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EAN : 9782070290604
256 pages
Gallimard (26/09/1974)
3.5/5   2 notes
Résumé :
288pages. in8. broché.  Un vol. couv. imprimée, rempliée, int. frais. Ouvrage provenant de la bibliothèque de Jean Todrani poète Marseillais
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Première approche de Roger Caillois avec ce recueil de textes, publiés entre 1935 et 1950, préliminaires à l'élaboration d'une vision du monde qui se démarquera ensuite progressivement des prémisses ici esquissées. Ce n'est sans doute pas l'idéal pour se faire une idée précise de l'enseignement considéré aujourd'hui comme étant définitif de Roger Caillois, mais rien n'indique qu'il ne soit pas instructif d'errer avec lui dans ses pensées du bas-fond pour mieux comprendre ce qu'il a finalement décidé de retenir. Dans sa préface, Roger Caillois précise qu'il n'approuva plus tous les textes de ce recueil quelques années plus tard, ce qui nous conforte au moins sur sa légèreté.


Pourtant, on découvre ici un Roger Caillois très sévère, lançant des procès contre le surréalisme auquel il appartint pourtant quelques années, contre le rationalisme sans limites, contre le romantisme, le mysticisme et la science poétique tout à la fois, contre la psychanalyse et le marxisme, et enfin contre le roman et le cinéma. On ne peut guère le lui reprocher mais enfin, il semble en faire partie lui aussi. Tout en négatif, il s'efforce toutefois de suggérer ainsi les caractéristiques du paradigme qu'il espère. Un court paragraphe semble particulièrement décisif, dans lequel il rêve impersonnellement d'une société dirigée par une élite éclairée :


« Récusant la force, elle devra posséder une magie ou une grâce, quelque vertu enfin qui sera son principe et qui paraîtra à la nature comme surnaturelle. Et rien ne saurait mieux stupéfier celle-ci que l'abandon volontaire des avantages qu'on s'assure à profiter de sa pesanteur. »


Roger Caillois fait le diagnostic d'une société qui s'est perdue dans la multitude. La désacralisation des valeurs anciennes a provoqué un tumulte dans lequel on se goberge, ne sachant plus à qui vouer notre besoin irrépressible d'obéissance. Même les recherches qui semblent les plus audacieuses finissent par s'essouffler lorsqu'on démasque le culte de la personne qui en est à l'origine. C'est une épidémie que Roger Caillois dénonce, et une épidémie dont la contagion ne cesse de s'accélérer par le vecteur du roman et du cinéma, entraînant la multiplication des prétendants pensant pouvoir prêcher la bonne parole. La quantité augmente, la qualité diminue. Roger Caillois exige plus de rigueur : « Il n'en faut pas moins quitter, à la suite de Rimbaud, toute attitude d'adoration en face du désordre de son esprit. L'imagination ne fait pas d'aveux aussi facilement que le premier coupable venu, sous prétexte qu'elle est bourrelée de remords ». Avec son Collège de Sociologie, il réclame que l'on mette en question l'imagination de la façon suivante :
- En réalisant des expériences provoquant des phénomènes imaginatifs dans les meilleures conditions de contrôle.
- En établissant des techniques permettant d'analyser les déterminations inconscientes.
- En faisant l'étude de toute espèce de conventionnalisme spontané.
- En réalisant l'interprétation réciproque des phénomènes du monde intérieur et extérieur pour placer dans une nouvelle lumière le rapport de la subjectivité et de l'objectivité.
- En récoltant tous les compte-rendus neutres de dépressions, confusions, angoisses et expériences affectives personnelles.
- Enfin, en mettant au jour le problème de la connaissance à l'aide des constructions épistémologiques nécessitées par les problèmes de la méthodologie scientifique contemporaine.


Sans doute, ce dernier point révèle le plus ce qui deviendra l'exigence principale de Roger Caillois pour la suite : la recherche d'une unité entre les figures obsessionnelles de l'imagination et les formes troublantes du monde naturel. Et s'il maltraite le roman et le cinéma, ces formes de l'imagination qu'il juge dévolues au compromis doucereux et lâche, il ne lui échappe pas qu'en faisant l'analyse inconsciente de l'état actuel de la société, elles contribuent à faire prendre du recul au lecteur et à l'isoler, transformant sans le vouloir la société qu'elle se proposait pourtant d'observer. C'est ainsi que la littérature peut devenir une force sociale et, à l'instar De Balzac (je ne suis pas responsable de cette référence et ne fais que rapporter l'opinion de l'auteur, j'aurais plutôt pensé à Walter Benjamin et à son essai sur l'oeuvre d'art à l'époque de la reproductibilité technique), c'est dans ce sens que Roger Caillois se propose d'oeuvrer.
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Citations et extraits (39) Voir plus Ajouter une citation
Ce que clament ces « clercs » sans église se perd dans le tumulte de la place publique, où, à leur exemple, chacun fait la leçon, se flattant mêmement d’être le verbe de la justice et du droit, sans assurer son crédit par rien qui distingue sa vie de celle du troupeau. On les prend parfois à déplorer que leur parole demeure lettre morte tout en se félicitant de vivre en un temps d’heureuse tolérance où la parole n’expose plus au bûcher comme si l’un n’impliquait pas l’autre, comme s’il était naturel que la foule écoutât docile et recueillie des mots qui coûtent peu à ceux qui les prononcent et qui ne les engagent à rien.
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Le relâchement des liens collectifs conseille à l’individu de s’appartenir aussi exclusivement qu’il le peut et le place au centre d’un univers particuliers que le roman lui enseigne à cultiver et à chérir. Ainsi le monde de la vie quotidienne demeure sans doute commun à tous, mais celui des cœurs et des pensées se divise de plus en plus et la création littéraire s’en ressent aussitôt. Chacun s’attache à exprimer la part de soi la moins communicable ; la surenchère d’originalité semble la loi qui préside le plus strictement à l’activité de l’écrivain.
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Auparavant, l’œuvre d’art, faite seulement pour la beauté et la postérité, naissait dans un monde qui ne l’intéressait nullement, mais où elle avait une place marquée d’avance et dont elle participait tout naturellement à un tel point qu’elle en adoptait nécessairement le style distinctif.
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Une pression hypocrite et continue condamne l’individu à une existence « timide, incomplète et rebelle », à la terrible et stérile insatisfaction vague qui nourrit les désirs et les songes. Cette pression lui interdit également l’extase et le désespoir. Elle le force sans cesse à réprimer ses instincts, à retenir ses élans, à calmer ses fureurs. Il ne peut être de satisfactions totales dans ce monde trop commode et ordonné. Et comme peu trouvent les moyens ou l’énergie d’en sortir pour vivre le roman, la plupart laissent flatter leur cœur par les récits qui les transportent à si peu de frais dans l’univers qui leur manque, et se contentent de lire.
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[A propos des sectes]

Ce gout de l’ombre et du pouvoir, cet appétit d’ordonner le monde suivant de plus fortes lois, sont-ils donc permanents ? D’où viennent en tout cas de si longues et constantes inquiétudes ? Voici des questions auxquelles il me semble urgent de trouver réponse.
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Video de Roger Caillois (13) Voir plusAjouter une vidéo

Chronique de Max Pol Fouchet sur le livre "Poétique de Saint John Perse" de Roger Caillois
A l'occasion de la sortie de l'essai critique de Roger CAILLOIS consacrée au poète Saint John Perse, intitulée "L'oeuvre poétique de Saint John Perse", Max Pol FOUCHET présente le poète.
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