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EAN : 9782266280549
320 pages
Pocket (12/10/2017)
3.53/5   91 notes
Résumé :
Et si l'Allemagne nazie avait remporté la guerre ?

Depuis sept siècles, l'Allemagne nazie règne sur la moitié du monde. Pour asseoir son pouvoir, elle a éradiqué l'histoire, annihilé la culture, et constitué une religion toute-puissante : l'Hitlérisme, dont le premier Führer est le dieu.
Le Saint Empire germanique repose sur l'ignorance des masses, la manipulation idéologique et une hiérarchie stricte : les chevaliers et les nazis en occupent l... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (29) Voir plus Ajouter une critique
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Littérairement, Swastika Night m'a semblé assez mauvais. Voire mauvais tout court. Mais son intérêt n'est pas là. Il est dans les réflexions sur le totalitarisme, l'asservissement, la construction d'une société, le féminisme, la culture, l'histoire, l'esprit critique, la réflexion personnelle...

Plus encore, il est dans le contexte de son écriture : le livre n'est pas une uchronie parmi d'autres présentant un monde alternatif où l'Allemagne nazie aurait gagné la Seconde Guerre Mondiale... car il a été publié AVANT la Seconde Guerre Mondiale. Et pourtant on y trouve des éléments sur la guerre ou la solution finale ! L'auteure était douée d'une étonnante prescience au moment où les démocraties traitaient encore Hitler comme un partenaire européen lambda...

Si les personnages sont caricaturaux et la thèse de l'auteure amenée au rouleau compresseur, il y a quelques instants de finesse et de grâce. Ainsi cette théorie que l'homme ne peut plus créer s'il perd sa liberté de penser, et que la seule culture d'une dictature serait celle du passé... voire celle du passé qui a échappé aux purges et aux réécritures... de même pour ces passages étranges où on apprend qu'il y a beaucoup de suicides parmi les nazis parce qu'une paix trop longue leur a permis de réaliser la vacuité de leur vie et de leur monde...

En un mot, même si ce livre n'est pas très bon, il est assez révolutionnaire. Il faut donc le lire, ne serait-ce que pour éviter chez nous l'avènement d'une telle Swastika Night.
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Avant de découvrir ce roman dans la dernière sélection Masse Critique (merci à Babelio et aux éditions Pocket, ainsi qu'aux éditions Piranha qui l'ont traduit en premier lieu !), je n'avais jamais entendu parler de "Swastika Night", tout comme j'ignorais tout de son auteur, la Britannique Katharine Burdekin. Celle-ci a donc imaginé une uchronie dans laquelle les nazis et leurs alliés japonais ont gagné la guerre, ce qui débouche sur... Stop ! Une uchronie, vraiment ? Contrairement à ce que l'on pourrait croire au premier abord, nous ne sommes pas face à un petit frère du "Maître du Haut Château" ou de "Fatherland" comme il en existe tant. Publié en France pour la première fois en 2016, ce roman date pourtant de 1937, soit quatre ans après l'accession au pouvoir de Hitler et deux ans avant le déclenchement de la Seconde guerre mondiale, à une époque où les dirigeants des démocraties occidentales en étaient encore à traiter avec le Troisième Reich comme avec n'importe quel partenaire... "Swastika Night" n'est donc pas une uchronie, laquelle consiste à modifier le passé pour imaginer un autre déroulement de l'histoire, mais une anticipation, puisque Katharine Burdekin extrapole sur les événements de son présent pour imaginer un avenir possible. Loin d'être anecdotique, cette distinction fait tout l'intérêt et la subtilité du roman.

Le futur imaginé par Katharine Burdekin est glaçant. Le "Reich de mille ans" promis par Hitler dans notre version de l'histoire est sur le point de devenir réalité, puisqu'il dure ici depuis plus de sept siècles. Le monde est équitablement partagé entre deux totalitarismes, allemand et japonais, qui se regardent en chien de faïence en attendant d'en découdre pour de bon. L'auteur étant une militante féministe, elle met l'accent sur le terrible sort réservé aux femmes, en écho à l'idéologie machiste qui prévalait à son époque dans l'Allemagne nazie : les femmes dans le Saint Empire germanique sont littéralement traitées comme du bétail, "dépourvues d'âme" elles sont privées des plus élémentaires libertés et leur seule fonction dans la société est celle de la reproduction. Sous la coupe des nazis, l'humanité s'est enfoncée dans l'obscurantisme : la plupart des hommes sont illettrés, il n'y a plus de culture, plus d'art, et le passé précédant la naissance du nazisme a été soigneusement effacé des mémoires. Hitler est devenu l'objet d'un culte religieux, dans lequel le Führer mythifié est célébré sous la forme d'un colosse blond mesurant plus de deux mètres. Mais la mise au jour d'un livre rédigé plusieurs siècles plus tôt, et rétablissant la vérité historique, va faire vaciller les certitudes des nazis du futur...

Au vu de la clairvoyance dont fait preuve l'auteur en dénonçant de manière virulente les méfaits du nazisme dès 1937, les lecteurs francophones qui découvrent ce roman au 21ème siècle peuvent se demander pourquoi celui-ci a été si longtemps oublié, au lieu de connaître la renommée de dystopies fameuses et devenues des classiques telles que "Le meilleur des mondes", "1984" ou "Fahrenheit 451"... Sauf que Katharine Burdekin, il faut le reconnaître, n'est pas un écrivain de la trempe de Huxley, Orwell ou Bradbury. D'un point de vue strictement littéraire, le roman est tout juste passable. Il souffre notamment du fait d'être explicatif et démonstratif à l'excès. Les protagonistes — au nombre de quatre seulement : le chevalier von Hess, Hermann le paysan nazi, Joseph le chrétien et Alfred le "candide" anglais — n'ont aucune substance, ce ne sont que des silhouettes destinées à donner ou recevoir des informations et des explications, au cours de tunnels de dialogues s'étendant parfois sur plusieurs dizaines de pages. Quant à l'intrigue, si tant est qu'il y en ait une, elle est réduite à la portion congrue. Je suis loin d'être un intégriste de l'adage "Show, don't tell", mais en l'occurrence tout le roman ou presque est sur le mode "tell", ce qui est assez dommageable : l'horreur de ce régime nazi du futur nous est exposée en détail, mais on ne la ressent pas réellement, elle peut frapper l'imagination mais ne prend pas aux tripes.

Au bout du compte, en tant que document historique, de témoignage d'une époque, "Swastika Night" est une oeuvre de grande valeur, qui sera lue avec profit par tous ceux que l'histoire du nazisme et de la Seconde guerre mondiale intéresse ; en revanche, pour les lecteurs de SF et plus généralement de littérature, j'aurais du mal à conseiller ce roman avec enthousiasme...
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Une autre uchronie qui prend place dans un futur où les nazis ont gagné la Deuxième Guerre Mondiale. Qu'est-ce qu'elle a de spéciale, celle-là, allez-vous me demander?

Bien... Elle a été écrite par une femme en 1937. Avant la guerre. Pourtant, à quelques détails près, elle aurait pu être écrire aujourd'hui. On y parle d'homosexualité, de féminisme, de masculinité toxique, de religion, mais surtout, d'égalité.

On y retrouve les autodafés de Fahrenheit 451, le rapport aux mots de 1984 et le rôle des femmes de Handmaid's Tale.

Bref, la science-fiction doit beaucoup à ce livre pourtant obscur.

Le seul hic : il ne se passe pas grand chose. Sur un peu moins de 300 pages, il y a de l'action dans les 50 premières et les 50 dernières. Les 200 pages centrales sont essentiellement des dialogues socratiques qui explorent l'histoire de cet univers (on est en 2600) et ses enjeux éthiques.

Ça ne m'a pas dérangé une seconde. Mais ce n'est pas pour tout le monde.
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Il fallait avoir une sacrée paire de couilles pour publier une uchronie dystopique (une dystopie uchronique ?) sur les dangers du nazisme en 1937, alors que la Seconde Guerre Mondiale n'avait pas encore commencé et que certains pensaient toujours qu'elle n'aurait pas lieu.

Des couilles et une sacrée vision des choses qui pourraient se produire si cette idéologie gagnait toute l'Europe.

La guerre n'est pas encore déclarée que l'auteure avait déjà imaginé un conflit terrible, basant son récit sur une victoire des allemands.

Pire, ayant connaissance des faits, je reste sans voix devant la clairvoyance de la dame qui, même si elle remplace les Juifs par des chrétiens, parle déjà d'extermination totale. Et en plus, dans son récit, les Juifs n'existent quasi plus… Exterminés qu'ils furent par les allemands.

C'est là que le roman prend toute sa force car il ne s'agit pas ici d'une 36ème version parlant d'une fin alternative de la Seconde Guerre mondiale mais bien d'une anticipation terrible sur l'avenir de l'Europe et du monde si le nazisme triomphait.

Le roman fait froid dans le dos… Nous sommes 700 ans après Hitler (oui, le vilain moustachu a remis à zéro le compteur de Jésus-Christ), le saint empire hitlérien domine toute l'Europe, et quand je dis toute, c'est toute, même pas un village gaulois pour résister.

Nous sommes face à une dictature impitoyable où les femmes ont autant de droit que les chiens et dont leur rôle est celui de poules pondeuses, juste bonne à se faire engrosser par les hommes et à mettre au monde des garçons, qui leur seront enlevés à l'âge de 18 mois.

Parqués dans des camps, nous sommes soumises au bon vouloir des mâles et le viol n'est plus un crime depuis longtemps. Nous n'avons plus de pensées, plus de vie, plus d'allant, plus rien…

L'art et la culture n'existent plus, les livres c'est pareil, hormis la Bible d'Hitler et les manuels techniques, les gens ne savent plus lire, lire ne sert à rien. Ne reste que la musique, mais tous les grands compositeurs que nous connaissons sont devenus allemands ou autrichiens, sans exception.

De plus, on a beau être 700 plus tard, les technologies ne sont pas très avancées, comme si les Hommes en avaient peur, comme s'ils vivaient toujours à l'époque de 1940 avec ses aéroplanes et ses vieux camions de l'époque.

L'univers qui est décrit dans ses pages est tout bonnement impitoyable, horrible, donnant des sueurs dans le dos car tout le monde a oublié ce qu'il y avait avant l'avènement du nain de jardin moustachu et on a fait de ce dernier un Dieu, limite un Jésus puisqu'il a donné naissance à une religion, la sienne.

Tout est effacé, on a réécrit l'Histoire, les faits ont été changés, tout est à la gloire des allemands et des nazis, les religions éradiquées et ce qui les remplace est une horreur sans nom, les chrétiens étant même considéré comme moins que des rats !

Ah, et le petit homme ventripotent que nous connaissons, moustachu, moche, avec du bide et une mèche de cheveux gras est devenu – propagande oblige – un grand blond magnifique (2,10m) aux yeux bleus, avec des cheveux blonds et longs digne d'une pub de chez l'Oréal, un être quasi divin, et pas sorti du ventre d'une femme.

On lui a écrit une légende, il fait l'objet de culte, on visite les lieux saints en Allemagne et les seuls à ne pas avoir été envahis sont les japonais, qui eux, tiennent sous leur coupe les américains.

L'histoire gravite autour d'Alfred, un anglais, le personnage principal avec Herman, l'ouvrier agricole l'allemand et von Hess, le chevalier.

Malgré leurs différences et leurs divergences, ces trois là vont discuter ensemble et le chevalier fera de terrible révélations à nos deux hommes, plongeant dans le désarroi le plus total l'allemand qui voit ses croyances s'effondrer.

Trois personnages attachants, réalistes, avec leurs pensées conformes à ce qu'ils ont toujours vu et vécu, la rébellion étant à proscrire chez les soumis, d'ailleurs, ils n'y penseraient même pas. Pourtant, comme le personnage d'Orwell dans 1984, Alfred a déjà conscience qu'on lui a menti cherche à déjouer la supercherie.

On ne peut pas dire qu'il se passe des tas de choses importantes, dans ce roman, mais on s'en moque, la narration étant tellement forte que l'on blêmit lors des conversations entre Alfred et le chevalier (haut grade chez les allemands), en découvrant la vie des gens, la condition de la femme, de l'enfant, les pensées qui sont celles des humains de tout bord.

Loin d'être indigeste, ce petit roman de 230 pages est limpide, facile à lire, même s'il a tendance à vous foutre des claques régulièrement, et pas des petites.

Il y a un réalisme effroyable, dont des faits qui se remarquent depuis quelques temps chez les Chinois avec leur règle de l'enfant unique (plus de garçons que de filles et un déséquilibre, comme dans notre roman).

Ceci est plus qu'un roman, c'était une vraie mise en garde en son temps, et elle vaut toujours pour notre époque ! Qui voudrait d'une telle société où les gens ne pensent pas par eux-même ?

Glaçant !

Lien : https://thecanniballecteur.w..
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Si je vous parle de dystopie et de contre-utopie, au mieux vous allez me citer le Meilleur des mondes d'Aldous Huxley, 1984 de George Orwell, le Massacre de Pangbourne de J. G. Ballard, Un bonheur insoutenable d'Ira Levin, L'Orange mécanique d'Anthony Burgess, Les Monades urbaines de Robert Silverberg, Fahrenheit 451 de Ray Bradbury, La Servante écarlate de Margaret Atwood, au pire vous me direz que c'est la même chose et que je ne sais pas de quoi je parle. Sincèrement, le débat sur la différence entre dystopie et contre-utopie n'a pas vraiment lieu d'être : c'est avant tout une question de point de vue, l'un définissant une société cauchemardesque s'assumant comme tel, tandis que l'autre est une société cauchemardesque qui se cache derrière des simulacres. Notez que ce qui peut être onirique pour les uns peut être cauchemardesque pour les autres, et inversement.
Toujours est-il que très peu de personnes me citerons Swastika night de Katharine Burdekin, une autrice britannique de la première moitié du XXème siècle, connue pour ses fictions utopiques et dystopiques.
Pendant longtemps j'ai eu du mal avec les dystopies ; je les ai étudiées à la fac, en première année de licence de lettres modernes, j'en ai lu beaucoup. Puis est arrivé la mode des dystopies pour ados et jeunes adultes : Hunger Games de Suzanne Collins a ouvert la voix aux Divergente de Veronica Roth et le Labyrinthe de James Dashner. Si j'étais et suis encore amusé du fait que la jeunesse s'emparait du genre de la dystopie en même temps que fleurissaient en librairie les rayons de développement personnel, la course au bonheur, à la prolifération de pseudo-études scientifiques qui prétend(ai)ent que se plaindre est mauvais pour sa santé mais surtout pour celle des autres et à cette horrifique aberration qui consiste à faire de la pensée positive la clé du bonheur – bref, que des choses typiques d'une dystopie -, j'étais aussi agacé de voir qu'il n'y avait aucune identité dans l'une ou l'autre réécriture de Hunger Games. Ou devrais-je parler de fanfiction – le terme est assez éloquent pour que je n'ai pas à préciser qu'il s'agit de récits écrits par des fans d'un univers ou d'un autre (Harry Potter, le Seigneur des Anneaux, Star Wars…). C'est assez ironique, quand on sait que l'uniformisation est aussi quelque chose de terriblement et justement contesté par les récits dystopiques. Et finalement, j'ai fini par abhorrer le genre. J'y reviens tout doucement, je me plante, ce sont des choses qui arrivent, même quand on pense détenir une dystopie originale. Et je pense avoir trouvé la dystopie qui fera prendre du recul à celles et ceux qui pensent que La servante écarlate de Margaret Atwood est la première dystopie féministe, parce que, mon pote, Swastika night est une dystopie féministe parue en 1937, soit un demi-siècle plus tôt.

Fallait-il avoir du cran, à l'époque, pour écrire un roman d'anticipation dans lequel l'Allemagne nazie a triomphé de toutes les puissances, alors même que la Seconde Guerre mondiale n'a pas encore commencé ! Et la dangerosité du nazisme et d'Hitler n'apparaissait sans doute pas clairement aux yeux de tous, y compris en Angleterre – car on a beau dire, le national-socialisme a connu ses antennes un peu partout, et ça perdure encore aujourd'hui. Aux environs du 27 ou 28ème siècle, l'Allemagne nazie domine le monde. Hitler est érigé en Saint, les seuls livres – et d'ailleurs la seule culture – autorisés sont des manuels techniques et la Bible d'Hitler. Les femmes sont réduites à l'état de poules pondeuses, aliénées, déshumanisées, engrossées lors de viols – qui ne sont plus considérés comme des crimes. On leur arrache les enfants dès 18 mois. Les chrétiens sont traqués, pourchassés, parce que accusés de tous les maux, tandis que les juifs sont exterminés définitivement. Encore une fois, la clairvoyance de Katharine Burdekin est troublante… En 1937, Swastika night est loin d'être le premier roman de science-fiction qui fait du nazisme un élément central. de ce qui est indiqué sur la troisième de couverture de l'édition Piranha, le premier ouvrage, écrit en allemand et encore inédit en français serait Nie wieder Krieg !, publié en 1931 !

Swastika night gravite autour de trois personnages : Alfred, un Anglais, Hermann, un ouvrier agricole, et von Hess, un chevalier. Alors qu'Hermann est un nazi convaincu, ébranlé par la certitude de son ami Alfred qui lui dit qu'il va faire s'effondrer l'empire nazi, va être abasourdi par les révélations du chevalier von Hess.

On va pas se mentir : c'est vieillot. le style est vieillot, ça parle beaucoup plus que ça n'agit. En 5 chapitres, soit quasiment 100 pages, il se passe très peu de choses et c'est particulièrement redondant. Il faut du courage pour franchir la première puis la seconde moitié du roman sans laisser le livre nous tomber des mains. Les dialogues sont vieillots, très littéraires, trop littéraires pour nous, habitués que nous sommes à une littérature qui écrit comme elle parle depuis Louis-Ferdinand Céline, au moins. Rien n'est naturel, en fait.
De l'action, il y en a. Elle est tout aussi tartinée sur des dizaines de pages que les dialogues et les réflexions internes des trois personnages principaux et là aussi, ça risque de décevoir un lecteur ou une lectrice d'aujourd'hui et je suis prêt à parier quoi que ce soit que c'était un peu le cas, aussi, à l'époque (comparé aux pulp fictions qui vendaient du space opera ou du planet opera sans problème).

En fait, ce roman est un mauvais roman de SF. Non pas que Katharine Burdekin soit trop intellectuelle, et on la sait capable de faire mieux que ça. Mais je pense que l'autrice se préoccupait plus de donner du nazisme l'image que l'on a à peu près tous – à une époque où Hitler était encore considéré comme certes un peu taré, mais ça vaaaa, ça passe – que de raconter une histoire qui ferait réfléchir autant qu'elle divertirait. D'ailleurs, le seul élément réellement SF de l'histoire, c'est que ça se passe 700 après notre ère. Pas de machines volantes, pas de pistolasers, pas de croix gammée sur la Lune, Mars ou dans le système jovien. C'est une uchronie, un pari risqué pour l'époque, une dystopie, certes, mais ce n'est pas bien folichon.
Katharine Burdekin pose aussi une vérité malsaine : le nazisme n'a pas besoin d'Hitler pour exister. D'aucuns pensent que si l'Allemagne et ses alliés avaient gagné la Première Guerre mondiale et humiliée leurs adversaires, les relents fascistes se seraient fait sentir en France, en Angleterre… Et l'Italie, qui pourtant a fait partie du camp des vainqueurs de la Grande Guerre, a vu le fascisme monter très rapidement. Oui, la question est complexe, intéressante, passionnante.

Oui, Swastika night s'adresse davantage à des historiens du fascisme et des amateurs de philosophie morale qu'aux fans de SF que nous sommes. Déçu ? Non, il convient de savoir que ce roman existe, il convient de savoir, si vous êtes dans la rédaction d'une thèse sur les dystopies ou que vous êtes simplement passionné.e par le genre, que ce titre mérite d'être cité plus pour ses idées que pour son histoire.
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Citations et extraits (16) Voir plus Ajouter une citation
Sans rien connaître de la démocratie, tu viens d'en trouver le point faible. Dans une démocratie, aucun homme sensé ne veut renoncer à son droit à exercer son jugement personnel; sachant son chef de même nature que lui, il ne peut lui faire aveuglément confiance; par conséquent il veut diriger lui-même. Et il devient difficile de gouverner. Car il y a de nombreux hommes sensés, le système les encourageant, mais aussi une quantité plus grande encore d'hommes faibles, auxquels il faut toujours dire quoi faire et quoi ne pas faire. Ceux-ci ne peuvent être laissé à eux-mêmes, sans loi. De sorte que la démocratie finit toujours de la même façon:elle dégénère, aboutit au chaos; du désordre naît un gouvernement autoritaire, un der Führer, une oligarchie, une dictature militaire ou quelque régime du même ordre. Je n'ai pas autant de mépris que von Hess pour ce système, car j'assiste en ce moment au dernier stade de la décomposition naturelle de la dictature-le marasme absolu.
Mais comment faire durer la démocratie assez longtemps pour que les intelligences se raffermissent? Tes arriere-petits-fils pourront réponde à cette question, Alfred, car une fois la vérité revenue au jour, les gouvernements autoritaires s'effondreront.
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L'ouvrage de von Wied prouvait ceci : Hitler était Dieu, non point né mais explosé ; les femmes n'appartenaient pas à l'espèce humaine mais étaient similaires aux grands singes ; enfin, tout ce qui avait été accompli et pensé avant la venue d'Hitler n'était que l'obscur et fallacieux produit d'une sous-humanité sauvage, par conséquent, il fallait en faire table rase. Ce fut avec von Weid que la peur de la mémoire atteignit son apogée. Il nous fournit le remède logique et teutonique à cette crainte : la destruction. L'histoire, la psychologie, la philosophie, l'art — hormis la musique —, la médecine — hormis ce qui concernait l'anatomie et les éléments purement matériels —; tout cela devait être complètement anéanti, de même que les livres, les représentations graphiques et les statues qui décrivaient les Allemands du passé. Un gouffre immense devait être creusé que nul ne pourrait jamais plus franchir. Le christianisme devait de même disparaître ; partout dans l'Empire devaient être détruits les textes innombrables de la théologie chrétienne ; les bibles chrétiennes devaient être collectées et brûlées ; et même celle d'Hitler, qui faisait l'objet d'un culte dans tout l'Empire, se voyait expurgée de certaines parties. Car elle contenait des éléments de la mémoire.
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Mais nous avons aussi tué notre propre culture, notre littérature... plus rien ne reste. Nous n'avons que la bible Hitler, les légendes et ce que nous, nazis appelons l'histoire de l'Allemagne. Nous n'évoluons plus. Nous ne sommes pas tout à fait des barbares: nous avons un savoir technique et les moyens de l'utiliser, nous ne craignons pas la nature, nous ne mourons pas de faim. Mais nous n'avons plus accès désormais à cette vie si riche du point de vue de l'esprit et des sentiments que les hommes vivent lorsqu'ils ont un but, un but qui les dépasse, aussi absurde soit-il. Nous ne pouvons rien créer, rien inventer. Nous sommes allemands. nous sommes sacrés. Nous sommes parfaits. Et nous sommes morts.
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La consommation de tabac n'était ni encouragée ni vraiment interdite dans l'Empire. L'Unique et Saint, le Héros-Dieu, lui, n'avait naturellement jamais fumé, ni mangé de viande, ni bu bière ou vin. Sa colossale stature (deux mètres dix, mesurait-Il) et les phénoménales prouesses que Lui autorisait Sa force ne devaient rien à la nourriture riche et grossière que prisent les Allemands inférieurs. Il n'y avait cependant aucune obligation à désirer l'imiter en Son hygiène de vie, en Sa totale ascèse (si complète en vérité qu'Il ne s'était jamais trouvé en la présence impure d'une femme) ; la plupart des hommes fumaient, buvaient de la bière et mangeaient de la viande lorsqu'ils en avaient la possibilité.
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Il y a deux façons de gouverner un empire. On peut faire en sorte que les sujets conquis se sentent mieux dans l’empire qu’en dehors, qu’ils soient fiers d’en faire partie, qu’ils en épousent la civilisation, meilleure que la leur, et qu’ils puissent, s’ils le méritent, en acquérir la nationalité. C’est la conception romaine. Il y avait dans l’Empire romain des milliers d’hommes qui, bien que n’ayant pas une goutte de sang romain dans les veines, se reconnaissaient avec joie et fierté dans l’Empire. Ils avaient le droit de se déclarer Romains et partageaient les prérogatives de leurs conquérants. Mais on peut aussi maintenir les races soumises en état d’infériorité essentielle et leur donner à penser qu’elles sont gouvernées par une nation sacrée constituée d’hommes entièrement différents, leur refusant à jamais l’accès à une égale citoyenneté. C’est notre conception. Il est inimaginable pour nous qu’un individu puisse s’arroger le droit d’être allemand s’il ne l’est pas de naissance. Nous sommes le Sang. Et vous autres êtes le non-Sang.
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