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EAN : 9782070409914
432 pages
Gallimard (07/06/2000)
3.56/5   34 notes
Résumé :
Des Piémontais, poussés par la pauvreté, émigrent et vont défricher un coin de cette plaine illimitée, la pampa.
Un enfant promis aux travaux des champs déjoue le plan de ses parents et saisit la seule chance alors offerte aux gens de son état : le séminaire, où l'attendent amitiés particulières, musique, livres, qu'il espérait tant, et la découverte de la langue française. Il a douze ans.
En Europe, la guerre bat son plein, tandis que, ici, s'instal... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Curieusement, je dois cette lecture au tableau de Piet Mondrian reproduit sur la couverture de l'édition le Livre de Poche : « Paysage avec un nuage rouge », 1907 !
Bianciotti, écrivain d'origine argentine et membre de l'Académie française, compose cet autoportrait en 1992, soit vingt ans avant sa disparition en 2012. Quand on y pense, « la nostalgie de la culture » de son père, pauvre Piémontais en exile, l'a conduit particulièrement loin !
J'aime les autobiographies et celle-ci m'enveloppe doucement, m'inspire, même si les scènes qui se sont nichées dans la mémoire de Hector Bianciotti sont très différentes des miennes. Je ne viens pas du monde rude qu'il décrit, « où faire des enfants revenait à se pourvoir de main-d'oeuvre », et où la beauté « si toutefois on la percevait, ne représentait qu'un caprice au coeur de la nécessité de survivre, de pourvoir sans trêve à la subsistance ». C'est étrange que je lise l'épisode (cf. ma citation d'hier) de la danse de Hector bébé, devant un miroir, dans les bras de sa soeur aînée, à la date anniversaire de la mort de mon père. Parce que j'ai des photos où, moi aussi, je « valse » avec lui, alors qu'il me porte en l'air, âgée de quelques mois, en pyjama. Comme chez la majorité des adultes, ma propre mémoire ne remonte qu'à mes trois ou quatre ans, mais les histoires qu'on me contait sur cette période choyée de ma vie sont dans le panthéon de mes souvenirs ! Pardonnez-moi le fait que, dans ce billet encore, je savoure des coïncidences !
Les flashes de mémoire de l'écrivain nous marquent à notre tour : « Il y aura toujours un serpent jaune et noir qui se redresse, prêt à mordre, […] et ma mère qui le tue ». Il y a aussi ce souvenir du cadeau d'un bijou, suivant la coutume d'autrefois, qui tiendra les doigts de Bianciotti à jamais claustrophobes : « On m'emmène chez le médecin du village le plus proche, en plein nuit ; la bague n'était plus qu'un fil étranglant l'enflure de l'annulaire ; et moi, tout entier, que ce doigt, cette petite parcelle de mon corps ». Il parle avec émerveillement et gratitude de son éveil à la beauté : sa première écoute de « La Traviata »…
Ce livre est beau, que de métaphores neuves il file ! Mais quelle beauté exigeante envers le lecteur dont la concentration et l'effort de l'imagination sont sollicités continuellement ! L'auteur affronte les écueils du compliqué car son vocabulaire recherché, ses longues phrases et incises sont très loin du parler ordinaire, voire il court par moments le risque de nous laisser froids ou nous fatiguer par sa densité. Cependant je crois que Bianciotti est trop passionné de l'insolite pour craindre de paraître prétentieux ou élitiste. Ce feu d'artifice de plaisir littéraire est tout à fait naturel pour lui ! Pour ma part, je n'aime pas quand un texte est trop simple, il faut qu'il me résiste un peu, qu'il me tire vers le haut, pour motiver ma lecture.
Cette oeuvre nous donne envie de fouiller dans notre propre enfance. En nous provoquant ainsi, elle est bénéfique. Vladimir Nobokov me faisait cet effet, que ce soit par sa biographie « Autres rivages » ou par le roman de son premier amour « Machenka ».
Le soliloque de Bianciotti pose souvent des questions philosophiques, comme celle-ci : « Et ma mère, l'avais-je aimée ? Poussés par la vie, nous n'avons de cesse que d'échapper à nos parents, de sorte que le coeur — à leur mort on s'en aperçoit, — aura toujours été en retard. » On n'oublie pas ses interrogations poignantes comme celle-là : « Peut-on faire quelque chose pour soi qui ne fasse, dans l'immédiat, du mal à quelqu'un ? » Parfois il se demande s'il n'a pas commis un abus d'imagination dans ses envolées poétiques ! Et là, Bianciotti entrevoit cette vérité extraordinaire : notre présent alimente, cultive, notre mémoire plus que celle-ci ne le façonne. Des sensations se sont imprimées en nous que nous n'avons pas forcément saisies au moment de l'expérience. Leur résurrection à travers l'écrit les transforme en aimants de toutes sortes d'impressions postérieures qui s'y agglomèrent comme les algues et les bigorneaux au rocher.
A lire, à relire et à méditer !
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Quel destin a eu Hector Bianciotti (1930-2012), né au fin fond de l'Argentine et devenu un grand écrivain de langue française, chroniqueur littéraire et académicien ! Il a un style agréable et même recherché, qu'on apprécie dans ce livre qui est une autobiographie romancée.

Dans cet opus il revient sur son enfance, sur la vie de sa famille, qui a quitté l'Italie et s'est établie dans la Pampa. Là, le petit Hector n'avait aucun espoir de sortir de sa condition sociale. Pourtant, une opportunité lui permet de quitter la ferme familiale en entrant au séminaire: un lieu qui ouvre des perspectives, même s'il n'est pas particulièrement recommandable. La dictature s'étant établie en Argentine, il décide de quitter le pays…

Ce livre est une libre évocation de souvenirs lointains et intenses, qui reviennent à l'esprit de l'auteur. Je trouve très remarquable qu'il nous ait fait part d'un vécu si éloigné de ce que nous connaissons habituellement - et ce, dans un langue qui n'était pas "maternelle" pour lui mais qu'il maîtrisait si bien.
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Autobiographie romancée au fil des souvenirs de l'auteur qui relate sa vie en Argentine. Un peu comme une madeleine de Proust, un souvenir, une image, une odeur ou une couleur rappellent à l'écrivain son enfance dans une ferme argentine où sa langue maternelle, l'italien est proscrite afin de mieux s'intégrer. Son entrée au séminaire pour d'échapper à sa destiné de vacher. Ses premiers émois; sa vie citadine, ses amitiés vraies ou fausses jusqu'à son exil en Europe.
Un beau roman, bine écrit , au vocabulaire riche qui nous fait traverser une tranche de vie d'Hector Bianchiotti.
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Courageuse biographie romancée de sa jeunesse en Argentine. Choisit le séminaire pour échapper aux rudes travaux campagnards. Y découvre pêle-mêle musique, livres, éveil des sens et amitiés particulières. Puis vient la peur engendrée par la dictature péroniste qui l'amènera à quitter son pays.
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C'est relativement rare...mais j'ai décroché, peut-être un mauvais timing, parfois, ce n'est pas le livre du moment, comme un rendez-vous manqué, pourtant, une belle écriture...je le retenterai certainement plus tard..
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Cécilia me prend dans ses bras ; elle a les lèvres rouges et une odeur que je ne lui connais pas ; et je nous vois dans le miroir de l’armoire où sa jupe se déploie jusqu’à le déborder : Cecilia me fait danser sur un rythme qu’elle entretient sur place, elle chantonne une mélodie qui s’en va dans l’aigu, et c’est le bonheur lorsqu’elle me passe sa main sur les joues, mais rien que pour sécher mes larmes, pour qu’elles n’abîment pas son fard : elle ne me caresse pas. […]
Sans rien posséder que mes envies, j’aurais tout donné pour une caresse. Les enfants ni les adultes ne jouissaient du toucher sous nos latitudes. Aussi de la petite enfance, ne reste-t-il que la main de ma grande sœur sur ma joue mouillée, tandis que dans un lent tournoiement d’ombres roses nous nous éloignons dans les miroirs jusqu’à disparaître sous la soie du sommeil qui m’enveloppe.
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Dès lors que j’appris à marcher, je n’eus de cesse que de remplir de pas le patio, un morceau de plaine clôturé d’un treillis en fil de fer où s’entrelaçaient par endroits des campanules — et l’on attendait en vain, saison après saison, année après année, les fleurs violacées que, chez la grand-tante Pinotta, j’approchais de mon oreille dans l’espoir d’entendre de la musique, car à mes yeux, en dépit de leur petitesse, elles étaient en tout pareilles au pavillon du phonographe qui trônait dans l’ombre de sa chambre à coucher.
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Longtemps je n'ai connu du monde que la nature la plus austère, la plus avaricieuse qui soit : un sol étendu à l'infini qui ignore les aménités que le mot "paysage" suggère, les lignes courbes qui conduisent le regard étant bannies d'une surface si homogène qu'on la dirait d'avant la Création, en dehors de l'insaisissable circonférence où le ciel et la terre s'inventent des limites. L'aube en s'ouvrant la dénude, la lumière de midi l'anéantit, le vent en provenance des origines du monde la balaie, soulevant au passage de hauts rideaux de poussière qui obscurcissent le soleil avant de retomber, telle une bruine sèche, avec lenteur. Dans ces contrées, là-bas, le centre du monde se déplace avec chaque homme qui marche et toutes les distances rayonnent à partir de son pas.
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A aucune époque, je n'ai éprouvé le goût d'y penser, ni en aval ni en amont, et moins encore d'élucider telle attitude ou tel revirement susceptibles de surprendre ou d'intriguer mes proches. Mais nous avons tramé ensemble une tapisserie, accentuant ou estompant le contour des figures au gré des jours, rehaussant ou atténuant jusqu'à l'effacement des couleurs ; et maintenant que l'hiver approche après lequel il n'u aura plus de printemps, maintenant que, de quelque étendue que s'avère la durée du sursis, l'échéance est pour demain, l'envie m'a pris de scruter son envers : le tressage, les fils noués et ceux qui pendent, inemployés.
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Chaque corps est un enfer, une caverne d'appétits, de fièvres, un gouffre affamé de plaisirs.
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