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EAN : 9782070380695
176 pages
Gallimard (25/08/1988)
3.33/5   51 notes
Résumé :
Harrouda n'apparaît que le jour. Elle commence par lâcher ses cheveux en avant et tourne sur place. Puis elle relève sa robe. Les enfants n'ont que le temps d'y croire, déjà le rideau est baissé. Le reste, ils le retrouvent dans leurs rêves et, pour le narrateur, à chaque étape de son adolescence. Harrouda, prostituée déchue, fut son premier amour, et la maîtresse de deux villes : Fès, lieu de toutes les vertus et de la tradition, Tanger - que Jean Genet appelle Tan... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Dans un récit décousu, poétique et délirant, Tahar Ben Jelloun parle du Maroc, de Fès et de Tanger. Il parle aussi un peu de sa mère, et beaucoup de sexualité.
J'ai eu du mal à suivre les méandres de ses divagations, mais j'ai continué malgré tout pour la musique des mots et la beauté de l'écriture.
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Dans ce livre iconoclaste, la poésie et la légende sont encre. Ou plutôt une potion magique dans laquelle Tahar ben Jelloun trempe sa plume pour donner une voix à la femme marocaine. Ainsi invente-t-il Harrouda, l'insoumise, la sorcière, l'hérétique.

Erotique aussi, elle hante les fantasmes et les nuits des enfants. Dans ce Maroc coincé entre traditions séculaires et religion à la lettre, elle se pose comme leur unique exutoire pour échapper à leur quotidien embrigadé par les ritournelles de leur vieux maître coranique. Comme ils ne croient pas à un seul mot de ses homélies, ils le tuent et le regardent expirer dans « une mare de mensonges dissous dans les déchets d'une vie indéfendable ».

Obnubilé par le sexe, l'enfant narrateur, accompagne souvent sa mère dans les bains maures et voyage voluptueusememt dans l'intimité des femmes. Cet endroit magique où les corps féminins, chairs crues et délicieuses, se livrent en toute liberté, loin du regard réprobateur de cette société clivante. Une sorte de prolongement du corps sensuel de Harrouda, dans lequel s'accomplissent chaque nuit ses délires et ses fantasmes.

Pour lui, la circoncision est une amputation, même si elle lui donne le droit d'accès au « marché de la virilité », une sorte de sauf-conduit, de passeport sexuel.

Portraitiste, l'enfant brosse avec passion les deux villes phares du Maroc, Fass et Tanger, étendues sur le sable et la légende. La première abrite en son sein deux personnalités dichotomiques : Harrouda incarnant le mal absolu et le saint Moulay Idriss le bien absolu. Les femmes invoquent ce dernier pour l'amélioration de leur quotidien entravé.

L'islam rigoriste régit en effet cette contrée où la femme est un « être de seconde main » et n'a pas voix au chapitre. « Oser la parole, c'était provoquer le diable et la malédiction. Oser la parole, c'était déjà exister, devenir une personne ! ». Elle demeure solitaire à l'intérieur de son propre foyer et prisonnière d'une idéologie la reléguant à la lanterne rouge de la société. Une femme-machine à double fonction : fabriquer le plaisir gustatif et le plaisir charnel. Révulsée par cet état de fait, Harrouda promeut un rêve à toute épreuve : « libérer le territoire » de ses coutumes misogynes, « enlever les femmes du harem » du silence et« dresser les oiseaux » de la liberté.

Cette quête de la liberté est poétiquement symbolisée par les enfants-oiseaux manifestant leur ras-le-bol et leur colère contre les injustices du jugement avant-dernier. Ils réclament le paradis, donc la liberté et la prospérité, et envahissent les rues. Mais les poulpes et les rapaces, figurant les policiers et les soldats, à la solde d'un régime autoritaire, les répriment avec force violence. Les plus chanceux sont jetés dans le puits, c'est-à-dire, la prison. Et même Harrouda, la putain, la folle, n'échappe pas à ce goulag des plus brutaux.

Mais cette meute de tortionnaires oublie que cette femme est sirène immortelle et intraitable sur sa mission : octroyer aux enfants et aux femmes le nectar de la liberté.

« Harrouda », livre éponyme, est en somme un kaléidoscope de thèmes et de genres. Conçu à la frontière du roman, de la poésie et de la légende, il convoque l'histoire ancienne et contemporaine du Maroc dans un vaste tour d'horizon thématique et polymorphique. Une ode exquise à la liberté de la femme arabe.

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Entre souvenirs et fantasmes le narrateur se rappelle d'Harrouda, prostituée déchue, qui a tant fait rêver les jeunes enfants, maîtresse de nombreux hommes, mais aussi de deux villes, de Fès, lieu de toutes les vertus et traditions, et Tanger, ville à l'opposée de la première. Harrouda, l'image d'une femme, de toutes les femmes, finalement liés au destin de ces deux villes.

Harrouda de l'auteur marocain Tahar Ben Jelloun sort en 1973 et est considéré comme son premier roman. L'axe central de ce roman-poème sont les souvenirs et fantasmes de l'enfant-narrateur entremêlés à plusieurs autres narrations autour du même thème. En effet ses cinq chapitres, ou plutôt récits, font naître plusieurs voix qui s'enchaînent et se mélangent en de nombreux fragments. Evidemment certains passages ont une allure plus conventionnelle, mais le roman reste définitivement hors norme que ce soit dans sa forme ou dans son style. Mais de par son originalité le roman en devient aussi assez difficile, dans le sens où on ne comprend pas toujours de quoi l'on parle. de plus l'auteur n'hésite pas à brouiller les interprétations par son écriture souvent bien complexe.
Concernant le contenu, comme à son habitude, Ben Jelloun s'attaque avant tout à la société marocaine, ses contradictions, ses hypocrisies, pour dénoncer l'image de la femme, certes tant adorée, mais aussi tant méprisée. Mais son pays il le décrit aussi par les destins de ces deux villes si opposées que sont Fès, la ville sainte, et Tanger, la ville de débauche. le thème de la sexualité, également fort présent dans l'oeuvre de l'auteur, tient ici aussi un rôle prépondérant.

Harrouda de Tahar Ben Jelloun est certes un roman remarquable mais assez difficile d'accès.
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un conte autobiographique plus qu'un roman, et plutôt même cinq contes dont le fil rouge est le fantôme d'une prostituée dénommée Harrouda. TBJ nous raconte son enfance et son adolescence marocaines, en mêlant souvenirs personnels et évocations historiques, mâtinés de fantasmes et de rêves. L"écriture est brillante, très sophistiquée, rappelant par moment Mallarmé ou Valéry. J'avoue avoir eu un peu de mal à entrer totalement dans cet univers onirique, même s'il y a tout de même quelques très belles pages, notamment celles consacrées aux villes de Fès et Tanger.
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Citations et extraits (18) Voir plus Ajouter une citation
"L'enfance, me disait une voix, doit cesser un jour. Elle ne peut durer. Tu l'as consommé dans les rues et les bains maures. Arrive un moment où il faut la quitter. Tu verras, ça passe comme un éclair. Et surtout ne nous fais pas honte ; pas de panique! Pas de peur! Pas de larmes. [...]"
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Les souvenirs jaillissent dans le désordre et provoquent chaos et délire. Harrouda s'en va retrouver ses maîtresses et exiger du hibou l'amnésie ou tout au moins l'arrêt des irruptions. Arrivée au seuil de la ville, elle expulse la nuit de sa gorge. Son rire fait la pluie dans le cimetière. Les morts changent de position et sont interpellés de nouveau par les anges. Harrouda va en titubant d'une tombe à l'autre. Sa peau se décolle et tombe en un mouvement lent sur la pierre. Les cheveux restent collés sur la nuque. Un liquide amer les retient. Les os se déplacent et viennent se tasser sur l'herbe humide.
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On me dit, pour me consoler, que l'exécutant s'était donné beaucoup de mal et que tout s'était bien passé. Il avait évité de justesse l’hémorragie. Mais je ne pensait plus au sang coagulé sur ma chair, je ne pensais plus à l'ouverture opérée dans le bruit et la fanfare. Je tendais la main désespérément pour mesurer ce qui subsistait encore de mon pénis. Ma main ne rencontrait qu'un trou douloureux.
J'étais déjà sans
Je décidai de récupérer ce que le sang avait drainé.
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Le sexe (d'une femme), qu'on nomme dans une rue déserte et
qu'on dessine dans la paume de la main. Celui par lequel on
injurie. Celui qu'on rêve de faire et de réinventer. Les rues de
notre quartier le connaissent bien. Les murs l'ont apprivoisé
et le ciel lui a fait une place. Sur l'effigie de ce sexe nous
éjaculons des mots
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[Les femmes] exhibaient leur laideur avec une nonchalance
déconcertante: leurs doigts traçaient des signes vagues sur le
mur noir. A l'instar du vent sur les sables, la chaleur effaçait
les bribes de ce langage... Tout se mêlait sur l'écran de ma vie
parallèle: présence phallique du désert, des oranges pigées,
des phrases de poils rejetés, des gouttes de vapeur salées...
Mon corps était trop étroit pour contenir l'ensemble des
signes qui assiégeaient les lieux
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Tahar Ben Jelloun vous présente son ouvrage "Les amants de Casablanca" aux éditions Gallimard. Retrouvez le livre : https://www.mollat.com/livres/2755520/tahar-ben-jelloun-les-amants-de-casablanca
Note de musique : © mollat Sous-titres générés automatiquement en français par YouTube.
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