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Jeanne Marrou (Traducteur)Denis Trierweiler (Traducteur)
EAN : 9782020386173
690 pages
Seuil (02/04/2001)
4.15/5   17 notes
Résumé :
Cette biographie célèbre est devenue un "classique". Elle se situe pour ainsi dire à la hauteur de la personnalité exceptionnelle, du génie littéraire et intellectuel que fut Augustin pour l'Antiquité tardive et de la formidable postérité qui fut la sienne en Occident. Or, depuis la parution de ce livre il y a trente ans, on a redécouvert un nombre considérable de lettres et de sermons inconnus dans les années 1960. Ils jettent une lumière très neuve sur les premièr... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Après la biographie de Serge Lancel consacrée à Saint Augustin, j'ai continué avec celle de Peter Brown, plus ancienne, et considérée comme une grande référence internationale sur la vie de l'évêque d'Hippone.

Peter Brown s'attache moins aux écrits, à l'exception des Confessions (livre centré en grande partie sur la vie de son auteur), et plus à l'existence de son personnage, ainsi qu'au contexte de l'époque. D'ailleurs chaque partie de l'ouvrage est précédée par un tableau chronologique qui récapitule les événements les plus importants survenus pendant la période évoquée, mis en regard des événements de la vie d'Augustin. Ces tableaux sont bien utiles et permettent de se retrouver plus facilement dans le contexte historique.

Nous suivons donc Augustin, à partir de sa naissance dans la modeste bourgade de Thagaste, à travers ses études qui le mèneront jusqu'à Carthage, ses relations complexes avec sa mère, ses succès professionnels qui le conduiront jusqu'à Milan, séjour de l'empereur, puis la fameuse conversion dans un jardin de cette ville. Suit le retour en Afrique et toute la carrière ecclésiastique, ponctuée de controverses avec les manichéens, païens, schismatiques, hérétiques qui lui permettront en quelque sorte d'affirmer ses propres positions théologiques. Avec en arrière plan l'effondrement progressif du monde dans lequel vivait Augustin, le déclin de l'empire romain d'Occident sous les coups de boutoir des « Barbares », la séparation de plus en plus prononcée entre l'Orient et l'Occident.

Peter Brown insiste davantage que Serge Lancel sur le caractère offensif et destructeur des luttes de Saint Augustin contre ses adversaires religieux, sur le recours à la violence d'état pour éliminer ses opposants, sur la chape de plomb idéologique qu'il aurait imposée à le pensée de l'Église. Aussi sur un aspect élitiste, un tant soit peu méprisant des foules ignorantes qu'il s'agit de mener par la force et le châtiment s'il le faut pour leur propre bien.

L'ouvrage est incontestablement de grande qualité, et permet de découvrir d'une façon précise et documentée le personnage d'Augustin ainsi que le contexte de l'époque. J'avoue toutefois d'avoir été plus intéressée par l'ouvrage de Serge Lancel, sans doute en partie parce que je l'ai lu en premier, et donc le livre de Peter Brown, même s'il est par moments complémentaire, est tout de même très proche dans le contenu. J'ai aussi davantage apprécié l'écriture de Serge Lancel, très élégante et précise. de plus j'ai trouvé que Peter Brown prenait plus partie, exprimait ses préférences ou jugements, sans toujours complètement les étayer, par exemple il nous dit que Julien d'Eclane n'est pas un personnage sympathique, sans plus développer ce point de vue. le biographe et ses partis pris est en quelque sorte plus apparent dans ce livre.

Mais le personnage et l'oeuvre de Saint Augustin sont d'une telle richesse et complexité (et ont d'ailleurs donné lieu à tellement d'ouvrages) que pour les approcher et tenter de se construire sa propre représentation, différentes lectures sont sans aucun doute nécessaires.
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En août 431 Hippone où vécut Augustin est incendiée, un peu plus d'un an après sa mort, il semble que la bibliothèque ait miraculeusement échappée aux flammes. Possidius évêque de Calame compila un catalogue complet de ses oeuvres et est probablement le rédacteur de "la vie d'Augustin". Il pris un soi  particulier pour que augustin jouissez après sa mort d'une postérité littéraire immédiate et sans problèmes. Ses écrits devaient son legs au monde catholique. Aucun lecteur n'aurait à se demander quel livre était de lui, quel était son contenu, quand et pourquoi il avait été écrit.

Possidius allant jusqu'à conclure sciemment sa vie d'augustin mais de manière surprenante pour un évêque chrétien par la citation de la pierre tombale d'un poète païen :
"Tu veux savoir, passant, comment un grand poète peut vivre au delà de la tombe ?
Tu es là et tu lis ce vers : et c'est moi alors qui parle.
En lisant celui-ci à haute voix,  ta voix vivante est la mienne"

Peter Brown le dit lui même : à quoi au juste ressemble cette voix qu'il a tenté de capturer dans les écrits d'Augustin. Ni la voix d"Augustin le philosophe, ni la voix d'augustin le penseur. Mais plutôt la voix d'Augustin l'évêque, saisi tour à tour dans sa plus profonde intimité et dans la plus simple routine.

En s'appuyant sur le corpus des des grandes oeuvres théologique d'Augustin, Peter Brown nous livre LA biographie de Saint Augustin.

Et c'est est un brillant tour de force qui ravira tout lecteur familier avec l'histoire de la pensée théologique ou de la fin de l'empire romain, voire les deux . 
Il raconte la vie et les luttes intellectuelles d'un personnage fascinant, éclaire les écrits d'un philosophe important et dresse un brillant portrait de la société africaine au Ve siècle. . Il prend des thèmes intellectuels de controverses dans la vie d'Augustin (d'où les titres de chapitre en latin) et raconte l'histoire autour de ces thèmes en les mettant en perspective historique et théologique 
La première chose à comprendre est que Brown a écrit une véritable biographie ; pas une spéculation sur la vie de l'homme connue à travers ses actions et quelques sources écrites. Brown disposait de toute la gamme de matériaux nécessaires pour composer une véritable histoire de l'homme public et privé. A sa disposition se trouvaient de volumineux écrits, des sermons et des lettres de la plume d'Augustin ainsi que de nombreuses autres sources contemporaines. 

En d'autres termes, Augustin a mis suffisamment de lui-même dans ses Confessions et ses lettres pour que le biographe moderne puisse recréer l'homme intérieur aux différentes étapes de sa vie, ce que fait Brown et de façon magistrale.
Il présente Augustin comme un penseur qui a été exposé à de nombreuses idées et qui y a profondément réfléchi. Il a reçu une éducation classique de l'époque romaine. Il fut brièvement manichéen puis passa la majeure partie de sa carrière professionnelle en tant qu'évêque catholique à combattre deux hérésies : le donatisme et le pélagianisme. Les grandes réalisations d'Augustin pour la postérité ont été d'unir le platonisme au christianisme et de jeter les bases du calvinisme à travers le développement de la doctrine de la prédestination. La réussite du livre de Brown est qu'il donne au lecteur une compréhension du contexte intellectuel dans lequel Augustin a été éduqué et a vécu, tout en expliquant comment les oeuvres d'Augustin sont passées à la postérité et marquées profondément l'antiquité tardive voire plus.

Car c'est ce puissant sens du dynamisme qu'Augustin légua directement dans les années après sa mort aux catholiques d'Italie et de Gaule... Les écrits de l'un de ses admirateurs Prosper d'Aquitaine, montrent que ceux qui se sont ralliés en Italie et en Gaule aux vues d'Augustin sur la grâce et le libre arbitre l'ont fait parce qu'ils appréciaient les hommes d'action coulés dans le moule de l'Antiquité tardive. de tels hommes démontraient que la grâce de Dieu était toujours à l'oeuvre dans un monde devenu dangereux. C'est la prise en compte de cette foule infiniment variée d'hommes et de femmes simples en lesquels, chacun selon sa manière, selon les sermons d'Augustin, la grâce était censée travailler. Dans l'Occident romain, les provinces déchirées par la guerre aspiraient à nouveau à des héros, à des figures publiques un peu plus grandes que la vie. le chrétien moyen était moins présent dans la vision du monde de Prosper. Mais Prosper était sûr d'une chose. Comme son maître, il prenait toujours soin de souligner que « les élus recevaient la grâce non pas Pour demeurer oisifs mais pour leur permettre d'agir de manière juste ».

Cette affirmation résolue résume aussi bien que n'importe quel autre legs plus immédiat la contribution d'Augustin à la naissance de l'Europe médiévale.

Cette Vie de Saint-Augustin de Peter Brown est un livre merveilleux, qu'il faut prendre le temps de lire car parfois la lecture peut se révéler plus complexe.
Alors pourquoi ne pas avoir à portée de main une oeuvre de Saint-Augustin que ce soit Les Confessions, La cité de Dieu, voire la remarquable édition Oeuvres philosophiques complètes (une valeur sûre de l'histoire, indispensable référence culturelle, un style fulgurant et accessible) publiées par Les Belles Lettres ce qui permet de retrouver les divers renvois à l'oeuvre initiale faits par l'auteur, et de faire des pauses bienvenues
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A ce jour, la biographie la plus complète et fournie d'Augustin. On peut comprendre le parcours de ce converti passionné et intransigeant grâce à sa situation dans une époque troublée et dans un christianisme non encore constitué ou figé dans ses dogmes. La lutte d'Augustin contre le manichéisme, l'arianisme, le pélagianisme, etc. explique ses prises de position qui ont été déterminantes pour le christianisme latin et occidental.
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Sur place, en Afrique, l'Eglise catholique était au point mort, divisée par le schisme, menacée par l'hérésie manichéenne, ses évêques avaient été réduits au rang de dignitaires locaux aux dons et aux ambitions également limités. Ils se contentaient de s'assurer des privilèges et ne semblaient capables de déployer quelque énergie que dans la chicane (aux yeux d'Augustin à Thagaste, la vie d'un évêque paraissait consister essentiellement en voyages d'affaires et les devoirs d'un homme d'Eglise être analogues, en gros, à ceux d'un homme de loi). A l'église, ils se bornaient à célébrer la liturgie et dehors ils arbitraient les procès. Dans tous les domaines l'Eglise rivale, celle des donatistes, était beaucoup plus active : le plus grand exégète africain était un donatiste, Tyconius, dont l'oeuvre devait exercer sur Augustin une influence profonde. Seuls les donatistes semblent s'être attaqués à la tâche difficile de convertir les montagnards des villages qui entouraient Hippone et ceux de l'intérieur du pays.
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Mais à l'époque d'Augustin, l'Eglise avait trouvé sa place au sein de la société romaine. Les pires ennemis du chrétien ne se trouvaient plus en dehors de lui mais en lui, dans ses péchés et ses doutes, et le point culminant de la vie d'un homme n'était plus le martyre mais la conversion qui l'avait arraché aux périls de son propre passé.
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A un niveau plus profond, Rome symbolisait la sécurité de tout un monde de vie civilisé. Aux yeux d'un homme instruit, l'histoire du monde connu atteignait tout naturellement son point culminant dans l'Empire romain, exactement comme pour un homme de XIXe siècle, l'histoire de la civilisation trouvait le sien dans la suprématie de l'Europe. Aussi le sac de Rome par les Goths fut-il comme un rappel menaçant, du fait que même les civilisations les plus hautes pourraient mourir un jour. "Si Rome peut périr, écrivait Jérôme, que peut-il rester de sûr ?"
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C'est que, pour Augustin, la nature humaine était dans un abîme d'incertitude : elle avait été cruellement blessée par un événement survenu dans un lointain passé et ne serait guérie, dans un futur également lointain, que par une transformation si totale et si glorieuse, qu'à sa lumière, la plus petite manifestation de l'effondrement actuel de l'homme devrait toujours être considérée comme une cause profonde de tristesse.
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Les Confessions ne sont donc pas un recueil de souvenirs mais un retour anxieux vers le passé. On y sent comme un ton d'angoisse pressante :"permets-moi, je t' en supplie et donne-moi de parcourir dans mon souvenir présent le trajet sinueux de mes erreurs passées..."
C'est aussi un livre profondément émouvant. On y décèle à chaque instant une tension entre le "alors" du jeune homme et le "maintenant" de l'évêque. On sent le passé, parfois très proche encore, ses émotions puissantes et complexes ne sont éteintes que depuis peu, on peut encore déceler leurs contours sous la mince couche de sentiments nouveaux qui sont venus les recouvrir.
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Video de Peter Brown (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Peter Brown
Quelques vues de l'ouvrage de Peter Brown, À Travers un trou d'aiguille. La richesse, la chute de Rome et la formation du christianisme. traduction Béatrice Bonne, Les Belles Lettres, 2016. En savoir plus : https://www.lesbelleslettres.com/livre/19-a-travers-un-trou-d-aiguille
>Histoire, géographie, sciences auxiliaires de l'histoire>Biographie générale et généalogie>Chefs et penseurs religieux. Religieux (220)
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