents. Il se maria, eut trois enfants, sa femme mourut jeune, il les éleva seul. Son début de vie en Chine le marqua à jamais, il en fit un roman autobiographique, Empire du Soleil, qui fut adapté à l'écran par Steven Spielberg. Ballard mentionne aussi ses amis écrivains, ses proches qui le soutiennent et l'amour qu'il porte à ses enfants. Si l'évocation d'un Shanghai aux prises avec l'occupation japonaise ou la mort de la jeune épouse nous resteront longtemps en tête, le reste de cette autobiographie nous apparaît bien peu incarnée, l'auteur répugnant visiblement à se livrer. Etait-ce la fameuse retenue britannique ou Ballard était-il pris par le temps, rongé par un cancer, ne pouvant finalement livrer au lecteur que la vie et rien d'autre ?
Lien : http://puchkinalit.tumblr.com/
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Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
Puis, à seize ans, je découvris Freud et les surréalistes, chapelet de bombes qui s'abattit juste devant moi, détruisant tous les ponts que j'hésitais à traverser.(...) J'avais la nette impression, je l'ai d'ailleurs toujours, que la psychanalyse et le surréalisme ouvraient les portes de la personnalité humaine et de la vérité de l'être, mais aussi mes portes personnelles.
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Pendant ce temps, j’en étais toujours au point mort question écriture. La raison m’avait convaincu de mettre un terme à mes efforts pour surpasser Finnegans Wake, et je n’étais ni assez musclé ni assez morbide pour imiter Hemingway. Le problème, c’était que je n’avais pas trouvé de forme qui me convienne. La fiction populaire était trop populaire, la fiction littéraire trop sérieuse. On publiait une avalanche de mémoires et de romans sur la Seconde Guerre mondiale, mais, étonnamment, l’idée d’écrire un roman sur ma propre expérience du conflit ne me venait pas à l’esprit. Même les évènements sinistres dont j’avais été témoin enfant, à Shangai, n’étaient pas comparables aux horreurs du génocide perpétré dans les camps de concentration nazis.
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La foi en la raison et en la rationalité qui dominait la pensée après-guerre me semblait désespérément idéaliste, tout comme la croyance qu’Hitler et les nazis avaient induit leur peuple en erreur. J’étais persuadé au contraire que les innombrables atrocités perpétrées en Europe de l’Est s’expliquaient du simple fait que les coupables allemands avaient aimé tuer en masse, de même que les Japonais avaient aimé torturer les Chinois.
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Shanghai était pour moi un lieu magique, un fantasme autogénérateur qui dépassait, et de loin, mon esprit limité. Les visions bizarres, incongrues s’y rencontraient n’importe où : un grand feu d’artifice célébrait l’ouverture d’une nouvelle boîte de nuit, pendant que les voitures blindées de la police municipale s’enfonçaient dans une foule hurlante d’émeutiers ouvriers.
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Les enfants n’étaient que des accessoires pour leurs parents, à mi-chemin entre les domestiques et les labradors bien dressés. Il ne venait à l’esprit de personne de les considérer comme un signe important de la santé familiale ou comme le centre de la vie de famille.
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Videos de James Graham Ballard (4) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de James Graham Ballard
Loin du récit survivaliste ou de la robinsonnade, “Sécheresse” de J. G. Ballard décrit un monde post-apocalyptique peuplé de personnages apathiques devant l'urgence climatique. Un roman d'une troublante actualité.
#sciencefiction #postapocalyptic #cultureprime _____________
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