AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de ATOS


« La perspective que nous adoptons, c'est celle de la morale existentialiste. Tout sujet se pose concrètement à travers des projets comme une transcendance ; il n'accomplit sa liberté que par son perpétuel dépassement vers d'autres libertés ; il n'y a d'autre justification de l'existence présente que son expansion vers un avenir indéfiniment ouvert. Chaque fois que la transcendance retombe en immanence il y a dégradation de l'existence en «  en soi », de la liberté en facticité ; une chute est une faute morale si elle est consentie par le sujet ; si elle lui est infligée, elle prend la figure d'une frustration et d'une oppression ; elle est dans les deux cas un mal absolu ».
Voilà posé en introduction l'intérêt de cet essai .
« Combattre le mal absolu », ce mal qui s'incarne dans le seul fait de refuser à celles, pourtant semblables, considérée comme « Autres», la possibilité de s'élever afin d'atteindre dans le plein épanouissement de ses libertés la complétude infinie et indéfinie d'elle même. Liberté, donc, mais avant études, analyses, dissection des mots, des mythes, des croyances, des systèmes sociaux, culturels, cultuels, économiques, des gouvernances, des lois, us, coutumes et rituels. Et cela en procédant à une première étude « microcosmique » du monde du vivant et en élargissant la focale de sa pensée sur l'échelle macro historique de l'humain. L'humain. Fait d' « humaine nature »… Qui ne cesse jamais de vouloir classer ses membres d'une façon pyramidale. Sexe, race, nations, continent, religion. Établissant moult évaluations perverses lui permettant de croire en l'établissement perpétuel de son règne. Force est de constater que cette évaluation architecturale est sous gouvernance masculine. Nous sommes nés dans une société dite moderne gouvernée par un système bourgeois patriarcal. Et même si en occident la condition de la femelle humaine a évolué, certaines libertés acquises, même si on nous vend trop vite l'image d'une femme modèle moderne, plus de la moitié de l'humanité sait que chaque espace gagné doit être chaque jour défendu, et qu'il reste encore de nombreux murs à abattre dans les tous les temples que les pouvoirs ont dressé pour se protéger .
Alors cet essai, n'est pas dépassé. Il n'est pas d'actualité. Parce que nous ne voulons pas ici faussement faire entendre que son contenu relèverait de l'épisodique. Il est Actualité. Comme tous les domaines sur lesquels la philosophie élabore sa pensée. Il touche à la définition de l'humain, de son identité, de son histoire, de ce qui demain lui permettra d'admettre la perfectibilité de l' « en soi » de chacun de ses membres. En un mot de se réaliser à travers la connaissance approfondie de son être rapporté à l'histoire d'un Ensemble.
La « nature », voilà le point de départ.Un point d'interrogation. Par nature, l'humaine porte la vie. Par nature il est donné à l'humaine la possible de porter la descendance. Disons simplement, que telle est établie sa destinée biologique. Un possible qui devint au cours de notre évolution une nécessite, un fait, plus ou moins un bienfait, jusqu'à en devenir , par concept mental, un devoir. Nous touchons là à l'idée de permanence, à l'idée même d'immortalité, donc à l'idée de la vie, de la Mort, de l'être et de son devenir face à la conception de son avenir. « C'est en exerçant l'activité sexuelle que les hommes définissent les sexes et leurs relations comme ils créent le sens et la valeur de toutes les fonctions qu'ils accomplissent : mais elle n'est pas nécessairement impliquée dans la nature de l'être humain ».
Libération donc face au précepte. Se libérer d'une destinée dite « naturelle ». Faire le choix. Être comme cela ou comme cela, par choix, mais opter pour la transcendance.
Faire usage ou non de sa possibilité d'être. Mais cela à la seule condition d'être totalement libre de ce choix et conscient du renoncement à soi même qu'il pourrait engendrer.
«  la femme est adaptée aux besoins de l'ovule plutôt qu'à elle-même.De la puberté à la ménopause elle est le siège d'une histoire qui se déroule en elle et qui ne la concerne pas personnellement ».
La destinée biologique ne peux soumettre le destin unique d'un être. Tendre à se libérer , se désencarter, de ce qui serait appelée loi naturelle, voir d'un inconscient naturel, d'une objectivité essentielle, et cela par la pleine conscience des capacités son être, par une subjectivité existentielle. La sexualité de notre corps fait partie intégrante de nous, mais il n'explique pas tout. Notre rapport au corps, à la matière,leur imprégnation, implication, interaction, leur niveau de langage, il faut comprendre, questionner l'ensemble. Ainsi il faut interroger le rapport de l'humain au monde. Et pour cela comprendre l'histoire de ce rapport.
« L'homme n'est pas une espèce naturelle : c'est une idée historique. » Merleau-Ponty.
L'humaine fut, et est majoritairement, toujours aliénée, reléguée, maintenue, en son état d'immanence. Elle incarne l'immanence. Celle qui maintient, celle qui transmet, celle qui doit veiller à le reproduction. Reproduction, maintien, génération de la chair. Soutenue par l'élaboration pure et simple d'un conservatisme de lois veillant à ce que ce projet soit assujetti et maintenu.
N'est elle pas devenue l'arbre du fruit mais également la pécheresse du jardin ? Sainte ou démon. L'humain qui la définit ainsi ne peut choisir. Entre ces deux mensonges se cachent sans aucun doute la question de propre incarnation. L'humain ne doit donc plus choisir, mais se réfléchir. C'est l'heure sans doute , le siècle, le moment de la confrontation.
« La femme n'est pas une réalité figée, mais un devenir ; c'est dans son devenir qu'il faudrait la confronter à l'homme, c'est à dire qu'il faudrait définir ses possibilités : ce qui fausse tant de débats c'est qu'on veut la réduire à ce qu'elle a été, à ce qu'elle est aujourd'hui, cependant qu'on pose la question de ses capacités ; le fait est que des capacités ne se manifestent avec évidence que lorsqu'elles ont été réalisées ; mais le fait est aussi que lorsque l'on considère un être qui est transcendance et dépassement, on ne peut arrêter les comptes ». « Dans l'humanité les « possibilités » individuelles dépendent de la situation économique et sociale. » Dans un sens positif ou négatif. Ainsi peut on voir des bourgeoises totalement aliénée à leur situation sociale, et d'un autre côté voir une ouvrière prendre parole et pleine conscience de soi. L'inverse est tout autant possible. le fait est que la relation sociale et économique ne doit à aucun moment être écarté de l'analyse historique. Cette relation est un facteur, le terreau dans lequel se développe et perdure le mal mais il reste à étudier le germe et l'enracinement de l'idée qui a créé l'image de « l'Autre ».
L'humain, le mâle, quant à lui veut vivre sa transcendance. Se déplacer, aller plus loin, se dépasser, s'élaborer lui même. Inventer, risquer, créer. Découvrir, explorer, trouver de nouvelles prairies. Enfin : posséder. Transcendance vers une liberté. Une conquête que lui imposerait sa destinée biologique…. le biologique explique t il la propriété privée, le libéralisme, l'intérêt outrepassant le besoin, la guerre, les extrémisme politique et religieux ?… On voit bien que la nature de l'homme ne tient pas , ne suffit pas face à l'idée de la transcendance, mais il est étrange de voir comment par contre on voudrait qu'un naturel féminin colle parfaitement à l'idée de l'immanence...
« Mais l'humain n'est pas une espèce naturelle »...Le cerveau de l'humain est bien trop grand pour se loger éternellement dans une caverne... L'inconfort s'installe.
«  C'est dire que nous intéressant aux chances de l'individu, nous ne nous définirons pas ses chances en termes de bonheur, mais en terme de liberté ». Être heureux ? Être Libre ? Faut il choisir ? Que dit le maître ? Que doit comprendre l'esclave, ? Quel visage prend le seigneur ? A quel titre ? de quel droit ?
Quelle est notre histoire ? Quels furent à travers l'histoire de l'humanité notre rapport au corps, à l'autre, à la sexualité, au désir, au plaisir, à l'amour, à la procréation, à l'avortement,
Immanence pour l'Autre. Mais qui est l'Autre ? Quel est cette idée de l'Autre ? Quand , pourquoi et par qui cette Autre a t elle été construite ? L'Autre, la femelle. Celle qui est différence, inconnue, celle qui attire et révulse à la fois, la mère, le ventre de la mère, la femme, la charnelle celle à laquelle on s'attache, à laquelle on se lie, se confie, et que l'on combat « en soi ».
L'Autre que l'on ne reconnaît pas en son « en soi ». L'Autre éternelle et immuable, qui recèle et qui conserve, qui a les bras remplis de gerbes , de descendance, l'Autre qui, ainsi faite, a les deux bras tellement remplis qu'elle ne s'accomplit pas ailleurs qu'elle ne le doit.

Alors Beauvoir va vite très vite, la tâche est immense, l'humain s'est mis en marche depuis si longtemps et sur la terre entière.
L'Autre, que l'on vénère, que l'on craint, objet de magie, de péché, tantôt déesse tantôt sorcière, sourcière /incendiaire. Bref l'Autre, la presque demeurée animale.
L'humanité a t elle élaborer la théorie de la différence par crainte de faire face à sa plus élémentaire substance ? A t on crée un leurre, une fausse idée, perverti l'altérité?
le premier tome du deuxième texte est extrêmement dense, mais il contient ce qui peut aujourd'hui nous faire mieux comprendre la complexité de toutes les interactions et réactions humaines qui ne cessent de surgirent, ressurgirent, naître et mourir. L'Autre, est ici est femelle puisque tel est le sujet de cet essai. Mais cette réflexion portée sur l'Autre peut nous amener à établir le schéma mental de l'élaboration de tout Autre. L'Autre faisant toujours face à soi il convient donc d'en un premier temps de ne pas méconnaître cet en soi à partir duquel nous élaborons depuis des millénaires tous les déclinaisons, inclinaisons, torsions, et perversions d'un réel à partir desquels nous inventons toujours l'Autre qui n'est en fait que l'image retour de nous mêmes.
Bien sûr, beaucoup , notamment ceux qui se considèrent exemptés par ce sujet du seul fait du privilège d'être « bien nés » relégueront cet essai au rayon d'une histoire dépassée. D'autres l'ignoreront. Mais pour celles qui n'y ont malheureusement pas accès. C'est à celles là , mais aussi à ceux, et celles également qui les maintiennent et les contraignent à vivre un état qu'ils déclarent naturelles, à tous , il faut que ce livre soit lu, enseigné, traduit, transmis, étudié, discuté. Qu'il soit ainsi débattu de cet essai. «  La biologie ne suffit pas à fournir une réponse à la question qui nous préoccupe : pourquoi la femme est elle Autre ? Il s'agit de savoir comment en elle la nature a été reprise au cours de l'histoire ; il s'agit de savoir ce que l'humanité a fait de la femelle humaine. »
Ce n'est pas un essai appelant une révolution mais une totale exhortation à notre évolution.
Dans « les proscrits » , en une seule phrase, Balzac a fait passer Dante de la verticalité à l'horizontalité.
Dans cet essai, Beauvoir, invite l'humaine à dépasser une horizontalité par la pensée de sa verticalité, un ordre que l'auteure a souhaité transmettre pour donner plein sens au devenir de l'humanité. Lecture à poursuivre.

Astrid Shriqui Garain
Commenter  J’apprécie          221



Ont apprécié cette critique (11)voir plus




{* *}