C'est un lieu commun que de rappeler cette prétendue caractéristique des Français : chez eux la critique tourne à l'esprit de critique. Les pages qui suivent montreront qu'il n'en est pas toujours ainsi. Celui-là même dont on fait volontiers le
meilleur représentant de l'esprit français dans ce qu'il a de négateur, Voltaire, prenait soin de noter que par le passé, au XVIe et encore au XVIe siècle, « les littérateurs s'occupaient beaucoup dans la critique grammaticale des auteurs grecs et latins ; et c'est à leurs travaux que nous devons les dictionnaires, les
éditions correctes, les commentaires des chefs-d'œuvre de l'Antiquité ». C'était décrire la critique, non comme une entreprise de démolition à coups de boutoir, mais comme une patiente reconstruction, comme une tâche conservatoire. L'exigence majeure restait le discernement.
Cérémonie IUF 2019 - Causerie de Monsieur Pierre Brunel (Institut de France)