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EAN : 9782749945439
253 pages
Michel Lafon (29/04/2021)
4.64/5   42 notes
Résumé :
Infiltration au sein des survivalistes pour mieux les comprendre et les décrypter.
" La violence était partout... tous ne parlaient que de ça. Dehors, c'était la guerre. Meurtres, viols, règlements de compte, terrorisme. L'horreur, toujours, partout, tout le temps. Il ne fallait rien attendre des autres. J'avais compris la leçon : " Prends soin de toi-même, personne ne le fera à ta place. " Toujours, il fallait rester méfiant. Prévoir le pire. Ce n'était pas ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (18) Voir plus Ajouter une critique
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Ce document est une plongée dans l'univers survivaliste en compagnie de Mathieu Burgalassi, docteur en anthropologie et en sciences politique. On n'est pas dans le documentaire rigoriste et analytique, non ça se lit plutôt comme un polar car l'auteur nous entraîne dans son propre parcours de vie et ne met aucune distance entre son vécu et son initiation, son endurcissement physique et mental pour se protéger. Se protéger de quoi ? C'est une grande part de son enquête, je vous laisse découvrir… Cette implication personnelle en dérangera certain·es, pas moi. J'ai aimé que Mathieu Burgalassi nous raconte d'où il parle, un jeune issu d'un milieu qui ne le destinait pas du tout à de hautes études, un parcours de vie atypique et riche d'un autre regard.

Alors évidemment, son récit nous confronte à la violence. La violence gratuite, la violence défensive mais qui devient offensive, tout est poreux quand on est peureux… Dans une société où le divertissement se nourrit allègrement de notre fascination de la violence, où le discours ambiant et politique induit une idéologie de l'insécurité, rien d'étonnant à ce que certains individus ressentent le besoin d'un tel repli en défiance du reste du monde.

Qu'est-ce qui fait que l'on est naturellement confiant ou méfiant ? Mathieu Burgalassi n'explore pas les hypothèses psychologiques, il pointe plutôt le néolibéralisme qui a créé un tel individualisme que l'on ne sait plus faire ensemble. Et c'est peut-être ce qui est le plus rassurant dans son enquête : les survivalistes restent des individus isolés, moins on se dévoile mieux c'est, on se prépare pour soi et contre le reste du monde. Là je fais un aparté avec un extrait du livre de Pablo Servigne et Gauthier Chapelle « L'entraide : L'autre loi de la jungle » parce que j'en ai besoin et que ça fait du bien dans ce contexte de haine, de peur et de loi du plus fort : « Un examen attentif de l'éventail du vivant – des bactéries aux sociétés humaines en passant par les plantes et les animaux – révèle que l'entraide est non seulement partout, mais présente depuis la nuit des temps. C'est simple : tous les êtres vivants sont impliqués dans des relations d'entraide. Tous. L'entraide n'est pas un simple fait divers, c'est un principe du vivant. C'est même un mécanisme de l'évolution du vivant : les organismes qui survivent le mieux aux conditions difficiles ne sont pas les plus forts, ce sont ceux qui arrivent à coopérer. »

Je ne regrette pas d'avoir lu « La peur et la haine », ça m'a fait cogiter sur mes propres peurs et besoins. Là où je m'avoue mitigée, c'est que si Mathieu Burgalassi dénonce cette idéologie de la peur, au final c'est précisément ce sentiment que fait naître son livre… Pour l'antidote, vous l'avez compris, je vous renvoie chez Pablo Servigne et Gauthier Chapelle !
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Je viens de finir ce livre et j'ai pris une sacrée claque. Je crois que c'est le premier livre qui m'a fait ressentir autant d'émotions à travers les expériences décrites dans ce dernier. Je pense sincèrement que ce livre est d'utilité publique et qu'il devrait être lu par tout le monde. Ce n'est pas un livre sur lequel je me serais arrêtée volontairement et quelle grosse erreur, j'aurais fait. Il fait clairement partie de mon top 5 des livres qui m'ont le plus apporté, je vais évidemment te laisser des avis l'offrir à certain.e.s de mes proches.
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Quand j'ai acheté ce livre je m'attendais à une enquête anthropologique plus "classique".
Il s'est avéré que le livre a été abordé sur un ton plus autobiographique, ce qui au final n'a rien enlevé à la somme d'informations que j'ai appris au cours de cette lecture qui a été très agréable.
Je n'ai pas vu le temps passé, on est complétement pris dans les péripéties vécues par Mathieu Burgalassi.
Grâce à lui j'en sais donc davantage sur le survivalisme dont j'avais de vagues notions qui ont été démontées par ce que j'y ai appris.
Je recommande.
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Un travail important écrit comme un roman autobiographique. Ce livre parle d'un sujet de société tres repandu pourtant méconnu : le survivalisme, il est important de lire de tels travaux et d'en mener aussi. Merci, j'ai passé une tres bonne lecture!
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Au-delà d'un ouvrage anthropologique qui retranscrit avec brio un terrain exigeant et même dangereux, il s'agit là d'un récit de vie que nous livre Mathieu Burgalassi.
L'importance du parcours de l'auteur est nécessaire à la compréhension des enjeux du survivalisme et l'auteur, en alternant entre différentes temporalités, rend admirablement bien compte de ce qui pousse un individu à se retrancher dans la peur et la haine.
Au-delà de l'analyse qui est faite du survivalisme, cet ouvrage propose modestement des clefs de lectures sur bon nombres d'interactions humaines qu'il est primordiale de comprendre. le rapport à la violence, le rapport à la peur, à autrui, faire communauté.
L'auteur a mis sa vie en jeu pour être à même de rendre compte en profondeur de ses thématiques. le moindre des respects est d'écouter ce qu'il a à nous en dire.
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Citations et extraits (36) Voir plus Ajouter une citation
Parce que cette histoire de groupe à risque, c'est une sacrée machine à créer du racisme. Ca change profondément notre vision du monde et, selon l'origine ou la couleur attribuée à une personne, on va plus du tout regarder les événements de la même façon. Par exemple, quand, le 29 octobre 2020, un Tunisien tue trois personnes dans une église niçoise après avoir crié Allah Akbar et que, deux heures plus tard, un Français attaque des gens à Montfavet avec un flingue après avoir fait un salut nazi, d'un côté on parle de terrorisme islamique, de l'autre d'un déséquilibré. Dans le premier cas, on place l'acte violent dans une continuité. Il rejoint dans notre mémoire d'autres événements similaires, qu'on attribue au même groupe à risque désigné par les politiciens : immigrés, musulmans, arabes. C'est une communauté tout entière qui reçoit la responsabilité en fardeau. On demande d'ailleurs aux musulmans de se désolidariser, comme s'ils avaient été, par nature, solidaires du criminel. Alors que, dans le second cas, l'acte est isolé de toute notion de groupe. On ignore volontairement le fait que l'homme a fait savoir son allégeance au nazisme. Non, son geste n'est jamais connecté à d'autres violences commises par des personnes d'extrême droite. [...] C'est un système vicieux. Ca donne l'impression que seules certaines communautés - les étrangers, les personnes non-blanches, les immigrés -, produisent de l'insécurité. Ca rend naturel de les jeter en pâture aux chiens, au prétexte de la sécurité.
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Et là, on a enfin vu l’Amérique. De grandes rues raides, dressées, géométriques, avec partout l’amas de béton des buildings brillants. Et en bas, écrasés dans leurs ombres, les trottoirs qui grouillaient d’un flot humain qui semblait infini. De la fenêtre, on voyait que des ombres et c’était comme une marée d’insectes dont les mandibules semblaient vouloir dévorer jusqu’à la moelle des cieux. C’était magnifique. Sacré presque. Puis on s’est retrouvés sur le pont à foncer au-dessus des eaux noires. Le type disait plus rien, moi je pensais à mon enquête. Je me disais que dans des villes aussi grandes, j’allais en trouver plein, des survivalistes. C’était prometteur. On est restés comme ça, dans un silence pensif jusqu’à l’arrivée à Oakland. Là, on a pris un drôle de virage qui tournait sur lui-même. La voiture a ralenti. On était complètement sous l’Interstate 580. Quelques réverbères éclairaient à droite à gauche, mais c’était surtout noir. C’est quand on s’est approchés de la sortie qu’on a compris ce qu’on regardait.
En fait, tout autour de nous, des deux côtés de la route, il y avait comme un campement. Une longue ligne de tentes et de cartons avec des dizaines et des dizaines d’hommes et de femmes allongés sur le sol, enroulés dans des grosses couvertures ou des sacs de couchage. À ce moment-là, on aurait pu remonter dans l’avion, parce qu’il n’y avait plus rien à voir. Elle était là tout entière, l’Amérique. Dans la raideur vide des buildings d’acier et la longueur infinie de la misère au sol.
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– On a vraiment pas d’argent, tu sais. C’était même pas un mensonge. On était tous fauchés. Le gars avait monté la voix, veines saillantes, cou tendu. Il s’était rapproché, son petit poing serré, sa mâchoire contractée. Il voulait être intimidant, ça marchait pas si mal. Je m’étais dit : « Frappe. » C’était le moment
« Frappe. » Rien. Mes muscles ne voulaient pas bouger. Il y avait eu un flottement. Puis le gars nous avait détaillés, lentement, de haut en bas, comme s’il venait juste de nous voir vraiment. On ressemblait à rien. Une espèce de résignation était passée dans son regard. Il avait soupiré.
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[...] D'un côté nous, les gentils, en en face les méchants, responsables de tout. C'était une pensée extrêmement binaire. Profondément dangereuse. Parce qu'évidemment, il allait pas chercher des boucs émissaires dans sa propre communauté. Hors de question de perdre des électeurs. Du coup, c'était toujours les mêmes qui dérouillaient : les non-blancs, les pauvres, les immigrés. Les coupables idéaux. Ceux qui n'avaient ni voix pour se faire entendre ni pouvoir pour se défendre.
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Parce que chaque fait divers à la télé, chaque histoire qu''on se répétait, chaque intervention politique sur la sécurité, tout ca s'agglomérait en un magma de terreur qui saturait nos vies. [...] Et on se rendait pas compte que la majorité de nos peurs venaient pas d'expériences personnelles mais de discours entendus, répétés et déformés. Qu'au fond, l'insécurité qui nous bouffait se basait précisément sur une idéologie.
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