Un roman qui commence tambour battant - dans Paris assiégé par l'armée prussienne, un inspecteur et son collègue le commissaire font face à quelques meurtres étranges ou l'assassin semble vouloir impliquer le poète Bandelaire, fraîchement décédé, en laissant des traces poétiques liées aux meurtres. Bien qu'une longue digression ait lieu chez une "cocotte" appelée Claire de Lune, les 50 premières pages sont alléchantes. Même lorsqu'on s'étend peut-être un peu trop sur les mystères "orientaux" découverts par les deux pandores lorsqu'ils étaient en Algérie (sous Charles X, on suppose). Même les citations de Baudelaire collent parfaitement aux modes des meurtres. On se lèche les babines.
Et là, tout commence à déraper. Pas besoin d'être grand clerc pour deviner que quelque part dans les pages à venir on va nous expliciter l'histoire d'une "jumelle méchante" de Baudelaire élevée par des nonnes et qui a fini par se tirer du pensionnat, non sans avoir dûment enculé "Soeur Loup" avec ce qui est décrit comme une "monstrueuse anatomie", à savoir un clitoris hypertrophié, ou alors un pénis en excès. Que le commissaire va dûment vérifier vers la fin du bouquin (malgré l'odeur fétide des fonds de culotte de la "monstrueuse" créature qui est entretemps devenue, on se sait trop pourquoi, pourvoyeuse d'armes démodées pour les Communards) . Rassurons-nous, sur 280 pages les Communards n'ont droit qu'à 2 pages qui semblent être adaptées de Wikipédia, et encore. le "zizi" de Napoléon III a droit à plus. L'auteur n'est sans doute pas marxiste, plutôt le genre Gala. "Sedan: malgré la défaite, l'empereur déchu nous montre son zizi". "Baudelaire, sa soeur, sa fille: pire que Jacques Anquetil!" ou "Les bombardements ne nous dérangent pas trop".
L'histoire essaie désespérément de relier les arts occultes, le satanismes, les mystères africains, Baudelaire, des voyants, des putes de luxe, un richissime bonhomme qui se déguise en indigène du Pacifique, un mec appelé astucieusement "Le Maçon" et qui enferme l'un des flics pour l'éternité derrière un mur de briques (mais en réalité ce flic est diablement content de mourir comme ça, apparemment, dans un des deux remakes dans le roman de "Je suis enterré vivant et je n'y peux rien") et bien sûr la peut-être soeur jumelle diabolique du syphilitique poète qui traîne son mal de vivre au fond des bouges. On a même droit à une création littéraire de la soeurette maléfique sous le pseudonyme stupéfiant de subtilité de Simone Bourbier. On ne nous épargne rien: non seulement on en a des pages et des pages, mais on en découvre encore un supplément. Heureusement, on a évité les annexes. Il devrait y avoir un prix Darwin pour les auteurs qui trouvent des noms aussi débiles et qui ne savent plus comment se démerder d'une bonne intrigue en nous racontant par le menu tout ce qu'on a déjà deviné et qui est, finalement, sans aucun intérêt.
En plus, on a un mal de chien (à l'époque, c'est risqué) à suivre question dates. L'empereur a été battu le 4 septembre mais tout le monde continue à parler de lui comme si l'empire n'était pas terminé, les gens mangent du chien et même de l'humain un peu partout (la viande de chien est, selon le commissaire, un peu sèche même s'il s'agit d'un chien de race) mais les bordels sont en plein essor et l'empereur (toujours lui) a filé une masse de fric à un voyant qui lui prédisait la victoire et à la maquerelle (la soeur maléfique) avec laquelle il travaillait. Sauf que l'or - mais juste avant Sedan - a été ramassé par la fille de Baudelaire, dont il ne faudrait pas imaginer que, dans la veine du film "La Petite" version 1870, sa virginité n'ait pas été sacrifiée à papa dans le boxon à maman. A la Claire de Lune...on a même ce qui ressemble à une version gore du petit Grégory, au croisement de la Veloze et de la Meurthe, à savoir le viol d'une soeur (celle du futur commissaire, cette fois, qui était déjà un vrai manche comme gamin) par un oncle débile qui parachève l'affaire en coupant quelques bras et quelques jambes.
Curieusement, ce sont les quelques pages qui parlent de souvenirs de Lorraine qui sont encore les plus "vibrantes" du roman, même si l'auteur semble ignorer que de Lunéville à Nancy on ne traverse pas que des forêts primitives, Lunéville qui va en fait devenir en 1870 la frontière.
On pourrait à la rigueur se dire que l'auteur a voulu faire du mauvais Chéri-Bibi (avec les déguisements, etc...) tout en situant historiquement et littérairement son intrigue. le problème est qu'au tiers du bouquin l'intrigue cesse. On a droit à d'interminables tirades dont l'ennui le dispute à l'inutilité crasse. Tout y passe, mais on finit par passer parce qu'on a bien compris les histoires biscornues sans avoir besoin d'interminables leçons de morale gélatineuse et de découpage narratif (nous expliquant ce que l'intrigue raconte, alors qu'elle est tombée en panne) pendant 150 pages.
On a aussi compris, par exemple, que l'auteur a voulu parachever la possibilité de se faire devin par rétrovision en nous annonçant l'avenir. On découvre donc le cinéma quarante ans trop tôt, et on nous annonce joyeusement qu'après cette guerre qu'on nous a en fait peu décrite (à part le prix de la viande de rat et les quelques bombes) il y en aura une pire. Impressionnant.
Le début et l'idée, ainsi que le fait de lire un auteur flamand, m'avaient rempli d'enthousiasme. le problème semble être que Bob, malgré un nombre important de romans, a produit quelque chose de somme toute raté. J'ai beaucoup de difficulté à comprendre que ce roman ait pu enlever un prix. Sauf si les fantasmes érotiques ont touché au niveau de la queue les membres du jury. En traduction, d'ailleurs, "queue" et "tail" entretiennent une certaine ambiguité "diabolique"...je me demande ce que c'est en néerlandais.
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Mon poète préféré est bien malmené dans ce roman. La vulgarité et le sordide sont au rendez-vous. Des longues digressions aussi, qui affaiblissent l'intérêt pour l'intrigue policière, et renforcent à peine celui pour les personnages. le coté historique donne de la crédibilité et une ambiance. Mais au final, je suis déçu.Car la conclusion parait plutôt inachevée.
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Un sulfureux roman de l’écrivain flamand Bob Van Laerhoven qu’a couronné le prix Hercule Poirot. Une histoire nettement plus "sataniste" que strictement policière, dans le Paris menacé de 1870.
Lire la critique sur le site : LaLibreBelgique
Avec son ambiance chaotique teintée d'érotisme, ce curieux polar historique, bourré de références littéraires et culturelles, a un intérêt certain, mais le dénouement inattendu, qui fait appel à l'occultisme, ne plaira pas à tous, et le tout souffre de quelques longueurs.
Lire la critique sur le site : LaPresse
C'était là un trait typique de la bourgeoisie française que de réchauffer aujourd'hui en son sein un poète qu'elle avait vomi et persécuté tout au long de sa vie.
La photographie est un enfant de ce siècle. Elle rend visible l'invisible. Il y a d'abord eu la lanterne magique ; à présent, ce sont des sels et des produits chimiques bien précis qui, plongés dans des bains révélateurs et guidés par la main d'un spirite expérimenté tel que moi, évoquent des démons et des morts.
Le crime sensibilise les gens aux mystères qui sommeillent sous la vie de tous les jours.
Les gens qui suivent leur destin sont en général des êtres romantiques.