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EAN : 9782707321404
156 pages
Editions de Minuit (14/10/2010)
3.63/5   19 notes
Résumé :
Il est regrettable que les critiques ne recourent pas plus souvent aux changements d'auteur, qui permettent de découvrir les œuvres sous un angle inhabituel. Attribuée à un nouvel auteur, l’œuvre demeure certes matériellement identique à elle-même, mais elle en devient dans le même temps différente et prend des résonances inattendues qui enrichissent sa perception et stimulent la rêverie.
On imagine les effets positifs que pourrait avoir l'extension de cette ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Une nouvelle facétie de méta-littérature par Pierre Bayard, particulièrement réussie !

Dernier livre en date de Pierre Bayard, qui poursuit sur la lancée du "Comment améliorer les oeuvres ratées" (2000) et du "Plagiat par anticipation" (2009) en se proposant cette fois, dans la tradition du Pierre Ménard de Borges, de "relire" certaines oeuvres en ayant changé leur auteur.

Après avoir "préparé le terrain" de son projet en nous entraînant à sa suite dans les auteurs inconnus (Homère était-il en fait une écrivaine, avec Samuel Butler ?, Edward de Vere était-il Shakespeare ?), dans les attributions spéculées (Dom Juan, de Pierre Corneille) ou dans les doubles littéraires (Gary / Ajar, Vian / Sullivan, ou le plagiat surréaliste par anticipation de Lewis Carroll), il nous conduit dans le vif du sujet... "L'Etranger" de Kafka ou "Autant en emporte le vent" de Tolstoï sont bons, mais à la limite un peu évidents. Les choses se corsent, et deviennent franchement hilarantes avec l'échange des deux Lawrence de "L'amant de Lady Chatterley" et des "Sept piliers de la sagesse", puis avec "L'éthique" de Freud et "Le cuirassé Potemkine" d'Hitchcock.

Parmi d'autres, deux exemples issus de ces analyses, toujours aussi sérieuses en apparence, et toujours aussi drôles :
"Aussi étrange que des textes comme "Totem et tabou" ou "Moïse et le monothéisme", l' "Ethique" nous révèle ainsi un autre Freud, plus secret, moins scientiste que le Freud officiel, contempteur de la religion, un Freud qui s'efforce de dépasser les contraintes de la science pour retrouver ses racines juives et tenter de réconcilier la psychanalyse avec une forme minimale de croyance."
Ou encore : "Il y a donc bien une veine historique d'une grande constance dans l'oeuvre de Hitchcock, même si elle n'est pas prédominante. Ne voir en lui, comme on le fait la plupart du temps, qu'un cinéaste désincarné et an-historique, préoccupé essentiellement de raconter habilement des histoires policières et de mettre en scène des blondes énigmatiques, relève donc d'une profonde méconnaissance de son oeuvre."

Un grand Bayard !
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Pierre Bayard, critique littéraire iconoclaste, marche dans les pas de Borges qui nous avait offert un surprenant Pierre Ménard, auteur du Quichotte. Portant plus loin son regard ludique sur la littérature, posture développée dans des ouvrages comme Comment améliorer les oeuvres ratées? ou Comment parler des livres que l'on a pas lus?, Bayard redonne encore ici au lecteur un pouvoir de création en libérant toute la potentialité que recèle la réattribution des oeuvres à de nouveaux auteurs.

Si l'essayiste nous amène dans cette analyse à revoir certaines manipulations biographiques ou créations de pseudonymes issues d'interventions de quelques écrivains sur eux-mêmes (Émile Ajar ou Vernon Sullivan, par exemple), il nous offre également une réflexion sur des théories concernant l'origine de certaines oeuvres comme L'Odyssée (récit écrit par une femme), les pièces attribuées à Shakespeare (ou à Édouard de Vere, un comte d'Oxford) ou celles signées Molière (qui auraient pu l'être par Corneille). Poussant encore plus loin la démarche révélée ici, il se permet d'explorer de nouvelles réattributions, comme L'étranger de Franz Kafka ou Autant en emporte le vent de Tolstoï, expliquant à chaque fois comment ce nouvel auteur vient teinter la lecture du texte original, comment on peut y reconnaître sa plume, sa façon de faire, l'univers de ses personnages comme ses thématiques récurrentes. Puis, dans un nouveau saut qualitatif, Bayard abat certaines frontières théoriques et envisage le Cuirassé Potemkine d'Alfred Hitchcock ou le Cri de Robert Schumann. Délectable.

On pourrait croire que Pierre Bayard a bien choisi ses pairages oeuvres-auteurs pour mieux illustrer ses thèses et dégager ainsi la puissance critique qui peut s'exprimer par le changement d'auteur. C'est probablement le cas, mais dans la mesure où à la fois l'oeuvre et l'auteur appartiennent à ce que lui-même appelle la bibliothèque collective (l'ensemble large de tous les livres déterminants sur lesquels repose une certaine culture à un moment donné) ou encore la bibliothèque virtuelle (un espace ludique de communication sur les livres dans lequel il est admis de parler de livres non lus ou seulement parcourus), on pourrait imaginer que tout pairage puisse révéler, par une nouvelle lecture, un potentiel critique novateur, un regard différent, un angle propre, venant encore confirmer que la lecture constitue un acte foncièrement créateur.

Bayard m'aura encore fasciné par ce curieux essai où la théorie érudite est poussée vers le jeu littéraire, où la thèse exprimée devient ludisme créateur.


Lien : http://rivesderives.blogspot..
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Une écriture toujours aussi agréable et des références toujours aussi variées, mais le contenu est, ma foi, plus sujet à caution que son ouvrage "comment parler des livres que l'on a pas lu". le postulat est le suivant : à chaque chapitre Pierre Bayard imagine qu'une grande oeuvre littéraire, picturale ou cinématographique est réalisée par un autre auteur. de ce fait cela change complètement l'analyse de l'oeuvre en question et permet de mettre à distance une partie des aprioris qui l'accompagnent habituellement. En effet, on appréhende souvent une oeuvre en fonction de son auteur, imaginons qu'il change, cela bouleverse complètement notre rapport à cette oeuvre. Un point de vue tout à fait intéressant mais pas très accessible. de plus, si certains chapitres m'ont tout à fait convaincue, d'autres en revanche, par exemple celui sur Freud, m'ont laissée sceptiques. Il suffit que l'on n'ait pas lu ou vu une des oeuvres pour que les arguments deviennent totalement hermétiques. Point de vue enrichissant me direz-vous puisqu'il sert le propos, à savoir découvrir un artiste ou une oeuvre sous un jour complètement neuf. Effectivement, il n'empêche que quelques passages m'ont ennuyée. Un thème très intéressant pas toujours limpide.
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et si on apprenait déjà à connaître les auteurs et leurs oeuvres avant de se mélanger les pinceaux ? Distrayant, sans plus.
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La démonstration développée dans cet ouvrage est particulièrement convaincante, en plus d'être originale, ludique et pleine d'humour.
L'article complet sur mon blog.
Lien : https://touchezmonblog.blogs..
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Autrement dit, la part d’invention que comporte toute activité de lecture ne s’arrête pas à l’oeuvre, elle s’étend jusqu’à l’auteur, qui est lui-même pris dans ce mouvement de création. On pourrait de ce fait aller jusqu’à dire que, d’une certaine manière, l’auteur fait lui aussi partie de l’oeuvre et en constitue même un personnage, pour être comme elle soumis au travail de réécriture du lecteur.
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Préserver le dynamisme du texte et l’intérêt de la lecture en prônant le recours systématique à l'attribution mobile, c’est donc prendre la mesure de tous les mondes possibles qui se rencontrent en chaque oeuvre et de tous les auteurs qui auraient pu l’écrire, et, loin de s’arrêter à telle filiation définitive, nouer sans cesse, entre les écrivains et les textes, de nouvelles unions.
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Quels que soient les résultats auxquels elle conduit, l'erreur est en effet un moyen de sortir des sentiers battus. Elle offre en tout cas l'occasion - et pour cette seule raison mérite d'être louée - de voir les choses autrement et de faire apparaître les textes sous un jour différent de celui auquel nous sommes habitués.
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[...] tout nom d’auteur est un roman. Loin d’être un simple mot, il attire autour de lui toute une série d’images ou de représentations, tant personnelles que collectives, qui viennent interférer avec le texte et en conditionnent la lecture.
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Videos de Pierre Bayard (15) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Pierre Bayard
Nancy Murzilli invite Pierre Bayard & Yves Citton
Dans l'essai de Nancy Murzilli, la fiction est analysée sous le prisme d'une expérience de pensée. Raconter des histoires, jouer au pirate, interpréter un personnage de théâtre ou un rôle social, faire des projets, mentir, rêver, parler aux fantômes ou aux anges, communiquer avec le règne animal, lire l'avenir dans les tarots ou dans les astres, jeter des sorts, écrire des romans… Souvent perçues comme des échappatoires au réel, ces opérations mentales nous permettent de « savoir » et d'« agir » sans utiliser les moyens ordinaires d'information.
En avril et avec la complicité de la comédienne Anne-Laure Sanchez, Nancy Murzilli tirait les cartes à la Princesse de Clèves. Pour cette deuxième rencontre, elle invite deux « personnages » de son livre, Pierre Bayard et Yves Citton, chercheurs reconnus pour leurs travaux sur les fictions littéraires et sociales.
« Tout écrivain qui a discuté un peu longuement avec un lecteur attentif connaît cette expérience d'inquiétante étrangeté où il se rend compte de l'absence de correspondance entre ce qu'il a voulu faire et ce qui en a été compris. » Comment parler des livres que l'on a pas lus ?, Pierre Bayard
À lire – Nancy Murzilli, Changer la vie par nos fictions ordinaires, Premier parallèle, 2023 – Pierre Bayard, Et si les Beatles n'étaient pas nés ?, éd. de Minuit, 2022 – Yves Citton, Altermodernités des Lumières, Seuil, 2022 – Yves Citton, Faire avec. Conflits, coalitions, contagions, Les liens qui libèrent, 2021.
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