A la mort de son riche mari,
Lady Lisle retrouve son ancien amant, toujours épris, qu'elle avait abandonné… Ainsi s‘ouvre ce roman, thriller avant la lettre, qui distille les ingrédients du genre : crime, secret, usurpation d'identité… A condition d'accepter le postulat qui va avec : des coïncidences assez invraisemblables qui lient les différents événements, on est tenu par le suspense d'un bout à l'autre du roman. Contrairement à ses autres oeuvres, où les héroïnes sont fières, déterminées et dotées d'un fort caractère, Claribel, «
Lady Lisle », est une créature pâle, douce, influençable et dont l'attrait réside principalement en son joli visage et sa chevelure dorée. Comme dans les autres « sensation novels » de M. E.
Braddon, on découvre des êtres foncièrement bons, d'autres mauvais, veules, rusés et sournois. Aucun n'étant jamais totalement mauvais. L'isolement, la réclusion sont des thèmes chers à l'auteure, comme ils l'étaient à
Wilkie Collins, et celle-ci nous rappelle vers la fin du roman, en quelques lignes glaçantes, qu'à son époque aucune femme n'est à l'abri d'un internement : « avoir un rang élevé ne sauve personne de l'asile ». Les histoires de M. E.
Braddon ont choqué à l'ère victorienne. Celle-ci sans doute en particulier : à cause du sort fait à un enfant et en raison de la présence d'un être singulièrement pervers. Dans les dernières pages, l'auteure nous propose un beau portrait de bohémiens, personnages au coeur fier et noble. le majordome du domaine de Lislewood Park s'appelle… Carson. La série Downton Abbey aurait-elle voulu faire un clin d'oeil à «
Lady Lisle » ? Un roman à suspense maîtrisé du début à la fin.