Simone a visité les Etats-Unis pendant quelques mois et a sillonné le pays en train, en bus greyhound, en voiture brinquebalante mais aussi en avion. On réduit souvent son épisode américain à Nelson Algreen mais le récit de sa découverte des Etats-Unis est passionnant !
Quel bonheur de parcourir ce continent avec son regard !
Elle nous offre un point de vue acéré sur le pays dans les années 40, sur la ségrégation, les prémisses du Mc Carthysme mais surtout sur tous ces petits détails qui nous rendent plus perceptibles les mentalités américaines, ce qui nous les rend si proches et si lointains. le mot juste, le sens du détail grâce précisément à son attitude de touriste d'est en ouest ! Un équilibre parfait pour explorer le pays !
Nous avons ainsi Simone visite le Grand canyon, « les paysages non plus ne donnent rien si on ne leur donne pas quelque chose de soi », Simone sirote des zombies, Simone tombe en panne sur une route perdue en Californie, Simone recherche des bons plans pour sortir à New York (et en fait partout), « nous restions à la surface des Lumières, des bruits, de toutes les promesses qui palpitent au soir dans une grande cité : nous ne réussirions pas à plonger »
Simone relate la solitude des grandes villes, Simone nous fait prendre conscience de la générosité des américains…
Et quel plaisir de voir que nous partageons le même amour des longs voyages en train ! « Chacun réalise une solitude absolue [..] Non seulement me voilà séparée de tout mais je ne me situe plus en aucun point de l'univers, rien qu'un passage ».
Je le garde précieusement pour le relire avant un prochain voyage ou pour rêvasser❤️
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entendu sur la 1ère 23/10/2017
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13 mars : « Bien sûr, nous ne pensons pas », me dit dans l'après-midi Elsa Maxwell avec arrogance. C'est une célèbre journaliste qui écrit des billets d'un bon sens éclairé dans la presse réactionnaire – je veux dire dans la grande presse. Il y a eu de suite un coup de foudre d'anthipatie entre ce Clément Vautel américain et moi. Cette vieille femme volubile et lourde, engoncée dans de longs satins noirs incarne tous les défauts de l'Amérique sans en avoir les qualités. Ils revêtent chez elle une forme caricaturale. Elle me fait lire d'un air satisfait la série d'âneries malveillantes qu'elle a débitées à ses lecteurs sur la vie intellectuelle de la France d'aujourd'hui ; un à un je désigne les auteurs et les livres qu'elle cite : l'avez-vous lu ? Et celui-ci, l'avez-vous lu ? Non, elle n'a rien lu et elle s'en vante. « En Amérique, dit-elle, personne n'a besoin de lire parce que personne ne pense. Ainsi, regardez-moi : des centaines de milliers de gens ne pensent rien d'autre que ce que le leur dis de penser dans mon billet quotidien : et moi-même je ne pense pas. C'est très bien ainsi. Quand on pense, on perd son temps, c'est l'anarchie. Nous ne pensons pas, mais nous n'en avons pas besoin parce que nous avons un instinct. Regardez Truman : ce n'est pas qu'il pense ; mais il a un instinct. Sa politique est une réussite de premier ordre parce qu'il a le bon instinct. »
743 - [Folio n° 2943, p. 239-240]
6 mars : Il y a un régionalisme intellectuel, en Amérique ; Henry Miller n'a pas beaucoup d'importance à New-York, mais sur cette côte ouest où il habite, on le tient pour un génie. Beaucoup de ses livres sont interdits ; mais on s'en passe des copies sous le manteau ; il y en a même des morceaux qui sont enregistrés sur disques. La librairie ou V. me conduit rappelle un peu la "Maison des amis des livres" d'Adrienne Monnier ; elle est toute petite, avec dans le fond une minuscule galerie de tableaux. Beaucoup des noms que je lis sur les rayons me sont inconnus ; je voudrais bien me renseigner sur la nouvelle génération d'écrivians, je demande conseil ; les réponses que je reçois ne se recoupent gère avec celles qu'on m'a données à New-York. Sur les anciens aussi, à part Faulkner et Melville, il semble que personne ne soit d'accord. Certes, en France aussi nous avons nos coteries, nos préjugés, nos partis pris : mais ici l'indécision marque un certains désarroi ; les écrivains tournent le dos à leur passé sans pressentir encore leur avenir.
740 - [Folio n° 2943, p. 199-200]
10 avril : A Paris, la vie littéraire finit parfois par prendre le pas sur la littérature même, ce qui n'est pas un bien ; mais l'absence de toute vie littéraire est un mal encore plus débilitant. On comprend que Hollywood et tous les mirages de la facilité tentent dangeureusement l'écrivain doué ; on comprend que ceux qui créent dans la peine se découragent. Il faut beaucoup d'ascétisme et de vigueur pour « tenir » longtemps. C'est ce qui explique un phénomène qui m'a longtemps paru déconcertant : que tant d'écrivains après un livre très bon ou tout au moins plein de promesses se soient tus définitivement. On peut citer de longues listes de ces enfants uniques. Ils sont une des preuves les plus saisissantes des possibilités qu'on trouve en ce pays chez les individus pris un à un et de la manière dont la civilisation américaine les tue.
750 - [Folio n° 2943, p. 364]
7 mai - L'écrivain n'a pas la possibilité de remuer profondément l'opinion publique ; certains d'entre les jeunes en sont à ce point conscients qu'ils se tournent vers la radio ; ils ne pensent pas trouver dans les livres un moyen de faire entendre leur voix. Il faut compter aussi avec le dirigisme littéraire dont me parlait Farrell et qui ne donne leurs chances qu'aux auteurs neutres ou conformistes. Enfin même si un écrivain arrive à faire pénétrer ses idées danas les masses, celles-ci sont tellement inertes, si dépourvues de tout instrument d'action, qu'il n'a pas gagné grand-chose.
623 - [Folio n° 2943, p. 478]
23 février : J'ouvre un livre. Je vais pouvoir lire à longueur de temps, comme ces étudiants si laid qu'il ne me distraira pas. La lecture charmera ces heures est aussi le qui me permettra d'en goûter tout l'indolent loisir. Les mots : Orient-express, transsibérien, m'ont toujours fait rêver ; je souhaitais faire en train un voyage de plusieurs jours ; alors, comme dans la Maison à Vapeur de Jules Verne, le train devient vraiment une demeure ; et c'est une demeure si insolite que la vie échappe à la routine quotidienne des jours et des nuits, elle se déroule avec une merveilleuse gratuité. Ce n'est sans doute pas un hasard si le souvenir de Jules Verne, auquel je n'ai pas pensé depuis vingt ans, me poursuit à travers l'Amérique : c'est un pays de prodiges mécaniques où se réalisent, à l'échelle des adultes, les imaginations enfantines de la « bibliothèque des voyages ».
715 - [Folio n° 2943, p149-150]
Vous connaissez Simone de Beauvoir, mais peut-être pas sa soeur Hélène. Pourtant, cette artiste peintre s'est elle aussi engagée pour la cause des femmes.
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