L'enfant bleu est une de ces histoires de vie poignantes, bouleversantes, qui délimitent les lignes de fuite et les manifestations de l'imaginaire.
Henry Bauchau sait jusqu'où aller lorsqu'il nous fait entrer dans la tête d'un psychotique, faisant accepter aux lecteurs toutes les déchirures du récit, des corps et des destins.
L'auteur nous fait cadeau de cette perception différente du monde, de son langage propre et de l'incapacité à comprendre le monde et ce que s'y passe.
C'est une lecture complexe et déroutante, parfois un peu longue, avec des répétitions, mais qui sait captiver par sa psychologie sûre, persillée de certaines formules décoiffantes, faisant souffler dans le bons sens le vent de cette aventure intime.
Persécutés par un démon intérieur doté de volonté propre, habités par un autre être, obligé de cacher une partie d'eux-mêmes, les victimes de cette maladie, se sentent bâillonnées par un mors invisible.
Nous assistons à la transformation d'un albatros dont les grandes ailes l'empêchent de marcher en oiseau capable de voler, grâce au dévouement et l'acharnement d'une psychanalyste. L'expérience/aventure humaine, nuancée de transfert et contre-transfert, finira par les libérer chacun à leur façon et à trouver leur voie.
C'est doucement poétique, tendre, vivant et surtout si crédible dans cette parole lourde de souffrances.
Une histoire de résilience, de lutte, mais surtout d'espoir.
Non pas l'espoir de guérir les blessures, mais de parvenir à vivre avec, d'être capable de les apprivoiser et d'en tirer du bonheur.