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EAN : 9782296026971
306 pages
Editions L'Harmattan (01/02/2007)
5/5   2 notes
Résumé :
Loin de toute spéculation critique, l'ouvrage se présente comme réflexion plastique en dialogue avec des peintres poètes, fascinés par le minéral. Leurs articles, notes, aphorismes, écrits mis en regard avec leurs oeuvres se prêtent à d'infinis jeux de miroirs, où ils se nuancent de reflets inattendus. De lecture facile, ce livre s'adresse à un public de spécialistes autant que d'amateurs.

Qui n'a vu surgir de murs décrépis ou lézardés, de vieilles tô... >Voir plus
Que lire après Emergences - effacements : Errances du regard sur les pierresVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
En 2006, dans la collection Esthétiques chez L'Harmattan, Martine Braun-Stanesco publie un texte issu de sa thèse de doctorat en arts plastiques soutenu en 2003 à l'université Marc Bloch de Strasbourg. de prime abord, le sous-titre Errances du regard sur les pierres semble plus explicite que le titre Emergences – effacements. Pour l'enseignante chercheuse, il s'agit d'être attentif à l'instant où une forme figurative surgit d'une tache, au moment où la vision émerge à la surface des pierres. Ces figures évanescentes, piégées dans la matière, « semblent osciller entre la ruine et l'inachèvement ».
Dans une 1re partie intitulée « Murs, galets, déserts : lieux », le procédé du frottage est étudié chez Max Ernst. le frottement apparaît comme une « ombre rasante », témoin d'un contact (que l'espace d'une feuille sépare) entre « l'ici du peintre et l'au-delà de l'objet ». L'image émergée est et n'est pas ; elle se tient dans un lieu indéfini entre le « monde phénoménal et le néant ». Quant aux dessins sur le sable, ils permettent à André Masson « d'arracher des formes aux abîmes les plus obscurs » sans que la spontanéité de l'apparition ne soit anéantie par une « réflexion fatale ». Les sculptures de Constantin Brancusi sont ensuite étudiées à travers le prisme des pierres polies de rivière. le galet ovoïde constitue le « Un primordial et indifférencié » dont son oeuvre découle. Les sculptures de Brancusi émanent de pierres en mouvement, en devenir, dotées d'un esprit intrinsèque qu'un langage respectueux peut exprimer : « La matière… est invitée à prendre part à l'invention de la forme ». Par le jeu des reflets, les sculptures polies de Brancusi « mettent la lumière à l'oeuvre ». Enfin, l'oeuvre du peintre et graveur slovène Zoran Music est perçu à travers, d'une part l'image matricielle du désert, ici les paysages karstiques de son enfance, taraudés, érodés : « c'est une terre où l'on voit ce qu'il y a dessous » et d'autre part son expérience du camp d'extermination de Dachau où les corps entassés massivement s'indifférencient dans la mort : « …perdant leurs traits distinctifs. Ils forment une masse… ». Quand sa peinture s'affaiblit, les morts anonymes du camp d'extermination refont surface sous la toile. Les images qui remontent et reviennent lentement à la conscience sont épurées, essentielles. Music est le « portier qui filtre » et rend apparent « l'invu » qui ne demande qu'à « surgir dans le visible ».
La 2e partie, intitulée : « La caverne : lieu », revient à la grotte, 50 000 ans en arrière et tente de cerner la naissance de l'art. La roche stimule et oriente le geste de l'artiste préhistorique : « La nature précède. Elle est plus ancienne, plus durable, plus terrifiante ». Les dessins enchevêtrés, incomplets, malhabiles et souvent illisibles à proximité des grandes compositions pariétales seraient soit des croquis préparatoires, soit des manifestations votives de fidèles à l'entrée d'un sanctuaire. Ensuite, Martine Braun-Stanesco s'intéresse à l'attention que Léonard de Vinci porte aux taches sur les murs et de sa recherche « d'un principe dynamique d'organisation des formes ». La nature semble « oeuvrer » continuellement les éléments et les choses de l'intérieur. A partir d'une souillure murale, il s'agit, pour Léonard de Vinci, d'extraire la « bonne forme » sans chercher à la délimiter, d'abord par un dessin gribouillé et confus avant de suppléer aux manques par des ajouts et un travail sur les détails. L'oeuvre inachevée chez Léonard est doublement touchante car elle approche davantage son inaccessible modèle et elle reflète une pensée en mouvement. Enfin, Martine Braun-Stanesco oriente sa réflexion vers l'oeuvre d'Alberto Giacometti. L'artiste aura été marqué par la découverte, dans son enfance, d'une caverne dorée, lieu fusionnel avec le monde et d'une pierre noire de forme pyramidale, signe de mort et d'abandon. Son oeuvre oscillera dans une vision indéterminée (les visages dessinés semble se dissoudre dans un fond gris) comme la tension exercée entre ces deux pierres polarisées.
Sans cesse, la réflexion de l'auteur est stimulante pour le lecteur. le style est vivant, quasiment exempt des boursouflures d'un jargon abscons. Les phrases sont équilibrées, les mots bien choisis, savamment pesés. Toutes les références bibliographiques et les citations d'auteur sont parfaitement assimilées et intégrées avec intelligence dans le texte, sans heurt, avec naturel. En dépit d'un propos qui pourrait paraître obscur et accessoire de prime abord, voire décousu, la lecture de la thèse remaniée ouvre des portes sur des champs attrayants de recherche et d'interrogation dans les domaines de l'esthétique et des arts plastiques. Quand l'auteur se trouve au seuil du visible et du dicible, la poésie prend le relais et invente d'autres chemins pour aller au-delà des mots et de la compréhension immédiate du monde. le poète Yves Bonnefoy écrit : « Dessiner : comme aller loin, dans les pierres ».
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Citations et extraits (14) Voir plus Ajouter une citation
Nier l'enracinement de Brancusi dans les traditions roumaines –artisanat, folklore et mythologie– serait injuste. Néanmoins, on est en droit de se demander si cela seul hante l'œuvre du sculpteur. Celui qui a incarné le mythe du bon sauvage était un homme cultivé. Sa riche bibliothèque comporte entre autres, outre les poèmes de ses amis Apollinaire, René Char, Blaise Cendrars, les œuvres du mystique tibétain du XIe siècle, Milarepa, de nombreux ouvrages classiques grecs et latins, dont les "Oiseaux" d'Aristophane et des contemporains, mathématiciens ou philosophes comme Henri Poincaré et Bergson. Il fréquente les musées : Guimet et Cernuschi, le Louvre, le musée indonésien du Trocadéro. Fasciné par l'art asiatique ancien, par l'art égyptien et celui des Cyclades, il en subit sans aucun doute l'influence.
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« La patience de l’art » serait cette capacité de laisser affleurer à la surface de la conscience ces images latentes, sommeillantes, jusqu’à ce qu’elles prennent forme. Les images intérieures seraient comme une réserve ; elles seraient des images en puissance et en attente de remontée à la surface.
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[...] le Carso – le Karst – une terre calcaire aride, à l’Est de Trieste, faite de roches sédimentaires sensibles à la dissolution. L’érosion y a créé une topographie particulière, caractérisée par des dépressions et des effondrements, des galeries, cavités et grottes liées à la circulation de l’eau, des gouffres, des éboulis, des vallées sèches, de rares résurgences d’eaux souterraines.
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La fine nervure des feuilles…, les dessins fantastiques des écorces, les formes tordues des vieilles racines arrachées à la terre par les orages, la convulsion géologique à jamais enfermée dans les rochers solitaires des cimes constituaient… les signes d’un langage qui dévoilait les mystères de la nature . »
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[…] le mot « rêver » avait au Moyen Âge un sens concret, synonyme de rôder, vagabonder, sortir de la bonne voie, s’égarer… N’a-t-on pas dit du rêve (et du rêve éveillé), qu’il serait le « fondement de toute idée de connaissance » , un état extatique où la conscience serait « portée à son plus haut degré de perception » ?
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