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EAN : 9782752910813
224 pages
Phébus (03/10/2016)
3.58/5   37 notes
Résumé :
Sergi Vélasquez, artiste peintre et prisonnier des apparences, s'amourache d'une rousse flamboyante qu'il croise dans l'ascenseur. Il est dingue de son corps, mais elle est hystérique ; c'est du moins ce que pense Julia, psychanalyste et soeur de l'artiste. Faut-il s'en inquiéter ? Roxane, elle, est photographe. Il y a quelques années, son visage a été brûlé dans un accident de voiture. Aujourd'hui, elle se réconforte, isolée dans une nature sans voisinage. Jusqu'à ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (28) Voir plus Ajouter une critique
3,58

sur 37 notes
Selon le dictionnaire, un accident est un, je cite, "événement fortuit qui a des effets plus ou moins dommageables pour les personnes ou pour les choses". Olivier Bordaçarre a quant à lui bien raison de mettre un "s" à ce mot concernant le titre de son dernier roman.
Tout commence par un accident. On pourrait presque le mettre au pluriel, cet accident, tant il aura de conséquences sur le reste de l'histoire. Il s'agit en premier lieu d'un accident physique, un accident de voiture, avec des effets très dommageables sur la femme qui est à l'intérieur, puisqu'elle en portera les stigmates jusqu'à la fin de ses jours. Cette femme, on ne sait qui elle est, si elle conduisait ou était passagère, mais on la retrouvera plus tard. Ce premier accident aura bien d'autres effets, tout aussi dommageables pour tout un tas de personnes.
Et puis, un nouvel accident, aux effets nettement moins dommageables, pense-t-on, a lieu, à Paris, quelques années plus tard : Sergi tombe amoureux ! Sergi est un peintre d'origine espagnol, qui a son atelier (et sa couche de sédiments, nécessaire à sa création artistique) en face de l'appartement et du cabinet de psychanalyse de sa soeur. Et, comme dans la chanson de Calogero, en prenant l'ascenseur pour monter jusqu'à son atelier, il se retrouve en tête à tête avec un ange. Mais contrairement à la chanson, il ne se mélange pas les pinceaux (ce serait un comble pour un peintre) avec les chiffres et repère très bien que la femme fatale à la longue chevelure rousse dont il est sous le charme s'arrête comme lui au 3ème étage, et est une cliente de sa soeur !

Accidents est ma première incursion dans l'univers d'Olivier Bordaçarre, et c'est plutôt une belle découverte, que je dois à Babelio et aux éditions Phébus (qui font des livres bien conçus et à la couverture soignée). J'y ai trouvé un belle écriture sensorielle, des dialogues familiaux plus vrais que nature, un sens du rythme plutôt bien maitrisé, de jolies réflexions sur l'art et l'artiste, et une touche d'humour pas désagréable. La première partie de l'ouvrage installe les personnages, l'histoire, amorce le suspense qui prendra le pas sur la seconde partie, plus intense. J'ai un peu moins aimé certaines facilités, comme l'artiste indépendant et coureur de jupon qui se transforme en "presque mari" modèle, le fait de tomber amoureux par "procuration", au travers de l'art, quelques personnages secondaires qui manquent un peu de finesse (le monde de la mode et de la publicité, par exemple), voire même une ou deux petites ficelles scénaristiques.
Ceci dit, j'ai trouvé ce livre de Bordaçarre très convaincant, agréable à lire, intéressant, et mystérieux. Une chouette découverte !
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«Chacun porte le drame de sa vie et, souvent, le dissimule d'un masque.» p.63

Une couverture suffisamment énigmatique pour donner envie d'ouvrir le livre. Deux femmes vêtues de rouge mais de style différent, l'une tourne le dos à l'autre. Puis en lisant la 4e de couverture on se dit qu'il s'agit d'une histoire de double.

Effectivement deux histoires alternent: celle d'une jeune femme accidentée de la route et celle d'un peintre qui tente d'être exposé et que l'on voit avec sa famille car il vit à côté de chez sa soeur mariée et deux enfants.

J'ai beaucoup aimé les premiers chapitres consacrés à l'accidentée. J'ai par contre trouvé horripilants les dialogues avec le peintre Sergi et ses proches. le style d'écriture est très inégal, composite. L'auteur veut la jouer original dans les dialogues ou les échanges (car il écrit des échanges entre personnages au style indirect avec une langue parlée) mais ça sonne faux. Il essaie de donner un ton intello, cultivé en citant et décrivant des scènes de films (« King-Kong » ou « Mon oncle » de Tati) cependant tout cela reste plaqué sans grand lien avec l'intrigue.

Forcément les deux histoires en parallèle vont se recouper et là… impression de déjà lu. Je n'ai rien trouvé d'original, aucune surprise, on devine vite la fin…
Même si j'ai apprécié certaines belles descriptions, l'ensemble ne m'a pas convaincue.

Je remercie toutefois les éditions Phébus et Babelio pour cette sélection lors de la Masse Critique.
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Sergi, artiste peintre bientôt renommé vit à côté de chez sa soeur, Julia, analyste.
Un jour il s'éprend d'une splendide rousse qui se révèle être plus qu'exaltée.
Parallèlement, Roxane, victime d'un accident qui l'a défigurée expose ses photos dans des galeries mais vit en province, à l'écart des gens.
Petit à petit, le lien apparaît entre ces deux histoires.
Sans qu'il y ait de style particulier, le livre est bien écrit puisque les pages filent toutes seules. L'histoire captive.
Entre Sergi, ses angoisses d'artiste et ses démêlées amoureuses, Entre Julia, son mari et ses deux filles. Entre Roxane, ses difficultés à affronter le monde. Entre Rebecca, la rousse surexcitée.
Tout un petit monde très parisien sympathiquement décrit.
Un bon moment de lecture détente sans prise de tête.
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Un épouvantable accident fige un instant les passants. Grâce au courage de l'un d'eux, la passagère échappe à une mort atroce.
Dans un bel appartement feutré, Paul prépare le goûter de sa fille en écoutant son beau-frère lui exposer ses doutes d'artiste. Julia, sa femme, reçoit un patient dans son cabinet de psychothérapeute. Valentine, l'adolescente, boude, grogne, se dispute.
Un jour, Sergi croise dans l'ascenseur, une rousse incendiaire . C'est ELLE, la femme de sa vie. Tout va pour le mieux.
Ou pas...
Je ne connaissais pas du tout Olivier Bordaçarre quand ce roman m'a été proposé par l'opération Masse Critique. La couverture me plaît, le titre m'intrigue, le résumé m'attire... Pourquoi ne pas tenter ma chance ?
Dès les premières pages, je suis tétanisée. le récit s'ouvre sur un terrifiant accident de voiture raconté de façon cinématographique. Coincée dans l'habitacle, une jeune femme, assommée et blessée prend lentement conscience que, si personne ne lui vient en aide, elle va mourir. le réservoir fuit, l'essence s'enflamme...
Le deuxième chapitre nous transporte dans un univers bien plus rassurant. Dans un appartement cosy de la rue Boulanger, un père de famille gère une adolescente rebelle qui veut à tout prix loger chez une copine et une petite fille avide de visionner un film de « grands ». Et d'ailleurs, « maman, elle voulait bien ». Paul discute avec son beau-frère, un peintre, qui hésite entre satisfaction de se voir enfin exposé dans une galerie et crainte de se faire rouler financièrement. Sans parler de ses doutes d'artiste : sera-t-il prêt à temps ? Ses oeuvres sont-elles dignes d'être présentées au public ?
Le roman est divisé en vingt-six chapitres dont les titres sont des adresses. Une bonne partie de l'histoire se déroule au troisième étage d'un immeuble ancien, occupé par Paul Calmant et Julia Vélasquez, une psychanalyste qui exerce à domicile, contraignant sa famille, au demeurant plutôt exubérante, à se tenir tranquille quand elle consulte. Leur voisin est Sergi Vélasquez, son frère, qui a transformé l'espace en un atelier bordélique. de temps en temps, nous retrouvons la jeune femme rescapée de la collision du début.
L'atmosphère, assez bon enfant à partir du deuxième chapitre, évoque la passion de Paul, cinéphile averti, les revendications de Valentine et Anouk, ses filles, mais aussi le coup de foudre de Sergi pour cette beauté mystérieuse croisée dans l'ascenseur. Que peut bien faire une femme pareille chez une thérapeute ? Pourtant, Julia le met en garde : s'il sort avec une de ses patientes, la déontologie lui interdit de poursuivre les entretiens. Mais franchement, où est le problème ? Rebecca a l'air parfaitement équilibrée. L'art de l'auteur consiste à distiller des éléments perturbateurs qui instaurent tension et malaise.
Un moment clef est celui où Sergi et Rebecca semblent jouer un remake du « Mépris » de Godard. Ici, Sergi se demande s'il ne devrait pas siffler quelques notes d' « Ascenseur pour l'échafaud », là, il raconte cette anecdote où Giacometti déclare : « dans un incendie, entre un Rembrandt et un chat, je sauverais le chat ». Voici, cachée entre deux voitures, Rebecca occupée à espionner Sergi. La voilà en pleine crise de colère, brisant tout autour d'elle. de discrets appels destinés à éveiller notre attention.
Olivier Bordaçarre utilise avec brio le discours indirect libre et transpose remarquablement les tics de langage des locuteurs. Valentine harcèle son père : « Félicie lui ferait grave la gueule (déjà qu'actuellement, au niveau de leur relation, c'était hyper complexe à gérer) ». Anouk a une idée fixe : regarder « King Kong ». « Mais siii ! Trépigna la petite au bord des larmes. » Elle sort « en grognant j'en ai marre, j'en ai marre, j'en ai marre. » Sergi se parle à lui-même. Dans une galerie, il se perçoit à travers le prisme du regard des autres, dont les réflexions sont à la deuxième personne du pluriel : « C'est tout vous ça, désirer l'ombre et provoquer la lumière, c'est vous tout craché. Une petite entorse au règlement vestimentaire vous positionne en inadapté. Ça attise la sympathie ou la curiosité, le mépris ou l'attendrissement. »
Soudain, nous déambulons dans une rue d'été. L'auteur peint les couleurs avec humour : « On avait chaussé les lunettes noires, on était bras nus, on fumait des blondes en sirotant des rousses, le sourire surligné d'un trait de mousse blanche », clin d'oeil à l'univers de Sergi.
Quelques mots suffisent à faire défiler sous nos paupières une scène de film connue : « Tati, pardessus beige froissé, chapeau brun à bord courbe, pantalon feu au plancher, chaussures marron, chaussettes à rayures, pipe emblématique et pébroque noir ». Indiscret, Sergi colle l'oreille au mur mitoyen du cabinet de sa soeur. Quelques bribes de la confession lui parviennent : « … grâce à moi... contrat avec l'industriel... je n'arrive pas à … il faut... beaucoup de temps... »
Le style m'a donc paru riche et varié. Olivier Bordaçarre sait créer un climat, une ambiance.
Le thème principal est, sans conteste, celui du double. Dès les premières lignes, on se focalise sur la passagère de la voiture accidentée. Mais, à côté d'elle, sur le siège conducteur, personne. Mystère. Ce n'est que bien plus tard que nous comprendrons. Sans cesse, on joue sur le contraste ombre et lumière. La photographe se présente de dos. Sergi et Julia sont frère et soeur. Julia fouille dans les esprits, Sergi fouille dans des débris, des poussières, qu'il agglomère à sa peinture pour créer des « cailloux ». Il y a deux appartements, deux chats, d'incessants jeux de miroirs.
Sur la couverture, du rouge, symbole du feu et du sang, deux femmes, dont l'une cache son visage derrière l'objectif et cadre le dos de l'autre. le tout très symbolique et très parlant quand on lit le roman.
Les personnages ont de l'épaisseur. On peut s'attacher à eux, se projeter dans certaines des situations qu'ils vivent, dans certains de leurs sentiments.
J'ai trouvé ce livre très réussi, prenant, captivant, haletant, même, parfois. Et,bien que j'aie pressenti le secret dès le début, j'ai beaucoup aimé cette lecture.
Je remercie donc de tout coeur l'opération Masse Critique et les éditions Phébus qui m'ont permis de la découvrir.
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Le livre s'ouvre brutalement sur un accident de voiture : les pneus explosent, l'huile se mélange à l'essence, la fumée commence à se répandre. La passagère est semi-consciente. L'explosion semble imminente : elle doit trouver la force de sortir de là mais sa blessure l'empêche d'agir… La scène est terrible, remarquablement décrite et l'on sort de ce premier chapitre déjà un peu secoué, il faut bien le dire… Qui conduisait ? Qui était la passagère ? On ne le saura pas, en tout cas, pas tout de suite…
Le deuxième chapitre présente les personnages principaux : une gentille petite famille très bobos parisiens : lui, c'est Paul, homme au foyer, féru de cinéma et visiblement doué en cuisine (miam, les crevettes au piment d'Espelette et à la coriandre fraîche !)
Il s'occupe de tout : ménage, courses, bricolage, leçons, cours de musique, goûter, sorties, RV chez le médecin, réunions de professeurs, de copropriétaires… sans s'énerver, très cool, très classe… (Les gens comme ça, en dehors des romans, je ne sais pas où on les trouve…)
Anouck et Valentine sont les deux filles : ados de chez ados. le portrait qui est fait des ces deux gamines est saisissant de vérité et qui possède ce genre d'individu chez lui se trouvera certainement rassuré de savoir qu'il n'est pas le seul à endurer le pire… Encore une fois, c'est excellent, les répliques sont très justes et très drôles (ça fait rire quand ça n'est pas chez soi…) Quant à la mère, elle s'appelle Julia Vélasquez, elle est psy et son cabinet se trouve dans son appart, rue Boulanger…
Leur voisin de palier, Sergi, est le frère de Julia. Il est peintre : son travail consiste à placer sur plusieurs toiles des « formes brunes pataoïdes d'environ cinquante centimètres de diamètre éclaboussées de taches blanchâtres. » On ne peut pas dire que Sergi soit tout à fait satisfait de son travail : il aurait préféré peindre comme Bacon mais une galeriste du Marais lui propose d'exposer… alors…
Tout ce petit monde vit sa vie presque tranquillement lorsqu'un jour, le gars Sergi se trouve nez à nez dans l'ascenseur de son immeuble avec la plus belle femme du monde (si, si !) : une belle rousse absolument irrésistible qui se rend… dans le cabinet de sa frangine !
Sergi tombe raide dingue amoureux de sa belle inconnue et est bien déterminé à savoir qui elle est… Et c'est là que les choses, comment dire… vont quelque peu se gâter… Ne comptez évidemment pas sur moi pour vous gâcher le suspense !
Est-ce que j'ai aimé Accidents ? Bien sûr ! Je me suis jetée dessus ! J'aime tout ce qu'écrit Olivier Bordaçarre et j'attends toujours avec impatience la sortie de ses livres… avec un coup de coeur particulier, je dois le dire, pour Dernier désir dont j'avoue ne m'être jamais totalement remise… Dernier désir m'avait intriguée, inquiétée, tendue à l'extrême… j'avais avalé ce bouquin en me demandant comment toute cette affaire allait finir. Un livre génial : une tension qui monte progressivement avec, toujours, l'évocation de la société et de ses valeurs (ou de son absence de) et de l'humour en prime.
Alors, oui, j'ai un peu moins aimé Accidents, même si je le classe quand même dans la catégorie des très bons. J'ai retrouvé l'humour de Bordaçarre dans la peinture de cette petite famille somme toute assez ordinaire et dans ses propos sur l'art… Je l'ai lu un peu comme un conte sur le thème du double.
En revanche, j'ai moins ressenti cette tension et ce mystère omniprésents dans Dernier désir, même si, vers la fin d'Accidents, mais peut-être justement un peu tard finalement, on commence à sentir se resserrer l'étau…
Je fais ma difficile parce qu'Accidents est incontestablement un bon roman que je n'ai pas lâché une seule seconde : les personnages sont attachants, l'humour décapant, l'écriture enlevée et superbe (certains passages sont de purs joyaux comme la baignade dans la cascade du Hérisson), la construction bien sentie, le portrait de la société virulent et très juste.
Merci encore, Monsieur Bordaçarre, pour ce grand plaisir de lecture… à quand le prochain ?

Lien : http://lireaulit.blogspot.fr/
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Citations et extraits (21) Voir plus Ajouter une citation
Une odeur de gomme cramée atteint les narines de la jeune femme.
Les roues bloquées par la tenaille des freins, les pneus ont explosé sur le bitume. À l’instant du choc, vitres et pare-brise ont été pulvérisés, moteur déboulonné, phares exorbités. La Clio rouge, toupie de papier froissé, a valsé jusqu’au centre du carrefour quand l’autre voiture terminait sa course, encastrée dans la devanture rose et or d’un institut de beauté. Un long silence de sidération a fondu sur les passants, sur les chiens à l’arrêt au bout des laisses tendues, et sur les choses elles-mêmes, les façades aux crépis de poussière, les fenêtres écarquillées, les panneaux de signalisation, les feuilles mortes.
L’huile bouillante dégouline du carter et se mélange à l’essence qui coule du réservoir éventré. Une fumée saturée d’une menace lente s’échappe des plis de la carrosserie, mais pénètre aussi dans l’habitacle par le châssis fendu et le tableau de bord, avant de s’évacuer par les ouvertures et de se désagréger.
Pour la passagère du tas de ferraille et de carbone immobilisé sur l’intersection, le temps est une notion momentanément étrangère. Elle n’entend plus rien et garde les yeux clos sans en avoir conscience. Son cœur hoquette sous ses côtes. Sa respiration est si frêle qu’elle n’entraîne aucun mouvement de poitrine. Elle fournit l’effort de soulever à demi ses paupières. Proches ou lointaines, les images floues se confondent. Torsions de tôle à portée de main, feux rouges et groupes d’humains, platanes nus sur l’horizon citadin. Elle ne distingue pas les marionnettes grises qui gesticulent aux fenêtres des immeubles quand d’autres se contentent de rester bouche ouverte dans un vague encadrement de rideaux.
Le mot accident clignote dans sa tête.
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Les monstres ont leur repaire. Ils s’y cachent. Terriers, caves, taudis, cartons, mouroirs en tous genres. Ils vivent et meurent dans leur trou. Ils occupent la place que la norme leur octroie : souterraine, froide, isolée. Longtemps, elle s’est crue perdue.
Son père lui répétait, très calmement : « Tu n’es pas un monstre. Tu portes sur toi les cicatrices d’un drame. C’est un fait. Tu ne peux pas t’y soustraire. Cela ne fait pourtant pas de toi un monstre. Tu es toi-même. Ne te sens pas réduite à ce qui te pèse. C’est un voile, oui, et tu peux lui reprocher d’être opaque et sans pitié, mais ton identité reste entière, avec ce qui la constitue essentiellement. Tu peux souffrir de ne pas te reconnaître dans ton miroir et d’en pleurer, mais ne néglige pas toutes tes capacités à être différente à chaque instant. C’est du sérieux, ça, tu sais ? Tu te crois seule, ma fille, à ne pas toujours sourire ? Viens, viens avec moi dans la rue, tu verras. Les autres, ils ne sont pas moins tristes. Chacun porte le drame de sa vie et, souvent, le dissimule d’un masque. C’est pourquoi certaines rencontres sont des malentendus, et ce qui les fait tenir, c’est la curiosité. Crois-tu que les amours ne se déterminent qu’en fonction des normes en vigueur ? Je sais que tu penses ça, mais le pire a déjà eu lieu, ma chérie. Notre ennemi, c’est la haine que tu as de toi-même. On va s’en occuper, pas vrai ? »
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Dans le miroir du cabinet de toilette, après des semaines d’attente, la jeune femme découvre la moitié droite de son visage rendue à la lumière. Tout a été rongé par le feu. Son cœur s’emballe. Elle s’agrippe des deux mains au lavabo. Le rythme de sa respiration s’accélère. Elle tremble devant le résultat des multiples interventions chirurgicales.
Sa bouche a été refaçonnée dans le prolongement des lignes saines, mais ne recouvrera jamais ses courbes d’antan. Ses lèvres arrondies à la commissure sont boursouflées, tendues, à se fendre, et portent les stigmates des brûlures tirant vers le pourpre. La greffe de peau sur la joue a recouvert les chairs calcinées et ressemble à la carapace d’un crabe en pleine mue, humide et molle, gorgée d’une humeur blanchâtre. L’arête du nez décrit une frontière rectiligne entre la dévastation et ce qui demeure vivant. La paupière ne recouvre pas totalement l’œil figé, vitreux, sans vie ni vision, double presque parfait de l’autre mais immobile, sans larme, serti dans l’orbite.
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–Paulo, soyons réalistes : le public de la peinture, c’est le bourgeois. Des hommes ou des cailloux, pour lui, c’est kif-kif ! Il vient dans la galerie parisienne, il mate cinq minutes, il achète un tableau de cailloux, il fout ça dans son salon pour le montrer à ses invités charmants, et après, ils bouffent comme des cochons. Voilà. Fin de l’intérêt de la bourgeoisie pour l’art. Le prolo, lui, il sait même pas que ça existe, il est trop préoccupé par sa survie.
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Non sans une pointe d'ironie,Sergi, fils de modestes immigrés andalous que la misère avait arraché à leur Séville natale l'aube des années 90 pour les replanter dans une loge de concierge de la place Dupleix....
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Vidéo de Olivier Bordaçarre
Dans son nouveau roman, Sens interdits, Chantal Pelletier projette le lecteur en 2046. L'enquête criminelle se déploie sur fond de drames environnementaux dans un pays régi par des permis de table, des contrôles de temps d'écran, des maisons de redressement alimentaire et des sessions de télécoaching punitif. Olivier Bordaçarre, dans Appartement 816, met en scène l'an 2030 dans un pays aux libertés et aux comportements modifiés par une épidémie. Dans un huis-clos hypnotique, un homme enfermé chez lui avec sa femme et son fils témoigne d'une époque et de ses effets sur la psychologie et les corps. Dystopie, anticipation, roman noir et réel : autant de liens à explorer qui montrent comment la littérature pense les enjeux de demain.
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