I remember (Je me souviens)

Voici le livre qui a servi de modèle au(x) "Je me souviens" de Georges Perec, ce que l'on sait peu. Si Perec cite Brainard, peintre et écrivain américain, dans sa préface, il ne le fait que très discrètement: a-t-il voulu ravir le titre d'inventeur de cette énumération anaphorique qui fait florès depuis 1978 (alors que les premiers "I remember" de Brainard datent de 1970)? Faire le procès de Perec serait bien vain, et d'autant plus que les deux livres diffèrent fondamentalement: là où l'artiste gay américain se dévoile jusqu'au plus intime, Perec fait le choix d'une évocation historico-sociologique dont sa personne n'est pas le sujet — à chaque lecteur, donc, sa préférence. du fait de son parti pris, lle propos de Brainard s'avère exceptionnellement touchant, voire bouleversant. Et qui a lu "Je me souviens" ne saurait ignorer "I remember", livre jumeau, même si "faux jumeau". Ajoutons que l'on peut tout de même s'étonner que le livre de Brainard ait été si tardivement traduit en français.

Survendu par Paul Auster, ce livre qui recueille toute une série de réminiscences simples m'a déçu.
Alors, oui, plein de fois je me suis dit "oui, moi aussi, je me souviens..." qui à la fois a un petit côté plaisant-régressif et en même temps, quelle banalité, ces vécus semblables et très probablement par beaucoup beaucoup d'entre nous est juste... bof.
Quelques-uns de ces souvenirs sont bien de son époque, c'est-à-dire, racistes.
Pas mal d'entrées à caractère homosexuel, revendiqué. Sans vraiment de provocation, cela dit.
Si l'on peut admirer la constance et la persévérance pour en sortir autant, je suis persuadé que n'importe quelle personne qui se creuse un peu et y passe suffisamment de temps aurait pu en faire une masse largement supérieure et sans doute encore plus sociologiquement et psychologiquement intéressante.
Bref, oui, ok, exercice de style non raté, mais je me souviens que plein d'artistes pourraient faire bien mieux.
Oui, aussi, parfois la concordance des temps et la grammaire laisse à désirer, volontairement, parce que régressif, mais ça, pour moi, c'est presque une qualité.