Blanchot, complice en silence d'Heidegger sur leur passé sulfureux ? Alors que l'on fait paraître les « Cahiers noirs » de l'un, on publie les « chroniques politiques » des années 1930 de l'autre.
Je crois que se révèle le rapprochement ici se fissure. Si Heidegger révèle comme le remarque
Jean-Luc Nancy un « sur-nazisme », Blanchot gagne à pouvoir être jugé (puisqu'il s'agit de cela, ce tropisme du jugement, du jugement moral et politique) sur pièce, avec le dossier intégral des chroniques.
Le bilan gagne en nuance et demeure en tension (voir le commentaire de
Michel Crépu sur son blog de la NRF) au-delà de la « révolution spirituelle » et nationale et du « terrorisme comme méthode de salut public » (texte à le lire beaucoup moins radical que le titre ne le suppose). Provocations, nihilisme, positions de principes marquent ces textes dont certains témoignent parfois cependant d'un esprit critique (on ne peut couper ce Blanchot de celui des années postérieures comme l'a souligné
Michel Surya dans son récent opus « L'écriture de jour, l'écriture de nuit »).
La position vertigineuse de Blanchot « non conformiste » de droite, reste bien représentée dans un de ses derniers textes « On demande des dissidents », appel à la perpétuelle mise en crise des idées (même si le texte a aussi une dimension ironique) : « la vraie forme de dissidence est celle qui abandonne une position sans cesser d'observer la même hostilité à l'égard de la position contraire. »