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Critique de lauredanse


Dès les premiers lignes de ce court roman (81 pages), Jeanne Benameur nous emporte avec elle dans cette histoire émouvante. Charriés par sa poésie, nous dévalons avec avidité le cours de ce fleuve de mots emplis d'humanité et de liberté. C'est un véritable coup de coeur pour la grandeur de ce petit récit, d'une intensité émotionnelle incroyable et d'une intelligence indéniable.

La Varienne, c'est comme cela qu'on l'a appelé, vit sa vie avec sa fille, sans penser, sans parler, sans montrer ses émotions. Elle est « la demeurée », « l'abrutie ». Sa fille cherche à chaque instant un signe, une émotion, un regard … mais rien. Pourtant ça n'enlève rien à l'amour pur qui les unit. Mais le jour où Luce va à l'école car c'est obligatoire, La Varienne est désemparée et reste plantée dans la rue à l'attendre. le sentiment de manque qu'elle ne connaissait pas s'insinue en elle et c'est alors une grande souffrance qui s'empare de tout son être. Luce est aussi triste et blessée à vif par cette séparation et reste totalement hermétique, de par sa volonté : « Elle fait mur. Aucun savoir n'entrera. L'école ne l'aura pas. » Pour elle, si elle apprend elle s'éloigne de sa mère, et elle ne veut pas. Leur amour est fusionnel, inconditionnel. Elles ne sont bien qu'ensembles.

Mademoiselle Solange, l'institutrice, va tenter de prendre Luce sous son aile après l'école avec l'accord de sa mère qu'elle est allée convaincre, pour lui transmettre son savoir. Très vite Luce va tomber malade et se retrouver à rester chez elle. Elle ne retournera pas à l'école, elle ne le veut pas. Sa mère restera à son chevet, apprenant la douceur en prenant soin de sa petite. » le savoir ne les intéresse pas. Elles vivent une connaissance que personne ne peut approcher. Qui était-elle, elle, pour pouvoir toucher une telle merveille . Comme elle a été naïve de croire qu'elle pouvait apporter à un être quelque chose de plus ! La petite est comblée. de tout temps comblée et si elle l'ignorait, en la faisant venir ici, dans cette école, elle le lui a appris. C'est la seule chose qu'elle lui ait enseignée sans le savoir : une douleur et un bonheur intense. Savoir qu'on manque à quelqu'un, que quelqu'un nous manque. »Tous ses évènements ne vont qu'amplifier leur besoin de rester unies et toutes les deux. Elles ont connu ce sentiment de manque insupportable lorsque Luce était à l'école. Désormais Luce est rétablie et elles vivent leur vie tranquillement chez elle, loin des autres, unies à jamais.

Luce commencera à chantonner, chantonner les mots qu'elle a entendus. Elle se rendra compte rapidement que tous ces mots refoulés qui lui venaient de l'école, tous ces cours, sont bien ancrés en elle. Malgré elle, malgré qu'elle les ait rejetés le plus fort possible, elle a appris, elle possède un savoir, et elle aime cela. Elle le savait, mais pour elle il était un danger pour sa mère et elle, alors elle l'a chassé, enfouie en elle, hors de sa conscience. Maintenant qu'il refait surface, elle le prend à bras le corps et veut apprendre. Elle s'initiera à la broderie avec du fil que ramènera La Varienne. Ce sera alors son secret et elle continuera par la broderie son apprentissage des mots loin des yeux de sa mère, de l'alphabet pour commencer. Elle aura protégé sa mère, protégé leur amour, gardé intact la pureté de leur lien, tout en ayant le plaisir du savoir et de la connaissance. L'institutrice quant à elle vivra avec douleur son échec, pensant qu'elle a eu tort de vouloir forcer un apprentissage, elle en perdra la raison de culpabilité.

Je ne vais pas en dire davantage mais la suite et la fin sont un condensé de beauté, de tristesse mêlée, des émotions à fleur de peau qui vous envahissent en un instant, vous laissant dans une sensation de plaisir littéraire intense. La plume de Jeanne Benameur est une merveille, sa poésie a un impact sur moi incroyable. Je savoure encore ses mots, ses messages, toute cette humanité qui explose, tout ce désir de liberté individuelle qui crie son existence et tout la beauté de la simplicité ! D'une grande pudeur, d'une sensibilité puissante, je vous conseille de tout mon coeur cet ouvrage magnifique !
Lien : http://madansedumonde.wordpr..
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