Si j'ai bien compris ce pamphlet assez littéraire, en éxagérant on pourrait dire que « mariage d'amour » est un des oxymores dont la modernité a le secret. le mariage est une institution, censé apporter de la stabilité. L'amour quand à lui est souvent réduit à l'amour passion, intense mais bref, qui n'est qu'une des nombreuses formes d'amour. Comme le dit l'auteur : « L'amour-passion c'est l'amour de la passion ». Ce pur-amour, devenu la forme laïque du Salut, est inatteignable pour le commun des mortels. Il faudrait aussi éviter de passer d'un extrême (l'idéalisme) à l'autre (le cynisme). Pour cela il faudrait être plus « raisonnable » en amour, le faire évoluer au fil du temps en amour-amitié, complicité, tolérance, transmission... En somme « un art de vivre avec les autres et non de jouir pour soi ». Alors oui c'est sûrement un essai de droite mais franchement ça fait du bien de prendre un peu de recul, de critiquer la société de consommation, le culte du « tout, tout de suite », du tout-en-un ou du tout-ou-rien, l'appétit insatiable de plaisirs, l'hystérisation des sentiments et de mettre un peu de raison dans nos passions... L'auteur n'en reste pas moins un progressiste, prônant la liberté de choix et aucunement un retour en arrière. Il nous invite simplement à trouver le juste milieu, la bonne distance.
Commenter  J’apprécie         10
Les réformateurs du mariage depuis les Lumières insisteront sur trois points : privilégier les sentiments sur l’obligation, en finir avec le tabou de la virginité et faciliter la séparation des époux mal accordés. C’est Balzac qui, obsédé par l’adultère féminin – « ce mot […] qui traîne à sa suite un lugubre cortège, les Larmes, la Honte, la Haine, la Terreur… » et la vision de millions de maris « minotaurisés » (c’est-à-dire cocufiés, dotés de cornes) – plaidera pour la liberté sensuelle des jeunes gens, seule à même de remédier à une foule de maux :
« Rendons à la jeunesse les passions, les coquetteries, l’amour et ses terreurs, l’amour et ses douceurs. A cette saison printanière de la vie, nulle faute n’est irréparable… et l’amour y sera justifié par d’utiles comparaisons. Dans ce changement de nos mœurs périra d’elle-même la honteuse plaie des filles publiques. »
Balzac développe ici un argumentaire qui deviendra classique au XIX e siècle et sera défendu également par Fourier, Stendhal, Hugo : la chasteté obligatoire des jeunes filles génère le double fléau des amours tarifées et des aventures extraconjugales, avec le spectre terrifiant de la bâtardise (dans la Rome antique, seules les femmes enceintes pouvaient se montrer infidèles sans problème, car cela ne remettait pas en cause la lignée, c’est-à-dire la pureté spermatique). Les hommes affamés recourent aux maisons closes, les épouses déçues par le manque d’assiduité des maris s’abandonnent aux galants de passage, tapis en embuscade. Léon Blum, dans un livre qui fit scandale lors de sa parution en 1907, approfondit avec talent la proposition balzacienne : il dépeint côte à côte la vierge
« dans son lit triste, tendant inutilement ses bras au rêve d’amour dont une imagination exaltée exagère encore la violence ou la douceur, et la prostituée dépêchant sur son lit de travail, avec un ennui hâtif sa tâche trop de fois répétée ».
Et comme ces deux misères se conditionnent, la vierge et la prostituée, celle-ci presque toujours une ouvrière, doivent être sauvées ensemble :
« A l’une, il faut faire oublier que l’amour existe, à l’autre qu’il existe dans la vie autre chose que l’amour. »
A la première, on interdit l’entrée dans la vie sexuelle, à l’autre on défend d’en sortir. Et Blum de plaider, d’une plume inspirée, pour le libre vagabondage des jeunes filles, aptes à vivre leurs fantaisies érotiques avec qui bon leur semble avant que « la maturité matrimoniale » ne les dispose à convoler en justes noces.
Les femmes ont un corps et ce corps a besoin d’exulter tout comme celui des hommes : il faudra plus d’un siècle après Balzac pour que les sociétés occidentales, marquées entre-temps par la révolution freudienne, admettent la réalité de l’Eros féminin, contrevenant au préjugé antérieur qui prêchait la pureté par terreur de la lubricité.
A la fin des années 60, un tiers des femmes étaient vierges à la veille de leur mariage; à la fin des années 80, elles ne sont plus qu'une sur dix.
Diderot stigmatise l'accouplement non consenti entre époux (que notre code a rebaptisé viol conjugal): "J'ai vu une femme honnête,frissonnante d'horreur à l'approche de son époux,je l'ai vue se plonger dans son bain et ne jamais se croire assez lavée de la souillure du devoir" (1772).
nous vénérons [l' amour parfait] à la façon d’une divinité, qu’il est devenu, comme le bonheur, l’alpha et l’oméga de nos sociétés occidentales. Posez un idéal, vous engendrez immédiatement des millions d’inadaptés incapables de se hisser à cette altitude et qui se croient déficients.
Nous vivons depuis un demi-siècle dans le domaine des mœurs une étrange aventure : celle d’une émancipation qui libère et opprime à la fois. De nombreux tabous sont tombés mais sur leur ruine, de nouvelles injonctions ont proliféré. Elles ont ceci de particulier qu’elles n’interdisent plus mais exhortent et se placent sous le signe du maximum : il faut jouir plus, aimer plus, gagner plus, consommer plus, spéculer plus, vivre plus et sans temps mort. Dans tous ces domaines, la démesure l’emporte selon une logique de profit propre au système marchand.
C à vous https://bit.ly/CaVousReplay
C à vous la suite https://bit.ly/ReplayCaVousLaSuite
— Abonnez-vous à la chaîne YouTube de #CàVous ! https://bit.ly/2wPCDDa —
Et retrouvez-nous sur :
| Notre site : https://www.france.tv/france-5/c-a-vous/
| Facebook : https://www.facebook.com/cavousf5/
| Twitter : https://twitter.com/CavousF5
| Instagram : https://www.instagram.com/c_a_vous/
Au programme :
• Recherche bien-être éperdument
On revit quelques uns des meilleurs moments de l'émission où il a été beaucoup question de santé et de bien-être avec notamment les conseils avertis de philosophes, de sociologues, Raphaël Enthoven, Pascal Bruckner, Christophe André, Perla Servan-Schreiber mais aussi ceux de Michel Cymès.
• Très chers parents
Des artistes qui rendent hommages à leurs parents, Daniel Guichard, Michel Denisot, Salvator Adamo, Catherine Frot, Bernard Hinault, Elie Semoune... ou qui sont devenus parents et que cette nouvelle responsabilité a inspiré Jamel Debbouze, Daniel Auteuil, Gérard Jugnot et son fils Arthur, Matt Pokora, Miou-Miou et Manu Payet se sont confiés
+ Lire la suite