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Lise Chapuis (Traducteur)
EAN : 9782922868289
121 pages
Les Allusifs (27/04/2005)
3.29/5   12 notes
Résumé :
Passes noires, conte des mille et une nuits de brutalité et de solitude, donne à voir l'apocalypse des femmes venues au monde pour l'esclavage et l'injustice. Arrachée à son Afrique natale par des négociants de chair fraîche, la jeune Fiona échoue dans un port italien où elle rejoint l'Amie chère, Cendrillon et la Boiteuse pour vendre son corps dans les obscénités et les humiliations des soldats, étudiants, pères de famille, magistrats, marchands de fritures et prél... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Plongée crue et superbement écrite dans le quotidien de la prostitution africaine en Sicile.

Publié en 2002 et traduit en français en 2005, le deuxième roman de Giosuè Calaciura est encore plus dur que son premier, "Malacarne" (1998). Là où le petit tueur palermitain nous épatait par sa confession logorrhéique d'une rare sauvagerie mais non exempte de drôlerie, le récit de Fiona, jeune Africaine "trafiquée," aboutie en Sicile avec pour seul horizon la prostitution intensive au service des mêmes réseaux mafieux sans pitié, ne fait à aucun moment dans la dentelle. Si le sujet est l'une des toiles de fond dénoncées en permanence par Andrea Camilleri dans la série Montalbano, le coup de projecteur est ici d'une tout autre crudité.

Fiona et ses trois compagnes d'infortune nommées dans le récit, parmi les autres victimes anonymes du trafic, ne voient de leurs journées que les passes, incessantes, la pression et les corrections exercées par leurs maquereaux, le mépris environnant, les hontes et les petites arnaques des clients, et enfin, les risques mortels liés au vol, à l'accident ou à la psychose pure et simple... en attendant la fin.

Sujet traité sans aucun fard ni aucun romantisme déplacé, les seuls sourires possibles proviendront d'anecdotes occasionnelles joignant le comique d'une situation ponctuelle au profond désespoir qui l'environne, obligatoirement dissimulé dans une bonhomie résignée, mais sujet servi par une phrase magnifique, toujours au bord de l'essoufflement mais devant nécessairement durer autant que l'épuisante journée de "travail", ou presque...

"Je m'en retournais vers le premier tour de tapin avec la joie des biscuits à l'anis, je contournais les rixes entre Arabes et Noirs qui se disputaient les angles émoussés de logements en sous-sol ouverts en soudaines tavernes pour étrangers où il n'y a pas de vin à servir mais seulement l'exaltation jaune paille d'un liquide imbuvable à transvaser directement du bidon, où l'on ne parle que la grammaire de l'alcool qui n'attend pas de réponse. Chacun articulait sa rage dans l'ivresse de sa langue incompréhensible, à travers une bataille territoriale qui ne prévoit pas d'affrontements mais un ivre soliloque tourmenté et entrecoupé de hurlements et de vomissements. Ils mettaient en jeu l'urgence de survivre, le besoin d'un espace puisqu'ils ont divisé les quatre ruelles de ruines du continent conquis en prenant pour modèle les géographies évanescentes des colonies imposées par la logique d'acier des partages faits à une table, par quantité de maisons, d'habitants, d'ici jusque là c'est rien que le Maghreb, pour le reste débrouillez-vous les Noirs."
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Quatrième titre de cet auteur sicilien qui arrive grâce à une écriture d'une grande sensibilité à nous conter et à rendre belles des histoires à la fois dures et tristes. J'avais été touchée, éblouie même, avec Borgho Vecchio et le tram de Noël.

Là, je ne vous cache pas que ma lecture fut beaucoup plus laborieuse. J'ai eu du mal à m'accrocher (si ce n'avait été dans le cadre du challenge #cemoiscionlit je crois que j'aurai abandonné ! ), ai malgré tout poursuivi, et vous avoue l'avoir fini en le survolant.

Il y est question de prostitution, de ces femmes africaines que l'on va chercher dans leur pays en leur promettant une vie meilleure et qui se retrouvent à faire le tapin dans des rues sordides d'un port sicilien. Elles sont quatre qui « veillent » les unes sur les autres pour se protéger de leur maquereaux ou de certains clients. Il y est question de leur quotidien noir, glauque, avilissant, des humiliations qu'elles subissent sans cesse. le tout est porté par une langue d'une crudité sans nom qui par la répétition de ce que ces femmes subissent a fini par véritablement me déranger.

J'ai bien conscience que cette prostitution ne peut en rien être comparée à celle d'Emma Becker décrite dans La maison (l'autrice choisit de devenir prostituée dans une maison close à Berlin pour écrire sur le sujet), et que ce récit est probablement nécessaire pour faire connaître le sort de ces femmes en tout point similaire à celui de dizaines d'autres partout en Europe et le dénoncer. Cependant la lecture en rebutera certainement plus d'un ou d'une.

Vous l'avez lu ? Qu'en avez-vous pensé ?
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" Nous partîmes la nuit suivante et ce fut le noir. Dans la soute, il n'y avait plus ni lueurs ni reflets, que le noir répété mille fois jusqu'à n'être un nombre, et mille fois le râle de l'asphyxie, la neuvaine du salut, la prière des torturés."
https://blogapostrophe.wordpress.com/2020/07/25/passes-noiresde-giosue-calaciura/
"Passes noires", conte des mille et une nuits de brutalité et de solitude, donne à voir l'apocalypse des femmes venues au monde pour l'esclavage et l'injustice.
Ce roman m'a mise mal à l'aise. le sujet, la prostitution clandestine issue d'Afrique en Sicile est plutôt intéressant mais l'écriture logorrhéique de Giosuè Calaciura rend le récit parfois opaque et lourd pour la lectrice que je suis. Tellement loin de "Borgo Vecchio" que j'avais dévoré et dont l'écriture m'avait emportée malgré la noirceur de la fiction. Ici, il ne nous laisse pas respirer. C'est dommage car les récits contés par la narratrice Fiona sont forts et sans artifice. Ses compagnes d'infortune sont décrites à la manière d'un conte (Cendrillon, l'Amie Chère et La Boîteuse) mais elles appartiennent toutes à la tragédie. Leur quotidien, les clients honnêtes ou pas, ceux qui demandent des rabais, les étudiants, les militaires, les hommes mariés, les commerçants, ceux qui ont besoin de parler ou de se mentir, les trafiquants autour, ceux qui les exploite, les permaliens aux abords de leur rondes nocturnes et diurnes, les insultes, les violences, les humiliations subies... le voyage clandestin dans la cale des cargos puants, sans air ni lumière, d'Afrique en Italie... Rien ne nous est épargné.

« En fin de journée, il me faisait déshabiller plus nue que quand ils me baisaient et il contrôlait si par hasard je n'avais pas mis des économies dans les revers de mes étoffes de pute imaginative, dans les élastiques des slips de nylon transparent…»

C'est dur et cette réalité des prostituées clandestines mérite d'être mieux connue. L'hypocrisie des hommes, de la société, est mise en avant lors de la célébration de Rosalie, la Sainte Patronne vénérée à Palerme depuis la peste de 1624. J'ai apprécié l'ironie de ce passage.

« Et une nuit c'est Dieu qui se présenta pour nous baiser. Il avait une voiture avec chauffeur, et quand il baissa la vitre je sentis le parfum d'encens, les effluves de sacristie. D'un geste il nous fit monter toutes les deux sur le siège arrière, une d'un côté l'autre de l'autre…"

De bons éléments, un sujet touchant sur le destin de femmes condamnées à des vies brèves d'esclaves dans un monde dit "civilisé" mais une écriture qui risque d'en décourager plus d'un.
Lien : https://blogapostrophe.wordp..
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L'Italien Calaciura consacre un récit bouleversant et terrible aux prostituées clandestine. Suivant un itinéraire semblable à celui qu'empruntait la traite négrière il y a trois siècles, des milliers d'Africaines débarquent chaque année dans des villes portuaires d'Europe afin d'y exercer, plus ou moins volontairement, le plus vieux métier du monde. Après avoir effectué le voyage illégalement, dans des soutes de cargos insalubres, la plupart sont vouées à une existence aussi brève que désastreuse, leur statut d'immigrées clandestines profitant aux organisations mafieuses qui les maintiennent dans une dépendance proche de l'esclavage. "Passes noires" de Giosuè Calaciura nous invite à suivre l'humiliant parcours d'une de ces "cargaisons" installées dans le quartier dit "des maisons d'Afrique", de Palerme en Sicile, sa ville natale. Un roman très dure à lire tant l'on souffre de voir cette réalité en face, on aimerait mieux se voiler la face mais Calaciura est là pour nous rappeler les conditions de vie inhumaines de ses femmes dans nos patries des droits de l'homme. Un récit qui m'a profondément marqué et ému, dont on ne sort pas indemne. Mais il n'est au fond que le reflet du quotidien de ses femmes esclaves. Je vous le recommande même s'il est d'une tristesse absolue et qu'il provoque en nous une nausée irrésistible.
Lien : https://thedude524.com/2009/..
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partant enthousiaste tant l'auteur que le thème me plaisaient, j'ai eu un mal fou à terminer ce livre.
Je suis sans doute , vu les belles critiques , une marginale..
Sans doute n'ai je pas trouvé ce que je m'attendais à lire.
certes le thème de la prostitution et la description de la vie misérable de ces pauvres filles sont bien là, mais que c'est pénible à lire.


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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Chère maman, je suis allée au zoo où on garde les animaux en cage pour essayer de les faire s'accoupler. mais ils ne veulent pas, ils préfèrent se laisser mourir. On les met ensemble dans une cage, et le matin, le gardien en trouve toujours un qui s'est laissé tombé dans la sciure. L'autre reste immobile dans un coin et regarde ailleurs.
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Et une nuit c'est Dieu qui se présenta pour nous baiser. Il avait une voiture avec chauffeur, et quand il baissa la vitre je sentis le parfum d'encens, les effleuves de sacristie. D'un geste il nous fit monter toutes les deux sur le siège arrière, une d'un côté l'autre de l'autre…
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En fin de journée, il me faisait déshabiller plus nue que quand ils me baisaient et il contrôlait si par hasard je n'avais pas mis des économies dans les revers de mes étoffes de pute imaginative, dans les élastiques des slips de nylon transparent[...]
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Nous partîmes la nuit suivante et ce fut le noir. Dans la soute, il n'y avait plus ni lueurs ni reflets, que le noir répété mille fois jusqu'à n'être un nombre, et mille fois le râle de l'asphyxie, la neuvaine du salut, la prière des torturés.
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Chère maman, je me porte bien, le travail est dur mais les collègues sont honnêtes
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