AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de peloignon


Lorsqu'on parle de romans d'amour on pense tout naturellement à des histoires de couples amoureux. À la limite, on pourrait imaginer un roman d'amitié, comme l'a fait Bernardin de Saint-Pierre dans son Paul et Virginie, mais même dans ce roman exceptionnel la belle relation de philia est bien vite pimentée d'eros avec l'arrivée à l'adolescence des personnages principaux. Vraiment, l'amour, en littérature romanesque, c'est une affaire de couples amoureux.
Et Balzac confirme la règle avec ses Modeste Mignon, le colonel Chabert, Mémoires de deux jeunes mariées, etc., mais son projet titanesque d'une fresque de l'ensemble de la société l'entraîne ici à explorer l'amour sous un angle vraiment exceptionnel pour un roman : celui de la paternité.
Or, chacun en conviendra sûrement, l'amour parental a quelque chose de beaucoup plus pur que l'amour d'un partenaire de vie. le parent (idéal) n'a en effet aucun désir égoïste pour son enfant. Il donne tout et n'espère en retour que le bien de son enfant. C'est exactement ce qui se produit pour le père Goriot qui aime vraiment ses filles de tout son être avec une simplicité et un abandon complet.
Par contre, l'amour ne doit pas être une faiblesse, mais une force. Il doit vouloir renoncer à tout pour rendre possible le meilleur de l'autre et c'est loin d'être le cas en ce qui concerne l'amour de Goriot pour ses filles. Son amour est en effet si passionnel que le pauvre homme n'existe pratiquement plus du tout lui-même et ses petites sont bien trop gâtées pour pouvoir s'épanouir dans leurs vies. Goriot le sait très bien lui-même. Il a échoué tragiquement. Il n'a pas su être à la hauteur de ce qui a donné sens à sa vie : assurer le bonheur de ses filles.
C'est ce constat qu'il exprime en excuse leur absence de reconnaissance dans le passage suivant :
« Elles sont innocentes, mon ami! Dites le bien à tout le monde, qu'on ne les inquiète pas à mon sujet. Tout est de ma faute, je les ai habituées à me fouler aux pieds. J'aimais cela moi. Ça ne regarde personne, ni la justice humaine ni la justice divine. Dieu serait injuste s'il les condamnait à cause de moi. Je n'ai pas su me conduire, j'ai fait la bêtise d'abdiquer mes droits...le plus beau naturel, les meilleures âmes auraient succombé à la corruption de cette facilité paternelle... Moi seul ai causé les désordres de mes filles, je les ai gâtées. Elles veulent aujourd'hui le plaisir, comme elles voulaient autrefois du bonbon. Je leur ai toujours permis de satisfaire leurs fantaisies de jeunes filles... Moi seul suis coupable, mais coupable par amour. » (346-347)
Peut-on en vouloir à un tel père d'avoir fait son propre malheur en élevant si mal ses enfants? Impossible! Il est tellement touchant! Et c'est si vrai que l'enfer est pavé des meilleures intentions...
Commenter  J’apprécie          380



Ont apprécié cette critique (30)voir plus




{* *}