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Robert Bréchon (Préfacier, etc.)Michel Chandeigne (Éditeur scientifique)
EAN : 9782070423736
414 pages
Gallimard (02/10/2003)
4/5   8 notes
Résumé :
Le Portugal est sans doute un des pays où la vitalité de la poésie contemporaine est la plus manifeste. Les poètes vivants connaissent des tirages que bien des romanciers pourraient leur envier ; les journaux leur consacrent de pleines pages à l'égal des prosateurs, les prestigieux prix littéraires ne les épargnent pas et le nombre de recueils traduits en diverses langues est impressionnant. En France, parmi les quelque trois cents titres de littérature portugaise t... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Bien sûr il y a Fernando Pessoa et avec lui Ricardo Reis, Alvaro de Campos, Alberto Caeiro et beaucoup d'autres… Et après ?
Oui, quoi d'autre après celui qui fut (avec tous ses hétéronymes) le plus moderniste, celui qui usa de la plupart des registres de l'écriture poétique ?

Populaire et érudite, la poésie a toujours régné sur l'histoire littéraire du Portugal, elle a toujours eu une place très particulière. Même si avec Luís de Camões (l'auteur des Luisiades au XVIème siècle), Fernando Pessoa restent aujourd'hui encore les figures incontournables de la poésie portugaise, c'est très certainement à cause de la prégnance de la poésie dans la culture lusitanienne, qu'après eux, de nombreux poètes se sont fait connaître.

C'est dans les années 50 que la scène littéraire va connaître un nouvel essor. Certes, António de Oliveira Salazar exerce un pouvoir dictatorial sur le pays mais la création poétique offre un espace tout particulier de liberté et de revendication.
C'est au début des années 70 avec la chute de Salazar et la Révolution des Oeillets en 1974, qu'un nouveau souffle de modernité va faire se révéler de nombreux poètes. Ils ont pour nom Eugenio de Andrade, Sophia de Mello Breyner Andresen, Antonio Ramos Rosa ou encore Herberto Helder.

À cette époque, la poésie portugaise n'est pas univoque, elle est plurielle. Même si chaque poète emprunte sa propre voie, chacun va contribuer, dans son style, à renouveler la veine puissante du lyrisme portugais. Malgré leurs visions divergentes, leur différence de caractère, de style, de conception de la littérature, les poètes de cette époque se fréquentent, dialoguent et se reconnaissent. C'est ce qui fait toute la la singularité et la richesse de la poésie portugaise.

Dans la très belle Anthologie de la poésie portugaise contemporaine dirigée par Michel Chanteigne, cette coexistence apparaît sous une belle lumière. Les tonalités, les rythmes, les thèmes s'enchaînent et puisent chacun dans la modernité mais aussi dans cet esprit assez indéfinissable de la Saudade.

Au travers des pages de ce très beau recueil, j'ai retrouvé Eugénio de Andrade et Nuno Judice, des poètes que j'avais déjà lus. J'ai également découvert beaucoup d'autres auteurs que je ne connaissais pas ou très peu comme Ruy Belo, Jorge de Sena, Sophia de Mello Breyner Andresen, António Osório, António Ramos Rosa ou encore Pedro Tamen, dont les poèmes m'ont particulièrement plu.

C'est le cas de celui écrit par Vasco Graça Moura. Un poème qui s'intitule… Poème.

« Silencieusement je m'approche du poème
je l'entoure d'un mot où je fais
une incision délibérée

puis j'expose la blessure à l'air sans protection
pour qu'elle s'infecte et fructifie

Par résine avec le goût encore du papier humide
le poème pousse se ramifie
par commotion de l'aubier vers l'écorce
entier lisse astringent sinueux

Mais
tout poème est parfaitement impur. »


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Citations et extraits (43) Voir plus Ajouter une citation
Avis sur la porte de la librairie

Que les délicats s'abstiennent de lire ce livre,
surtout les héros de la grossièreté domestique,
les nymphes viriles, les vestales de la pureté,
ceux qui avancent à petits-pas et à cloche-pied,
tenant leurs chastes mains l'une devant, l'autre derrière,
tandis que de la troisième ils empêchent de parler
ceux qui marchent sur leurs deux pieds sans avoir peur
des mots.

Et que l'évite celui qui ne connaît rien à l'amour,
quel qu'il soit : de l'amour charnel à celui
qui n'aspire qu'à lui-même, n'aspirant point
à une vile récompense, mais élevé et quasi éternel.
C'est d'amour et de poésie et d'avoir une patrie
qu'il est question ici : interdiction à la canaille de franchir
ce seuil sacré, gare à elle si elle ose
remplir de rats cet espace libre
où l'on se meurt avec une dignité humaine
de la douleur d'être né au Portugal
sans rien pouvoir faire que le porter tout au fond de son coeur.

Jorge de Sena
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CÓRDOBA LEJANA Y SOLA
- poème de Ruy BELO

Dans cette ville où nous fumes jeunes
nous cueillons aujourd'hui sur la place
des rayons du dernier soleil
Quel est l'enfant qui oserait encore
naître du fond de nos yeux ?
Aujourd'hui la rue entrerait-elle encore chez nous
comme lorsque tous les retours étaient possibles ?
Déjà dans notre bouche le soir va s'éteignant
Dans pays avons-nous entendu ces sons tomber ?
Il est bien loin le temps où nous nous avancions
au plus près des oiseaux
Les yeux nous promettaient de futures étoiles
tous les couchants venaient nous mourir au visage
Maintenant la nuit seule la nuit viendra
étendre une pelisse pour couvrir notre agitation
Et ta parole planera c'est certain sur notre âme
comme une feuille de platane banale dans le soir
Ce ciel passera et alors
ton rire descendra des sommets sur les fleuves
pour trouver son delta dans notre cœur.


Pages 188-189
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LE POETE

Quand un homme se met à marcher
il laisse un peu de lui en chemin.
Il est entier au départ épars à l'arrivée
Le reste demeure toujours en chemin
quand un homme se met à marcher.

Il reste toujours en chemin un souvenir
il reste toujours en chemin un peu plus
de ce qu'il avait au départ ou lui reste à l'arrivée.
Il reste un homme qui ne revient jamais plus
quand un homme se met à marcher.

Manuel Alegre
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NAVIGATIONS [I]
de Sophia de Mello Brenner Andresen

Nous avons navigué vers l'Orient
La longue côte
Était d'un vert dense et somnolent

Un vert immobile sous aucun vent
Jusqu'au sable blanc comme des roses
D'une plage effleurée par les eaux transparentes

Alors ont surgi les îles lumineuses
D'un bleu si pur et si violent
Qu'il excédait l'éclat du firmament
Navigué par des grues miraculeuses

Et en nous s'abolirent et la mémoire et le temps.
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Je ne peux remettre l’amour à un autre siècle…


Je ne peux remettre l’amour à un autre siècle
je ne peux pas
même si le cri s’étrangle dans ma gorge
même si la haine éclate crépite brûle
sous des montagnes grises
et des montagnes grises

Je ne peux ajourner cette étreinte
qui est une arme au double tranchant
d’amour et de haine

Je ne peux rien ajourner
même si la nuit pèse des siècles sur mes épaules
même si tarde l’aurore indécise
je ne peux remettre ma vie à un autre siècle
ni mon amour
ni mon cri de libération

Non je ne peux ajourner le cœur


//António Ramos Rosa (1924 – 2013)

/Traduit du portugais par Michel Chandeigne
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