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EAN : 9782070344314
336 pages
Gallimard (13/04/2007)
3.71/5   244 notes
Résumé :
« La petite Malika, ouvrière dans une usine du port de Tanger, demanda à son voisin Azel, sans travail, de lui montrer ses diplômes.
– Et toi, lui dit-il, que veux-tu faire plus tard ?
– Partir.
– Partir... ce n'est pas un métier !
– Une fois partie, j'aurai un métier.
– Partir où ?
– Partir n'importe où, là-bas par exemple.
– L'Espagne ?
– Oui, l'Espagne, França, j'y habite déjà en rêve.
– Et tu t'y sen... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (37) Voir plus Ajouter une critique
3,71

sur 244 notes
Ce livre est le portrait d'une jeunesse marocaine prête à tout pour "brûler"... Brûler ?... Brûler, signifie traverser la Méditerranée, brûler ses papiers, tout ce qui permettrait une identification de leur propriétaire et un renvoi à la case départ, dans ce Maroc qui ne leur propose pas d'avenir à la hauteur de leurs espérances, un Maroc gangréné par les petits trafics, la corruption de ses fonctionnaires, les fondamentalistes religieux . Et pour passer en Espagne, ces jeunes sont prêts à tous les sacrifices, toutes les compromissions. Ben Jelloun ne nous (leur) épargne rien : prostitution féminine ou masculine, scène de viol du héros dans un commissariat, drogue, mariage blanc.... Et malgré tout Ben Jelloun réussi l'exploit de ne jamais tomber dans le sordide, le vulgaire. Certes nous ne retrouvons pas sa poésie habituelle (à part peut-être dans le dernier chapitre) mais son écriture est toujours aussi fluide et agréable.
On sent que Ben Jelloun nous parle là d'un sujet qui lui tient à coeur, même s'il ne juge pas, s'il n'est pas là pour faire la morale, on le sent grave, triste, amer, il n'a aucune complaisance vis-àvis de ses compatriotes : " au Maroc, il faut faire comme tout le monde, égorger de ses propres mains le mouton de l'Aïd-el-Kébir, épouser une vierge, passer des heures au café à dire du mal des gens, ou dans le meilleur des cas comparer les prix des dernières voitures allemandes, parler de la télé, arrêter de boire de l'alcool trois jours avant et après le ramadan, cracher par terre, essayer de passer avant les autre, intervenir sur tout, dire oui quand on pense non, et ne pas oublier de ponctuer ses phrases par un " y'a pas de problème", makayene mouchkil, et puis rentrer le soir après avoir bu quelques bières avec les copains, s'installer devant la table et s'empiffrer comme un cochon. Pour bien finir sa journée, ce cochon se mettra au lit et attendra que sa femme termine de ranger pour la pénétrer, mais elle tardera un peu, il finira par s'endormir en ronflant."

Un grand écrivain, un grand livre, vite quelque chose de plus léger pour décompresser.
4,5/5
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C'était addictif !
J'ai passé ma nuit à le lire !
« Partir » …avec lui…
C'est fait !
Déçue ?
Absolument pas !

Il a été mon « Shéhérazade » d'une nuit !
Il m'a conté sa Réalité ;
Celle qui ne me fait pas rêver,
Celle qui dérange,
Celle qui humilie,
Celle qui viole,
Celle qui cogne !

Il m'a raconté cette fuite en avant !
Cette fuite quel qu'en soit le prix !
Prix du corps !
Prix d'une homosexualité subie !
Il a vendu son corps
Pour l'avoir cette liberté d'être.
De vivre cet ailleurs rêvé.
Dans cet ailleurs qu'il guettait de l'autre côté...

Tanger,
Gibraltar,
Espagne !
Y aller de toute les façon possible!
Même au péril de sa vie !
Une vie fantasmée !
L'autre rive... il va l'atteindre…
Il suffit juste qu'il accepte de se
Donner à cet homme ?
A son sauveur :
Miguel,
Le raffiné,
Le dandy,
Qui lui prend sa jeunesse,
Sa beauté !

Il accepte tout pour être libre !
Dérangeant !

Mais j'aime Azel,
Dans ses rêves,
Dans sa quête,
Dans son innocence,
Dans sa vulnérabilité,
Dans sa nostalgie,
Dans ses choix assumés !

J'ai dévoré ce livre…éperdue de cette LIBERTÉ…qui est dans cet ailleurs…qui s'avère pourtant décevante une fois approché …
Je referme ce livre pleine de cette énergie déployée pour vivre cet ailleurs… qui nous habite tous !
Et pourtant le courage c'est aussi de ne pas partir… mais de rester là où nos racines se déploient !
Plus difficile de rester que de partir ?
Partir avec la nostalgie au ventre…
Ou Rester et vivre de regret …
Courage ou lâcheté !
Là où le rêve nous mène …
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40 chapitres et une multitude de personnages - certains reviennent régulièrement - pour écrire sur cette immigration clandestine réelle, avortée, rêvée ou échouée vers l'Europe.
Tous ces personnages sont jeunes et ont des rêves qu'il ne peuvent accomplir s'ils restent au Maroc où tout est immobile, où il n'y a pas d'avenir prometteur pour eux ni de présent enrichissant.
Ils sont tous à des étapes différentes de leurs rêves, certains ont mis un pied en Europe, il ne reste plus qu'à poser l'autre pour s'y sentir un peu plus chez soi. D'autres sont sur le point de se lancer dans l'aventure, au risque d'échouer, pire, de faire naufrage. Et puis, il y a tous ces récits de cousins, d'amies, de frères ou soeurs ayant réussi ou... qui se sont perdus.

On est loin du Ben Jelloun de l'époque de l'Enfant de Sables ou les Yeux Baissés. Ici, pour plus de réalisme, le ton est sec, presque journalistique, le récit est sans compassion, comme si Ben Jelloun s'était endurci avec le temps. mais c'est aussi une manière de nous faire rentrer dans la réalité brute de ces jeunes pleins d'espoir confrontés à une situation souvent impossible à dominer.

Un livre à lire, comme un témoignage qui nous ferait passer de l'autre côté d'un monde que nous cotoyons tous les jours.
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Lorsque partir veut dire fuir des conditions de vie difficiles comme le chômage, le malaise politique, la corruption de la police, les humiliations et le manque de liberté, cela devient une obsession, une quête et une fin en soi. Partir au risque de sa vie…

Lorsque s'en aller c'est quitter ses origines, sa famille et ses racines, c'est aussi mourir un peu, c'est laisser un bout de son âme qui ne se recollera plus, un organe amputé qui ne se régénèrera jamais.

Lorsque quitter son pays natal est la seule alternative envisagée par les jeunes marocains désenchantés, cela donne un récit fort et poignant appuyé par une écriture sensible et poétique. L'auteur aborde des sujets tels l'homosexualité, l'Islam, l'hypocrisie liée à la religion, la condition de la femme et le décalage entre les croyances anciennes et les temps modernes.

C'est une descente un peu sombre dans un tunnel et au même temps c'est pétillant d'humanité et chargé d'un regard plein de chaleur empathique. Tahar Ben Jelloun déchire le voile des apparences ou des pudeurs pour plonger son regard au coeur d'une dure réalité avec une écriture parfois saignante, mais toujours préservée de facilité. le récit est rythmé de questions et alterne les chapitres concernant chacun des personnages.

La frontière est mince entre le Maroc et l'Espagne mais elle l'est tout autant entre espoir et désespoir, entre attente et déception, entre étouffer et se brûler, entre les questionnements sur l'identité et le désir de vivre libre, ailleurs.

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Azel et Kenza, comme tant d'autres jeunes, ne rêvent que de quitter le Maroc, d'échapper à la pauvreté, à la cruauté et à la mafia locale. le pays perd ses forces vives au profit d'une Espagne aux airs d'El Dorado. « Quitter le pays. C'était une obsession, une sorte de folie qui le travaillait jour et nuit. Comment s'en sortir, comment en finir avec l'humiliation ? Partir, quitter cette terre qui ne veut plus de ses enfants, tourner le dos à un pays si beau et revenir un jour, fier et peut-être riche, partir pour sauver sa peau, même en risquant de la perdre… » (p. 25) Nombreux sont ceux qui tentent de traverser le bras de mer entre l'Espagne et le Maroc. Au matin, on retrouve leurs corps gonflés sur les plages. Au Maroc, on dit que traverser la mer et partir, c'est « brûler ». le départ, c'est un peu un suicide. Et pour ceux qui gagnent les côtes espagnoles, la solitude de l'immigré est une autre mort.

Pour Azel, le départ prend les traits de Miguel, un riche Espagnol homosexuel. le jeune homme se soumet aux désirs de son protecteur et espère mener la vie dont il rêvait dans ce nouveau pays. Dès qu'il le peut, il écrit une lettre. Son destinataire n'est autre que son pays d'origine : au Maroc, il déclare son amour, il confie ses espoirs et adresse ses reproches. « Soigner les apparences et faire des cochonneries en douce, c'est ça le Maroc qui m'énerve. » (p. 97) Hélas, Azel laisse s'échapper ses rêves et se perd lui-même. Finalement, quitter le Maroc semble moins prometteur que d'affronter ses vicissitudes.

Il y a différentes façons de partir : certains échappent au pays, d'autres quittent une identité, d'autres encore courent après un rêve. Mais tous les immigrés le savent, le départ n'est jamais une fin en soi. « Nous partons, mais toujours pour revenir. » (p. 269) Ce roman polyphonique mêle des voix furtives et des voix récurrentes. le Maroc parle au travers de ses enfants, il pleure leur départ et attend leur retour. Cette galerie de portraits parle d'Islam, de sexualité, de péché et surtout d'humanité. « Vous savez, il vaut mieux partir du principe que l'homme est bon, s'il se révèle mauvais, c'est lui qui se fait mal. C'est une question de sagesse. » (p. 273) Pas de manichéisme dans ce roman, ni de leçon de morale. C'est plutôt une troublante élégie et un puissant hommage à la jeunesse et à la terre natale.
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Citations et extraits (50) Voir plus Ajouter une citation
Suis-je raciste ? Peut-on être raciste contre son propre camp ? Pourquoi les Marocains m'énervent-ils autant ? Ils ne s'aiment pas, et pourtant dès qu'on émet la moindre critique sur leur pays ils se montrent susceptibles et se mettent en colère. Pourquoi est-ce que je préfère les éviter ? N'est-ce pas plutôt moi-même que j'évite, que je fuis ? Je suis dans la fuite. Et ce n'est pas très glorieux. Les Marocains que j'ai rencontrés hier me rappellent beaucoup trop ce que j'aurais pu devenir. Ils brassent du vent, vont et viennent comme une abeille dans un bocal où il n'y a plus de miel. Ils n'ont pas beaucoup d'imagination. Ils subissent, essayant de s'en sortir avec leurs petits trafics, pas grand-chose, à peine de quoi enrichir un paumé. Et pour ça ils ont besoin de recréer la joutya, le souk de la ville, se retrouver entre eux, même s'ils ne se supportent pas, et au moins se croire au village, se sentir à l'abri.
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Cher pays (oui il faut dire “cher pays”, le roi dit bien “mon cher peuple”) Aujourd’hui est un grand jour pour moi, j’ai enfin la possibilité, la chance de m’en aller, de te quitter, de ne plus respirer ton air, de ne plus subir les vexations et les humiliations de ta police, je pars le cœur ouvert, le regard fixé sur l’horizon, fixé sur l’avenir ; je ne sais pas exactement ce que je vais faire, tout ce que je sais, c’est que je suis prêt à changer, prêt à vivre libre, à être utile, à entreprendre des choses qui feront de moi un homme debout, un homme qui n’a plus peur, qui n’attend pas que sa sœur lui file quelques billets pour sortir, acheter des cigarettes, un homme qui n’aura plus jamais affaire à Al Afia, le truand, le salaud qui trafique et corrompt, qui ne sera plus le rabatteur d’El Hadj, ce vieillard sénile qui tripote les filles sans coucher avec elles, qui ne fera plus les petits boulots, qui n’aura plus besoin de montrer son diplôme pour dire qu’il ne sert à rien, je m’en vais, mon cher pays, je traverse la frontière, je me dirige vers d’autres lieux muni d’un contrat de travail, je vais enfin gagner ma vie, ma terre n’a pas été clémente, ni avec moi ni avec beaucoup de jeunes de ma génération, nous croyions que nos études nous ouvriraient les portes, que le Maroc en finirait enfin avec les privilèges, avec l’arbitraire, mais tout le monde nous a lâchés, il a donc fallu se débrouiller, faire n’importe quoi pour arriver à s’en sortir, certains ont frappé à la bonne porte, ont été prêts à tout accepter, d’autres ont dû au contraire se battre…
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Tu sais, ma grand-mère, parce qu'elle venait de la campagne, portait le haïk. On aurait dit un linceul ample, un grand morceau de tissu en coton blanc dans lequel elle s'enroulait. À l'époque, personne ne critiquait le port du haïk, c'était naturel. Ma mère a porté la djellaba sans le voile, et ne nous a jamais demandé de nous voiler malgré les remontrances de mon oncle émigré en Belgique. Quand il venait en vacances, l'été, il nous donnait des leçons de morale. Cela me faisait doucement rire, car ses filles fumaient en cachette, avaient un petit ami, etc. Elles n'obéissaient à leur père que pour faire ce qu'elles désiraient en toute tranquillité. Je déteste cette hypocrisie. Soigner les apparences et faire des cochonneries en douce, c'est ça le Maroc qui m'énerve.
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(...) Kenza, c'est moi qui te parle, je suis l'autre Kenza, celle qui t'a toujours poussée à aller de l'avant, celle qui t'a appris à lutter, à ne pas se résigner, celle qui a fait de toi une fille libre, n'écoute pas trop ta mère, elle va te manger, fais attention à toi, à ta vie, ne te laisse pas prendre dans le filet de la fatalité, lève la tête et regarde les oiseaux migrateurs qui se sont donné rendez vous dans ce morceau du ciel de Barcelone, observe comment ils suivent le rythme du ballet qu'ils exécutent ce matin juste pour toi, pour tes yeux qui ont tant besoin de lumière, la vie est belle même si les imbéciles sont nombreux à précipiter le malheur, à le propager, tu es hors d'atteinte, tu es sauve, cours, vis et ris...
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Imaginer un immense hammam qui serait la Cité des femmes, avec des voiles de vapeur, avec cette semi-obscurité qui pousse à la confidence, qui libère la parole, avec des circuits clandestins, des sous-sols, des tavernes, des antichambres pour la sexualité enfin libérée, sans entraves, sans jugement moral, dans pudeur. Les femmes se retrouveraient là pour organiser autrement les relations sociales, en tous cas les relations hommes-femmes, ce serait une jolie révolution.
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