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EAN : 9782877302340
350 pages
Editions Philippe Picquier (19/05/1998)
4.04/5   58 notes
Résumé :
Cet essai, écrit à distance, sur commande de l'Office of War Information, par une femme qui n'était jamais allée au Japon et en ignorait la langue, pour servir de manuel aux forces d'occupation américaines, réussit la gageure de demeurer, de l'avis général des Japonais, l'un des grands livres que l'on ait écrits sur eux. Des articles et des ouvrages ont, après lui, été publiés qui réfutent, complètent, approfondissent, réapprécient les interprétations de Ruth Benedi... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Un travail unique pour comprendre le JAPON en profondeur ...
Depuis les années 90 le japon connait des transformations sociétales en profondeur ..
Mais le Japon reste le Japon ...
Et cette étude reste aujourd'hui un des textes francophones le plus accessible pour ce qui est de se figurer , la structuration et les fonctionnements des liens sociaux dans ce pays et dans cette culture excessivement singulière .
Du point de vue méthodologique ce travail est absolument bluffant !
On est entre la méthodologie historique et la méthode sociologique ...
C'est un délice de rigueur ... chaque mot est pesé .. de plus c'est très bien écrit et de ce fait c'est aussi enrichissant que agréable ...
L'auteur mobilise des centaines de questionnaires remplis par des prisonniers japonais de la seconde guerre mondiale .
Cependant ce travail débouche sur un examen approfondis de la société japonaise selon les angles suivants :
Le sens de la hiérarchie .. la bienséance .. les plaisirs et la jouissance ... la vertu et l'éducation ... ( j'en passe dans les ramifications et sujets connexes )
Toutes ces problématiques sont détaillées de façons excessivement pointues et l'auteur restitue absolument le contexte culturel d'où émergent ces " paroles écrites "
Ce travail particulier sur documents ( analyse de questionnaires ) ne peut faire honte à aucun ethnologue ..
Un must incontournable et un délice pour ceux qui aiment et veulent découvrir le japon de l'intérieur ...
Si on considère par exemple le caractère absolu , radical et fonctionnel de la capitulation japonaise après le discours de l'empereur , et bien c'est impressionnant et incompréhensible sans une analyse des structures mentales de cette civilisation .
Depuis 1995 la société japonaise s'est transformée mais il y a un très fort héritage et des logiques qui perdurent et ce témoignage historique vient à point témoigner du bois qui a servi à façonner l'armée japonaise comme de celui qui explique des fonctionnements déroutants voir effrayants du japon contemporain et qui évidement ne sont pas à l'ordre du jour dans ce texte méticuleusement analytique .
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Aujourd'hui, je vais commencer par vous parler d'un essai très connu sur le Japon : "Le chrysanthème et le sabre".

Il s'agit d'un essai commandé par l'administration américaine à une anthropologue. Les Etats-unis sont en guerre contre le Japon et cherche à mieux comprendre les mécanismes de pensée d'un peuple qui les déstabilise.

Ecrit en 1 an, dans un contexte bien particulier, le fait le plus notable de cet ouvrage est que son auteur n'a jamais mis en pied au Japon ! Pourtant, Ruth Bénédict livre ici un essai de qualité qui fera date et servira de référence aux ouvrages suivants qui s'inscriront en adéquation ou en opposition à celui-ci.Notant les contradictions extrêmes des japonais, elle va s'attacher à les expliquer.

Après avoir présenté sa démarche au lecteur, l'auteur évoque l'attitude du Japon actuel (1945) pour pouvoir lancer les grandes lignes de ses recherches.

Le Japon, qui est donc en guerre, possède une vue hiérarchique du monde. Il y a les gagnants et les perdants, des états supérieurs à d'autres et un étagement des relations humaines également. Pendant la guerre, nombreux ont été étonnés de l'attitude des japonais. Belliqueux, prêts à donner leur vie et à subir des privations, les combattants japonais ont pourtant fait preuve d'un revirement excessif lorsque le Japon a rendu les armes. En effet, la population a acceptée avec facilité la défaite et proposa rapidement son aide aux américains persuadés qu'il y aurait rébellion dans les rangs. Mais il n'en fut rien. Cet état de fait vient de l'importance de la hiérarchie dans la conscience japonaise. A partir du moment où ils perdirent la guerre, où l'empereur déclara la reddition, les japonais acceptèrent la défaite : c'est leur loyauté envers l'empereur qui est en jeu.

De cette attitude surprenante, l'auteur en tire 2 grands thématiques : le sens de la hiérarchie, le sens de l'honneur et des devoirs.
- Les japonais sont ainsi très attachés à la hiérarchie.
Les règles sont apprises dès l'enfance. On salue par exemple selon des règles bien définies qui tiennent compte de l'âge, du sexe, de la classe sociale, du rang dans la famille. Dans le cercle familial, le plus âgé décide. La femme est assujetie à l'homme mais reste libre : elle gère le budget, dirige le foyer et est libre de circuler librement. Les enfants, même adultes, doivent se ranger aux décisions du plus ancien ou du conseil de famille. La famille se plie sans remous à ses codes. La tyrannie domestique est rare, le rôle de chef de famille est pris très au sérieux et l'homme se doit d'assumer le statut et les responsabilités qui en découlent pour des questions d'honneur. Pour les autres, le code est aussi synonyme de sécurité.

Cette tradition hiérarchique tient son origine du temps du régime des Tokugawa. La culture des clans y était très importante. Il y avait un shogun qui régentait ses seigneurs vassaux (les daimyos) sous lesquels étaient assujetis les 4 classes de population : guerriers (samourais), fermiers, artisans et marchands.
Le besoin de hiérarchie, appliqué tout d'abord à la famille, fut peu à peu assimilé dans les autres domaines : économiques, politiques, ...

- le second point notable est la haute importance de la morale et du sens des obligations.
Les japonais se considèrent comme des héritiers du passé. Ils ont un profond sentiment de dette envers leurs parents, son patron, envers le monde,... conscients de tout ce qu'ils leur doivent, de ce qu'il leur a été donné. On appelle ces sortes de dette, ces obligations passives : le "On". C'est une dette inexpugnable qui ne pourra jamais être totalement remboursée, qui s'accroît avec le temps. Il y a différents types de "On" et d' importances diverses. Ce peut-être tout de qu'on doit à notre mère de nous avoir élevé, l'aide d'un professeur ou d'un collègue de travail, un verre offert par une connaissance, etc...Cet état de débiteur est extrêment inconfortable et rembourser ce "On" est une question de dignité, le contraire apportant honte et perte d'honneur. C'est pourquoi il convient de limiter les "on" et d'éviter à contracter un "On" qu'on ne pourra pas rembourser. Les faveurs accordées aux étrangers par exemple sont mal perçues car elles impliquent un "On". L'inverse est tout aussi délicat : il faut éviter toute intervention qui obligerait le bénéficiaire à assumer un "On". D'où, par exemple, la passivité de la foule lorsque survient un accident.

Le remboursement suit des règles précises et se réparti en 2 catégories.
Le "Gimu" représente les dettes illimitées : envers l'empereur et les parents.
On appelle "Giri" les autres types de remboursement (famille éloigné, serviteurs,... ).

Le "Gimu" est une dette obligatoire qui se doit d'être remboursé à n'importe quel titre, même si les protagonistes sont en tort et peut supposer de fermer les yeux sur une injustice.La piété familiale en fait partie. Une piété qui n'implique pas forcément estime des membres de la famille, d'où les rancunes tenaces entre membres de la famille...
Le "Giri" est une obligation envers son propre nom, des actes par lesquels on garde sa réputation intacte. Il s'agit de garder sa réputation sans tâches comme un véritable devoir. Cela peut impliquer des actes divers pour effacer un affront ou une insulte : vengeance, domination de sa souffrance et du danger, sang-froid, vivre selon son rang, s'interdire de reconnaître ses échecs ou son ignorance, ... le "Giri" est une obligation forte qui peut entraîner susceptibilité excessive, suicide, dépression, ... Si la vengeance a tendance à s'estomper aujourd'hui, la violence tend maintenant à se retourner contre soi-même.

De nombreuses règles de civilité ont été ainsi édictés pour éviter les situations provoquant la honte et mettant en cause son "Giri" : rites d'hospitalité, principe du secret pour tout projet n'ayant pas atteint le succès, utilisation d'intermédiaire pour éviter confrontation directe. La compétition est fortement perturbatrice et il y a une volonté de la réduire. Elle arrive très tard dans le parcours scolaire où en primaire, le redoublement et la notation n'existe pas.

Parallèlement au poids important des obligations, on trouve malgré tout un cercle d'émotions humaines très important. Les plaisirs sont loins d'être supprimés et sont même recherchés à partir du moment où ils n'interfèrent pas avec le "Giri".
ON trouve chez les japonais une culture du plaisir avec les bains chauds, du sommeil, de l'amour,du repas et même de l'ivresse.
Le temps du sommeil n'est pas vécu comme une phase récupératrice mais comme un plaisir qui peut être totalement supprimé pendant les examens ou la guerre, par exemple.
La nourriture est appréciée autant pour son goût que pour son apparence et on constate beaucoup de recherche dans la présentation des plats.
L'ivresse est courante et est une façon de relacher les règles strictes. Une ivresse non-violente qui n'implique pas d'alcoolisme chronique, ni de violence conjuguale.
Du côté de l'amour passion, il n' y a pas de tabous. L'érotisme et le sexe échappe du domaine de la morale. Tant qu'on lui accorde une place mineure, il est considéré comme bon. le domaine conjugual est séparé du domaine érotique. Les deux sont permis et tolérés au grand jour. le sexe est un délassement mineur alors que le mariage et l'épouse font partie des obligations (mariage souvent organisé par les parents qui ont toute autorité). Les plaisirs homosexuels sont aussi reconnus par la tradition, tant que la hiérarchie est respectée (les hommes adultes vont avec des hommes plus jeunes et passifs, maintenant ainsi la dignité) tout comme l'auto-érotisme.

Contrairement à l'occident, pas du jugement moral, pas de culpabilité pour ces pratiques acceptées. On ne trouve pas de vision opposant le Bien et le Mal, les 2 font partis du monde. L'esprit et le corps ne s'opposent pas et la jouissance des plaisirs n'est pas un péché.
Pour les japonais, le but de la vie n'est pas le bonheur mais il s'agit de remplir ses obligations, quitte à sacrifier ses désirs. Ils sont préparés à souffrir et acceptent les sacrifices que ça implique.

Bien évidemment, les différentes obligations énoncées ci-dessus peuvent provoquer de nombreux problèmes.
On juge un homme selon les codes qu'il respecte ou pas. Malheureusement certaines obligations peuvent se contredire. Rembourser un "Giri" peut vous mettre en porte à faux par rapport à un autre "Giri", s'acquitter d'une obligation peut en bafouer une autre. Ces conflits peuvent entraîner de nombreuses voltes faces ou même amener à une impasse. Cela peut parfois conduite à des suicides lorsque la personne est dans l'incapacité de faire face, perdant ainsi sa dignité.
La vertu du "Giri", du sens des sacrifices a été fort transcendée par les samourais qui en faisait une véritable ligne de conduite. La loyauté à un maître discident peut se contredire avec la loyauté au seigneur. Parfois c'est la piété familiale qui peut entrer en conflit avec d'autres types d'obligations.
Le cinéma et la littérature japonais abondent d'histoires au dénouements tragiques. Alors que les américains privilégient les happy-end, les japonais, au contraire, privilégient la compassion et préférent des héros qui se sacrifient.On peut relever les histoires d'amour malheureux pour cause de mariage imposé par la famille, des histoires de conflits entre clans (le récit des 47 ronins, par exemple).
On peut constater que les japonais ont une culture de l'estime de soi extrêmement importante. Il s'agit de ne rien faire qui puisse attirer la honte sur soi, son nom, sa famille. La honte est plus importante que la culpabilité et s'avère être chez eux "la racine de la vertu".

Ce comportement procède d'une véritable auto-discipline. Améliorant les moyens de conduire son existence, elle s'appuie sur une volonté de l'esprit qui démontre sa supériorité sur le corps. Les sacrifices ne sont pas ressentis comme tel et les japonais sont entraînés dès l'enfance à se soumettre à un certain types d'obligations.

L'auteur revient d'ailleurs dans le dernier chapitre sur l'éducation des enfants et de la façon dont il sont envisagés dans le cercle familial. L'enfant est nécéssaire pour continuer la lignée et les femmes se doivent d'être fécondes pour acquérir véritablement son statut d'épouse. Alors que l'âge adulte est conduite par bon nombre de contraintes, la petite enfance (tout comme la vieillesse sont synonymes de liberté.

Vous l'aurez compris, cet essai est véritablement passionnant. Ce très looooooong résumé ne donne pourtant qu'un très petit aperçu des éléments de culture et de comportement que vous trouverez dans cet ouvrage.
S'il a été écrit il y a longtemps, il n'en reste pourtant pas moins actuel. J'y ai pour ma part, retrouvé bon nombre d'éléments que je connaissais (parfois par intuition) et gagné de nombreuses clés de compréhension. En comparant avec certaines oeuvres littéraires ou cinématographique, certaines choses, certains faits se sont trouvés éclairés à la lecture de cet essai.
Certains éléments sont peut-être à prendre avec plus de recul aujourd'hui, plus de 50 ans après, la comparaison régulière entre japonais et américains pourra en agacer certains (je rappelle que cet ouvrage leur est destiné), pourtant "Le chrysanthème et le sabre" est un ouvrage anthropologique, ethnographique et sociologique passionnant et facile d'accès pourvu qu'on en ait une lecture très suivie.
Je ne peux bien évidemment que le conseiller fortement à toute personne désireuse de comprendre la culture japonaise !!
Lien : http://legrenierdechoco.over..
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Quand les Américains sont arrivés au Japon en 1945 ils se sont aperçus qu'ils ne comprenaient rien aux Japonais. Quand on doit administrer un peuple, il vaut mieux savoir à qui on a affaire. Mais le fossé culturel était tellement important entre les deux cultures que l'Office of War Information a commandé un rapport à une ethnologue pour leur expliquer le fonctionnement de cet étrange peuple. Ruth Benedict s'est donc mise au travail (sans quitter les USA) et a écrit ce petit ouvrage dans lequel les Japonais eux-mêmes se sont reconnus.

Je laisse la parole à la quatrième de couverture qui est très juste:
"Ce livre traite des habitudes qui paraissent naturelles et que nul ne songerait à remettre en cause au Japon. il traite des situations où tout Japonais peut compter sur la courtoisie et de celles où il se sent honteux, des circonstances où il éprouve de l'embarras, de ce qu'il exige de lui-même." On y parle des règles de hiérarchie, de bienséance, de l'éducation des enfants, de morale sexuelle, de politique économique...

C'est notamment grâce à cet ouvrage que les Américains ont choisi de ne pas supprimer l'institution impériale. A posteriori on ne peut que constater que l'occupation Américaine a été exemplaire dans ce pays et n'a pas nui à son développement futur. On est bien loin de l'Irak!
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Certes, l'ouvrage passe pour une référence absolue pour présenter les us et coutumes au Japon ... mais je n'ai pas accroché du tout ! J'ai trouvé cette lecture fastidieuse et orientée , et j'en ai appris beaucoup plus avec l'excellent Stupeur et tremblements d'Amélie Nothomb. Après, c'est juste mon avis ...
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Ce livre publié en anglais en 1945 est une commande que les États-Unis ont passé auprès d'une ethnologue. Les différents chapitres nous permettent d'essayer de comprendre la culture nippone. L'ouvrage nous explique par exemple le poids de la dette morale entre les japonais.
Pour avoir une idée plus précise reportez-vous au tableau schématique des obligations page 139-140
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Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
Il ne suffit pas de savoir devant qui on doit s'incliner, mais aussi jusqu'où il faut se baisser.
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Dans la philosophie japonaise, la chair n'est pas le mal. Jouir des plaisirs qu'elle donne n'est pas un péché. L'esprit et le corps ne sont pas des forces adverses dans l'univers, et les Japonais vont jusqu'au bout de ce que ce principe implique. Le monde n'est pas un champ de bataille où s'affrontent le bien et le mal.
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La vertu, au Japon, dépend de la reconnaissance de sa propre place dans le grand réseau de dettes mutuelles, réseau qui englobe à la fois ancêtres et contemporains.
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La belle-fille haïe continue à mettre au monde des petits-fils bien aimés.
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Si nous avions eu peur des chiffres, la guerre n'aurait pas été déclenchée. Les grandes ressources de l'ennemi existaient avant cette guerre.
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