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EAN : 9782091884455
96 pages
Nathan (09/02/2012)
3.39/5   52 notes
Résumé :
Dans le Paris de la première moitié du XIXe siècle, un jeune peintre, plutôt doué, choisit la voie d'un art commercial et rentable, plutôt que de vivre la bohème créatrice de ses amis artistes. L'occasion pour Balzac de jeter un regard plein d'humour sur la bourgeoisie parvenue et de s'interroger sur le statut de l'art à son époque. Pierre Grassou est-il un artiste digne de ce nom ? Un texte qui ouvre sur l'histoire des arts : la représentation de l'artiste au XIXe.
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Pierre Grassou, c'est l'un de ces portraits-nouvelles auxquels Honoré de Balzac nous a si souvent habitués. Ce portrait, même s'il s'appuie vraisemblablement sur une personne concrète, est bien plus la peinture d'un type que de quelqu'un en particulier. Il est d'ailleurs grandement question de peinture dans cette nouvelle-ci.

Qu'a cherché à nous dire Balzac au travers de Pierre Grassou ? Encore une fois, une parcelle du fonctionnement social ou sociétal dans lequel nous nous inscrivons encore de nos jours et qui concerne certes la peinture, mais encore bien davantage : littérature, musique et, je pense, à peu près tout le monde des arts au sens large.

Qu'en est-il ? Pierre Grassou est un provincial d'origine modeste et qui est venu tenter sa chance à Paris. Il s'échine et ne ménage pas sa peine auprès de très grands maîtres qui, tous, lui signifient poliment mais fermement qu'il n'a aucun talent et qu'il ferait mieux de quitter ce milieu. Ils le trouvent tous bon camarade mais en qualité d'artiste, zéro.

Alors Pierre Grassou gratte, gratte, gratte, s'efforce, s'efforce, s'efforce. Il rampe centimètre par centimètre pour tâcher d'atteindre les sommets. Mais il reste, au mieux, un copiste honnête, qui refait en très ordinaire des compositions qui ont révolutionné l'art en leur temps.

Toutefois, parmi les gens du gratin mondain qui n'y connaissent pas grand-chose en art, il arrive que certaines oeuvres de Grassou puissent, sur un malentendu, satisfaire l'oeil de l'une ou l'autre grosse légume, au rang desquels on comptera le roi Charles X.

La cour des lèche-savates fait donc grand éloge du tableau de Grassou et, dans la minute, on lui en commande à la pelle, de la même veine. Grassou exploite honnêtement le filon et devient vite un artiste dans le vent, une sommité de pacotille, multi-décoré, qui siège aux académies compétentes...

Je vous laisse évidemment découvrir le sel narratif de cette nouvelle et le rôle d'entremetteur que jouera le roublard marchand d'art juif Élias Magus. Ce qu'il est intéressant de noter, c'est que rien, absolument rien n'a changé à l'heure actuelle. Toutes les assemblées dites " d'experts " ou " d'artistes " sont pour la plupart un ramassis d'auteurs ou d'interprètes de deuxième voire troisième zone qui, par les vicissitudes de la vie, se sont fait un nom à un moment donné et qui capitalisent dessus jusqu'au restant de leurs jours.

Il suffit de regarder les jolies têtes de veaux d'Éric-Emmanuel Schmitt, Didier Decoin et consort pour se faire une opinion de l'académie Goncourt, et je n'ose même pas vous parler de la réception récente du grand, de l'illustre, du génialissime Marc Lambron à l'abracadémie française. Comme Lambron y est, Grassou y est. (Excusez une nouvelle fois ma fâcheuse tendance matinale au calembour de bas aloi ; on ne se refait pas.)

Là, là vraiment, on se dit qu'il avait tout de même un sacré oeil d'observateur notre petit Honoré chéri. On pourrait évidemment élargir ceci aux victoires de la musique et autres singeries du même genre dans d'autres domaines spécifiques des arts. En somme, le fossé qui existe entre le génie des artistes et leur reconnaissance publique et/ou académique.

Vaste sujet qui nous emmènerait loin et sur lequel je ne souhaite pas m'élancer plus avant. Une nouvelle donc, très clairvoyante, de loin pas celle que je préfère De Balzac qui a su faire beaucoup, beaucoup mieux, mais un Balzac même de second choix reste plus intéressant que ceux écris par la ribambelle de tiers couteaux sus-mentionnée. Au demeurant, souvenez-vous que ce que j'exprime ici n'est que mon grassouillet d'avis, c'est-à-dire, pas grand-chose.
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Un petit portrait vaut parfois mieux qu'un long discours - et dans le cas de Pierre Grassou, peintre médiocre, un mauvais portrait bien rémunéré vaut mieux qu'un talent d'artiste crève la faim.
En peu de mots, Balzac nous peint le personnage de l'artiste vendu au système, peignant à la chaîne de vilaines toiles pour des clients dénués de goût mais fortunés, sans autre ambition que de vulgaires envies bourgeoises de confort. Un portrait qui n'a pas pris une ride!
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Dans ce roman, confondant parfaitement le réalisme du contexte historique dans lequel il se situe - accentué également par l'évocation d'un certain nombre d'artistes et d'oeuvres réels - on retrouve d'intrigants et mystérieux personnages imaginaires, dont le personnage éponyme.

Par son réalisme, l'oeuvre critique ouvertement l'embourgeoisement de l'art, la dégradation du Salon et indirectement la mort de l'art, soulignée par les nombreuses copies ratées de Grassou de Fougère. le Salon devient le lieu où le chef-oeuvre côtoie la médiocrité.

"Au lieu d'un tournoi, vous avez une émeute ; au lieu d'une Exposition glorieuse, vous avez un tumultueux bazar".

En effet on constate que la bourgeoisie est clairement ignorante, qu'elle aime la personne de l'artiste, la manière dont il est vu, son grade, mais ne comprend en aucun cas la subtilité et l'intérêt de l'art, au point d'admirer des pastiches médiocres. La naïveté de la bourgeoisie s'associe ici à celle du peintre, résultant de la richesse de Magus.

"Les tableaux magnifiquement encadrés avaient des étiquettes où se lisaient en lettres noires sur fond d'or "RUBENS Danses de faunes et de nymphes, REMBRANDT Intérieur d'une salle de dissection. le docteur Tromp faisant sa leçon à ses élèves". Il y avait une cinquantaine de tableaux, tous vernis, époussetés..."

Le nom même de Magus, l'usurier des toiles, peut laisser soupçonner plusieurs choses, fusion tout d'abord des noms du célèbre antiquaire Mage, ainsi que du fameux marchant parisien de l'époque nommé Susse. L'addition des deux noms démontre sa somptuosité de manière économique, mais également au sens global (magnus en latin signifie grand). On peut ajouter à cela un côté magique, n'oublions pas que Magus "transforme" mystérieusement les tableaux, et par sa capacité à les vendre se présente comme un magicien aux yeux de Grassou.

Grassou d'ailleurs clairement défini comme mauvais, lors de ces études notamment, mais il est entêté et déterminé, car ne voit pas d'autres moyens de s'en sortir. Ce peintre naïf n'a pas peur d'être critiqué puisqu'il continue inconsciemment de s'inspirer fortement d'autres artistes. Il est passif, ne dépense ni argent, ni énergie.

En bref, ce livre montre que la réussite n'est pas toujours liée à la performance et la personnalité mais à l'obstination et à la pitié. D'autres peintres intégreront l'oeuvre copiée de Grisou au Salon par exemple. Quoique le bonheur qu'apporte l'art à Grassou (argent, mariage, passion, honneur etc...) ne rivalise pas face au mépris des artistes réellement compétents.
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Histoire d'un peintre qui malgré ses médiocres talents s'obstine dans son art, contre l'avis de tous ses maîtres. Il vendra des copies de grands maîtres à un dénommé Elias Magus, marchand d'art mi brocanteur, mi usurier, lequel exploitera ce filon et le présentera à une famille de petits bourgeois entichée d'art dont il épousera la fille.
Je n'ai pas été vraiment séduite par cette courte nouvelle dont je ne trouve pas grand-chose à dire sinon qu'elle rencontre l'actualité de l'époque : une vogue pour les portraits, les prémisses de l'organisation du marché de l'art et de ses intervenants peu scrupuleux en même temps que sa ruine en proportion de son succès marchand.
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Dans Pierre Grassou, Balzac critique ouvertement les liens de la bourgeoisie avec l'Art. Engagé pour l'Art qui lui tient à coeur, il dénonce les changements apportés au Salon du Louvres en 1830 et va jusqu'à dire que : "Depuis 1830, le Salon n'existe plus". le surplus d'oeuvres va en contre-sens de la définition de l'Art proprement parlé. Les artistes représentés au Salon ne sont pour la plupart que des amateurs d'art, et non pas de vrais peintres d'après Balzac.

L'histoire de Pierre Grassou soutient la pensée De Balzac. Grassou est un excellent citoyen mais un médiocre peintre, et il le sait lui-même. Il parvient néanmoins à faire succès, à exposer certaines de ses oeuvres au Salon et à devenir riche. Il fait donc parti de ces peintres médiocres qui arrivent à se faire une place au milieu du Salon qui auparavant présentait de vraies oeuvres.

Je n'ai personnellement pas compris tout au livre dès la première lecture. le style De Balzac est très particulier et ne m'enchante pas plus que ça. Il est néanmoins sûr que Balzac est un écrivain de renommée qui a su défendre ses idées et ses pensées à travers l'écriture. Il a également beaucoup critiqué la bourgeoisie à travers ses nouvelles!
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Citations et extraits (29) Voir plus Ajouter une citation
Inventer, en toute chose, c'est vouloir mourir à petit feu ; copier, c'est vivre. […] Cette cruelle maxime à laquelle la société doit ces infâmes médiocrités chargées d'élire aujourd'hui les supériorités dans toutes les classes sociales, mais qui naturellement s'élisent elles-mêmes, et font une guerre acharnée aux vrais talents. Le principe de l'élection, appliqué à tout, est faux ; la France en reviendra.
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Toutes les fois que vous êtes sérieusement allé voir l’Exposition des ouvrages de sculpture et de peinture, comme elle a lieu depuis la Révolution de 1830, n’avez-vous pas été pris d’un sentiment d’inquiétude, d’ennui, de tristesse, à l’aspect des longues galeries encombrées ? Depuis 1830, le Salon n’existe plus. Une seconde fois, le Louvre a été pris d’assaut par le peuple des artistes qui s’y est maintenu. En offrant autrefois l’élite des œuvres d’art, le Salon emportait les plus grands honneurs pour les créations qui y étaient exposées. Parmi les deux cents tableaux choisis, le public choisissait encore : une couronne était décernée au chef-d’œuvre par des mains inconnues. Il s’élevait des discussions passionnées à propos d’une toile. Les injures prodiguées à Delacroix, à Ingres, n’ont pas moins servi leur renommée que les éloges et le fanatisme de leurs adhérents. Aujourd’hui, ni la foule ni la Critique ne se passionneront plus pour les produits de ce bazar. Obligées de faire le choix dont se chargeait autrefois le Jury d’examen, leur attention se lasse à ce travail ; et, quand il est achevé, l’Exposition se ferme. Avant 1817, les tableaux admis ne dépassaient jamais les deux premières colonnes de la longue galerie où sont les œuvres des vieux maîtres, et cette année ils remplirent tout cet espace, au grand étonnement du public. Le Genre historique, le Genre proprement dit, les tableaux de chevalet, le Paysage, les Fleurs, les Animaux, et l’Aquarelle, ces huit spécialités ne sauraient offrir plus de vingt tableaux dignes des regards du public, qui ne peut accorder son attention à une plus grande quantité d’œuvres. Plus le nombre des artistes allait croissant, plus le Jury d’admission devait se montrer difficile. Tout fut perdu dès que le Salon se continua dans la Galerie. Le Salon devait rester un lieu déterminé, restreint, de proportions inflexibles, où chaque Genre exposait ses chefs-d’œuvre. Une expérience de dix ans a prouvé la bonté de l’ancienne institution. Au lieu d’un tournoi, vous avez une émeute ; au lieu d’une Exposition glorieuse, vous avez un tumultueux bazar ; au lieu du choix, vous avez la totalité. Qu’arrive-t-il ? Le grand artiste y perd. Le Café Turc, les Enfants à la fontaine, le Supplice des crochets, et le Joseph de Decamps eussent plus profité à sa gloire, tous quatre dans le grand Salon, exposés avec les cent bons tableaux de cette année, que ses vingt toiles perdues parmi trois mille œuvres, confondues dans six galeries. Par une étrange bizarrerie, depuis que la porte s’ouvre à tout le monde, on parle des génies méconnus. Quand douze années auparavant, la Courtisane de Ingres et celles de Sigalon, la Méduse de Géricault, le Massacre de Scio de Delacroix, le Baptême d’Henri IV par Eugène Deveria, admis par des célébrités taxées de jalousie, apprenaient au monde, malgré les dénégations de la Critique, l’existence de palettes jeunes et ardentes, il ne s’élevait aucune plainte. Maintenant que le moindre gâcheur de toile peut envoyer son œuvre, il n’est question que de gens incompris. Là où il n’y a plus jugement, il n’y a plus de chose jugée. Quoi que fassent les artistes, ils reviendront à l’examen qui recommande leurs œuvres aux admirations de la foule pour laquelle ils travaillent : sans le choix de l’Académie, il n’y aura plus de Salon, et sans Salon l’Art peut périr.

Depuis que le livret est devenu un gros livre, il s’y produit bien des noms qui restent dans leur obscurité, malgré la liste de dix ou douze tableaux qui les accompagne.
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Ce peintre, bon père et bon époux, ne peut cependant pas ôter de son cœur une fatale pensée : les artistes se moquent de lui, son nom est un terme de mépris dans les ateliers, les feuilletons ne s'occupent pas de ses ouvrages. Mais il travaille toujours, et il se porte à l'Académie où il entrera. Puis, vengeance qui lui dilate le cœur ! il achète des tableaux aux peintres célèbres quand ils sont gênés, et il remplace les croûtes de la galerie de Ville-d'Avray par de vrais chefs-d’œuvre, qui ne sont pas de lui. On connaît des médiocrités plus taquines et plus méchantes que celle de Pierre Grassou qui, d'ailleurs, est d'une bienfaisance anonyme et d'une obligeance parfaite.
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Ce détestable artiste était un excellent citoyen : il montait sa garde, allait aux revues, payait son loyer et ses consommations avec l'exactitude la plus bourgeoise.[...] Ce peintre, bon père et bon époux, ne peut cependant pas ôter de son cœur une fatale pensée : les artistes se moquent de lui, son nom est un terme de mépris dans les ateliers, les feuilletons ne s'occupent pas de ses ouvrages
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Ce peintre, bon père et bon époux, ne peut cependant pas ôter de son cœur une fatale pensée ; les artistes se moquent de lui, son nom est un terme de mépris dans les ateliers, les feuilletons ne s'occupent pas de ses ouvrages.
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Vidéo de Honoré de Balzac
Deuxième épisode de notre podcast avec Sylvain Tesson.
L'écrivain-voyageur, de passage à la librairie pour nous présenter son récit, Avec les fées, nous parle, au fil d'un entretien, des joies de l'écriture et des peines de la vie, mais aussi l'inverse, et de la façon dont elles se nourrissent l'une l'autre. Une conversation émaillée de conseils de lecture, de passages lus à haute voix et d'extraits de la rencontre qui a eu lieu à la librairie.
Voici les livres évoqués dans ce second épisode :
Avec les fées, de Sylvain Tesson (éd. des Équateurs) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/23127390-avec-les-fees-sylvain-tesson-equateurs ;
Blanc, de Sylvain Tesson (éd. Gallimard) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/21310016-blanc-une-traversee-des-alpes-a-ski-sylvain-tesson-gallimard ;
Une vie à coucher dehors, de Sylvain Tesson (éd. Folio) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/14774064-une-vie-a-coucher-dehors-sylvain-tesson-folio ;
Sur les chemins noirs, de Sylvain Tesson (éd. Folio) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/14774075-sur-les-chemins-noirs-sylvain-tesson-folio ;
Le Lys dans la vallée, d'Honoré de Balzac (éd. le Livre de poche) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/769377-le-lys-dans-la-vallee-honore-de-balzac-le-livre-de-poche.
Invité : Sylvain Tesson
Conseil de lecture de : Pauline le Meur, libraire à la librairie Dialogues, à Brest
Enregistrement, interview et montage : Laurence Bellon
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Les Éclaireurs de Dialogues, c'est le podcast de la librairie Dialogues, à Brest. Chaque mois, nous vous proposons deux nouveaux épisodes : une plongée dans le parcours d'un auteur ou d'une autrice au fil d'un entretien, de lectures et de plusieurs conseils de livres, et la présentation des derniers coups de coeur de nos libraires, dans tous les rayons : romans, polar, science-fiction, fantasy, BD, livres pour enfants et adolescents, essais de sciences humaines, récits de voyage…
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