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EAN : 9782253148944
219 pages
Le Livre de Poche (01/06/2000)
4.32/5   22 notes
Résumé :
Ancien tirailleur sénégalais et invalide de guerre, Blaise Massamba Diouf a le coeur gros : en dépit de ses efforts, sa Coumba Diallo ne se laisse pas « enceinter », le ventre de sa chérie noire refuse de porter fruit. Est-il condamné à demeurer un « écourté », un homme sans postérité ? Non pas...

...Car l'océan complice et familier poussera un jour vers son rivage une calebasse qui contient, ô merveille, l' enfant tant désiré, un tigou blanc. Penché ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (11) Voir plus Ajouter une critique
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Comme le veut le dicton, tout vient à point à qui sait attendre". Blaise Massamba Diouf, ancien tirailleur sénégalais, pourrait être un homme comblé, si ce n'est que son épouse, Coumba Diallo, ne se laisse pas "enceinter ". Comme c'est joliment dit... Alors que ce dernier se croit condamné à être un homme sans descendance, la Providence en décide autrement. En effet, tandis qu'un soir, assis sur la plage, il se laisse aller à ses pensées, une calebasse ayant "à son bord" un petit bébé blond, à la peau blanche et au regard d'azur, s'approche du rivage. À travers la voix de Blaise Massamba Diouf, Anne Bragance nous conte alors le parcours de ce couple désormais contraint à fuir pour échapper aux autorités. J'ai été tout à fait charmée par la plume de cette auteure. C'est dans un language tout en poésie qu'elle "s'adresse à son lecteur". Dans une narration émaillée de magnifiques métaphores, elle nous dépeint les aléas de ce départ précipité, les dangers à éviter, mais nous brosse également le portrait de belles personnes que le hasard mettra sur la route de ces "jeunes parents". Dans ce roman, c'est sa vision de l'être humain que nous confie l'auteure, avec tout ce qu'il porte en lui de laid et de si merveilleux par instants. Je tiens surtout à souligner la dimension historique qu'a donné Anne Bragance à cet ouvrage. L'auteure a eu à coeur d'attirer l'attention du lecteur sur l'ingratitude dont la France a fait preuve envers les tirailleurs sénégalais qui, lors des deux guerres mondiales, "livrèrent à la "mère patrie" leur tribut de chair à canon". Elle eut à coeur de rappeler à notre souvenir le massacre de Thiaroye, et le mépris auquel ces soldats français mais non métropolitains eurent droit en guise de remerciements pour avoir servi sous le drapeau Français. Quelle honte ! Je ne m'étendrai pas sur le sujet, car il est question dans ce roman des tirailleurs sénégalais, mais dans la mesure où d'autres ont eu à souffrir de ce même mépris et de cette même ingratitude dès lors que les armes se sont tues, force est quand-même de constater que décidément, la France ne détient pas la palme d'or de l'égalité. je ne peux que saluer l'initiative de l'auteure et son souci d'équité, car combien d'entre nous pensent parfois à tous ceux qui furent considérés assez dignes pour aller se faire tuer ou estropier sur les terres de France, mais pas assez, faut-il croire, pour que leur retraite, pension d'invalidité et consorts soient égales à celles perçues par les anciens combattants Français "bien de chez nous" ? J'ai une pensée émue pour tous ces combattants qui n'étaient déjà plus de ce monde, lorsqu'enfin ce scandale prit fin... sous la mandature de Nicolas Sarkozy.... Merci Madame Bragance pour la profondeur de votre roman. Merci pour votre écriture si délicate et tout en retenue. Je ne suis pas du tout férue de scènes de sexe, mais sous votre plume, même les ébats amoureux de Blaise Massamba Diouf et de son épouse sont empreints de poésie.
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Blaise Massamba Diouf se souvient...


Il se souvient de la guerre, celle en France, la dure, la difficile. Tirailleur sénégalais, il est sollicité par ses pairs pour écrire une lettre à De Gaulle. La France reconnaitra-t-elle enfin ceux qui l'ont servie et qui viennent de si loin ?
Soleil sur ces soldats à la peau d'ébène !


Il se souvient de sa famille, de son père, de son grand-père, griots, conteurs et louangeurs des ancêtres. Il en est le digne héritier.
Soleil sur ses aïeux !

Il se souvient de sa chérie noire, son ange, son amour, avec qui il danse sur le rivage du Sénégal, avec qui il entre dans une sarabande de vie et d'amour.
Soleil sur Coumba Diallo, sa chérie !


Il se souvient de ce petit « tigou » blanc qui leur est arrivé par ce même rivage, dans une calebasse. Cet enfant blond aux yeux bleus, venu de nulle part, le bienvenu dans ce couple stérile.
Soleil sur le petit Simon !


Il se souvient de leur départ, de leur peur, peur qu'on ne leur arrache cet enfant béni, mais aussi de cet immense élan de solidarité des anciens Tirailleurs.
Il se souvient de leur exil, de la tante Aminata qui les accueille, du doux Samba, l'homme sourd-muet qui les aime.
Soleil sur ces gens au coeur de velours !


Massamba s'illumine, il remercie, il aime la vie.
Soleil sur Massamba !


Et toujours, comme pour rythmer cet hymne à la Beauté, les femmes à la fontaine, qui par leurs bavardages, ponctuent la peur et le bonheur.


Un style poétique, comme une incantation.
Un style vivant, comme un rire d'enfant.
Un style émouvant, comme une vie.


« Soleil sur toi, l'ami, bonheur sur toi !
Pour toi, j'ai voulu me souvenir.
Et pour toi je me souviens ».


Merci à Magali pour ce roman plein de soleil.
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« Redis-moi les vieux contes des veillées noires, que je me perde par les routes sans mémoire. », Léopold Sédar Senghor -

Soleil sur toi, l'ami, bonheur sur toi, Blaise Massamba Diouf, fils et petit-fils de griot, berger de la mémoire, chanteur de louanges, sac à paroles de naissance, comme l'étaient avant toi ton père, le père de ton père et tous tes aïeuls qui les ont précédés depuis que la Terre est Terre, pour que la source de la Connaissance jamais ne se tarisse sur tes chères terres sénégalaises.

Tu te souviens, Blaise Massamba Diouf...

Soleil et bonheur aussi sur ta Coumba Diallo, ta chérie noire, ta sopé au sein lourd, aux yeux de braises et à la peau de velours, que tu as choisi pour tienne et que tu as chéri quand bien même la graine de la Vie ne pouvait point germer en son ventre stérile.

Et puis Soleil sur lui... Ce Tigou blanc, cet enfant-soleil que l'océan a enfanté pour vous, ce chérubin des mers qui vous a rendu gros d'amour aux premières lueurs du jour, soleil après soleil, lune après lune, ce fils-récompense à la peau blanchie, dont les génies des eaux vous ont « cadoté ».

Vous avez du fuir de votre case, vous avez vécu la Découverte, la Fuite et la Pérégrination loin de l'océan, loin des vôtres, loin des on-dit et des médisants.. Mais vous avez vécu pour ce petit d'homme le plus beau des voyages... Vous l'avez choyé, vous l'avez élevé avec la peur au ventre de le perdre un jour... Mais ce jour jamais ne viendra... Et le Tigou vous l'a bien rendu, lui l'Enfant-Nature qui sait si bien parler aux oiseaux, aux méduses et au reste du monde animal.

Ami, il faut me croire, ce n'est pas là légende !

Un enfant appartient à ceux qui l'aiment... Et votre amour pour ce Tigou était infini...

Soleil sur vous ! Bonheur sur vous ! La paix sur vous, Blaise Massamba Diouf et Coumba Diallo ! Et caresse à lui, votre petit Tigou !

Qui logera nos rêves sous les paupières des étoiles ? se questionnait Léopold Sédar Senghor. Je lui répondrais que vous l'avez fait pour nous ! Merci à vous !

Ami, il faut me croire ! Ce livre est d'une beauté rare ! Il y a du Rudyard Kipling dans cette terre d'Afrique !

(et Soleil aussi sur toi... tu te reconnaîtras...)
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Les tirailleurs sénégalais, corps d'élite recruté dans l'armée française pendant la guerre, ont donné de leur sang et se sont battus au même titre que les autres, pour la mère patrie.
Blaise Massamba Diouf fut des leurs et y perdit une jambe.
Griot, tel son père et le père de son père depuis des générations, il se souvient, se souvient, se souvient encore.
Et il nous conte le fabuleux cadeau que l'océan leur fit, à lui et à sa chérie noire, sa sôpé, Coumba Diallo...un fils ! Celui qu'ils n'espéraient plus après tant d'années d'infertilité.
Mais, autour de la Borne-Fontaine, les femmes du village plongent leur linge en piaillant et, pour éviter qu'on leur reprenne leur tigou, ils s'enfuient et trouvent refuge chez un berger muet dont ils partagent la vie pendant plusieurs mois.
C'est au milieu de la nature et des animaux que grandit l'enfant, révélant peu à peu un étrange don.

Une merveilleuse légende africaine servie par une plume tout en finesse, tout en poésie, qui place l'enfant au coeur de la vie.
Une histoire lumineuse où l'amitié n'est pas en reste et qui nous rappelle que l'homme est l'espérance de l'homme, que rien n'est possible sans l'autre.

Tu vois, l'ami, il a fait son soleil, Blaise Massanda, ce "sac à paroles" qui a reçu la bénédiction de l'océan et qui a vu sa joie s'élever si haut que chacun pu la voir escalader les degrés de l'air et toucher le ciel.
Telle un enfant, j'ai écouté sa parole très nombreuse et très riche, je l'ai vue se glisser, brillante et soyeuse, entre les peignes de ses dents au fil des pages et je fus éblouie de beauté...
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Je termine ce magnifique roman les yeux plein d'amour, je vous conseille vraiment de le découvrir, surtout si vous aimez la nature, les prodiges, les belles histoires en terre sénégalaise.

Cette histoire c'est celle de Blaise Massamba Diouf, ancien invalide de guerre. Amoureux fou de sa femme, il attend avec elle qu'arrive l'enfant et la vie dans le ventre de sa belle. le temps passe et rien ne prend vie dans ce ventre.
La mer apporte dans sa barque échouée un bébé blanc (un tigou) à cet homme estropié. L'amour est submergeant, forçant le couple à fuir afin que l'enfant ne soit pas repris.
Sur cette nouvelle route, le couple fera la rencontre de gens sages et précieux. Et surtout fera l'observation et le ravissement du génie de cet enfant blanc qui nourrit un rapport privilégié avec la nature et les animaux.

C'est vraiment une très belle histoire, presque onirique. Un roman captivant et enchanteur. Anne Bragance se penche ici sur un registre plus doux, plus tendre, très lumineux, avec des images de la terre noire tellement belles que les yeux sourient ainsi sans crier gare.
Un roman qui fait du bien, beaucoup de bien...
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Citations et extraits (19) Voir plus Ajouter une citation
La lumière déclinait, le soleil achevait de replier ses doigts de feu pour se précipiter vers sa demeure – chaque soir c’était la même hâte car il tenait la lune en détestation, il se refusait à frayer avec elle et, plutôt que de la rencontrer, il préférait lui céder la place. C’était un soleil mal luné que nous avions là, un vieil ours solitaire qui n’aimait pas la compagnie, nous le savions. Quand il fut bien claquemuré dans ses quartiers, seule une coulée de clartés molles, comme exténuées, persistait encore du côté du couchant. Alors, et alors seulement, le voile vivant, le voile tendu au-dessus de nous se déchira, il se fendit d’un coup par le milieu sans un seul crissement. Alors nous comprîmes que les oiseaux étaient allés au bout de leur dévouement et que, ayant rempli leur office, ils nous quittaient.
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Dans ces moments, ses mains-papillons ne savaient plus voleter entre les ampleurs du bassin, elles restaient affalées sur ses cuisses, inutiles et comme privées du battement de vie. Dans ces moments, quand dame désolation agitait autour d’elle ses sinistres hochets, la faillite de ses rêves d’enfantement accablait ma sopé, elle se laissait glisser sur le toboggan du désespoir. Et moi, son époux, son aimé, son amant, je ne pouvais la retenir. Moi, de la voir là, sans gestes, en proie à cette détresse sèche et sans cris, je sentais le vertige me prendre et ma joie se calciner.
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- Cet enfant, il faut le rendre
- Le rendre ? Et à qui donc veux-tu que je le rende ? C’est le génie des eaux qui me l’a apporté, c’est la mer des larmes qui l’a enfanté pour moi, pour nous !
- Mais de quelle mer parles-tu ? Oh, Massamba, tu me fais peur, je ne te reconnais plus, tu es en train de perdre la raison…
- De quelle mer, femme ignorante ? Mais de celle-là même qui bat notre grève de ses vagues dansantes. De cet océan qui emporta jadis des millions de nos frères dans un voyage sans retour. De cet océan sur lequel appareillaient non loin d’ici, à Gorée, les bateaux des négriers avec leur cargaison de « bois d’ébène », centaines et centaines de malheureux raflés dans la brousse et la savane, enlevés à leurs vies, entassés, enchaînés à fond de cale comme des bêtes. Femme de faible mémoire et de mauvaise souvenance, aurais-tu oublié tout ce que cette mer a arraché aux terres d’Afrique et tout ce qu’elle leur doit ? Si je l’appelle comme je l’appelle, c’est qu’elle fut bien, des siècles durant, mer de larmes et de sang pour tout le peuple noir.
- Je n’ai pas oublié, protesta ma 𝘴𝘰𝘱𝘦. Mais tu mélanges tout ! Tu divagues, Massamba, tu t’égares !
- Oh ! que non, je ne divague pas, rien n’est plus vrai. Et cette mer le sait aussi bien que moi. Elle connaît l’ampleur de sa dette. En poussant cet enfant blanc vers notre plage, vague après vague et chaque vague se relayant, elle n’a fait que s’en acquitter. Voilà pourquoi ce 𝘵𝘪𝘨𝘰𝘶-là nous appartient, voilà pourquoi je ne le rendrai pas.
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C'est que mon coeur grossissait de minute en minute, il battait fort, il tambourinait contre mes côtes, il tonnait: place ! Place ! Le tigou tant désiré est là, je l'abrite, il m'habite, allons, faites-moi place ! Et dans mes intérieurs, tous mes organes effrayés par ce tonnerre obéissaient à la formidable injonction, ils reculaient en débandade, ils se ratatinaient, se tassaient peureusement les uns contre les autres. Ma glotte se nouait, le soufflet de mes poumons ne pulsait plus qu'un filet d'air, tout ce joli monde se trouvait bousculé, compressé, réduit au minimum d'espace vital soumis à la suprématie de ce coeur qui prétendait s'agrandir à chaque battement.
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Entre Matam et Bakel, nous découvrîmes que le fleuve gagnait en jeunesse ce qu’il perdait en majesté. En effet, à mesure qu’il remontait vers son pays d’enfance, son cours s’étrécissait, ses berges se rapprochaient, où les femmes qui étendaient leur lessive inventaient des symphonies éclatantes de couleurs, composaient une mosaïque bariolée avec les pagnes qu’elles mettaient à sécher là, qui se détachaient là, sur une toison d’herbe très verte et très rase.

Il y eut à la cime d’un arbre un singe vert très imbu de son rôle de vigie qui, à notre passage, marquait son déplaisir en s’égosillant afin d’alerter ses congénères. Il y eut un couple de phacochères que nous vîmes occupé à fouir le sol entre les trouées d’un feuillage patiné de vert et de bronze.

Il y eut un envol d’oiseaux « toucouleurs » et, plus loin, des vaches et des bœufs blancs en train de s’abreuver dans des troncs évidés, sous la surveillance de petits bergers peuls qui nous faisaient signe de la main.

Je me souviens.
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Une affection longue durée Marque-page 05-07-2011
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