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EAN : 9782841004751
266 pages
Bartillat (10/02/2011)
3.57/5   27 notes
Résumé :

Le village fit scandale à Moscou lors de sa parution en 1909, parce qu'il montrait un autre visage dela paysannerie russe, bien différent de celui qu'on représentait habituellement. A travers le destin dedeux frères, Tikhon et Kouzma, Le Village fait entrevoir une terrible réalité. Il s'agit d'une fresque aux couleurs sombres, où se manifestent la cupidité, la hargne, la plus féroce des jalousies et l'égo&... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (14) Voir plus Ajouter une critique
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Chose promise chose due, je reviens vers Bounine dont la plume m'avait enchantée dans Les allées sombres.
Surprise : ce premier roman est d'un tout autre ton, et d'une écriture si différente qu'à l'aveugle je n'aurais jamais su deviner qu'il s'agissait du même auteur.
Sans doute est-ce le sujet qui s'y prête et qui façonne cette plume grasse, terrienne et d'une sombre poésie. "Le village" est d'ailleurs conçu par l'auteur comme un poème et non un roman, une ode grinçante et désabusée à l'âme du paysan russe, présentée ici sous son aspect le plus noir et le moins reluisant : sales, stupides, cruels, velléitaires, ivrognes, bornés, rien ne peut racheter ni faire s'élever ces personnages qui défilent en une succession de tableaux crus, englués par une nature qui écrase et condamne.
C'est un soulagement de sortir de cette lecture dans laquelle il faut accepter de plonger comme dans une vase nauséabonde, et d'y stagner à chaque page car l'eau n'y coule pas, la révolution qui vient (nous sommes en 1905) ne fera que charrier plus de boue et exhaler plus de laideur.
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A sa publication, le Village créa un tollé en Russie. Bounine le nomme "poème" plutôt que roman, peut-être parce que l'intrigue est lâche, à peine existante, que c'est tout un paysage qui se dessine comme un tableau de Brueghel, qu'on fouillerait du regard plutôt qu'on le lirait.

Sur fond de révolution russe (1905), deux frères que leurs ambitions avaient séparés se retrouvent à la quarantaine. L'un Tikhon, s'est enrichi par des moyens pas très honorables et en vient à une période de sa vie où sa conscience lui demande de se racheter. Quant à Kosma, longtemps parti vivre en ville, il se dit anarchiste mais passe son temps à boire et à traîner au village où il est revenu.
L'un par ses fréquentations, sa méchanceté et son égoïsme - à l'image, dit-il, du peuple russe lui-même, qu'il critique vertement - et l'autre par ses observations qu'il consigne dans un carnet jour après jour, désespéré, honteux, permettent à Bounine de dépeindre un monde paysan rustre, violent, buveur, menteur, bestial même sous le joug de la misère et de l'ignorance.
Peu de portraits sortent à leur avantage, et peu d'espoir apparaît.
C'est un poème noir malgré la neige, mais une neige d'une pâleur mortifère, un froid de glace, une steppe morne et boueuse.

Vous vous en douterez, malgré sa taille, la lecture a été éprouvante, mais les descriptions n'ayant rien à envier à celles de Zola, j'y ai aussi pris beaucoup de plaisir. le Village a bien sûr été perçu comme une provocation pour la Russie moderne de la fin du XIXème siècle, qui venait d'abolir le servage et était en pleine industrialisation. Loin de Moscou, loin des yeux.

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C'est la seconde fois que j'essaie d'apprivoiser l'oeuvre d'Ivan Bounine et si "Les allées sombres" m'avaient laissée satisfaite de ma lecture, il en va autrement du "Village", le premier roman d'un auteur auréolé du prestige du Nobel de littérature.

Bien que le roman soit court, je n'ai pu en venir à bout et comme je déteste cette impression de lutter contre un livre, je renonce au dernier tiers du "Village".

Noir et âpre à dessein, ce roman qualifié de poème par son auteur à l'instar des "Ames mortes" de Gogol est de nature réaliste à tendance naturaliste. Les deux frères que nous découvrons sont représentatifs de ce que Bounine, grand expert de la société qui fut la sienne, s'échine à décrire pour mieux dénoncer. Médiocrité, saleté, ruse, corruption, immoralité, violence... le portrait qu'il brosse des paysans russes de son roman est éloigné de l'image idéalisé du bon moujik, pieu et servile.

Tikhon et Kuzma, deux frères loin d'être nés avec une cuillère d'argent dans la bouche, bourlinguent au travers d'existences pauvres en idéal et riches en instincts primaires, ce qui les rend non seulement pas attachants pour un sou mais clairement repoussants et antipathiques.

Le verbe de Bounine est difficile à suivre pour qui n'a pas une connaissance fine voire intime de la mentalité russe. Car ici il ne s'agit pas de la mythique "âme russe" fantasmée mais bien d'une réalité crue et impie. le style souvent abscons de l'auteur qui s'apparente parfois à du flux de pensées désordonnées m'a lassée.

Considéré dans la sphère littéraire comme un titre majeur de l'oeuvre de l'auteur, "Le Village" est un récit fort et frontal, témoignage d'une société slave qui l'est tout autant.


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Le paysan russe sous la plume de Bounine n'a rien de doux, ni de pacifique ou de naturellement bon.
Dans "Le village", ce sont des portraits de moujiks taillés à la faux, des paysans du début du vingtième siècle, rustres, paresseux et cruels…des portraits sans concessions. L'auteur dépeint dans ce roman, à travers le regard de deux frères, Tikhon et Kouzma Ilitch, l'un commerçant l'autre citadin, la banalité de la misère qui frappe Dournovska, village noir "de squelettes d'isbas au milieu de seigles grêles, sans épis où règne une odeur de crasse et de fumier".

Ce sont des portraits qui exonèrent d'intrigue tant le désoeuvrement y est prégnant. Les paysans se débattent dans la fange pour de l'eau-de-vie et un peu de tabac dans un pays où "pendant huit mois de l'année souffle le chasse-neige, et pendant quatre tombe la pluie". Lorsque ce n'est pas la rigueur de l'hiver qui plonge le village dans la torpeur, l'ennui et la maladie c'est l'incurie qui frappe la campagne. Peu âpres au travail, les moujiks déambulent de ferme en ferme pour un travail qu'ils quittent lorsque la lassitude les gagne.
Il y a un morne désespoir qui embaume l'âme de ces paysans qui, sous la plume d'Ivan Bounine, revêt tous les attraits d'une douce mélancolie...et une mélancolie magnifiée par un sens de l'observation particulièrement affûté. Alliée à un souci du détail qui envahit tout le récit, cette langueur s'avère propice à une certaine contemplation.
Même l'écho lointain des émeutes qui appellent la révolution de 1905 ne trouble guère le désespoir monotone de Dournovska. Si les va-nu-pieds s'agitent, s'invectivent et menacent de faire grève, la flamme de la colère s'éteint très vite. Ils s'animent davantage pour les "baragouins" et autres cancans du coin car ici "chacun est l'ennemi d'autrui, lui porte envie, le calomnie".
Toutefois, malgré la saleté et l'ivrognerie décrites sans fausse pudeur, l'auteur ne tait pas la rumeur de la ville qui annonce quelques grandes espérances.
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Lui qui ne voyait rien, qu'il avait dit à Tolstoï autour de sa 20 e année, lors d'une rencontre impromptue rue Arbat à Moscou, la rue des artistes, il verra bien clair pourtant à la création de ce roman quelques années plus tard, avec une lucidité que n'aurait certainement pas répudiée le maître intransigeant d'Iasnaïa Poliana (auteur de la Matinée d'un seigneur).

Plus tard, Ivan Bounine va connaître l'exil, et comme pour tous les exilés russes de cette époque, des russes blancs mais pas seulement, on ne mesurera jamais assez les ravages du déracinement que je mesure déjà par mes proches, sans ajouter l'accueil du pays qui les reçoit qui n'est jamais les bras ouverts par des politiques idéologues qui font "chier" le monde qui mériteraient cent fois d'être châtiés. Mais de ça, j'en ai déjà parlé ici, bien que cela vaille bien une messe plus qu'une bénédiction.

Alors il me vient une idée concernant l'exil dont on n'explore jamais toutes les facettes de ses effets ravageurs, douloureux, cela touche bon nombre d'exilés civils ou économiques qui laissent les parents vieillissants au pays, c'est de ceux-là dont je veux parler aujourd'hui, le jour où ces derniers se retrouvent seuls. Un jour, le téléphone ne répond pas .. et on se dit alors qu'il y a bien du chagrin qui les emporte plus vite, dans un rapport qu'on ne saurait évaluer. Bien sûr qu'il faut s'émanciper, mais comme la vie est mal faite quand viennent les vieux jours des parents. Comment penser autrement quand le fait de les voir régulièrement les apaise considérablement comme à chaque fois un évènement invisible mais au combien important; cela leur tient chaud le coeur pour quelques temps. Par contre je me demande comment peut-on voir ça si l'on n'est pas témoin soi-même de ces déconvenues rendues cruelles quand la demande se fait plus forte, au fur et à mesure que le terme de la vie se resserre ..
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Citations et extraits (12) Voir plus Ajouter une citation
Bounine s'est fait remarquer en Russie par la pureté et la correction de sa langue, quelque peu sèche, et surtout par ses excellentes traductions du Caïn de Byron et du Chant de Hyawata de Longfellow, ainsi que par ses poésies, discrètes et agréables, qui révélaient en lui un bon artiste-paysagiste. Parmi ses oeuvres en prose, ce n'est guère que le Village qui fit sensation dans le monde slave. Lorsqu' après la guerre du Japon, si malheureuse pour la Russie, on entendit les coups de tonnerre annonciateurs de la première révolution russe, par tout le pays déferla une vague de dévastation des propriétés. Dès ce moment, Bounine, de ses yeux clairvoyants, vit le revers de la médaille : le peuple ne lui apparut pas avec une auréole au front ni sous les traits d'un porte-Dieu, mais comme un être emporté dans une débauche d'anarchie révolutionnaire. De cette impression naquit le Village (1909)
Il ne faut chercher pourtant dans cette oeuvre ni tendances, ni indignation, ni enseignement, ni désir de convaincre : Bounine est avant tout un artiste, et son tableau du Village n'est pas le fruit d'une inquiétude, ni du désir de jeter l'alarme, mais la constatation impartiale de ce qu'il a vu et senti à cette époque de la vie du peuple russe. On se tromperait cependant beaucoup si l'on voulait établir les caractéristiques du peuple russe tout entier d'après le Village de Bounine ; c'est la même erreur que commettraient des étrangers qui jugeraient du caractère de tout le peuple français d'après le beau roman d'Alphonse de Chateaubriand La Brière, où l'on trouve une peinture de la grossièreté et même de la sauvagerie de la population de ce petit coin de France..
(De Hofmann et Kulmann)


Je mettrai un bémol sur cette comparaison avec Chateaubriand !
Oui l'option que prenait le peuple ne paraissait pas à Bounine de nature à calmer les esprits, manipulé qu'il était par des idéologues sans merci, écartelé, pris dans la nasse avec les ouvriers comme si cela avait quelque chose à voir, les problèmes étaient bien distincts, mais les révolutionnaires se chargeaient d'y voir unicité et place au soulèvement général et pour certains par la violence.

Et s'il fallait faire une parenthèse avec la France et écouter les sirènes de Romain Rolland, intellectuel en vue, grand guignol, démagogue, peuple du monde entier unissez-vous dans son appel à la révolte internationale, que fallait-il de plus pour entretenir l'illusion ?

La paysannerie russe représentait alors 85% de la population, les provinces étaient gagnées par la famine, depuis la libération du servage, certains s'enrichirent, d'autres étaient encore plus dans la misère. C'était de la brasse coulée ! C'est sur ce terreau que vont s'échafauder les plans les plus fous, les plus audacieux des révolutionnaires qui déjà étaient gagnés par des luttes fratricides, lavage de cerveau, intimidations, manipulations. Des révolutionnaires socialistes en appelaient à la violence seule capable de vaincre et de renverser le régime tsariste, dans le sang en quelque sorte. Ajoutez-y un peu d'Antéchrist et on avait tous les ingrédients pour un cocktail explosif.

La situation sociale, il est vrai était arrivée à un point insoutenable, presqu' à un point de non retour. Un embrasement potentiel gagnait les esprits. La situation 1905-1910 était quasiment insurrectionnelle. C'est dans ce chaos invraisemblable qui n'est pas sans rappeler dans une moindre mesure évidemment nos situations d'aujourd'hui en occident, mais ça chemine ..En langage trivial, c'est toujours facile de foutre le bordel qui généralement en finalité profite à la réaction.

Et nous arrivons à notre Ivan Bounine qui ne l'oublions pas tout de même était de famille propriétaire foncier. Nous sommes en 1909 avec son Village? C'est ainsi qu'il va dresser un portrait impitoyable de la paysannerie de l'époque qu'il connaît bien, avec une lucidité remarquable, mais jamais ne mettant de l'huile sur le feu dans un sens ou dans l'autre de l'échiquier politique.

Pour illustrer ou corroborer ces propos, pas mieux que de lire nos grands littéraires étonnants de vérité et de lucidité, avant que ne s'installent pour 3/4 de siècle les écrivains de la honte soviétique.

La Matinée d'un seigneur, Léon Tolstoï Editions Climats 1999, oeuvre écrite en 1852, avant la libération du servage.127 pages. Il avait peut-être la naïveté de son inexpérience, mais avait-il la naïveté de ses objections face à la misère paysanne ?

Le Village, Ivan Bounine Editions Bartillat 2011, oeuvre écrite en 1909, 268 pages

Bounine ou la lecture de son oeuvre prend tout son sens aujourd'hui, car il y en a marre de toutes ces idéologies pernicieuses et subversives.

Il a été couronné au Nobel littérature avant guerre dans un contexte très particulier. Il s'agissait de faire entendre une voix libre et de consacrer un auteur de premier plan qui vivait dans la dure condition de l'exil.
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Vers le soir, Ivanouchka se leva et partit, sans se préoccuper du temps qu'il faisait, sans céder aux instantes prières qu'on lui adressait d'attendre jusqu'au matin... Et il prit un rhume qui lui coûta la vie, -- et, vers l'Epiphanie, trépassa dans la cabane de son fils. Celui-ci l'engageait à recevoir le viatique. Ivanouchka n'accepta point : il déclara que, quand on avait communié, on en mourrait, et il était décidé "à n' pas s' laisser faire". Durant des journées entières, il resta étendu sans connaissance; mais, même en son délire, il priait sa bru de répondre qu'il était sorti si la Mort venait frapper à la porte. Une fois, la nuit, il reprit ses sens, rassembla ses forces, descendit du poêle et s'agenouilla devant l'icone qu'éclairait une veilleuse. Il poussait de profonds soupirs, marmonnait de longues oraisons, répétant : "Seigneur, Petit-Père, pardonne moi mes péchés...". Puis, se mit à réfléchir, se tut longtemps, prosterné, la tête appuyée sur le plancher. Et tout à coup se redressa et dit fortement : "Non point, je n'cède point!" Mais au matin il vit que sa bru roulait de la pâte de farine et allumait un grand feu, dans le four...
- Ca s'rait-i' pour m'enterrer? -- demanda-t-il d'une voix qui trembla.
La bru se taisait. De nouveau il rassembla ses forces, de nouveau descendit du poêle, passa dans l'entrée : c'était bien ça, -- contre le mur se dressait un immense cercueil peint en violet avec des croix blanches à huit pointes. Alors il se rappela ce qui était arrivé, trente ans auparavant, à un voisin, le vieux Loukiane : Loukiane était tombé malade; on avait acheté le cercueil, -- c'était aussi un beau cercueil, qui avait couté cher, -- on avait rapporté de la ville de la farine, de l'eau-de-vie, du poisson salé; et Loukiane, va-t'en voir, avait guéri. Que faire du cercueil? Comment justifier la dépense? Loukiane, après cela, pensant cinq ans, entendit les malédictions des siens, subit leur reproches qui finirent par l'envoyer dans l'autre monde, mourant de faim, mangé de vermine et de crasse... Ivanouchka, s'étant rappelé ces choses, baissa la tête et rentra soumis dans l'isba. Et, la nuit, allongé sur le dos, sans connaissance, il se mit, d'une voix tremblotante, plaintive, à chantonner, de plus en plus bas, et tout à coup agita les genoux, fit un hoquet, gonfla sa poitrine d'un large soupir et, avec de l'écume sur ses lèvres entr'ouvertes, se figea...
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Seigneur Dieu, quel pays ! De la terre noire à une profondeur d'un mètre, et de quelle qualité ! Et jamais un lustre ne s'écoule sans amener une famine. La ville est renommée par toute la Russie pour son commerce de blé mais, quant à manger du pain à satiété, il n'y a peut-être qu'une centaine de personnes, dans toute la localité, qui puissent se payer ce luxe. Et la foire, cette foire ? Des mendiants, des idiots, des aveugles, des estropiés, laids à faire peur, à donner des nausées, par bataillons entiers !
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Sur le pacage dépouillé, se carrait brutalement une église grossièrement peinturlurée. Derrière cet édifice, brillait au soleil une petite mare glaiseuse, dominée par une digue de fumier; l'eau était opaque, jaune; là se tenait un troupeau de vaches qui, à tout instant, lâchaient leur bouse dans ce bain; et un moujik nu s'y savonnait la tête. Lui aussi s'était avancé dans l'eau jusqu'à la ceinture; sur sa poitrine étincelait une petite croix de cuivre, son cou et son visage étaient noir de hâle, et son corps d'une blancheur, d'une pâleur frappantes.
- Débride-le voir un peu, dit Tikhon Illiitch, poussant on cheval dans la mare, d'où montait l'odeur du troupeau.
Le moujik jeta son savon marbré de bleu sur le bord de l'eau, où les tas de bouse faisaient des taches noires, et, la tête toute grise de mousse, se couvrant par un geste de pudeur, s'empressa d'obéir. Le cheval tendit avidement le cou vers la mare, mais le liquide était si chaud et si repoussant que l'animal releva aussitôt la tête et se détourna. Tikhon Illiitch sifflait pour l'engager à boire, et cependant, dodelinant de la casquette :
- Eh ben, elle est jolie, votre eau! Vous buvez ça?
- Ah! mais, chez vous, est-ce qu'é' s'rait sucrée, par hasard? -- répliqua aimablement et gaiement le moujik - Ca fait mille ans qu'on en boit! Et p'is, l'eau, c'est rien, -- c'est plutôt l'pain qui manque...
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Le travail et la tranquilité manquaient perpétuellement au Gris. Sa mine justifiait le sobriquet qu'on lui avait donné: une face cendrée; maigre de partout; de taille moyenne; les épaules tombantes; une demi-pelisse courte, haillonneuse, crasseuse; des bottes de feutre déformées et rapiécées avec de la ficelle; et que dire du bonnet! Assis dans son isba, ne se débarrassant jamais de cette couffure, n'abandonnant jamais sa pipe, méditant soucieux, il avait l'air d'attendre, d'attendre toujours on ne sait quoi!
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