Un beau jour d'octobre, j'ai reçu dans ma boîte aux lettres ce que je croyais être alors un polar dans le milieu de l'art comme j'aime lire.
Hamadryas, j'ai déjà dû sortir mon dictionnaire avant de commencer le bouquin, c'est le nom d'une espèce de babouin, un des avatars du dieu égyptien Thot, patron des scribes et du passage dans l'eau-delà. Dans le livre, c'est le nom d'une société secrète qui sévit dans le Paris de 1995, et qui réunit quelques illuminés de l'école du Louvre et même à l'international.
On nage très vite en plein polar ésotérique, dans la même catégorie que le Da Vinci code, et si j'ai beaucoup apprécié le roman de Dan Brown malgré ma réticence pour le surnaturel, je demeure plus que réservée pour cette relecture de la grande peur de fin de millénaire .
Le bric à brac accumulé de fausses pistes pour égarer le lecteur, est pire que toute la symbolique utilisée par Dürer dans Melencolia, une de ses oeuvres majeures, une sorte de vanité cryptée de la fin du Moyen âge, qui sert de fil rouge. On se perd dans tous ces personnages inconsistants. Ça part dans tous les sens, et bien malin est celui qui comprend ce qu'il y a à comprendre, et quel est le fin mot de toute cette histoire.
La seule chose un peu sympathique c'est le cours d'histoire de l'art du professeur Longhi, qui a son propre mystère à résoudre, et encore, il reste entaché du doute qui pèse sur toute cette invraisemblable histoire. La dame est un tout petit peu quand même, la caricature de l'universitaire péremptoire que je déteste. Dürer n'est pas ma tasse de thé, mais si je veux en apprendre plus sur lui, je ne fais pas trop confiance à cet ouvrage.
Bref, vous l'aurez compris, pour moi, si Dan Brown en son temps a su remarquablement créer une polémique autour de son roman, c'est qu'il avait très bien su aménager une atmosphère de vraisemblance, pour faire adhérer et se chamailler ses lecteurs et la presse spécialisée qui présentait alors ses inventions d'écrivain comme des découvertes scientifiques. Une narration plus serrée et directe et un rythme plus soutenu maintenaient les lecteurs en haleine derrière le professeur Langdon.
Dans Hamadryas, l'illusion ne prend pas et je me sens bête, au bord du chemin, méfiante d'emblée, une fois la comète passée, le suicide collectif de Waco, la signature de Dürer sur les lieux de l'attentat du RER, le saint suaire ...et ce n'est qu'un aperçu de ce faisceau de coïncidences en gros sabots qui vous accueille dans un univers de complot généralisé fomenté depuis la nuit des temps, couplé à un discours complexe, pseudo érudit ...ou fumeux, je ne sais pas à vrai dire, presqu'une caricature du genre.
Et que dire de la fin ? décevante forcément, avec toute l'artillerie qui précède, on aurait pu espérer quelque chose d'apocalyptique tant qu'à mobiliser les gros moyens .
Je remercie toutefois l'éditeur et Babelio pour ce cadeau , ce livre n'a pas été un bon moment de lecture en ce qui me concerne, mais tout est relatif.
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Thriller passionnant. Un ami qui lit ce genre de livres me l'a conseillé hier soir, je l'ai trouvé près de chez moi et une fois commencé, j'y ai passé la nuit! Mélange d'érudition et d'intrigue policière qui mériterait de faire un film! Tentez le coup.
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"Hamadryas " se veut un anti "Da Vinci Code": un thriller sur l'art produit à partir d'analyses scrupuleuses qui prend fait et cause contre les extrapolations conspirationnistes.
Bon. Tout ça est très bien et on apprend quelques petites choses sympa sur Dürer et sa célèbre "Melancholia1".
Mais au fil des pages l'analyse se fait de plus en plus allusive et péremptoire pour aboutir à des assertions définitives du genre "Créer des images signifie accepter d'inscrire son existence dans la dimension de la finitude et de la mortalité ". Ah? Vous m'en direz tant.
Et surtout, quand on décide d'écrire un roman, on n'oublie pas que le principe romanesque majeur consiste à faire vrai, que le lecteur puisse se projeter selon le mot préféré des émissions immobilières sur M6. Et là, euh... comment dire? L'auteur applique les recettes à la mode: chapitres alternés, intrigues parallèles, flashback... Et aussi les rengaines inusables : enfants trouvés et souterrains mystérieux... Mais les personnages sont tous plus fabriqués les uns que les autres et hystérisés pour produire de l'enjeu. Quant à l'intrigue, elle avance suspendue à des ficelles plus grosses que ça tu meurs. Par exemple, le méchant échappe à la police, capture une otage, lui explique où et quand un attentat va être commis puis se suicide. Ah, zut! Trop facile a dû se dire l'auteur qui décide alors que le témoin sera mis sous sédatifs au lieu d'être interrogé par la police. L'attentat sera finalement déjoué dans un summum de décrédibilisation assumée : "(L'enveloppe cristalline) , conçue pour ça, résistait aux coups de marteau pourtant d'une extrême violence. La pluie des blocs de marbre continuait et le fait que Mario fut (sic) épargné relevait déjà du miracle. Il redoubla d'efforts. Trouvant une force physiquement impossible, il asséna de tels coups au coffre blindé qu'une brèche finit par s'ouvrir."
Quoi, j'ai raconté la fin? Ben oui, ami lecteur, mais tu l'aurais devinée de toi-même. Donc la secte des iconoclastes va perdre, et on souhaite le même sort à celle des profs qui se croient capables d'écrire un roman tout ça parce qu'ils ont réussi à taper leurs cours sous word.
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En écrivant ce que l'on risque d'oublier on le fixe et on décharge la mémoire de la tâche ingrate de tout retenir. De plus l'écriture porte remède à l'oubli à long terme: grâce à elle on fixe la mémoire des choses et on peut écrire l’histoire comme mémoire collective...
- C'est une grande invention !
- Ce n'est pas l'avis de Platon qui pense que ce remède à l'oubli est en fait un poison pour l'esprit qui fait trop confiance depuis à ces traces extérieures que sont les signes écrits aux dépens des traces intérieures que sont les vrais savoirs inscrits profondément dans l'âme, d'après lui. Bref l'écriture nous rendrait amnésiques et ignorants.
...d'un côté il (Albrecht Dürer) était persuadé que la géométrie détient le secret des bonnes proportions, mais de l'autre il était fasciné par l'irréductible diversité des formes naturelles. Il n'y a rien de plus étonnant que ses minutieuses aquarelles représentant des touffes d'herbe d'un réalisme qui manifeste l'extrême attention à ce qui ne saurait être le produit d'une reconstruction géométrique ! On ne calcule pas la verte explosion des brins d'herbe, elle est incommensurable, irréductible à une quelconque proportion. Elle ne répond qu'à une logique des apparences.
Barbara avait remarqué que lorsque son esprit était mobilisé par un problème dont elle ne trouvait pas la solution, elle rentrait dans une sorte de processus automatique qui commençait par l'incapacité à trouver le sommeil, se poursuivait par une sorte d'excitation qui la rendait incapable de se concentrer sur quoi que ce soit d'autre, enfin la plongeait dans une forme de léthargie dans laquelle tout ce qu'elle avait pu lire et penser s'interconnectait malgré elle, nuit et jour, débouchant soudain sur une solution.
Quand j'écris que la photo capte la visibilité des choses je dis qu'elle n'est justement pas le simple miroir d'une réalité qui se laisse percevoir sans mal mais bien le réel plus une clé pour le voir selon un jour original, sans doute plus vrai que celui qui se livre au regard banal.
Le principe est acquis :il faut aller voir les oeuvres pour les comprendre puis faire par soi-même.