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Critique de ClaireG


En fouinant dans sa librairie habituelle, Andrea Camilleri tombe en arrêt devant un entrefilet consacré à un élément mineur de l'histoire d'Agrigente où il a fait ses études : un paysan a été nommé roi au début du XVIIIe s. Elément mineur pour l'Histoire mais majeur pour l'auteur qui connaît sa Sicile natale comme le fond de sa poche et qui ignorait ce détail.

Pas moyen de moyenner, il faut absolument qu'il connaisse les tenants et aboutissants d'une existence hors du commun… mais dont rien d'autre n'existe que ce « fait divers » paru dans les « Mémoires historiques d'Agrigente » en 1866.

Et voilà notre auteur, tout sensipoté, prit à scrutiner l'époque peu enviable de la succession d'Espagne dont la Sicile est un enjeu important. Tous les éléments historiques qui entourent les personnages du roman sont rigoureusement exacts. La biographie du paysan devenu roi est rigoureusement inventée. Avec quelle verve !

Or donc, l'enfantelet Michele Zosimo naquit de parents pauvres de génération en génération. Précoce et coquin, le petit Zosimo refuse le lait maternel au profit d'une sardine et de quelques miettes de pain, se met à parler dès sept mois et est enseigné par un ermite extravagant qui en fait un amoureux des livres et un « pagan savant » qui mettra son érudition et son bon sens au service de ses semblables.

Alors que le roi d'Espagne cède la Sicile à la Maison de Savoie non sans échauffourées continuelles, alors que les armées s'étripent, que les grands propriétaires terriens s'écharpent et que l'évêque manipule ses ouailles à la venvole, seule la vie misérable des paysans connaît la stabilité. S'y ajoutent de temps à autre sécheresse, famine, épidémies et inversement.

Dans ce climat tendu et terriblement injuste pour les populations, naissent nombre de jacqueries, de troubles et de tohu-bohus où des ordres contradictoires d'un régent ou l'autre viennent souvent affaiblir le pouvoir des roitelets locaux. C'est ainsi qu'un jour, Zosimo devint roi. Ephémère, mais roi quand même.

A son habitude des plus originales et des plus inventives, Camilleri mélange l'italien moderne et les dialectes siciliens à la verve espagnole pour colorer les dialogues et les scènes de la vie quotidienne. Cela confère au texte un rythme musical très savoureux, métissé d'un langage suranné sans doute, mais tellement vivant. Il faut épingler le talent de la traductrice, Dominique Vittoz, qui a fait un travail de recherche considérable en adaptant la langue de Camilleri en français ancien et en français régional de Lyon. Un glossaire très étoffé en fin d'ouvrage mérite le détour même si la compréhension de cette fourchelangue intervient d'elle-même après quelques pages.

Pour l'instant, je n'ai pas encore trouvé l'inspecteur Montalbano qui pourrait me faire apprécier les enquêtes policières d'Andrea Camilleri mais en ce qui concerne ses romans historiques, je leur suis acquise à 100%.
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