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EAN : 9782707319524
211 pages
Editions de Minuit (02/03/2006)
3.47/5   54 notes
Résumé :
Mercier et Camier nous invitent au voyage.
La contrée qu'ils vont parcourir, une île jamais nommée, est parfaitement reconnaissable. C'est l'Irlande, merveilleusement décrite ici, avec ses landes de bruyères, les jetées de ses ports lancées vers le large pour enlacer la mer, ses sentiers parmi les tourbières, les écluses du canal de Dublin, tout un paysage si cher à Samuel Beckett et si souvent présent en filigrane dans toute son oeuvre. Le but du voyage de M... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Fait notable, ce texte de 1970 a été entièrement composé par Beckett en français. Absurde et dérisoire, il est nécessairement vrai. Dès les premières lignes, un rapport tout particulier est créé entre le narrateur (omniscient ?) et le lecteur. Serait-ce de la connivence, de la dépendance ? En tout cas, le narrateur impose son autorité : les faits relatés, il prétend les connaître. Un peu comme dans les contes populaires roumains "car si n'étais point ne conterais" (și dacă n-ar fi fost nu s-ar mai povesti), il est interdit aux lecteurs de douter de la véracité du récit : "Le voyage de Mercier et Camier, je peux le raconter si je veux, car j'étais avec eux tout le temps". D'ailleurs, Mercier a la sensation qu'ils sont accompagnés, puisqu'il sent "comme la présence d'un tiers"… "Elle nous enveloppe. Je l'ai senti depuis le premier jour. Je suis pourtant rien moins que spirite". Qui est-ce donc : le narrateur omniscient, omniprésent, ou bien Dieu ? Les deux voyageurs n'ont qu'une seule certitude lorsqu'ils commencent à entreprendre ce périple : "celle de ne pas se lancer à la légère dans l'aventure" Et combien de temps ? "ce n'est pas tous les jours qu'il est donné de couper en quatre un cheveu de cette qualité. Car du moment que l'on vit, bernique." Je relève ici que ce symbole de déception n'est qu'une patelle, un mollusque gastéropode. Si l'on considère que le voyage est la métaphore de la tragédie de la naissance, un rapprochement avec "Fin de partie" devient possible. le protagoniste de la pièce de théâtre, Hamm, affirme : "Vous êtes sur terre, c'est sans remède !" Cette vie doit être vécue, c'est tout. Il faut faire le voyage et avancer, même au rythme d'un mollusque. Il revient donc au narrateur investi de sa prérogative de créateur et artiste de reconstituer la nature. le dernier rapprochement que je vous propose c'est avec Marguerite Yourcenar qui, dans "Nouvelles orientales", raconte l'histoire cruelle d'un peintre condamné à mort qui s'échappe en se glissant dans un tableau représentant la mer : "Comment Wang-Fô fut sauvé" : Wang-Fô et son disciple "disparurent à jamais sur cette mer de jade bleu que le peintre venait d'inventer". Si le cadre du roman de Beckett ne connaît pas les mers et les frontières, il ressemble plutôt à la campagne irlandaise où la mer n'est finalement jamais trop loin. La pluie pourrait d'ailleurs être un autre symbole de la dissolution, disparition imminente : "c'est tordant mais on n'arrive pas à se tordre, à se dissoudre dans le sourire mille fois souri." C'est dans un bar qu'à la fin du roman les deux personnages tenteront, en citadins invétérés, de se noyer. Les derniers mots du roman sont : [le bruit de] la pluie sur l'eau.
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Deux hommes veulent partir. Ils mettent deux heures à se trouver au même moment au même endroit, cassent leur parapluie, oublient leur sac, perdent leur vélo, retournent chez une copine qui répare les parapluies et commentent abondamment toutes ces péripéties.
Quand ils parviennent à partir, c'est pour un sinistre voyage. Métaphore de notre triste condition, de nos vaines gesticulations, de la convergence de tous nos efforts vers l'épuisement et le néant.
Et puis soudain, au détour d'une page, cette phrase : « Ce qui donne, don précieux entre tous, de la vraisemblance à cette façon de voir, c'est qu'à peu de temps de là ... »
Qui d'entre vous avait remarqué la présence du verbe donner dans cette expression tristement mathématique ?
Heureusement, le vieux Beckett veille…
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Les pérégrinations de ces deux personnages, attachants, souvent en désaccord mais toujours unis dans la difficulté m'ont laissé dubitatif. Je n'ai malheureusement réussi à m'imprégner de leur univers, de leur philosophie, de leur motivations...mais n'est ce pas exactement vers cette incompréhension que veut nous mener l'auteur? Je ne pense pouvoir me forger un réel avis pour l'instant.
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le premier roman de Beckett que j'ai lu, il y a des années, nombreuses, de cela. Celui qui est sans doute le plus facile d'accès, surtout quand on vient de son théâtre. Celui qui est peut-être le moins cruel, où l'humour est le plus direct.
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Citations et extraits (18) Voir plus Ajouter une citation
Le voyage de Mercier et Camier, je peux le raconter si je veux, car j'étais avec eux tout le temps.
Ce fut un voyage matériellement assez facile, sans mers ni frontières à franchir, à travers des régions peu accidentées, quoique désertiques par endroits. Ils restèrent chez eux, Mercier et Camier, ils eurent cette chance inestimable. Ils n'eurent pas à affronter, avec plus ou moins de bonheur, des moeurs étrangères, une langue, un code, un climat et une cuisine bizarres, dans un décor n'ayant que peu de rapport, au point de vue de la ressemblance, avec celui auquel l'âge tendre d'abord, ensuite l'âge mûr, les avaient endurcis.
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Un homme entra dans la salle. Il portait une casquette, un trench-coat bardé de pattes et de poches, une culotte de cheval et des chaussures d'alpiniste. Ses épaules encore vaillantes pliaient sous le poids d'un sac plein à craquer et il tenait à la main un immense bâton. Il traversa la salle d'un pas incertain, en traînant bruyamment ses semelles cloutées.
Il est des personnages dont il convient de parler dès le début, car ils peuvent disparaître d'un moment à l'autre, et ne jamais revenir.
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Des vitrines s'éclairaient, d'autres s'éteignaient, cela dépendait de la vitrine. Les rues glissantes s'emplissaient de gens se pressant apparemment vers un but déterminé. L'air s'imprégnait d'une sorte de bien-être courroucé et las. En fermant les yeux on n'entendait pas une voix, seulement l'immense halètement des pas. Dans ce silence de horde ils avançaient, comme ils pouvaient. Ils se tenaient sur le bord extérieur du trottoir, Mercier devant, la main sur la guidon, Camier derrière, la main sur la selle, et la bicyclette glissait dans la rigole, à leur côté.
Te me gênes plus que tu ne m'aides, dit Mercier.
Je ne cherche pas à t'aider, dit Camier, je cherche à m'aider moi.
Alors tout est bien, dit Mercier.
J'ai froid, dit Camier.
Il faisait froid, en effet.
Il fait froid, en effet, dit Mercier.
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L'instant que Mercier hésite, avant de rendre ce salut, inattendu pour en dire le moins, Camier en profite pour reprendre son chemin. On ne s'en sort plus de ce présent. Mais même les morts on peut bien les saluer, rien ne s'y oppose, c'est même bien vu, ils n'en profitent pas mais cela fait plaisir aux croque-morts, cela les aide à croquer, et aux amis et aux parents, et aux chevaux, cela les aide à se croire en survie, à celui qui salue cela fait du bien aussi, c'est vivifiant. Mercier ne se laisse pas démonter, que non, il lève la main à son tour, la bonne, l'hétérologue, dans ce geste large et complaisamment désintéressé qu'ont les prélats., dédiant à Dieu des portions de matière favorisées. Que je suis bon, dit Mercier, meilleur que s'il me voyait. Mais pour en finir avec ces délires, arrivé à la première fourche (finie la lande !) Camier s'arrêta (enfin un petit passé) et son coeur battait (encore un) plus fort à la pensée de ce qu'il allait mettre dans ce suprême salut gravide à en péter de délicatesse sans précédent.
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Bientôt, ils n'avancèrent plus qu'en titubant. On avance très bien en titubant, moins bien évidemment qu'en ne titubant pas, moins vite surtout, mais on avance.
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