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Critique de Ellane92


L'île de Beauté, les plages de sables fins, les criques cachées, les villages que l'on atteint par les sentiers détournés plein de senteurs, de châtaignes et cochons sauvages, le tout sous l'oeil bienveillant de la Citadelle... Tout cela est bien loin de la Corse telle que nous la dépeint Marc Biancarelli dans Orphelins de Dieu ! La beauté y est crasseuse, les plages lointaines, les sentiers raides et plein de caillasses et de boue. La sieste à l'ombre n'amène que la malaria. Les gens crèvent de faim dans des taudis, tandis qu'ils épient leurs voisins à leur fenêtre. Les héros d'hier sont les bandits d'aujourd'hui, toujours prêts à sortir les armes au moindre froncement de sourcils, et plus chatouilleux sur leur honneur qu'un Espagnol de l'ancien temps. Même les filles de joie n'enivrent leurs jeunes visiteurs que pour mieux leur soutirer leurs bourses (non, il n'y a pas de jeu de mot...). On ne va donc pas s'étonner si une jeune fille part dans l'espoir de venger son frère en lavant sa colère dans le sang, avec l'aide de l'Infernu, un ancien de la bande à Poli, le célèbre héros Corse.

Orphelins de Dieu est un drôle de livre. Nul doute que le titre est bien choisi et donne le ton de cet ouvrage résolument noir et violent, qui engendre chez le lecteur (enfin, ça a été mon cas) une sorte de fascination malsaine pour les aventures de Vénérande et le passé d'Ange. Qu'est-ce qui fait qu'un homme devient un héros ? Pourquoi Lewis Wallace est-il encore un symbole de liberté et d'indépendance, alors que Théodore Poli a finit trahi et abattu comme un chien ? Les guerres d'indépendance, quand c'est chanté par des poètes, ca va, mais quand on les vit en vrai, on n'a pas envie d'en faire des chansons. Mais à la vérité on n'était plus des héros depuis longtemps. On était des salopards.
Salopard, il faut sans doute l'être encore pour vivre de la boisson que rapportent les contrats que l'on exécute pour le compte de tiers. L'infernu, vengeant le faible et la vierge sans défense, devient-il un héros, ou à défaut peut-il se racheter une conscience au crépuscule de sa vie ? Est-ce en se vengeant qu'une jeune fille peut enfin, peut-être, vivre sa vie ?

Il y a quelque chose de sordide dans l'histoire racontée par Biancarelli, dans la succession de bagarres, de violence, de mutilations, évoquées. Mais il y a aussi parfois des éclairs de désir, de rédemption. Mais ça ne dure jamais que le temps que la réalité prenne le dessus. Il manque à mon sens quelque chose à ce livre pour en faire autre chose qu'un étalage de sévices et de morts brutales, une lumière d'espoir, un brin de compassion, un peu d'humanité, une aspiration à transcender cette vie de misères pour une autre. Et c'est dommage, parce que Orphelins de Dieu aurait pu être un livre fort et marquant.
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