Le rassemblement est une conséquence du sens que nous donnons à l'action
Comme l'indique
Serge Wolikow dans sa préface, les « écrits de militants et de dirigeants ont permis de sauvegarder des informations et des éléments de connaissances précieux qu'on trouve rarement dans les archives »
Je ne vais pas tourner autour du pot, mes analyses de l'histoire et des orientations du PCF sont profondément différentes de celles de Bernard Calabuig. Je ne vais donc pas discuter ici de ces divergences d'analyses. Non que cela ne soit pas important. Il faut revenir encore et encore sur la tragédie criminelle du « socialisme réel », les politiques menées par les partis « majoritaires » dans la classe ouvrière, dont particulièrement celles du PCF. Aucun courant politique ne peut se dispenser de ces regards « rétrospectifs ». Ce passé pèse d'un poids considérable sur les possibilités d'émancipation et les élaborations d'hypothèses stratégiques à vocation majoritaire, sans oublier le quotidien de division… Cependant, ni hier ni aujourd'hui, les analyses sur le passé ne devraient être un préalable à l'action et à l'élaboration commune…
Le parcours et les commentaires de Bernard Calabuig soulignent la recherche d'un monde meilleur, l'enthousiasme militant combiné à l'acceptation d'un fonctionnement anti-démocratique (« Elle était la direction, les choix de celle-ci n'étaient pas discutables, ils étaient toujours bien fondés »), le refus de prendre en compte les critiques et les élaborations d'autre courants (non reconnus en tant que tels) du mouvement révolutionnaires, la mystique du « parti de la classe », les compromissions, les réécritures du passé, les doubles langages, etc.
J'ai notamment été intéressé par le détail des descriptions soulignant le caractère formel des élections internes, la réalité du soit-disant centralisme démocratique, le fonctionnement des directions du PCF. L'auteur montre comment et pourquoi un-e militant-e ne (se) questionnait pas, « je n'avais pas suffisamment d'indépendance d'esprit, de recul critique » ou « une fidélité sans borne à « la famille » »…
Bernard Calabuig analyse la matrice « originelle » du PCF la « double filiation française et soviétique », (j'aurais écrit nationale voire nationaliste et stalinienne), les visions mécaniques de l'évolution des sociétés humaines. Il parle de pensée « asséchée, dogmatisée, érigée en principes intangibles », de confusion entre l'outil et l'idéal et souligne que « le Parti communiste français n'a jamais fait du socialisme l'objet principal de son combat »…
Des analyses qui contournent cependant les raisons bien matérielles de la bureaucratie et ses politiques d'auto-préservation. Car il n'agit pas seulement d'orientations politiques erronées.
L'auteur n'a pas renoncé à changé le monde, à prôner des politiques d'émancipation. Il montre que étatiser et nationaliser n'est pas équivalant (je préfère la notion de socialisation), parle d'appropriation sociale, de droits et de pouvoirs des travailleurs (mais n'intègre pas les élaborations des féministes), de circuits courts de distribution, de réappropriation de l'outil industriel, d'une « interaction entre conscience et changement personnel , et combat social », de gratuité, « la gratuité rassemble, la tarification sociale bien souvent est un ferment de division », de force à vocation majoritaire, d'égalité des droits, « le concept d'égalité des chances s'est substitué peu à peu à celui d'égalité des droits », d'anticapitalisme, d'égalité hommes-femmes…
« Faire société nécessite de développer et d'étendre ce que les forums sociaux ont appelé les « biens communs ». »
La lecture de ce livre me renforce dans l'idée que l'analyse du passé ne peut se faire de manière interne à un courant politique, à partir de la seule critique de sa/ses matrice(s) constitutives, de ses discours ou de ses orientations. L'auto-perception de « matrices » est elle-même profondément liée à la constitution de chaque courant politique. de ce point de vue, l'autisme ne concerne pas seulement les autres…
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