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Magali Bessone (Éditeur scientifique)
EAN : 9782080730503
237 pages
Flammarion (15/02/2000)
4.67/5   3 notes
Résumé :
Rassemble des textes d'Arendt à Walzer, en passant par Aristote, la Déclaration des droits de l'homme, Foucault, Hobbes, Kant, Pascal ou Rousseau. Une seconde partie aborde les thèmes du constitutionnalisme, de la désobéissance civile et civique, de la résistance, du droit du plus fort, de l'équité, de la raison d'Etat...
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Anthrôpos anthrôpou daïmonion.
La justice réalisée, en supposant qu'elle puisse exister, consiste à récolter ce que l'on sème, sans que l'on sache pourtant pleinement quel est le contenu de ce que l'on sème, ni donc quelle récolte peut en sortir. Trop de paramètres nous échappent quant aux causes et conséquences de nos actes, sans parler des circonstances favorables ou défavorables qui précèdent, entourent ou suivent, ou influencent et inclinent nos actions.
La justice comme vertu, le « droit naturel », est, sur la base du sentiment que l'on a de ce qui est juste ou injuste, l'application de ce que nous ressentons comme juste.
Ce sentiment, dont chacun a fait l'expérience, est peut-être inné, mais toujours fortement imprégné des valeurs du juste et de l'injuste de la société dans laquelle on grandit, de sorte qu'il peut facilement se confondre avec ces valeurs, et ne plus avoir grand-chose de « naturel ».
Ce constat fait les beaux jours du « positivisme juridique », qui en conclut qu'aucune norme « naturelle » n'est discernable qui pourrait servir de mesure aux normes existantes dans telle ou telle société. de sorte que la norme quelle qu'elle soit est juste normale, fût-elle injuste aux yeux d'autres normes.
Pour qu'on puisse juger de l'injustice d'une norme, il faut effectivement disposer d'une norme transcendant toute norme. Pourtant, l'idée d'un sentiment inné du juste, d'un droit naturel supérieur à tout droit positif, permet seule de délégitimer l'injustice légalisée. Elle présuppose l'existence d'un sens inné universel de la justice, avec lequel il serait possible de renouer par-delà toute institution/codification du juste et de l'injuste, par-delà le « droit positif », qui n'est rien d'autre que l'application comptable des valeurs d'une société : qu'il s'agisse de justice arithmétique (corrective) ou proportionnelle (distributive), ou d'autres moutures du même principe de comptabilité, il s'agit toujours d'un calcul, ce qui suppose de disposer de paramètres efficaces - à défaut d'être justes. Ces paramètres, permettant de définir ce à quoi un individu ou un groupe a droit, ne peuvent jamais être complets, ce qui supposerait de les connaître et de les maîtriser en totalité dans leurs causes, conséquences et circonstances, intérieures et extérieures.
Nous ne pouvons pas savoir vraiment ce que « vaut » un individu, mais le droit positif ne s'en préoccupe pas, sinon de façon marginale voire décorative ; il lui applique simplement une mesure définie selon des valeurs qui sont toujours les valeurs dominantes d'une société donnée, les valeurs qui permettent de dominer légalement les autres dans une société.
Mais c'est bien pire : affecter une valeur à un individu, c'est en faire une chose, un objet, un ensemble de caractéristiques, bref, le contraire d'une subjectivité, c'est-à-dire le contraire d'une irréductibilité vivante, à la trajectoire et aux potentialités inconnues.
Certes, une société, une communauté, un individu, sont en droit – n'est-ce pas là un droit naturel ? -, de se protéger de ce qui peut leur nuire. Mais cela n'implique nullement la prétention du jugement, la prétention de « rendre la justice. »
Cette protection serait d'ailleurs meilleure, et plus juste, et même finalement plus efficace, en s'enveloppant de non-jugement actif, c'est-à-dire d'un effort d'empathie, d'un souci de bienveillance : j'aurais peut-être pu devenir ce nuisible, j'ignore l'alchimie qu'il porte en lui et qui peut le porter au meilleur.
Nous introduisons ainsi un nouveau principe de justice : mon non-jugement me rend plus juste, j'entre donc avec lui dans une relation plus juste, je le rends donc sensible à son propre sens de la justice, je l'ajuste alors à la possibilité d'une évolution/transformation positive.
La véritable justice est un alliage d'humilité et de générosité. Elle ne comptabilise pas, ne règle pas un passif, elle est le déploiement du sens inné de la justice, qui sait que nul n'est parfaitement juste, qui est donc sensible à sa propre injustice, ce qui le rend plus sensible à l'injustice et plus attentif à ne pas la commettre, ou à la réparer, et à grandir en justice en faisant grandir le sens commun de la justice.
Le sens inné de la justice, le droit naturel, que nous pouvons perdre et retrouver, laisser se dessécher ou se développer, n'est rien d'autre que la sensibilité universelle au bien commun.

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