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EAN : 9782853134415
543 pages
Nouvelle Cité (25/08/2003)
4.09/5   11 notes
Résumé :
En écrivant en 1921 cette biographie de Charles de Foucauld, assassiné le 1er décembre 1916, René Bazin révélait au grand public une figure encore assez peu connue, même si certains milieux vantaient déjà sa science et une foi chrétienne missionnaire qui en faisaient un pionnier. De son vivant, Charles de Foucauld avait lui-même émis l'idée de confier à René Bazin le projet d'un livre capable de révéler au public la situation humaine et spirituelle des populations e... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
La canonisation de Charles de Foucauld m'a incité à reparcourir la biographie que René Bazin publia en 1921, cinq ans après la mort de l'ermite, qui reste, à mes yeux, la plus intéressante de toutes, car l'auteur connaissait le religieux, rencontra nombre de personnes qui l'avaient côtoyé lors des différentes étapes de sa vie d'officier, de débauché, d'explorateur, de géographe, de religieux puis de prêtre et eut accès à ses correspondances.

Le titre de l'ouvrage souligne les deux dimensions du personnage.

Explorateur au Maroc, Foucauld est un géographe qui établit la première cartographie du royaume et publia une étude remarquable, honorée d'un prix de la société de géographie, qui montre la curiosité et l'attention aux autres de celui qui parcourut à pied le Maroc. Sa découverte des Marocains et de leur religiosité joua un rôle important dans sa conversion.

Ermite au Sahara, frère Charles vécut humblement et pauvrement au milieu des esclaves et des défavorisés au coeur du Sahara et finit assassiné durant la première guerre mondiale.

Cette biographie contribua à la notoriété du martyre et fut la première pierre du long chemin qui mena à sa canonisation et associe la mémoire de l'écrivain à celle du religieux.

La mémoire de Bazin est également attachée à ses romans « La terre qui meurt » et « Les Oberlé » mais je me demande si cette biographie ne sera pas, dans le temps, son oeuvre marquante de la même façon que la « Vie héroïque de Guynemer » contribue à sauver Henry Bordeaux de l'oubli où sombrent ses romans, que les biographies d'André Maurois survivent mieux que ses romans et que « Marie-Antoinette » immortalise Stefan Zweig.

Une biographie assure-t-elle à son auteur une pérennité supérieure à celle d'un roman ?

PS : mon analyse de l'étude que Mgr Jean-Claude Boulanger consacre à la spiritualité de Charles de Foucauld
Lien : https://www.babelio.com/livr..
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De Saint Paul à Saint François d'Assise en passant par Saint Augustin, les vies de saint racontent souvent la même histoire : une jeunesse impie, une conversion et une vie exemplaire. le bienheureux Charles de Foucauld a d'abord été militaire, élève de Saint-Cyr (dans la même promo que Pétain), puis explorateur au Maroc, incroyant ; il est devenu moine trappiste sur le tard, dans une extrême contrition. Il était attiré par une solitude et une mortification que n'assouvissait pas la vie monacale. On peut dire qu'il est donc retourné aux sources de l'érémitisme chrétien: la vie dans le désert.
L'Eglise se méfie de ces extrêmes humilités qui peuvent cacher un grand orgueil, l'enfer est pavé de bonnes intentions, mais Charles de Foucauld s'est toujours soumis à sa hiérarchie et c'est selon la volonté de l'Eglise et dans un contexte très particulier qu'il est parti, hors de toute communauté, littéralement prêcher dans le désert. de bonnes intentions, il n'en manquait pas, il a racheté avec ses pauvres moyens quelques esclaves, il a tenté quelques douces conversions par l'exemple sans beaucoup de résultat ; l'Afrique du Nord était toujours hermétique au christianisme, malgré la présence française en Algérie depuis 1830. Il écrit en 1905 : « Au Maroc, grand comme la France, avec dix millions d'habitants, pas un seul prêtre à l'intérieur ; au Sahara, sept ou huit fois grand comme la France et bien plus peuplé qu'on ne le croyait autrefois, une douzaine de missionnaires ! Aucun peuple ne me semblait plus abandonné que ceux-ci… ».
On peut accuser les Français de tous les maux en Afrique du Nord, mais certainement pas d'avoir fait du prosélytisme religieux, et si aucun effort n'avait été fait jusqu'en 1905, tout esprit sensé pouvait juger que rien ne serait jamais fait de ce côté-là. Charles de Foucauld était une exception, il croyait dur comme fer à la mission civilisatrice de la France : « Si nous sommes ce que nous devons être, si nous civilisons, au lieu d'exploiter, l'Algérie, la Tunisie, le Maroc seront, dans cinquante ans, un prolongement de la France. Si nous ne remplissons pas notre devoir, si nous exploitons au lieu de civiliser, nous perdrons tout, et l'union que nous avons faite de ce peuple se tournera contre nous. »
Cependant, il se faisait peu d'illusions sur la conversion des Arabes musulmans, au contraire il voyait leur influence s'accroître. C'est plutôt sur les antiques Berbères, dont la foi lui paraissait plus superficielle, qu'il comptait s'appuyer pour introduire le christianisme. Il part donc s'installer à Tamanrasset, un village de « vingt feux », deux trois maisons et quelques tentes, en plein milieu des territoires touareg du Hoggar, seul. Dans cette solitude, son action ne pouvait se limiter qu'à la simple présence et l'exemple d'une vie humble et charitable. René Bazin évoque des rumeurs selon lesquelles le Père de Foucauld aurait poussé la tolérance de l'Islam jusqu'à réciter des versets du Coran lors de funérailles, il le nie, mais il rapporte aussi le témoignage d'un certain docteur Hérisson qui a vu Charles de Foucauld encourager quelques musulmans tièdes à faire leur prière. Voilà où il en était, à essayer de rendre ces nomades sédentaires, à leur apprendre à récolter la nourriture, la laine et à ne pas perdre tout lien avec la religion, quelle qu'elle soit. La base : se rendre acceptable par ses bienfaits. Et aussi préparer la voie aux futurs missionnaires en étudiant la langue et la culture. Il a écrit un dictionnaire et traduit des poésies.
Avec tout ce qu'il s'est passé en un siècle, on rêve beaucoup sur ce qu'aurait pu devenir l'Afrique du Nord, si les conseils du Père de Foucauld avaient été suivis et sans quelques évènements. Il ne s'agit pas tellement de la loi sur la laïcité, que René Bazin semble déplorer. Elle n'a certainement pas favorisée les missionnaires, mais s'il n'y en avait que cinquante-six en 1910, ce n'était pas la faute à cette loi, c'est qu'il n'y avait jamais eu une réelle volonté de christianiser ces colonies avant. C'est toujours l'exploitation économique qui avait primée, comme le regrettait Charles de Foucauld. Par contre, il y a les guerres européennes et l'Allemagne dépourvue d'empire colonial, qui ont certainement jouées un grand rôle dans le processus de décolonisation, à commencer par la mort du Père de Foucauld.
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Ce n'est pas si facile de trouver une bonne biographie d'un homme tel que Charles de Foucauld. Un biographe catholique aura tendance à passer très vite sur la première partie de sa vie, trouvant probablement qu'une bringue pareille, ça fait désordre, et un biographe totalement fermé sur le sujet de la religion (oui, vous me direz pourquoi écrire une biographie de Charles de Foucauld alors? Les gens sont plein de contradictions mais c'est comme ça) , au contraire sera complètement perdu par sa conversion et verra dans sa décision d'aller s'installer au beau milieu des Touaregs non pas la volonté de vivre dans la pauvreté du Christ et de témoigner de celui-ci mais une quelconque machination colonialiste.
Cette biographie-ci a l'avantage d'avoir été écrite il y a tellement longtemps que l'auteur est allé interviewer des personnes ayant connu Foucauld et peut ainsi offrir des témoignages, pas seulement des faits déformés par les années. C'est tout de même très marqué par l'époque où René Bazin vivait, un éditeur lui dirait probablement aujourd'hui que c'est franchement paternaliste pour les habitants de l'Afrique du Nord, quoique moins que je le craignais.
C'est un témoignage d'une époque révolue, autant qu'une biographie, et cela la rend doublement intéressante....quoiqu'avec des longueurs, il y a des moments où j'ai du lutter!
C'était vraiment une figure étonnante, aussi bien jeune, avant sa conversion, où il pénétra pour jouer les géographes déguisé en juif dans le Maroc interdit aux chrétiens, qu'ensuite, ascète et ermite qui ne rêvait que d'être rejoint par d'autres prêtres que pour former une communauté fraternelle mais qui jamais ne fut exaucé...entre autres parce que les instances du clergé trouvaient que les règles qu'il s'imposait étaient si dures que nul autre n'aurait pu y résister !

Malgré ses longueurs et son style passé de mode, je suis bien contente d'être arrivée au bout de ce portrait d'un homme exceptionnel.



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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Un chacal dévalisait le poulailler des clarisses. Il se glissait dans un jardin, par un certain passage qu'on connaissait bien, entre deux roches, enlevait une poule qu'il emportait encore criant; le lendemain, il enlevait la meilleure pondeuse, et, s'il y avait ensuite un peu de répit, c'est que le sire aux oreilles pointues rendait visite aux basses-cours des voisins. Il fallait débarrasser le pays de cette bête puante et voleuse. Et qui le ferait plus aisément qu'un ancien officier de cavalerie? On avait emprunté un fusil de chasse à un agent consulaire. Charles de Foucauld se mit à l'affût, à bonne distance des roches, et commença d'attendre le chacal. Mais à peine se fut-il assis sur une pierre, l'arme chargée posée sur ses genoux, qu'il se mit à réciter le rosaire, selon la coutume qui lui était chère, et à méditer les mystères joyeux, douloureux, glorieux. Le temps, pour lui, passait délicieusement. [...] Le chacal n'en demandait pas plus. Il vint en trottinant, s'arrêta avant de se montrer, reconnut que l'ennemi avait l'esprit ailleurs, pénétra dans le poulailler, tua net une poule choisie, et, au galop cette fois, l'emporta. Quand les tourières vinrent interroger Frère Charles, et lui demandèrent des nouvelles de la chasse:
-Je n'ai rien vu passer, répondit-il. Ce fut son premier et son dernier affût dans les collines de Nazareth.
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Cette douceur de la solitude, je l'ai éprouvée à tout âge, depuis l'âge de vingt ans, chaque fois que j'en ai joui. Même sans être chrétien, j'aimais la solitude en face de la belle nature, avec des livres, à plus forte raison quand le monde invisible et si doux fait que, dans la solitude, on n'est jamais seul. L'âme n'est pas faite pour le bruit, mais pour le recueillement, et la vie doit être une préparation du ciel, non seulement par les oeuvres méritoires, mais par la paix et le recueillement en Dieu. Mais l'homme s'est jeté dans des discussions infinies : le peu de bonheur qu'il trouve dans le bruit suffirait à prouver combien il s'y égare loin de sa vocation.
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Il ne faut jamais hésiter à demander les postes où le danger, le sacrifice, le dévouement sont plus grands : l’honneur, laissons-le à qui le voudra, mais le danger, la peine, réclamons-les toujours. Chrétiens, nous devons donner l’exemple du sacrifice et du dévouement. C’est un principe auquel il faut être fidèle toute la vie, en simplicité, sans nous demander s’il n’entre pas de l’orgueil dans cette conduite : c’est le devoir, faisons-le, et demandons au Bien-Aimé Époux de notre âme de le faire en toute humilité, en tout amour de Dieu et du prochain…
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Il n'est pas douteux que la foi à l’Église et à la morale chrétienne avait été rejetée. Avait-elle disparu? C'est une autre question, et je crois plutôt qu'elle se tenait très loin, invisible, comme une terre qu'un navigateur a abandonnée, où il a la ferme intention de ne pas revenir, mais dont il sait qu'elle existe, dont il aime encore, sinon les jours qu'il y a passés, du moins plusieurs des habitants qui vivent là, et qui sont de cette patrie ancienne. Tant qu'on aime un chrétien, on aime encore un peu le Christ qui l'a formé.
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Si vous saviez combien je désire finir ma pauvre et misérable vie, si mal commencée et si vide, de cette façon dont Jésus a dit, le soir de la Cène, "qu'il n'y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ce qu'on aime" ! J'en suis indigne, mais je le désire tant ! Les bruits de guerre reprennent... c'est un état très doux pour l'âme : se sentir toujours si près, si au seuil de l'éternité, c'est une douceur extrême et en même temps cela est bon pour l'âme.
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